ugo&louisa -- words can't express my boundless gratitude for you

« Je dois y aller, je dois livrer les cupcake et je dois rentrer à la maison. Mon père rentre aujourd'hui. » A la maison, c'est une sensation bizarre qui la prend quand Louisa se dit qu'elle ne sera peut-être plus jamais chez elle au Oak Complex et que les affaires qu'elle a entreposé dans un box devraient peut-être revenir à Dawson Circle. Elle n'a pas envie de revenir vivre avec son père, bien qu'elle l'aime d'un amour sincère, mais elle a été trop indépendante pendant bien trop longtemps. Quand bien même, elle a eu la maison toute seule pendant quelques mois, elle ne sait pas comment va se passer la cohabitation, sur le long terme et elle ne veut pas que sa relation avec son père en pâtisse. Elle ne veut pas que leur relation se dégrade. Elle ne veut pas... le perdre. Lui aussi. Un baiser sur les lèvres de Noam, elle enfile sa chemise, sa jupe et ses doc martens, avant de remonter les chaussettes et elle se dirige jusque la pâtisserie pour récupérer la commande pour le mariage. Le uber qui l'attend, elle se dépêche pour se retrouver dans Manhattan, un peu perdu, le look qui dénote un peu de toutes les dames de la haute qui sont pressés, pour aller se faire faire le brushing du samedi, les hommes en costume pressés qui ne cessent de jeter un regard sur leur montre. Et elle arrive sur le lieu de réception, des étoiles pleins les yeux et ses cupcakes qu'elle tente tant bien que mal de livrer sans tout renverser. Les yeux cernés, elle y a passé jusque quatre heures du matin pour donner le meilleur d'elle-même. Elle donne tout ça à la wedding planner qui vérifie, et Lou récupère le chèque en souriant avant de lui laisser sa carte de visite, espèrant secrètement qu'elle ferait affaire avec elle plus d'une fois. Ça pourrait lui faire du bien et de la pub, et peut-être qu'elle pourrait ouvrir sa pâtisserie. Qui sait.

Alors qu'elle est sur le chemin du retour de Staten Island, elle sent que le sommeil est en train de la rattraper alors qu'elle pique du nez dans le ferry. Elle se maintient éveillée en envoyant des messages à Noam et quand le ferry arrive au port, elle espère qu'Ugo soit là. Mais non, après tout, elle ne l'a pas prévenu. Elle attend un nouvel uber avant de monter dedans et de se retrouver devant la maison de son père. Elle ne peut pas l'appeler sa maison, parce qu'elle ne la considère pas comme tel. Peut-être que ça viendra un jour. Son sac de sport sur l'épaule, elle déverrouille la porte d'entrée qui n'est... pas verrouillée ? Elle fronce les sourcils et la pousse doucement, son coeur qui bat un peu trop vite, un peu trop fort et elle entend de la musique. Une douce symphonie qui lui rappelle son enfance. « Papacito ? » demande t-elle, en avançant un peu, déposant sans bruit son sac de sport sur le sol. « Papacito, tu es là ? » Et quand elle le voit finalement, elle sursaute avant de poser une main sur son coeur « Mais tu es rentré plus tôt ? »

Elle avait tant de projets Louisa, qu’elle ne savait pas vraiment par où commencer, déjà l’emploi qu’elle avait réussi à obtenir dans le café librairie de Jack, ce projet secret qui restait gravé dans un coin de la tête et les commandes qu’elle avait pour divers mariages, il fallait dire qu’elle ne chômait pas et qu’elle n’était pas une tire-au-flanc, peut-être qu’un jour ça lui retomberait dessus, peut-être qu’un jour elle devrait lever le pied mais pour le moment, elle n’en a certainement pas envie parce qu’elle aime ce qu’elle fait, même si elle est épuisée, au moins, elle peut se permettre de voir Noam quand elle le souhaite, après le travail, avant de rentrer à Staten et elle peut continuer à chercher un colocataire pour retourner au Oak Complex. C’est là qu’est sa vie, c’est là qu’est son avenir, elle le sent, elle le sait. Elle aurait pu dire que c’était aussi à Staten Island avec son père, mais depuis qu’il avait prit le large la première fois, Louisa n’avait pas eu envie d’être égoïste au point de lui demander de rester pour toujours. Elle voit qu’il fait des efforts, elle voit qu’il fait en sorte d’être plus présent, mais lui demander de rester éternellement reviendrait à l’enfermer dans une cage, l’enfermer dans un carcan et le voir malheureux. Alors elle acceptait, tant bien que mal, les missions, le fait que son père soit absent. Souvent. Le fait qu’il soit en danger, parfois. Mais surtout, ce qu’elle appréciait secrètement, c’était que quand il revenait, rien n’avait changé entre eux. Tout était comme avant et c’était ce qu’elle appréciait le plus. Son père devait revenir bientôt et Louisa en était impatiente, presque ravie d’avoir quelque chose à lui raconter. Son premier contrat en tant que pâtissière indépendante, les cupcakes faits pour un mariage. La confiance aveugle qu’on lui accordait. Et la fierté qu’elle avait ressenti quand on l’avait appelé pour lui confier le dessert d’un mariage. Le temps qu’elle avait mis, la cuisine qu’elle avait laissé sans dessus-dessous, s’endormant sur le canapé parce qu’elle était épuisée. Le chemin vers Staten Island était la chose qu’elle détestait le plus, parce que le trajet en ferry, dans un état de fatigue avancée était bien trop long. Parce qu’elle avait hâte de rentrer et de se poser dans la baignoire devant une série. Ça passait toujours plus vite quand elle était avec Noam parce qu’au moins, elle avait quelqu’un a qui faire la conversation, aujourd’hui elle était seule. Il travaillait et elle ne pouvait malheureusement pas le déranger. Alors elle s’en accommodait, mais au moins, elle allait pouvoir se reposer. Elle ne savait jamais vraiment quand son père rentrait, c’était toujours quelque chose qui était secret pour elle, peut-être pour l’effet de surprise, et aujourd’hui, elle se demandait si c’était lui ou si elle avait mal fermé la porte.

- « Ça me rassure que tu reviennes le jour, j’aurais trop peur que ce soit un voleur la nuit. » avoua t-elle, à demi-mots, sur la réserve.


Elle se rapprocha de lui, son père si grand et elle qui se sent à chaque fois si petite face à lui, papa ours, papa qui la protège envers et contre tous, malgré la distance, malgré l’absence. C’est quelque chose qu’elle aime quand il est là, savoir qu’elle sera protégé qu’importe ce qu’il peut se passer. Et quand il lui parle de sa promesse, elle ne peut s’empêcher de se rapprocher de lui pour entourer la taille de son père de ses bras frêles, toujours elle a besoin de ce contact comme pour se prouver qu’il est bien là, en chair et en os et qu’elle ne rêve pas.

- «  J’ai tant de choses à te raconter ! Laisse moi nous faire un café ! »

Elle se pressa dans la cuisine pour s’activer face au percolateur, avec joie. Elle chantonnait en préparant le café et quand les boissons chaudes étaient prêtes, elle se retrouva dans le salon pour déposer les tasses sur la petite table.

«  J’ai trouvé un travail ! Et aujourd’hui, j’ai dû livrer des cupcakes pour un mariage ! Tu te rends compte papacito ? Mes cupcakes ! A un mariage ! » s’exclama t-elle, les yeux brillants.

Et quand il s’installa à côté d’elle, elle posait sa tête contre son bras, sa tasse entre les mains.

- « Et toi, ta mission ? Comment ça s’est passé… Tu m’as manqué… »

Il ne manquait que Lewis au paysage pour que le puzzle de la vie de Lou soit enfin complet, mais elle ne pouvait pas lui en vouloir, cette opportunité de travail, elle l'aurait prise aussi. Alors elle reste avec ses mails, ses sms et ses appels, elle se contente de cela pour ne pas lui faire regretter son choix. Mais son père est revenu, alors elle se sent un peu mieux, un peu plus soulagée et elle a l'impression enfin, qu'elle peut sortir la tête de l'eau. Louisa serrait la tasse fumante de café entre ses mains et regarder Ugo qui lui posait des questions sur sa vie.

- « Je travaille dans une nouvelle pâtisserie ! C'est une librairie qui fait aussi salon de thé, alors je fais les gâteaux. » explique Lou, fière d'elle « Puis, je fais aussi des cupcakes pour les mariages, ou pour des occasions spéciales. Mais je ne peux pas en faire mon métier en entier, je n'ai pas assez de talents pour ça. »

Toujours à se dénigrer, toujours à ne pas voir le talent qu'elle a. Toujours à voir qu'il y a mieux ailleurs. Les doutes du passé sont tenaces, et marquent le coeur. Les mots et les propos qui ont la peau dure.

« Oui, financièrement ça va. Et... je ne veux pas que tu aies l'impression que tu rentres juste pour me donner de l'argent. &raquo avoue t-elle, d'une petite voix fluette.

Puis, elle regarde son père, un instant, dans le silence de la pièce et elle fond contre lui, se blottit à ses côtés, parce qu'il lui a manqué.

« J'ai envie de tenter ma chance à Sugar High, tu sais, c'est une émission de télé-réalité... Je me dis que ça pourrait peut-être me faire m'améliorer... Mais j'ai peur, parce que je ne sais pas comment Maman va réagir, comment Noam va réagir et comment tu ... tu vas réagir. J'ai pas envie que vous ayez honte de moi. »

La colombe qui avait du mal à voler, la biche effarée. Voilà comment on qualifiait Louisa, avant. Avant tout. Avant qu’elle ne rencontre Eli. Avant qu’Eli lui ouvre les yeux et lui donne la possibilité de déployer ses ailes. Ailes qu’Eli a aidé à se déployer sans prétention avec son sourire, ses mots et son aide. Et maintenant qu’Ugo était revenu, elle avait prévu de continuer de s’élever, voler de ses propres ailes, mais c’était encore compliqué. Compliqué à vivre, compliqué à assumer. Et les compliments d’ugo la touchaient en plein coeur, plus que ce qu’elle ne voulait se l’avouer en tout cas.

- « Oui mais tu es biaisé parce que tu es mon papacito. » répond t-elle en souriant.

La caresse rassurante d’Ugo lui tirait un nouveau sourire et elle n’aurait voulu l’annoncer a personne avant lui, elle aurait voulu ne le dire à personne d’autre que son père mais elle savait pertinemment qu’elle ne saurait pas tenir sa langue longtemps. Elle attendait l’appel de Lewis, elle attendrait de voir sa mère, de voir Noam pour leur avouer à tous. Peut-être qu’elle pourrait faire une petite fête dans son appartement, pour célébrer son retour et l’annonce ? Elle n’avait pas envie parce qu’elle n’aimait pas le monde, elle n’aimait pas les gens Lou. Elle tolérait simplement certaines personnes et ça se comptait sur les doigts de la main. Et elle savait que ça pouvait être un problème. Mais elle s’en fichait un peu. Elle savait sur qui elle pouvait compter. C’était certainement ce qui importait le plus. Et son père était certainement la personne, malgré les obstacles et le passé, la personne la plus importante de son entourage.

- Oui c’est une émission sur Netflix pas en direct mais un épisode sort chaque semaine... Et pour les castings j’ai juste vu ça passer. J’attendais de te voir pour me lancer pleinement dedans. Explique t-elle d’une petite voix.

Elle n’était qu’inquiétudes et  doutes mais si son père croyait en elle alors c’est que c’était la chose à faire. Elle soufflait un peu.

- Même si je ne gagne pas, je me dis que ça peut être un tremplin et que les personnes peuvent me connaître et peut-être que ça pourrait faire décoller mon entreprise de cupcakes. Il faudrait que j’en parle à Jack mais je suis sûre qu’elle serait d’accord… Enfin j’espère.

Parce qu’elle ne voulait pas décevoir sa patronne, elle ne voulait décevoir personne.