Confessions nocturnes || Noé

Noé sort de sa loge et se complait à faire quelques photos avec les personnes qui attendent à la stage door. Elle sourit, signe des POP! À l’effigie d’Anna et une fois qu’il n’y a plus personne, elle saute dans la voiture qui l’attend depuis ce qu’on pourrait appeler des lustres. Mais elle avait envie de faire plaisir ce soir, pour une fois. Elle est épuisée Noé mais elle sait qu’elle ne trouvera pas le sommeil avant maximum une à deux heures alors autant faire plaisir. Les écouteurs vissés dans les oreilles, elle fait craquer sa nuque dans le taxi et tapote du doigt avec impatience, parce qu’elle a envie de rentrer chez elle et de se lover dans son plaid pour regarder un épisode de série avant de penser à dormir. Elle envoie quelques messages à Leah sans grande conviction de réponses puisqu’elle est persuadée qu’elle dort, avant de voir son immeuble qui se matérialise -enfin- devant ses yeux.

Elle sort de la voiture, tend un billet bien trop important au chauffeur qui a dû l’attendre et elle déverrouille la porte de l’immeuble pour finir par monter et voir que personne n’est là. À quoi ça sert d’avoir des colocataires si personne n’est jamais là. Elle a l’impression de vivre dans un hall de gare, ou tout le monde va et vient à sa guise. Mais soit. Il est tard, peut-être qu’ils dorment. Alors qu’elle se fait un bol de Mac and cheese, elle allume la télé et Netflix pour s’installer sous le plaid après s’être changée et s’être mis en tenue un peu plus décontractée. Son téléphone qui vibre la coupe dans son élan de lançage d’épisode et elle voit un message de Soledad. Elle fronce les sourcils et répond que oui, elle peut venir. Même si ça l’étonne qu’elle lui demande de venir en pleine nuit. Alors qu’elle ne s’envoie des messages que de temps à autre. Elle fait chauffer la bouilloire, regarde l’heure et grince des dents quand elle se rend compte qu’il est vraiment tard et qu’elle va avoir du mal à se réveiller demain matin, mais tant pis. Elle avale rapidement son bol et ne prend pas le temps de lancer un épisode parce que Soledad n’est sûrement pas là pour enfiler des perles ou pour parler de la tempête de neige qui a paralysé le pays au début du mois. Quand ça toque à la porte, Noé noue ses cheveux en un chignon rapide avant d’ouvrir la porte et elle voit le visage contusionné de son amie, ce qui lui fait froncer les sourcils. Et la bombe est lâchée, Noé tousse d’étonnement avant de regarder la brune au visage abîmé « Pardon ? » demande t-elle, assez sèchement. Elle ne voulait pas que ce soit si sec, mais elle n’arrivait pas à modérer ses pensées. Elle la laisse entrer et passe par le congélateur pour récupérer un sachet de petit pois congelé qu’elle lui tend pour faire diminuer le bleu sur sa joue. « Owen t’en a collé une au moins ? » continue t-elle avant de secouer la tête, comment va t-elle pouvoir expliquer qu’elle connaît le fiancé de la blonde ? « Ou c’est Hope ? Elle a un sacré crochet du droit si c’est le cas. »

Comment avait-elle pu penser que c’était Hope qui lui avait collé une beigne de la sorte ? Noé n’en sait rien mais c’était une idée complètement stupide quand on y pense. Alors elle ne peut qu’être ici en soutien pour son amie. Elle est presque heureuse qu’Owen ne sache rien de ce baiser, elle ne sait même pas s’il était chez lui. Elle ne sait même pas si Soledad aurait osé faire cela alors que son cousin était dans le coin. Le coeur de Noé est un peu soulagé quand elle lui raconte pour le groupe de sans abris « Ah ça… Je savais bien que ça te porterait préjudice un jour, heureusement que je ne dormais pas. » répond t-elle, pour lui faire comprendre que ça aurait pu mal finir, mais sans vraiment le dire parce qu’elle ne sait pas comment son amie le prendrait. Et la curiosité malsaine prend le dessus, Noé voudrait tout savoir, pourquoi, comment, quand ? Et puis surtout depuis quand Hope aimait les filles, n’était-elle pas heureuse avec son fiancé ? Comme quoi on ne connaît jamais vraiment tout le monde. Puis elle n’avait pas vraiment prit le temps non plus de chercher à connaître Hope plus que la fiancée de mon cousin. Peut-être était-ce une autre personne ? Non, la coïncidence était trop grande parce qu’elle sait qu’elles travaillent toutes les deux au même endroit. Alors ça ne peut être qu’elle. Hope, la fiancée d’Owen. Elle soupire un peu face à l’aveu de Soledad. « Ça m’aurait étonnée tout de même qu’elle ait un aussi bon crochet… » Elle ne veut pas reprendre le fait qu’elle l’ait repoussé, Noé ne sait que trop bien ce que c’est de se faire repousser parce qu’on a interprété des signes qui n’en étaient pas. Mais a t-elle montré des signes ? Les questions fusent dans son esprit et elle aimerait s’arrêter de penser. Noé déglutit quand les mots traversent la bouche de Soledad, parce qu’elle est perdue, elle ne sait pas quelle partie prendre. Celui de son cousin, la famille ou celui de Soledad, son amie aux ailes cassées, qui a sûrement voler trop près du soleil. Elle n’en sait rien, elle fait les cent pas devant la brune et soupire, elle sait qu’elle va regretter ses mots « Tu n’es pas une enflure. Tu ne savais pas. » Elle s’installe alors à ses côtés en baissant la tête et en posant ses deux mains sur sa nuque, les yeux clos. « Je ne sais que trop ce que c’est d’avoir l’impression que, et puis finalement non. » Elle soupire une nouvelle fois, avant de relever la tête « Mais bon, Owen ne sera sûrement jamais au courant alors ça peut être une erreur de parcours, mais tu sais sûrement à quoi t’en tenir maintenant. » Noé n’est absolument pas douée pour la psychologie de comptoir, pour la psychologie tout court. Bien trop occupé à devoir mener sa vie comme elle l’entend, mener sa vie de façon complètement contrôlée. Et elle sait qu’elle devrait parfois perdre le contrôle, un peu, mais perdre le contrôle résumerait à se perdre elle-même et dans des situations comme elle vit actuellement, elle est plutôt heureuse de l’avoir, ce contrôle.

Noé ne voulait ni contredire son amie ni même confirmer ses propos parce que là n’était pas le moment. Elle voulait juste lui remonter le moral et être là pour elle comme Soledad pouvait être là pour la rousse quand les doutes l’assaillaient parfois et qu’elle avait besoin d’une oreille réconfortante. Par contre ce que Noé voulait, c’était savoir. Savoir jusqu’où ça avait pu aller, jusqu’où le coeur de Soledad avait été touché par la tempête blonde qui faisait aussi chavirer le coeur de son cousin. Elle avait besoin de savoir mais les questions qui venaient été trop directes, elle ne parvenait pas dire à trouver une interrogation qui ne balaierait pas tout sur son chemin. Une interrogation qui ne ferait pas mal quand elle franchirait les lèvres de la comédienne. Et les questions ne durèrent pas longtemps quand Soledad exposait enfin ce qui la tourmentait avec un timbre de voix qui démontrait à Noé que c’était pire que ce qu’elle pensait. Et les pensées, désormais, passaient de la colère à la compréhension, de l’envie de tout foutre en l’air et celle de prendre Soledad dans ses bras pour lui dire que ça irait. Mais est-ce que ça irait seulement ? Elle n’en était pas sûre. Parce qu’Hope allait se marier avec son cousin et Noé ne voulait pas jouer l’oiseau de mauvais augure. Elle voudrait lui dire qu’elle comprend si seulement c’était la vérité mais comme Noé ne sait pas mentir, elle lui répond simplement « C’est un sentiment normal. » N’a t-elle jamais détesté celle qui partageait la vie de la fille qu’elle admirait en secret ? N’a t-elle jamais détesté le garçon qui déposait ses lèvres sur celles qu’elle pensait être celle qu’il lui fallait avant de se rendre compte une fois de plus qu’elle s’était trompée ? Si. Mais Noé n’avait jamais parlé de cela à Soledad ni même à personne, gardant en elle cette rancoeur qui grandissait au fur et à mesure que le temps passait, le temps assassin qui malmenait de plus en plus les battement de son coeur quand elle pensait à Samia, son premier amour, qu’elle avait revu au bras de ce type qu’elle aurait voulu gifler si tant est qu’elle assumait que Samia n’avait jamais réellement quitter son esprit. Aux derniers mots de son amie, Noé vient s’installer à côté d’elle et elle ferme les yeux, cherchant les mots qui ne venaient pas. Elle s’humidifie les lèvres et elle sait qu’elle regrettera forcément ce qu’elle va dire mais tant pis. « Laisse là. » prononce t-elle, les yeux toujours fermés. « Vous verrez bien ce que ça va donner, mais laisse là venir vers toi. » Parce qu’elle ne doit pas courir au risque de se faire du mal, encore plus de mal. « Je devrais pas te dire ça parce qu’Owen est mon cousin. Je devrais peut-être te hurler dessus, mais pourtant non. Parce que je sais ce que ça fait d’être blessée à cause de ça. » Et Noé ouvre les yeux pour tourner son regard vers Soledad « T’aurais pas pu en choisir une autre hein ? » Rit-elle un peu, pour alléger la situation avant d’hausser les épaules « Toujours choisir la complication. »

Elle ne sait pas quoi dire Noé et elle a l’impression d’avoir le cul entre deux chaises. D’un côté elle comprend le désespoir de Soledad et de l’autre, qu’est-ce qu’elle dira quand elle verra son cousin ? Quand elle les verra tout les deux, Hope et lui ? Est-ce qu’elle saura tenir sa langue ? Noé n’aime pas mentir, c’est même quelque chose qu’elle exècre. Et elle s’en veut de voir son amie si mal sans pouvoir faire grand chose, si ce n’est une caresse dans le dos et lui dire que tout ira bien. Mais est-ce que tout ira bien ? Noé aimerait y croire mais elle n’y arrive pas. Parce qu’elle même n’est pas la pro des relations amoureuses quand on voit à quel point ses relations ont été chaotiques par le passé. « Hope est une sacrée personne oui. » Après tout, elle ne la connaissait pas vraiment, si ce n’est qu’elle était très douée pour faire des babkas et faire de la cuisine mais c’était tout. Elle avait toujours eu un feeling assez particulier quand la blonde était dans les parages, elle n’était jamais parvenue à mettre un mot sur ce qu’elle ressentait quand Hope était dans le coin, il fallait dire qu’elle n’avait pas vraiment chercher. « Je te comprend, je ne sais pas quoi te dire j’avoue, à part que ça passera. Ça finira par passer. Je te l’promet. » Une promesse faites à moitié en l’air, parce qu’elle ne voulait et ne pouvait pas promettre réellement Noé, ce serait compliqué, et elle ne pouvait malheureusement pas prédire le futur. Toujours installée à côtés de son amie, Noé cognait doucement sa tête contre le mur, les yeux fermés. Elle se trouve terriblement pathétique à ne pas être capable de faire la différence, à ne pas être capable de pouvoir conseiller son amie. Un grimace tord le visage de la rousse et elle joue, nerveuse, avec ses doigts pour ne pas craquer. Pour ne pas virer folle et lui hurler dessus de laisser Hope tranquille, elle n’en a pas envie et elle n’a pas envie de la rendre encore plus mal. « Tu veux que je te dise quoi ? Que je te dise que t’es bien gentille de ne pas vouloir briser le coeur de mon cousin ? Tu veux que j’te dise que t’es dans la merde ? » Noé perd un peu patience, peut-être est-ce la fatigue qui parle. « Tu ne vas pas pouvoir l’éviter éternellement et tu le sais Soledad. Alors merde à la fin, assume. Assume qui tu es, ce que tu ressens, l’attirance qu’elle te procure et si jamais tu te prends un vent, la porte sera grande ouverte. Mais arrête, par pitié, arrête de te lamenter, de penser que ça n’ira pas, parce que tu n’en sais rien. Tu ne sais pas. » explique t-elle et elle sent son coeur qui se brise parce qu’elle a l’impression de revivre son histoire avec Samia qui avait été crevé dans l’oeuf. « Alors assume, crois moi, ça fait plus mal de voir ce qu’on a loupé que ce qu’on a jamais voulu faire parce qu’on était incapable de prendre son courage à deux mains. » Et elle en sait quelque chose, Noé. Malheureusement.

Elle n'aurait jamais pensé avoir cette conversation Noé, c'est beaucoup trop étrange pour elle. Parler de la fiancée de son cousin avec l'une de ses amies. Amie qui a embrassé la dites fiancée et qui arrive au beau milieu de la nuit, la gueule abîmée, le sourire fâné et les yeux fatigués. Digne d'une série télévisée. Mais Noé ne peut pas lui en vouloir parce qu'elle sait qu'on ne peut contrôler ses choses là, les sentiments, le désir et toutes ces choses dont on ne peut être le maître que si la volonté est réellement présente. Force est de constater que du côté de Soledad, ce n'est pas le cas. Noé ne s'éloigne pas quand Soledad pose sa tête tout contre son épaule et elle dépose sa tête au sommet de celle de son amie. « Je suis plutôt d'accord sur ce point, je pense qu'on choisit la difficulté parce que sinon on s'ennuierait. » explique t-elle en haussant les épaules légèrement histoire de ne pas brusquer Soledad. Noé ne peut s'empêcher de grimacer un instant, en s'humidifiant les lèvres pour finir par les pincder « Je pourrais essayer de lui en parler si tu veux. Enfin de parler d'elle. De sa sexualité. De j'en sais rien. Mais lui parler quoi. » Il est tard et elle ne parvient pas à réfléchir correctement Noé. Et elle rit face à son affirmation « Ah ça... Si on m'avait dit que c'était si compliqué, je me serais fait nonne. » rit-elle un peu avant de croiser ses jambes, sa tête toujours au dessus de celle de Soledad « Tu veux dormir ici ? » Pas qu'elle ait grand choix mais Noé préfère demander, peut-être qu'elle refuserait et souhaiterait partir mais au fond, Noé préférerait qu'elle reste pour la savoir en sécurité.

Noé hausse les épaules à la réponse de Soledad. Bien qu’elle pense que ce sera le cas, Noé pense aussi que Soledad se prend bien trop la tête et que Hope ne va sûrement pas faire le rapprochement entre le fait qu’elle a embrassé sa co-star et le fait que Noé débarque pour parler sexualité, mariage ou peu importe le sujet qu’elle évoquera par la suite. « Je ne pense pas, enfin ce serait peut-être un signe qu’elle pense que ça vient de toi, non ? » demande t-elle, comme pour tenter de rassurer fébrilement son amie. Comme pour tenter de lui dire que tout ira bien à la fin. Le rire cristallin de Noé emplit la pièce quand elle entend la remarque de Soledad, elle se pince les lèvres et calme son rire avant de répondre « Peut-être, peut-être pas qui sait. » répond t-elle en haussant les épaules. Elle se fait craquer la nuque et se lève quand Soledad accepte l’invitation « Bon, mes colocs dorment comme des souches, donc ça devrait le faire. Puis ça leur fera matière à parler si jamais on se lève en même temps. » Ce qui n’était pas sûre puisque Noé avait son emploi du temps bien à elle. Et le regard qu’elle pose sur l’horloge la fait grimacer. Il est trop tard, et elle se lève dans quelques heures. Elle lui tend la main avec un sourire « Promis, je te ferais des gaufres au petit déjeuner. » explique Noé avant d’emmener Soledad jusque dans sa chambre. « Tu veux que je te prépare un Doliprane pour demain matin ? » Après tout, elle pouvait au moins faire ça, c’était la moindre des choses.

Le monde marche sur la tête, elle ne pouvait pas s'imaginer qu'une de ses amies viendrait pour avouer qu'elle a un crush sur la fiancée de son cousin. Elle n'avait jamais eu l'impression que New York était petit, mais visiblement si. Peut-être que c'était qu'une impression stupide. Mais elle avait du mal à se dire qu'elle pourrait regarder Owen en face, si jamais un jour ils se séparaient. Parce qu'elle était au courant maintenant. Mais une fois le sujet de crise passé, Noé ne pouvait pas décemment laisser son amie repartir chez elle. Elle rit alors à la remarque de Sol « Oh tu sais, je chante souvent le matin ils ont envie de me tuer. » explique t-elle en riant. « Et puis, ça pourrait être marrant qu'ils parlent en vrai. Ils ont toujours quelque chose à dire et le fait que je sois seule depuis quelques temps ne cessent de leur tourner dans la tête, au moins, ils arrêteront de m'agacer avec ça pendant un temps. »

Elle était plutôt ravie que Sole ait des doliprane sur elle parce que Noé n'en avait plus beaucoup et elle avait été frappé de flemme intense pour aller en racheter alors elle pourrait encore attendre si jamais une migraine se pointe. Quand elles arrivaient dans la chambre de la rousse, elle laisse Sol se mettre en tenue de nuit, sans penser qu'elle n'en a pas et elle se change, enfile un tee-shirt bien trop grand pour elle, avant de se glisser dans le lit. Elle avait mal pour la latina Noé mais elle ne lui proposerait pas un massage, ce serait trop bizarre. Beaucoup trop bizarre. Allongée sur le lit, les yeux qui fixaient le plafond, Noé haussait les épaules « Oh c'est pas grave, t'es pas la première ni la dernière qui dormira ainsi vêtu dans mon lit. » explique t-elle en riant, avant de fermer les yeux. « Je viens de penser, tu veux peut-être de la crème ? » demande Noé, tout en gardant les yeux clos avant de les rouvrir « je peux peut-être regarder où tu as des bleus ? Enfin, si c'est pas trop bizarre bien évidemment. »

L'ambiance tourne rapidement dès lors que Noé ferme la porte de la chambre, ce n'est pas de la pudeur qui la prend, mais un éternel questionnement qui prend place dans son esprit. Cependant, ce n'est pas elle qui s'est fait casser la gueule, ce n'est pas elle qui devrait avoir tant de questions dans l'esprit. Et pourtant. Pour la première fois depuis longtemps, elle a l'impression de ne plus avoir le contrôle sur son esprit, sûrement à cause de l'heure trop avancée de la nuit, certainement faute à la fatigue qui l'assomme petit à petit. Noé plongeait son regard dans celui de la brune et elle s'autorisait un simple sourire en coin face à sa réponse. Elle ne veut la forcer en rien mais elle ne semble pas pertinent de rajouter cela, le silence fait tout parfois.

Noé restait stoïque face aux mots et aux gestes de Soledad, son bras calé sous sa tête alors qu'elle était allongée sur le flanc. Noé se mit un peu à rire à la remarque de son amie et doucement, du bout de ses doigts éternellement froid, Noé effleurait le bleu qui s'affichait sur le visage, et lentement, elle fit glisser ses doigts le long du corps, un effleurement presque timide, alors qu'elle pose son regard, un regard doux, presque tendre sur la brune « Est-ce que ça te fait mal ? » demande t-elle, comme pour briser le silence, silence lourd de sens. « Est-ce que tu veux que j'aille chercher des glaçons ? » demande t-elle, encore, sans bouger. Son index qui continue à effleurer les bleus, faisant chemin sur la peau nue de la brune, du visage à l'abdomen et de l'abdomen au visage.

L’ambiance change du tout au tout, elle le sent Noé mais elle ne bronche pas, elle ne dit rien, n’émet aucune hypothèse sur la suite de la soirée parce que ce serait inutile. Parce que ce serait brisé le silence et les soupirs pour ne rien dire, pour dire une vérité qui n’a pas besoin d’être énoncé à voix haute. Noé découvre le corps tuméfié de la Latina, les doigts fins et laiteux qui font le tour des blessures engendrées par un type un peu trop ivre. Noé se met à rire à son tour quand Soledad se moque un peu d’elle. Et c’est vrai que cette question était d’une inutilité effarante quand on y pense. Les doigts continuèrent leur ascension sur la peau de la Latina, toujours avec cette même douceur, toujours avec cette même délicatesse. La respiration était régulière pour la rousse, et elle tentait de maintenir le cap, de ne pas dévier, parce que ce serait la porte aux ennuis, mais est-ce que ce n’était pas ce qu’elles étaient en train de faire ? Repousser les ennuis toujours un peu plus loin avant qu’ils n’en puissent plus et qu’ils explosent à la figure ? C’est certainement ce qui allait se passer. Noé en était persuadée et pour une fois, elle ne voulait pas avoir le contrôle. « Hm? » elle attendait la réponse de Soledad. Prête à partir. Prête à se lever pour aller trouver de quoi l’apaiser encore un peu plus. Et la réponse ne se fit pas attendre trop longtemps. La respiration de Noé devenait de plus en plus saccadée, elle voyait les problèmes qui arrivaient certainement mais pour l’instant, rien d’autre ne comptait. Et quand Soledad se rapprochait d’elle, Noé s’humidifiait les lèvres avant de prolonger ce baiser, baiser profond qui démontrait tristement le manque d’affection dont était victime Noé. Faute à sa propre personne qui n’était pas capable de lâcher du leste ne serait-ce que le temps d’un instant. Mais pour une fois, elle en a envie Noé. Ses doigts qui s’étaient arrêtés sur un bleu se dirige lentement vers la poitrine, du bout de l’index alors qu’elle approfondit le baiser, attirant Soledad tout en faisant en sorte qu’elle glisse en dessous d’elle. Et Noé laisse glisser ses lèvres le long de la peau nue de Soledad, sur sa poitrine avant de remonter contre ses lèvres, encore, comme une bouée à laquelle on se raccroche pour ne pas perdre pieds, alors qu’on sait pertinemment que ce n’est pas la solution. Mais foncer tête baissée, c’est quelque chose que Noé connaît.

Toute cette tension qui les habite et qui ne demande qu’à être exprimé. La tension qui a prit place dans la pièce, les soupirs qui brisent le silence. Deux corps qui ne demandent qu’à s’apprivoiser, se repousser avant de se retrouver. Les doigts qui deviennent curieux. Le corps se tend sous les caresses, sous les baisers, un frisson qui ne cesse de la parcourir au fur et à mesure que la tentation devient plus forte, plus brûlante. Noé se laisse faire, s’enivre de ce contact qui devient de plus en plus électrique alors que les secondes s’étirent, s’effilent et Noé laisse sortir des soupirs de ses lèvres entrouvertes. Elle cherche le contact, cherche à approfondir les baisers qu’elle lui offre sans vraiment avoir de possibilités. Quand Soledad lui demande si elle est sûre, Noé opine du chef avant de l’embrasser pour lui indiquer que oui, elle lui murmure au creux de l’oreille, d’une voix chevrotante « Je n’ai jamais été aussi sûre de quelque chose. » et elle dépose une nouvelle fois ses lèvres contre celles de la Latina, comme pour sceller sa réponse et lui montrait qu’elle ne changerait pas d’avis.

Le réveil de Noé qui sonne et qui la tire de sa rêverie, elle tape sur le pauvre engin de malheur et ouvre un oeil, avant de poser une main près de son visage parce que les rideaux ne sont pas fermés et le soleil est bien trop violent ce matin. Elle soupire et repousse la couverture avant de voir qu’elle est nue. Puis les souvenirs de la nuit endiablée lui reviennent en mémoire, elle fronce les sourcils et tourne la tête. Oh putain. Elle se lève presque trop rapidement et se rhabille avant de regarder Soledad qui semble encore dormir. Elle s’humidifie les lèvres et se les pince avant de passer une main dans ses cheveux. Et elle sort de sa chambre discrètement, avant de faire couler un café. Est-ce qu’elles ont vraiment fait ce qu’elles ont fait ? Visiblement oui. Les traces de cette petite nuit se creusent sur son visage alors qu’elle se regarde dans le miroir du couloir. « Quelle conne ! » murmure t-elle en posant ses deux mains à plat sur le sommet de sa tête. Puis elle reprend une contenance avant de servir deux tasses de café et de prendre un Doliprane et un verre d’eau, de tout déposer sur un plateau pour retourner dans la chambre « Je t’ai réveillé ? » demande t-elle, alors qu’elle se réinstalle au bout du lit, une jambe coincée sous sa cuisse et tandis qu’elle lui tend son doliprane et son verre d’eau « Tiens. Ça te fera du bien. Y’a du café aussi ! » Comment noyer le poisson en une leçon, leçon initiée par Noé Gallagher.

Le miroir lui renvoie à la figure les diktats de cette nuit, les petits yeux, les cernes qui commencent à se creuser sous ses yeux. Il faut qu’elle reprenne une contenance, qu’elle fasse une sieste avant le show de ce soir et qu’elle dégonfle ses yeux. Mais elle doit aussi retourner dans sa chambre, affronter le regard de Soledad, même si elle ne regrette rien, elle sait, elle se doute que ça va être bizarre. Enfin, elle imagine décemment. Les pensées se bousculent peu à peu dans son esprit alors qu’elle regagne sa pièce, le théâtre de leurs ébats charnels de la nuit dernière. Quand elle ouvre la porte, elle se doute bien qu’elle n’a pas été discrète, bien trop habituée à ce que ses colocataires découchent ou qu’ils aient un sommeil lourd, alors elle peut se préparer le matin sans se soucier du bruit qu’elle fait. Noé s’excusait silencieusement quand elle apprit qu’elle avait bien réveillée son invité du soir et elle répondait d’une voix chaude « Avec plaisir. » Elle ne buvait pas vraiment d’alcool Noé, et elle ne savait pas vraiment ce que la gueule de bois faisait mais elle l’avait expérimenté ne serait-ce qu’une fois et ça ne se reproduirait pas. Elle ne voulait plus avoir l’impression d’être entre deux mondes pendant toute une journée avec un éléphant qui semble danser dans son crâne à longueur de journée. Elle déplacait le plateau vers le côté libre du lit pour ne pas être embêté par l’objet qu’elle tenait il y a quelques secondes plus tôt. Quand elle émettait ce qu’elle pensait être une vérité, Noé secoua négativement la tête avec une vivacité bien trop présente pour l’horaire si peu avancée de la journée. « N’importe quoi ! » s’emporte t-elle en s’approchant un peu plus de la latina, une main qu’elle laisse glisser le long de son avant-bras, alors qu’elle se pince les lèvres, se rapprochant un peu plus de la Latina « Je ne regrette pas cette nuit » explique t-elle, en la regardant dans les yeux « Je ne vois pas pourquoi je la regretterais. J’avais peur que toi tu regrettes mais visiblement, non. » elle attrape alors une tasse de café dont elle boit une gorgée avant de la regarder « Je ne vois pas pourquoi je regretterais, on est deux adultes consentantes, rien ni personne ne nous retient. Alors ce n’est pas du regret, c’était juste du questionnement dont je viens d’avoir les réponses. Rien de plus. »

Noé pensait naïvement que ce serait étrange le lendemain matin mais c’était sans compter sur Soledad qui n’avait rien de dérangeant ni même de genant. Elle n’avait pas l’habitude des one night stand, elle qui n’était même pas sur un site de rencontre quelconque. Elle qui ne prenait même pas le temps des applis de rencontres parce qu’elle trouvait ça bizarre. Elle se confortait dans son célibat, parce que les soirées étaient toutes occupées et qu’elle ne voulait imposer son rythme effrénée, ses listes et ses névroses à personne. Après tout qui voudrait de quelqu’un qui n’est jamais là, qui fait passer son travail avant tout le reste. Qui voudrait de quelqu’un qui angoisse à chaque audition et qui devient imbuvable. Thank god, son rôle dans le Frozen musical dure encore un temps. Elle avait apprécié de se sentir désirée la nuit dernière et se doutait que ça ne se reproduirait pas de sitôt. Qui sait. Noé s’armait d’un sourire quand Soledad effleura ses lèvres et son regard devint amusé le temps d’un instant.

“Il n’y a aucun mal à se faire du bien.” rétorqua t-Elle d’une voix mielleuse. Une nouvelle gorgée de café avalée, elle se laissait tomber sur le matelas, avant de se pencher sur le côté, une main soutenant sa tête alors qu’elle regardait la Latina a ses côtés. “je bosse ce soir, je dois partir à seize heures pour arriver a 16h45 au théâtre.” La précision affolante, Noé se demandait si Soledad allait prendre peur. Elle qui était heurée comme un coucou bien remonté. « Tu peux rester ici pour la journée si tu veux.» lui proposa t-Elle alors qu’elle effleurait la jambe tendue du bout de ses doigts fin. « Je crois que le frigo est vide par contre, alors on peut se faire livrer et rester toute la journée au lit.» prononça t-Elle, sans sous-entendus mais avec un sourire en coin sur ses lèvres « C’est comme tu veux, je ne te chasserais pas en tout cas.»