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Love song, quiet night [PV Levi]

@ Invité

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Ven 12 Juin - 17:38
Zivia poussa un petit soupir de soulagement en enlevant ses chaussures. Si elle adorait les cours de salsa qu’ils avaient commencés à prendre avec Levi, il fallait être honnête : tenir le rythme pendant trente minutes avec ces inventions diaboliques tenaient du cauchemar. Pourtant, sur le coup, elle ne ressentait pas la douleur, s’amusant beaucoup trop pour cela. Il fallait voir les deux octogénaires s’essayer à divers mouvements adaptés à leurs âges sur la piste de danse ! En quelques semaines, la vieille dame avait l’impression qu’ils étaient devenus la coqueluche de tous les participants. Plus drôle encore, elle avait constaté que la plupart les prenaient pour un vieux couple, sans doute marié depuis plusieurs décennies qui, toujours aussi amoureux, venait faire perdurer la flamme en tentant une nouvelle activité, ou simplement entretenir leur physique plaisamment. Quand une jeune fille lui avait dit, avec un gentil sourire, que son mari et elle lui redonnaient espoir en la vieillesse et en l’amour, parce que vraiment, c’était inspirant de voir que la joie pouvait exister encore à cet âge, après tellement de temps, la sémillante membre du quatrième âge avait souri comme une gamine et n’avait pas osé la détromper, heureuse que son « flirt », comme on disait de son temps, puisse être ainsi qualifié, et qu’ils arrivent aussi aisément à tromper leur monde. Au moins, cela montrait qu’il y avait cette flamme entre eux qui, loin de devoir être entretenue, avait enfin trouvé à s’épanouir joyeusement. Parce que tout avait changé, et rien n’avait changé. Ils étaient les mêmes, avec leurs loisirs, leurs discussions, ses yeux qui se levaient au ciel quand Levi devenait bougon, et ses lunettes qui se fatiguaient à relire ses diverses épreuves – ainsi que son contrat qu’elle avait épluché en détails afin de trouver « la faille », comme elle s’était écriée à deux heures du matin avant de l’appeler triomphalement, avec force emphase sur le terme. Mais maintenant, quand ils faisaient la cuisine, il l’embrassait en passant d’un plat à l’autre dans le cou et lui murmurait des mots doux, et elle frissonnait de plaisir. Et en retour, elle l’enlaçait gentiment par derrière quand il restait penché sur ses recherches, avant de laisser une trace de rouge à lèvres sur sa joue.

Ils n’avaient pas vraiment mis de mot sur leur relation. Ils étaient ensembles, c’était évident, un item qui ne disait pas son nom mais en avait toutes les apparences. C’était juste logique, depuis ce soir-là, au dancing, qu’ils s’étaient liés, qu’ils tentaient d’avancer dans une direction légèrement différente que précédemment, comme s’ils avaient décidé de s’arrêter au milieu de la route pour changer de véhicule avant de reprendre leur chemin, leurs deux mains sur le volant. Pour autant, chacun restait discret. Zivia n’en avait pas réellement parlé à sa nombreuse famille, craignant sans doute que son adorable smala ne vienne brutalement éclater leur petite bulle de bonheur et ne submerge le malheureux prétendant. Et puis, elle était seule depuis si longtemps ! Enfin, pas vraiment : il y avait eu quelques hommes, dans sa vie, mais soit elle avait toujours su n’avoir aucune envie de les présenter aux siens, soit … eh bien, cela n’avait pas vocation à durer, pour différentes raisons. Parce que si les enfants étaient toujours légèrement inquiets au moment de la célèbre et redoutée « présentation officielle », au bout d’un certain nombre d’années, c’étaient les parents qui ressentaient la même chose ! Il y avait la peur de ne pas voir la nouvelle relation acceptée, la difficulté de composer avec la figure du conjoint absent ou disparu … et tout simplement, la crainte d’être jugé, dans ces habituels discours sur le caractère raisonnable, à un certain âge, d’une telle entreprise. Ce n’était plus pour eux, tout cela. Et si, et si … tant de récriminations possibles. Et peut-être aussi que Levi n’en avait pas envie, pour le moment. Parce que ce serait un immense bouleversement. Alors elle se contentait de mener sa vie comme d’habitude, même si elle avait entendu son fils aîné lui faire une gentille réflexion sur sa soudaine lubie de la danse, et d’autres râler légèrement sur son emploi du temps soudainement plus occupé, qui laissait moins de temps à la garde des petits-enfants.

Bien sûr, d’autres questions guettaient, comme la gestion de la célébrité de Levi. Elle qui s’était retirée du monde médiatique, sauf cas exceptionnels, n’avait guère envie de devoir gérer cet aspect-là, et plus encore, quelque part et tout au fond d’elle-même, de revenir à « une femme de ». A quatre-vingt-quatre ans, elle espérait fortement que ce ne serait pas le cas, mais … Elle ne rêvait pas. Et au milieu de ces interrogations bien particulière, restait aussi à continuer leur relation bourgeonnante, foisonnante même pour filer la métaphore florale, à l’approfondir doucement, avec ce que cela comportait de frissons et de craintes, parce qu’il était des choses dont on ne se souciait pas à vingt ans, et beaucoup plus quand on multipliait les années par quatre. Le temps manquait, le temps filait … et paradoxalement, il avait déjà laissé sa trace. Au moins pouvaient-ils continuer à profiter, ce soir.

La table, au moins était dressée. Zivia avait commandé, en prévision de sa fatigue à venir, dans le petit restaurant cacher du coin de la rue, et ils avaient profité de leur retour pour passer prendre leur dîner. Ainsi, tandis qu’elle invitait Levi à s’installer, l’octogénaire récupéra leurs petites barquettes dans le sac qu’on leur avait donné et entreprit de réchauffer un peu le tout, avant de disposer les bagels à composer eux-mêmes qu’ils avaient pris, ainsi que les accompagnements, dans des assiettes et de les déposer sur la table du salon qu’elle avait apprêtée avant de partir, en mettant sa plus belle nappe, avec deux bougies aromatiques en forme de pingouins enlacés – où donc avait-elle trouvé quelque chose d’aussi adorable et kitsch ? Elle ne s’en souvenait même plus. C’était simple pour le palais, et un peu recherché, comme pour marquer une occasion. Finalement, elle s’assit également, et déclara :

« Honnêtement, je salive depuis une heure rien qu’en imaginant ce moment. Après l’effort, le réconfort certes … mais parfois, je dois avouer que le réconfort pourrait passer avant, pendant, et après, que ça ne me déplairait pas !

Même si je risque de ne plus être aussi alerte sur la piste de danse. Et ce serait bien dommage, de ne plus pouvoir en mettre plein la vue à tous les petits jeunots du cours …

Tu sais qu’il y a une jeune fille dans les vestiaires qui m’a demandé notre secret ? Apparemment, nous sommes ‘adorableuh’. »


Terme exagérément prononcé qu’elle y mit les guillemets avec les mains. Même si, réellement … cela lui faisait terriblement plaisir. Ses joues avaient légèrement rosi malgré elle, Zivia en était certaine. Aussi elle détourna la conversation en demandant :

« Alors, ça te plaît ? Tu as pris avec quoi déjà ? »

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Mer 17 Juin - 10:39


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feat @Zivia Edelman

Il n’était pas très bon en danse. C’était un fait que Levi avait accepté depuis belle lurette ! Mais à défaut d’avoir une bonne technique, il avait le goût de l’aventure et le bonheur aux creux des gestes ! Chaque fois qu’il laissait aller ses pieds, il émanait de l’écrivain une telle énergie, un tel rayonnement qu’on en oubliait ses erreurs et ses pas de travers. Alors la salsa et encore plus aux côtés de la talentueuse Zivia Edelman, c’était tout ce qui lui fallait. Les exercices avaient été modifié pour convenir à leur âge et Levi avait un peu grogné comme le vieil ours qu’il était quand on lui rappelait à quel point son corps n’avait plus la même dextérité qu’avant. Mais Zivia avait su le détendre et ses doigts graciles contre ses épaules y avaient participé. Ils ne savaient pas ce qu’ils étaient vraiment, du moins, ce qu’ils devenaient depuis leur premier baiser et les gestes tendres qui s’étaient ajoutés à leur relation. Un couple ? Peut-être. Un duo ? Certainement. Rien n’avait vraiment changé depuis cette soirée et tout était pourtant différent. Levi en était heureux, espérant secrètement que Zivia aussi. C’était tout ce qui l'importait, de voir l'ancienne avocate continuer de sourire et de rayonner comme avant.

Après être passé chercher les victuailles de la soirée, ils s’étaient engouffrés dans l’appartement de Zivia avec rire et amusement. Oui, rien n’avait changé entre eux et leur bonne entente avait même gagné en affection. Une caresse contre le dos par-ci, un baiser dans le cou par-là. Rien de grandiloquent mais dans leur duo, c’était bien les détails qui comptaient. Les petites attentions, les moments d’amour que personne ne voyait. Ils n’avaient plus 20ans, n’avaient plus besoin de prouver à qui que ce soit leurs sentiments. Si l’un comprenait ceux de l’autre, l’autre en faisait tout autant et c’était ça le plus important.
Après avoir ôté ses chaussures, chaussettes de laine chaude aux pieds, Levi vérifia la table mise avant de s’asseoir. L’oreille tendue en écoutant Zivia, il eut un petit rire amusé quand elle évoqua la jeune fille dans les vestiaires. Manger avant la danse, il était d’accord avec elle de toute façon et ne s’en était pas privé avec une belle part de gâteau au chocolat ! Prêt à répondre, il n’eut pourtant pas le temps quand son amie lui demanda ce qu'il avait pris dans son bagel.

- Mmh.. Un truc qui rime avec patate.

Les sourcils froncés, essayant de se souvenir, ça lui revint en quelques secondes dans un sourire plus que rayonnant !

- Un bomber patate ! Avec une petite crème à la ciboulette si je ne m’abuse et… Bien sûr que nous sommes adorables !

La conversation changea du tout au tout. Comme à son habitude, Levi Boyle passait du coq à l’âne sans aucune transition. Heureusement, Zivia réussissait à le suivre et rien que pour ça, il ne pouvait que l’aimer ! Attraper un couteau pour découper le dit bagel, il reprit aussitôt :

- Danser la salsa à notre âge avec autant de souplesse, c’est ce que  j’appelle être adorable ! Et puis… Nous étions les plus doués bien entendu.

Il avait gardé les prunelles baissées jusqu’à la fin de sa phrase. La regardant par dessous ses longs cils, un sourire amusé vint compléter la remarque. Le fou rire qui en découla n'en fut que la suite logique !

@ Invité

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Jeu 18 Juin - 22:58
En écoutant Levi lui répondre, Zivia ne put empêcher un sourire attendri de se dessiner sur son visage. A la vérité, avec leur petit dîner aux chandelles, les badineries gentilles et son air rêveur en contemplant son vis-à-vis, la vieille dame ne put s’empêcher, l’espace d’un instant, de se dire qu’elle ressemblait terriblement à une adolescente face à son premier flirt, ou « crush » comme les jeunes disaient maintenant. Elle avait l’impression, sincèrement, de ressembler à la jeune fille aperçue dans le restaurant qui gobait chaque moue – et quelques mouches au passage – du beau blond en face, à moins qu’elle ne soit le portrait craché de celle, dans la queue du magasin quelques mètres derrière eux, qui ne pouvait s’empêcher de contempler, en se mordillant les lèvres et en se cachant derrière une mèche faussement rebelle, sa compagne qui lisait pour faire passer le temps. Un jour, quand l’un de ses fils lui avait demandé ce qu’était l’amour, elle avait répondu que souvent, c’était moins regarder devant soi à deux que de regarder l’autre et finir par se prendre un sacré gadin parce qu’on avait oublié de voir où l’on mettait les pieds. Cela l’avait fait rire, et il lui avait parlé de la fille des voisins qui était tout de même bien jolie, et qu’il aurait aimé emmener au prochain match de l’équipe de la ville, ce qui nécessitait une avance en argent de poche. Et le jour venu, elle n’avait pas pu résister à l’envie de le regarder partir par la fenêtre chercher la dulcinée. Quand elle avait observé qu’il n’arrivait pas à détacher son regard de sa cavalière, et qu’il avait trébuché sur le premier mauvais bout d’asphalte venu, elle n’avait pu réprimer un ricanement peu glorieux. Comme quoi, elle n’avait pas tort ! Ah, plaisir de la jeunesse, douceur des premières amours … Pourtant, il lui semblait que cela se reproduisait, parfois, au cours de la vie, et que c’était bien le témoignage qu’une relation particulière se nichait, doucement, au creux de son cœur. Levi la faisait rire, et elle adorait suivre leurs conversations sans queue ni tête qui sautaient d’un sujet à l’autre avant de revenir au premier. Souvent, leurs amis communs avaient coutume de dire qu’ils étaient insupportables à écouter. Peut-être bien, mais ils s’en étaient toujours moqués, dans leur bulle de taquineries et de ronchonnements affectés. Maintenant … pardi, ils s’en fichaient encore davantage. Pis, Zivia se sentait le cœur léger, follement léger, à l’écouter parler de rien dans sa maison bien ordonnée. On avait coutume de dire que, parfois, le bonheur se trouvait à portée de mains. En effet. Il était là, aussi chantant que le rire de Levi qui s’élevait, emportant le sien au passage, sans que ce sourire idiot ne se décroche de son visage. Et puis après, pourquoi pas ? On avait décroché la lune, alors un sourire, ce n’était rien.

« Evidemment ! »

Une fois remise de son hilarité, elle ajouta, pas peu fière malgré tout de leur performance :

« Je suis certaine qu’aucun n’aurait notre talent à notre âge, avec les mêmes rhumatismes et l’arthrose en prime ! »

Oui, vraiment, ils n’avaient qu’à essayer de faire les bons pas à quatre-vingt-quatre ans. Ça, c’était un exploit ! Enfin, en soit, ils n’étaient pas trop mal conservés, pour leurs âges avancés. Zivia avait la chance d’avoir une santé de fer, et tout fonctionnait normalement – du moins, autant qu’elle pouvait l’espérer après avoir dépassé la huitième décennie. Elle éprouvait réellement une forme d’orgueil à être capable d’en remontrer à certains plus jeunes, comme pour convaincre le monde qu’on pouvait avoir vu beaucoup de printemps et avoir toujours la pêche, et l’envie aussi de sortir, de tenter de nouvelles choses, d’apprendre. Ils n’avaient pas dépassé une sorte de date de péremption qui les condamneraient à regarder la télévision en permanence en tricotant des tonnes d’écharpes, merci bien. Et sa vie à elle ne devait certainement pas se résumer à ses petits-enfants et ses enfants, même si bien entendu elle les adorait. Elle avait aussi ses propres activités. En un sens, elle continuait à exister par elle-même, bien que beaucoup l’oublient. Ce cours faisait partie de ces plaisirs personnels, ce qu’elle ne manqua pas d’exprimer.

« Tu sais, je suis vraiment heureuse que tu aies accepté de m’accompagner. Je sais que parfois, mes idées doivent te sembler un peu baroques mais … je n’aime pas l’idée que nous devrions rester dans nos pénates avec nos charentaises à jouer au bingo …

Même si mes enfants seraient plus rassurés comme ça. »


Vraiment, Zivia était immensément reconnaissante à Levi de la suivre dans ses lubies sans poser de question, comme cette fois où elle avait décidé de partir d’une soirée pour aller dans un vieux dancing … soit, clairement, la suite n’avait pas été exactement semblable à ce qu’elle avait initialement prévu, mais c’était pour le meilleur, puisque cette escapade les avait menés là : à manger des bagels en se regardant … eh bien, amoureusement était le terme adéquat, elle en avait bien peur. Et l’admettre la heurtait de plein fouet, surtout par rapport à sa précédente phrase.

« Je me demande ce qu’ils diraient en nous voyant … »

@ Invité

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Dim 28 Juin - 12:38


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feat @Zivia Edelman

Levi ne la quittait pas des yeux. Elle et son rire, elle et son sourire, elle et son cynisme aussi bien affuté que le sien ! Zivia était sa meilleure amie après tout, la seule toujours à ses côtés malgré les années qui passaient à vitesse grand v. Et bien que leur relation avait pris un tout autre tournant depuis quelques semaines - au plus grand bonheur de l’écrivain- elle était et restera toujours sa meilleure amie et la seule avec qui il voulait passer le reste de sa vie. Arthrose ou pas, santé de fer ou pas, cours de danse au nom imprononçable ou pas, Levi Boyle suivrait jusqu'au firmament Zivia Edelman.

Prenant un croc de bagel après avoir bien vérifié que tout tenait entre ses doigts, Levi profita de ces quelques secondes de répit, pour avaler sa bouchée. Succulent !

- Pour information, je préfère être plutôt pieds nus qu’en charentaises. Et quant au bingo… J’y ai joué une fois et j’ai dû me battre pour avoir mon gain ! Un vieux chicaneur disait que j’avais triché. Moi ! Triché !

Bon okay, il n’avait pas triché mais il avait pris les cartes de son assistante de l’époque qui était partie leur chercher des cafés. Quand elle était revenue, elle lui avait bien dit qu’elle se fichait du lot remporté et que Levi pouvait aller le chercher… Tout une histoire qu’un voisin avait entendu et était aller se plaindre à l’organisation !
Replaçant la feuille de salade qui s’était fait la mal, il reprit, les prunelles rivées dans celles de Zivia.

- La prochaine fois, on devrait essayer la zumba. Ou le rock acrobatique. Ça leur donnera une vraie raison d'être inquiets !

Un sourcil haussé et un petit rire étouffé plus tard, Levi reprit, un brin plus calme.

- Plus sérieusement, pourquoi penses-tu qu’ils auraient un avis différent de celui d’avant ? Ils nous connaissent ainsi depuis des années et même si je n’ai pas été souvent là lors des repas de famille, je pense qu’ils m’apprécient, non ?

Levi avait croisé quelques fois les petits enfants de Zivia, ainsi que ses enfants mais jamais assez de temps pour réellement créer des liens. Il les avait trouvé intéressant et cultivés et de ce qu’il savait d’après les réflexions de Zivia, le vieil écrivain avait vu juste ! L’ancienne avocate avait réussi un coup de maitre dans l’éducation des siens et ça rendait encore plus fier Levi. Lui n’avait eu une telle responsabilité sur les épaules et n’avait jamais voulu la prendre non plus. Pourtant, avec Zhaleh, il aurait pu mais... Le souvenir fut aussitôt effacé pour éviter d’avoir l’esprit embrumé par la nostalgie.

- Et en ce qui concerne ce que nous… devenons, peu de choses ont changé. Je te regarde toujours avec autant d’amour et te prends la main comme avant. La seule différence étant que l’on peut s’embrasser et que tu as le droit de me dire que mon haleine sent l’ail après un tel bagel !

Oui, ça et le fait de s'aimer au grand jour, sans aucune gêne vu tout ce qu'ils savaient l'un de l'autre et sans aucune peur vu ce qu'ils avaient déjà vécu.

@ Invité

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Sam 11 Juil - 0:05
Zivia affecta un regard de braise pendant quelques secondes, avant d’exploser de rire à l’idée qu’ils puissent rééditer l’un des mouvements les plus célèbres du cinéma, et accessoirement de la danse. Quoique, en effet, ce serait très drôle de l’annoncer une fois, juste pour voir les têtes mi-horrifiées mi-gênées autour d’eux. Le pire, c’est que cinquante ans plus tôt, c’était le genre de folie qu’elle aurait été capable de faire. Heureusement, rien ne les empêchait de danser des slows à leur âge, et au fond, ça préservait l’essentiel du potentiel romantique de cette activité ? Comme quand ils s’étaient trouvés, dans ce dancing désaffecté … Oui, elle rosissait encore de plaisir en y repensant, comme une adolescente songeant à son premier baiser, et n’en avait pas honte. C’était si inespéré, si doux, à quatre-vingt-quatre ans, de ressentir certains émois de jeunesse à nouveau : d’avoir le ventre qui papillonnait et de sourire à tout bout de champ, juste parce qu’elle en avait envie, juste parce qu’elle le pouvait, que la vie était belle et que Levi la faisait rire. Elle se sentait curieusement revigorée, et ne cessait de le constater. Oh, certes, elle n’allait pas dire que sa vie était bouleversée, que son chemin s’était brutalement illuminé, mais … elle avait l’impression d’être passée d’un mode joliment sépia à la dernière définition de la couleur. Ou d’avoir mis de nouvelles lunettes pour voir le monde.

Cela ne signifiait pas, paradoxalement, qu’elle ne s’inquiétait pas des changements que cela pouvait amener. Pour le moment, en effet, tout restait plutôt semblable à ce qu’ils avaient connu – quand bien même de son point de vue, il y avait des transformations substantielles, parce que butiner comme des jeunes gens, c’était tout de même très nouveau – mais il y avait peu de risques que cela dure. A un moment, ils allaient le dire. Et c’était un pas qu’elle n’avait jamais envisagé de faire, avant. Elle avait toujours séparé sa vie de femme et celle de mère, puis de grand-mère, d’abord pour protéger ses enfants, puis par habitude, et aussi par facilité, parce qu’il n’y avait jamais besoin de faire autrement. Sauf que là, c’était différent, à ses yeux : elle n’allait pas mentir en parlant de son meilleur ami qui n’étaient plus que cela à sa famille. Peut-être était-ce idiot, mais cela ne lui semblait pas … bien. Alors, elle écouta Levi et finit par dire, doucement :

« L’amour rend aveugle et fait perdre tout odorat, je ne sens déjà rien. Du moins, je m’applique fortement à le croire. »

Bon elle gagnait du temps, et en même temps, elle verbalisait quelque chose, Zivia, il lui avait dit qu’il l’aimait, mais elle n’avait pas répondu de la même façon. Après tout, cela leur ressemblait aussi, par certains aspects, sentimentalement, c’était plutôt elle qui avait une réputation de fonceuse. Néanmoins, la vieille dame avait toujours aimé dire les choses, avec cette conviction que cela rendait toujours tout plus palpable, plus réel. Que ce soit au cœur d’une boutade ou pas, le résultat restait le même : c’était clair, ce qui existait entre eux, à ses yeux, et c’était finalement l’élément qui changeait tout. En temps ordinaire, après juste quelques semaines à fréquenter un homme, elle n’aurait absolument pas utilisé ce mot. Il pouvait y avoir de l’attirance, du désir, de l’affection, de la complicité … mais les mots avaient un sens. Et amour ne rimait pas forcément avec tous ces autres noms, aussi beaux et doux soient-ils individuellement. A vrai dire, elle avait très rarement utilisé le terme, dans sa vie : il avait été là pour Asher, pour Bao … et puis, c’était tout. Ils n’étaient pas les seuls qui avaient compté, car il y en avait eu après, mais elle avait souvent répugné à aller au-delà qu’une réelle et sincère affection, peut-être teintée d’une touche de romance, mais à chaque fois, il y avait un frein, celui de sa famille. Parce que les enfants étaient trop jeunes, puis parce qu’elle n’avait pas envie de s’enchaîner, parce que tout simplement elle ne sentait pas les choses ainsi. Et maintznant …

« Bien sûr, ils t’aiment beaucoup, tu es l’Oncle Levi, le tonton lointain globe-trotter … mais justement, ils nous connaissent comme amis, pas comme autre chose.

C’est … enfin, ce serait la première fois que j’introduirais quelqu’un dans notre famille depuis la mort d’Asher. Non pas qu’ils pensent qu’il ne se soit jamais rien passé dans ma vie en un demi-siècle, mais je crois que ça les a toujours arrangés que … je mette ça de côté. Là … c’est différent. Je n’ai pas envie de leur mentir, ou d’euphémiser en gardant juste le côté amical. Je veux dire … pour un temps, ça ne me dérange pas mais … je ne me vois pas ne pas leur dire la vérité, à un moment.

Ne serait-ce que parce que, si jamais il m’arrive quelque chose, je n’ai pas envie que tu ne puisses pas venir me voir, ou que les choses se disent dans ces moments plus tendus, tu vois ?

Mais c’est vrai, je mentirai si je t’assurais que je n’ai pas un peu peur de leur réaction, qu’ils pensent que c’est ridicule à notre âge, ou que je m’emballe, ou que …

Et à l’inverse, j’ai peur aussi que ce soit trop pour toi, d’avoir toute ma famille d’un coup, pas uniquement une fois en passant, mais aux fêtes, certains week-ends … Je veux dire, même moi, parfois, ils m’épuisent. »


Zivia avait ri en prononçant les derniers mots, mais c’était pour masquer le fait qu’elle avait néanmoins entièrement honnête sur son ressenti, sur ses peurs, et aussi, par extension, sur ses attentes. Et pour le coup, non seulement elle avait passé l’âge des peut-être et des interrogations de la jeunesse sur les tenants et aboutissants d’une relation, mais en plus, elle estimait ne plus vraiment avoir de temps à perdre. A quatre-vingt-quatre ans, il fallait savourer chaque instant, et ne pas se perdre en hésitation.

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Sam 18 Juil - 16:02


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feat @Zivia Edelman


La regardant avec attention, Levi ne pu résister à lui sourire pendant qu’elle s’expliquait. Zivia avait raison sur toute la ligne, comme souvent et mettait les mots là où Levi oubliait de les évoquer. Il n’avait pas pensé à tout ça, au fait que la famille Edelman serait surement surprise de les voir débuter une relation à leur age, après tant d’années à se connaitre. Encore moins à l’idée que toute cette petite troupe viendrait rompre son habituelle solitude. Levi, bien que globe-trotteur et connu pour son amour des paillettes et de la lumière, aspirait depuis toujours à une vie plus calme qu'on lui donnait. Il était introverti malgré tout ce qu'on s'imaginait de lui et retrouvait son énergie dans ces moments en compagnie de son esprit et de sa plume. De Zivia aussi mais deux, c'était le maximum qu'il pouvait supporter quand la fatigue l'ébranlait. Alors se retrouver au milieu de tous ces enfants et petits enfants, tous plus énergiques que leur grand-mère, l'idée lui ferait presque tourner la tête.

- On trouvera un terrain d’entente, j’en suis certain. Tes enfants et petits enfant sont adorables mais si ça fait trop pour moi, je ne viendrais pas toujours aux réunions de famille ou m’éclipserais plus vite. Tu serais surprise de mon imagination quand il s'agit de trouver des excuses !

Il dodelina de la tête avant de croquer dans son bagel. Ils avaient tellement eu raison de s’arrêter dans ce petit restaurant pour l’emporter ! Clairement, Levi en aurait bien pris un second du même calibre et des mêmes saveurs. Avalant sa bouchée, il reprit aussitôt, un peu de crème sur le bord des lèvres :

- Je connais plus Ezra et Leah que les autres mais… Je suis certain qu’ils seront heureux pour toi et pour nous. Pour moi ça ne change pas grand chose, à part que je suis finalement entièrement sincère avec toi depuis que je t’ai avoué mes sentiments. Mais tu es et resteras ma meilleure amie jusqu’à ma mort Zivia Edelman et je ne te lâcherai pour rien au monde, même si certains veulent décider pour nous. Ils seraient stupides de vouloir s’attaquer à quelqu’un comme Edelman et Boyle !

Levi ne parlait plus de la famille de Zivia mais bien de tous les autres. Leurs agents, leurs fans, leurs éditeurs, tout ce petit monde de célébrité qui gravitaient autour d’eux et verraient d’un bon ou mauvais oeil cette relation. Relevant ses yeux dont les commissures avaient été martelés à coups d’années et d’aventure, Levi lui adressa un sourire plus discret.

- Si ça peut te rassurer, on peut organiser un petit repas avec eux en comité réduit et leur en parler. Ça ne trainera pas trop en longueur et tu te sentiras mieux ?

@ Invité

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Lun 10 Aoû - 21:45
« Je ne doute pas que tu auras souvent des réunions d’édition pile pendant Shabbat. »

Taquine, Zivia fit un clin d’œil à Levi, pour souligner qu’elle avait parfaitement compris et que ce compromis lui allait parfaitement. A vrai dire, elle n’aurait pas osé imaginer imposer toute sa plantureuse famille qui avait tendance à s’étendre de plus en plus à quelqu’un, encore moins un homme comme le sien, désormais – ce que cela pouvait faire bizarre à penser ! – qui n’avait jamais été au cœur d’une telle tribu. C’était là, il est vrai, une différence fondamentale dans leurs existences, puisque l’un avait mené la vie de bohème, en quelque sorte, comme on disait à l’époque, et elle celle traditionnelle d’une épouse, puis d’une mère. Du reste, la vieille dame avait suffisamment de sagesse pour savoir qu’elle n’aurait pu rêver autre chose, tant par conventions sociales que parce qu’elle avait achevé bien plus grâce à son mariage très avantageux qu’en restant vieille fille. Oui, elle aurait été plus libre, à n’en pas douter. Mais elle n’aurait pas fait d’études, n’aurait pas réalisé autant de choses … et oui, n’aurait pas connu la douceur de partager un chemin en commun pendant tant d’années, la maternité … Elle ne regrettait pas ses enfants, même si les premiers étaient venus un peu vite. En même temps, sans contraception, et quand on avait vingt ans, le feu aux joues en regardant l’être adoré et beaucoup, beaucoup de temps devant soi le soir, parce qu’il n’y avait pas les ordinateurs, Netflix, toutes ces choses merveilleuses et naturelles désormais … Eh bien, on s’occupait autrement. Et après, naissaient les enfants. Ce n’était même pas qu’ils n’étaient pas désirés, c’était juste … dans l’ordre des choses, une conséquence logique, un destin commun, auquel on n’échappait pas. Pourtant, arrivé à quatre-vingt-quatre ans, si on lui demandait ce qu’elle aurait changé, au cours de son existence … Non, elle ne choisirait pas cela. Malgré les difficultés, surtout quand elle était restée, seule, pour les élever, ses enfants étaient sa revanche sur sa jeunesse, son espoir que quelque part, sa mère voit que ses yeux si bleus s’étaient accrochés dans le regard d’un petit-fils qu’elle ne connaîtrait jamais, mais qui témoignait par sa simple existence qu’elle avait existé. C’était voir dans l’ombre des sourires de sa fille celui de ses sœurs, la fossette au menton de la petite dernière. C’était entendre, quand ses grands garçons parlaient, à vingt ans, la voix de son frère aîné, si claire et déterminée. Et, en chacun d’entre eux, aussi, c’était voir son mari disparu, se rappeler de ce qu’ils avaient été, un jour.

Cela n’enlevait rien au fait qu’après Asher, elle avait aimé. Puissamment, follement, peut-être davantage encore qu’à vingt ans. La passion était à l’amour ce que la rage était à la colère : elle ne s’expliquait pas, balayait tout, et laissait ses cicatrices, aussi. Et puis, après, il y avait eu des rencontres, parce qu’elle ne se résignait pas à terminer sa vie de femme à même pas quarante ans. Désormais, il y avait Levi, qui n’était ni la passion d’une vie, ni l’amour d’une existence entière, mais le compagnon de son long chemin. Elle qui, finalement, avait aimé par coup de foudre, apprenait à le faire par amitié. On pouvait toujours apprendre des choses, même durant l’hiver des hommes. C’était différent, oh, si différent : doux, comme picorer un gâteau par petites tranches plutôt que de le dévorer en un coup, apprendre à effeuiller un mille-feuilles, pièce à pièce, croquer dans la cerise sur la pièce-montée – Zivia commençait à penser à prendre un dessert, ce qui influait considérablement sur le contenu de ses métaphores. Chaque homme qui avait marqué sa longue vie avait sa place. Elle était certaine que, pour Levi, c’était pareil, qu’il y avait eu des personnes avant elle, des histoires folles, des passions secrètes – c’est qu’il était terriblement séduisant à ses vingt, trente, quarante ans, avec son léger accent britannique et son côté enfant terrible de la photographie. La seule chose qu’elle désirait éviter, précisément, c’était que ses enfants ne s’imaginent le pire, à savoir qu’ils assistaient à une révélation qui courraient depuis trop longtemps, qu’ils ne se demandent pas aussitôt si, finalement, ils n’assistaient pas au dévoilement d’une vérité qui n’avait pu exister. Ce n’était pas si rare, dans leur génération. Il y en avait, des couples adultérins qui avaient vécu dans l’ombre, parfois presque sans se cacher, profitant des silences complices ou simplement de l’aveuglement collectif pour mener leurs amours tranquillement et qui, maintenant, arrivaient finalement dans la lumière. Au moins, Levi, comme souvent, arrivait à mettre de l’ordre dans ses pensées désordonnées, par une proposition simple, qu’elle n’aurait pas osé mettre sur la table immédiatement.

« Oui … Ce serait parfait. D’abord Ezra et Leah, je pense. Ils pourront utilement préparer le terrain, puis mes enfants.

On va beaucoup manger dans les semaines à venir … »


Histoire d’éviter le grand rassemblement, parce que même en comité réduit … Entre les enfants, les beaux-enfants, les … Bref, c’était encore trop. Et surtout, elle évitait de penser au reste, soit basiquement la moitié des jeunes entre douze et vingt-cinq ans qui avaient lu les livres de Levi. Sérieusement, ils n’allaient pas avoir des paparazzis à leurs âges, quand même ? Les frasques des stars qui faisaient rêver, ça faisait vendre du papier, admettons, mais deux octogénaires … Quoique.

« Tu crois qu’on devrait … c’est ridicule … je ne sais pas, faire un communiqué de presse. Non, c’est idiot. Prévenir nos agents ?

D’un côté, je me dis que personne ne va s’intéresser à la vie de deux vieilles personnes comme nous, mais en y réfléchissant, je me rappelle qu’il ne faut jurer de rien … »


Bigre, que la vie pouvait être compliquée, d’un coup. Mais cela valait la peine. Tellement. Lâchant un soupir, Zivia conclut donc :

« Au moins, tu sais toujours trouver les solutions pour me rassurer. Je me sens parfaitement d’attaque pour faire un sort à notre dessert, du coup ! »


Sortant de leur boîte les petits gâteaux achetés avec leurs plats – un délicieux brownie pour elle, notamment, elle les disposa devant leurs assiettes respectives, avant de croquer dans la petite douceur et de lâcher un petit glapissement de joie culinaire. Sa victime fut engloutie en un rien de temps. Et, imperceptiblement, son regard se porta sur l’horloge au mur, qui indiquait une heure fort tardive.

« Tu veux rester dormir ? »


Question posée des centaines de fois, auparavant et qui, brusquement, n’avait plus exactement la même teneur. C’était étrange, comme une phrase changeait du tout au tout suivant le contexte, l’inflexion de la voix, la lueur dans le regard, les espoirs derrière, les interrogations aussi, les craintes, les envies.

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Dim 6 Sep - 13:49


this is a love story.
feat @Zivia Edelman


Levi adorait manger alors plusieurs repas pour rendre officiel leur relation, ça lui convenait à la perfection ! Et ils n’auraient qu’à modifier les menus pour l’occasion : un jour pommes de terre vapeurs, un autre légumes du jardin, un autre gâteau à la crème… Il pouvait aussi être très créatif quand il s’agissait de composer des repas - au grand damn de beaucoup d’organisateurs·trices d’évènement où il se rendait ! Levi avait la créativité facile mais aussi la critique et il n’avait aucun soucis à pointer du doigt ce qui n’allait pas (comme la présence systématique de viande ou de poisson, l’oubli de préciser si c’était casher ou non etc).

Continuant son repas, il fut amusé par la question de Zivia. Elle connaissait un peu moins la folie des paparazzis et autres journalistes s’affairant à trouver le moindre ragot sur les célébrités. Lui ne se voyait pas ainsi mais il aurait été stupide de ne pas faire attention malgré tout ! Les articles le concernant étaient rare dans la rubrique potins sauf quand il se retrouvait en cellule pour manifestation ou outrage à agent ! Et ça, c’était bien moins rare !
Attrapant un petit gâteau, il répondit à Zivia avec un ton dès plus jovial :

- Préviens ton agent, je préviendrai le mien ! Pas de repas pour eux, ils sont bien trop occupés et clairement, je ne veux pas voir Thomas à table alors que c'est un jour de week-end !

De toute façon, il allait devoir changer vu que Thomas était attaché à la maison d’édition qu’il venait de quitter en grande pompe ! Y repenser lui hérissa le poil. Sacrés souvenirs, souvent agaçants et teintés d’amertume. Mais Levi avait tout de même remercier son éditeur pour lui avoir permis de publier ses livres avec une telle aisance. Maintenant, il était temps de passer à autre chose ! Quelque chose de plus respectueux, plus en accord avec ses principes.
Le biscuit fut dévoré avec rapidité et il était sur le point d’en reprendre un quand Zivia lui posa une question. Non. LA question. Voulait-il rester dormir ou s’en aller alors que l’aiguille de l’horloge pointait un douze bien tardif ? Le regard azur planté dans celui de Zivia, incapable de bouger à part en amenant le biscuit à ses lèvres, il eut un petit sourire goguenard.

- Nous sommes d’accord que ça sonne bien différemment maintenant que nous sommes en couple, n’est-ce-pas ?

Ses joues auraient rosi s’il n’avait pas 80ans passés et des rides dissimulant ses effusions de gêne. Dormir ici, chez son amie, n’était pas un problème en soit. Loin de là même, le nombre de fois où il s’était assoupi sur le divan ou en empruntant une des chambres libre ne se comptaient même plus sur les doigts de deux mains ! Mais là… Là, Levi avait envie de dormir à ses côtés. De l’entendre respirer, de sentir sa peau contre ses doigts délicats, qui feraient attention à ne pas la brusquer. Juste quelques baisers alors que la lumière serait éteinte et des gestes tendres qui leur feraient oublier leur age. Non, pas oublier. Faire avec, vivre avec, continuer d’exister en se fichant bien des conseils que les magasines donnaient quant on aimait, à 83ans passés.

- Par contre je n’ai pas pris mn pyjama.

Parfaite réponse, pour détendre l’atmosphère et lui répondre discrètement, que c’était un grand oui, avec toute la tendresse qu'il serait capable de lui offrir.

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Sam 19 Déc - 19:11
« Ça va être le coup de fil le plus étrange de ma vie … Je vais avoir l’impression d’avoir dix-neuf ans de nouveau et de devoir annoncer à mon père et ma belle-mère que je vois quelqu’un …

Finalement, voilà qui me donne un sacré coup de jeune ! »


Retrouver le temps béni des annonces sérieuses à la famille, effectivement, n’était pas quelque chose que Zivia avait prévu de refaire. Certes, elle plaisantait, cela ne ressemblerait certainement à ce moment particulièrement gênant de son existence où elle avait dû expliquer qu’elle fréquentait un jeune homme à ses parents – enfin son père et sa belle-mère – et qu’il allait la demander en mariage. Parce que oui, à l’époque, l’un n’allait pas sans l’autre. Autres temps, autres mœurs. Mais il est vrai qu’hormis ce passage, elle n’avait pas connu ce moment depuis. Les hommes qu’elle avait fréquentés après la mort de son mari n’avaient jamais été que de passage, d’abord parce qu’elle n’avait pas envie de les faire rentrer dans sa vie, tout simplement, avec ses enfants à élever, son travail et quelque part, cette indépendance qui était désormais la sienne et pour laquelle elle devait lutter sans cesse. Le seul pour qui elle l’aurait fait avait choisi de ne pas quitter sa femme … et elle-même, de ne pas s’engager plus avant dans cette passion qui aurait détruit un foyer. Ses aînés, cependant, avaient dû plus ou moins se douter de ce qu’il se passait, sans oser aborder frontalement le sujet, même maintenant. Même lorsqu’elle avait reçu, quelques années auparavant, la lettre lui annonçant la mort de Bao, elle avait simplement déclaré avoir perdu un ami très cher avant de se murer dans le silence pendant plusieurs jours, pour faire, silencieusement, son deuil. Ses enfants lui avaient laissé de l’espace, apportant juste des plats, des petits cadeaux, appelant, mais n’osant pas poser la question qui leur brûlait les lèvres. Leur mère avait son jardin secret, de femme. Ils l’avaient compris depuis longtemps – ou avaient pieusement semblant de ne pas comprendre qu’elle en avait un. Alors, d’une certaine façon, prendre la décision de leur introduire un homme comme son compagnon, au soir de sa vie, c’était une révolution, et nul doute que ses enfants et petits-enfants seraient particulièrement surpris. Sans parler de son agent, qui avait souvent répété que l’avantage avec Zivia, c’est que sa gestion de communication était minimale, en termes de scandales à la noix et de couvertures de tabloïds. Mais le changement avait du bon. Et si, à son âge, on ne renversait pas la table … Il était temps d’être aventureux. Parce que du temps, il leur en manquait. Elle faisait ce constat de bon sens sans acrimonie : ils appartenaient au quatrième âge, tous les deux. Le bonheur durerait, elle l’espérait, le reste de leur existence. Mais ce reste, bien entendu, était plus réduit que pour les autres jeunes couples. Qu’importait : au moins, ils auraient cette consolation, que d’avoir pu dire qu’ils avaient aimés, toujours, même dans les rides et les petites avanies du corps. Quand elle contemplait sa longue vie bien remplie, les épreuves traversées, et ce présent inespéré, Zivia se disait, avec un brin de philosophie amusée, qu’ils représentaient aussi une forme d’espoir en ces temps troublés : celui que l’humanité avait une force de résilience immense.

En attendant, elle avait posé la question, et Levi eut l’intelligence de mettre des mots sur l’éléphant au milieu de la place. Aussi elle se contenta d’un sourire, hocha la tête, et déclara, sans chercher à se dérober, parce qu’elle avait honnêtement passé l’âge de se cacher derrière des minauderies et qu’elle était un être de chair et de sang, qui n’avait pas renoncé aux plaisirs que pouvaient apporter une relation, dans tous ses aspects. Certes, ce n’était pas comme à ses vingt ans, mais ce n’en était pas moins aussi doux, que de se savoir aimée, désirée, de voir une flamme s’allumer dans les yeux d’un homme quand il franchissait la porte de sa chambre, de se sentir serrée dans ses bras, de s’endormir à ses côtés, de se réveiller avec lui, de préparer le petit-déjeuner ensemble.

« Disons que l’invitation ne se réduit pas au canapé ou à la chambre d’amis, cette fois. »

Autant être sincère. Mais Levi avait de toute façon compris. Evidemment. On n’était toujours pas sérieux, quand on avait quatre-vingt-trois et quatre-vingt-quatre ans, mais on était un peu plus malins qu’avant. L’expérience. Ou juste le bon sens. Se levant de table, l’octogénaire s’approcha de son compagnon et souffla à son oreille, qu’elle atteignait sans mal lorsqu’il était assis vu leur différence de taille :

« Je peux t’en prêter un, mais il est possible que je fasse un peu de rétention avant … »

L’expression d’un désir tendre n’avait pas à se cacher. Surtout pas maintenant. Zivia n’avait pas à avoir honte de cela. Qu’importe son éducation, son âge, le regard que la société pouvait avoir sur les envies des personnes âgées, comme si ces dernières devaient se réduire à de simples grands-parents affectueux à la santé vacillante. Non, il y avait encore un cœur qui battait dans sa poitrine, du sang qui palpitait dans ses veines, la tempe qui pulsait à son côté. Un corps qui voulait aimer, ressentir, vivre, voir la vie en rose et chanter l’hymne à l’amour. Et une âme qui se sentait envahie d’un besoin irrépressible de ne plus être seule, mais de rêver à deux, ou de cauchemarder, pourvu que les mains soient liées et les souffles mêlés, avec les pieds éparpillés sous la couette pour se réchauffer. Déposant un baiser sur le haut de sa tête – pour une fois qu’elle le pouvait – elle ajouta :

« Tu viens ? »

Le reste de la soirée se perdit une fois la porte fermée et la lumière diminuée. La nuit les engloutit, mais les sourires tendres et quelques soupirs illuminaient suffisamment la pièce pour qu’ils puissent tout voir, malgré la vue un peu basse. Le langage du cœur parlait pour eux, regardait pour eux, et ressentait pour eux. Et s’il y avait des étoiles dans le ciel sombre, elles étaient aussi près d’eux, autour d’eux, à les regarder redevenir des adolescents, mais de quatre-vingt-quatre ans.

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