Généralement, les soirs de fête, Leone se proposait pour assurer la garde du service, histoire de permettre à ses collègues ayant des enfants d’en profiter. Surtout en ce moment où il n’avait pas nécessairement la tête à festoyer en compagnie d’inconnus. Néanmoins, sa cheffe avait refusé, prétextant qu’il était largement en dehors des quotas horaires normaux ce mois-là, ce qui était parfaitement vrai, et l’avait donc mis manu militari en repos, à son grand dam. Résigné, il avait donc accepté la première invitation qui passait, puisque Orion comme Sirius étaient tous les deux attendus ailleurs. Honnêtement, il aurait aimé avoir un de ses meilleurs amis à ses côtés, cependant, ce ne serait pas le cas, et il n’avait plus qu’à faire contre mauvaise fortune bon cœur. Aussi avait-il au moins pris soin d’être présentable, avec sa chemise et sa veste de couleur claire, et sa barbe fraîchement taillée pour l’occasion.

Contrairement à ses craintes, il se trouva rapidement en charmante compagnie, puisqu’alors qu’il se présentait à une personne, une jeune femme entendit son métier et bientôt, il se retrouvèrent sur le canapé, chacun un verre à la main – de limonade pour lui, comme d’habitude – à discuter de ses dernières interventions, et Leone se surprit à ne pas voir le temps passer. La passion transpirait dans sa voix, alors qu’il parlait avec amour de son service, de ses patientes, voir de ses tous petits patients pour la néo-nat’. Au fond, il aurait pu en parler des heures, de cet amour pour la médecine chevillé au corps, pour ses spécialités. Il était d’ailleurs à deux doigts de parler de son travail au Planned Parenthood, ayant l’impression que Gabriele pouvait être intéressée, ou du moins, qu’elle ne le regarderait pas de travers comme certains lorsqu’il mentionnait l’association, lorsque son discours fut interrompu par la sonnette de l’appartement qui résonna. D’un œil distrait, il vit la porte s’ouvrir sur … rien.

Bon, sans doute des gamins un peu excités en voyant de la lumière et en entendant le bruit provenant de la petite foule assemblée dans l’appartement, et qui avaient à cœur de fêter Halloween dignement, soit en choisissant les tricks plutôt que les treats. A moins que ce ne soit que des petits plaisantins abandonnés à eux-mêmes : dans son quartier, il avait l’habitude après tout.

Reprenant le fil de la conversation, Leone continua à parler à Gabriele quand … la sonnerie retentit encore. Bon. Cela commençait à devenir agaçant, mais c’était inoffensif. Même si l’homme installé non loin avec une jeune fille trouvait cela manifestement plus qu’énervant, comme sa vis-à-vis. Souriant à son assertion sur un compte à régler avec des enfants, et se souvenant qu’elle avait dit, lorsqu’elle s’était présentée, être professeure, l’italien lui sourit et demanda :

« Tes élèves seraient-ils donc si turbulents que tu ne puisses plus voir des gamins en peinture ? »

Avant de répondre à son interpellation directe, l’air un peu hésitant :

« Je ne sais pas … Bon, c’est un peu ennuyeux, mais ce ne sont que des gosses. Dans mon quartier, ça arrive souvent. »

Haussant les épaules, il avait du mal à se convaincre d’abandonner sa soirée pour partir à la chasse aux mômes remuants … quand la sonnerie retentit à nouveau, et que des petits cailloux s’écrasèrent en même temps sur la fenêtre donnant sur la rue, pas suffisamment fort pour l’ébrécher, mais suffisamment pour faire sursauter quelques personnes et commencer à énerver les propriétaires des lieux.

« Ok. J’ai rien dit. Ils vont finir par faire une bêtise plus grosse qu’eux, à force. »

« Et alors ? Tu l’as dit, ce ne sont que des enfants. Franchement, on s’en fiche ! »

L’homme qui avait parlé, Eliot, avait accompagné sa déclaration d’un petit reniflement, comme pour indiquer tout le mal qu’il pensait de l’idée d’aller rendre la monnaie de leurs pièces à ces chenapans juvéniles.