hallowink (jules)

Troisième bière terminée, je la pose dans le bac de recyclage et troque mon tshirt troué pour une tenue un peu plus classe. J’ai dit à Jules que je n’avais pas de costume, ce qui est vrai, mais je m’arrange pour faire quelque chose rapidement. J’enfile un costume bleu marine, une chemise blanche immaculée et fouille dans les rouges à lèvres de ma soeur pour me dessiner quelques traits rouges sur le visage. On pourrait croire que je me suis battu. Je regarde mon reflet dans le miroir et décide de mettre un peu de gel sur mes mains et de mettre mes cheveux en pagaille. Et quand je tombe à court d’idées, mes yeux se posent sur les fards à paupières d’Arya. Elle me tuerait si je venais à les abîmer alors, lorsque je m’étale des couleurs foncées sur la paume des mains, j’essaye d’être le plus soigneux possible. Elle risque de me tuer demain mais vous savez quoi ? Demain est un autre jour. Les mains pleines de fards, j’agrippe mon col de chemise et tire un peu dessus, faisant sauter un bouton et desserrant vulgairement la cravate que je viens de mettre. J’ai l’air débraillé, doux vainqueur d’une bagarre qui n’a pas eu lieu. Quoi que. Avec mon esprit et ma déprime, je gagne haut la main. Téléphone dans la poche du costume, je me dirige vers la bouche du métro et mets une bonne vingtaine de minutes à arriver sur le point de rendez-vous. Je ne sais pas ce que Jules va en penser mais j’ai fait un effort, moi qui déteste cette fête. Mes parents n’ont jamais compris pourquoi je n’aimais pas Halloween mais c’est simple : je n’aime pas avoir peur ni les jump scare. Alors oui, en 2021, les femmes sont plus souvent en version sexy de trucs un peu creepy mais… Ça ne change pas que j'ai hâte que cette période soit terminée. Noël, par contre, ça m’intéresse bien plus. Un message pour la blonde - pour la soirée - et j’attends comme un con, tapant du pied parce qu’elle est presque trop lente pour venir m’ouvrir la porte. Mais quand elle est là… Wow. Diablerie. La porte s’ouvre et je lui offre mon plus beau sourire. J’ai fait du mieux que j’ai pu. Je ne voulais pas arriver nu... J'aurais pu, vraiment. Mais je crois que je finissais au poste avant même d'arriver devant ce building dans laquelle une soirée se tient. C'est même sûre. Et j'aurais eu l'air sacrément con devant mes collègues des autres districts. Là, au moins, j'ai fait un effort et c'est bien le plus important, non ?

@Jules Ainsworth

Elle n’avait pas franchement prévu de faire la fête pour Halloween Jules, mais elle a accepté une invitation de dernière minute, alors elle avait dû trouver quelque chose dans son armoire qui pouvait faire penser à un costume d’Halloween et ce body en cuir qui traînait depuis des lustres et qu’elle n’avait pas eu l’occasion de mettre était sûrement la meilleure chose à porter, elle attrapait alors une paire de cuissardes qu’elle enfilait avant de s’affubler d’une perruque et d’un maquillage plutôt sympathique. Black Canary d’Ali Express est dans la place, pensa t-elle en riant un peu, ses lèvres qu’elle maquillait de rouge avant de prévenir son amie qu’elle arrivait avec une bouteille de vin et elle demandait à son chauffeur de préparer la voiture tandis qu’elle attrapait une de ses innombrables veste en (faux) cuir qu’elle enfilait dans l’ascenseur. Elle n’avait pas loin à marcher Jules mais elle n’avait pas envie de croiser quelqu’un qu’elle n’appréciait pas ou même de faire affaire avec Jean-Michel le relou qui aurait l’impression qu’il a le droit d’ouvrir sa gueule quand bon lui semble. Jules n’a pas envie de se battre ce soir, elle a juste envie de s’enivrer et de ne penser à rien d’autre. Elle avait certainement besoin de ça pour cesser de penser à sa vie. Dans la voiture, elle réajustait sa perruque avant de se regarder dans son miroir de poche, jusqu’à la destination. Elle remerciait son chauffeur qu’elle congédiait pour la soirée, elle trouverait bien un taxi ou quelqu’un avec qui rentrer. La soirée qui bat son plein, Jules est un peu enivré, juste ce qu’il faut, pas encore ivre au point de ne plus se contrôler et plus vraiment sobre pour subir les remarques incessantes de son amie qui se plaint de sa vie amoureuse et sexuelle. Poor unfortunate soul. Elle ne sait pas comment elle en vient a envoyer des messages à Charles et à lui proposer de passer. Elle ne sait pas s’il va se plaire à cette soirée ni même s’il avait prévu quelque chose de son côté, mais quand il accepte sa proposition, elle sent son coeur qui fait un upside down, ne s’en préoccupe pas vraiment et quand il la prévient qu’il est en bas, elle s’excuse un instant, fini son verre de vin d’une traite, attrape un bonbon qu’elle fourre dans sa bouche avant de descendre pour le retrouver, avec une impatience certaine. Elle salue le pauvre homme qui doit faire le piquet entre les deux portes et elle sourit à Charles dès lors qu’elle l’aperçoit derrière la vitre. Son sourire s’agrandit quand elle voit qu’il a fait un effort et elle sort, réajustant sa veste pour cacher l’amas de peau qui peut être au contact du froid. « Tu aurais pu venir nu, ça ne m'aurait pas dérangé. » avoue t-elle, amusée. Elle se rapproche de Charles pour lui offrir une accolade avant de le regarder et d’attraper une trace de rouge a lèvre mal étalée pour lui étaler sur les lèvres avec un petit sourire en coin. « On y va ? » Demande t-elle, avec une voix amusée, entrant dans l’immeuble dont la porte est ouverte par le portier. Une fois dans l’ascenseur, elle se rapproche de Charles, lisse sa chemise un peu abîmée et le regarde « Je pense qu’elles risquent d’être pénible, mais si jamais, demande moi un verre de soda et je sais que tu auras envie de partir. » explique t-elle en évitant tout de même le regard du blond. L’ascensioon est longue jusqu’à l’étage et quand les portes s’ouvrent, Jules attrape la main de Charles pour lui assurer qu’elle est là, s’il a besoin. « Prêt ? » Parce qu’elle, pas du tout, enfin si. Mais non.

Clairement pas ma soirée préférée mais pourtant, quand Jules m’invite à la rejoindre, je ne mets pas bien longtemps à dire oui. Pourquoi ? Je ne sais pas trop. Je sais que ce n’est pas bien, surtout vu les messages que l’on vient d’échanger, que ce n’est pas franchement réglo pour… Pour qui donc ? Je suis officiellement célibataire et je n’ai de compte à rendre à personne. Si la brune me semblait intouchable, il n’en est plus rien maintenant. Je peux me laisser aller, laisser mes pensées et mes envies voguer. J’ai le droit de me dire qu’elle est merveilleuse et que ses lèvres m’appellent. J’ai le droit d’avoir envie de l’embrasser et de ne faire qu’un avec elle. Le droit, oui. Capable de le faire, c’est une toute autre histoire que nous vérifierons - ou non - ce soir. Je ne sais pas ce que ça va donner, tout ça, je ne sais pas si c’est l’idée du siècle ou la pire que j’ai eu depuis un bon bout de temps mais je suis vite dans le métro, comme une abeille attirée à un pot de miel. Je crois que ça me fera du bien et me permettra de mettre un peu d’ordre de ma vie. C’est pas ce qu’on dit ? Qu’il faut - certaines fois - mettre toute sa vie en désordre pour y retrouver de l’ordre ? Alors oui, c’est ce que je me dis quand j’arrive devant l’immeuble dont elle m’a donné la localisation un peu plus tôt. Ce soir, je mets le désordre et demain, je rangerais ce qu’il y aura à ranger. Peut-être qu’il y aura du bordel, peut-être que ce sera encore pire ou peut-être que j’y verrais plus clair. Je ne sais pas trop, pour être honnête mais qui vivra verra. Et après des mois à avoir l’impression d’être en prison, c’est ce dont j’ai besoin. Vivre, jusqu’à en mourir. Il me faut un certain temps pour arriver à destination et lorsque j’attends devant l’immeuble, je commence à tout remettre en cause. Est-ce que c’est vraiment une bonne idée d’être là ? est-ce que ça va juste confirmer ce que je pense et ressens depuis des mois déjà ? Est-ce que j’ai trompé Jane, ne serait-ce que par la pensée ? Parce que le soir, pour m’endormir, ce n’était pas toujours à la femme qui était dans mon lit que je pensais. Et quand je la vois, une bonne partie de mes questionnements disparaît. J’aurais eu froid... Comme elle à ce moment même. Parce qu’elle peut dire ce qu’elle veut, je la vois la chair de poule qui se glisse sur sa poitrine qu’elle tente de cacher en faisant remonter la fermeture éclaire de ce body en cuir noir qu’elle arbore. Ses hanches sont terriblement bien taillées et elles me donnent envie de les découvrir des mains et puis des lèvres. Allons-y. Que je souffle, rappelé à l’ordre par ta voix et ce geste qui paraît si intime. Ton index sur mes lèvres. Ça a un goût plaisant, je ne peux pas le nier. Il n’y a rien que je puisse nier avec elle dans les parages, c’est déstabilisant. Et complètement fou. Je la suis jusque dans la cage de l’ascenseur et l’écoute. Jules... Je susurre ces mots et capte son regard. Je suis déjà allé à des tas de soirée et j’ai une plus jeune soeur. Être le clou du spectacle, c’est ma spécialité. Je lui adresse un clin d’oeil et me redresse légèrement. J’agis un peu comme à l’université et il n’y a rien qui m’inquiète. Si ce n’est que je me sois envoyé en l’air avec l’une de ses amies dans le passé. Mais même ça… Le passé est passé, non ? C’est pas ce qu’elle dit la gueularde blonde de Disney ? Toujours ! Que je lance en serrant sa main et lui adressant mon plus sourire. Et avant que les portes s’ouvrent complètement, je tire sur sa main, l’attire contre moi et dépose mes lèvres sur sa clavicule droite. Elles auront de quoi parler comme ça. Et nous sortons rapidement de l’ascenseur. Les présentations sont vite faites et j’attrape le verre que l’on me tend. Les voix sont aiguës, les rires aussi et les chuchotements, je les entends. Il y a de tout ici mais surtout du beau monde et ça me fait beaucoup de bien de sortir, je ne peux pas le nier. Comment est-ce que je connais Jules ? Je me racle la gorge et tourne les yeux vers la fausse blonde. Elle saura mieux vous le raconter que moi. Je n’ai pas honte mais je n’ai pas envie que ces gens s’imaginent que la jeune Ainsworth est une briseuse de ménage.

C'est sûrement la pire idée de l'année, du siècle et des siècles à venir de lui dire de la rejoindre mais est-ce qu'elle en a quelque chose à faire ? Non. Elle n'a pas envie de se prendre la tête, de réfléchir, elle est bien trop enivrée pour cela et puis si elle doit regretter, elle regrettera demain. Demain est un autre jour, désormais elle a juste envie de profiter et de ne pas se poser de questions, elle s'en pose beaucoup trop des questions, toujours, tout le temps alors pour une fois, elle avait envie de profiter sans se prendre la tête, quitte à regretter demain matin. Mais Jules ne regrette jamais ce qu'elle fait, a fait, ou fera. Elle met un point d'honneur a assumer ses actes et leurs conséquences en dépit de certaines choses parfois. Elle se souvient avoir envoyer se faire voir la mère d'Aidan, à l'époque quand elle ne voulait pas que la fausse blonde le cherche alors qu'il avait disparu. Elle se souvient avoir dit à son père d'aller se faire foutre avec son argent quand il avait voulu acheter sa tristesse. Et elle n'a jamais regretté ne serait-ce qu'un de ses gestes, alors ce n'est pas aujourd'hui qu'elle va commencer à le faire. Des remarques s'immiscent dans son cerveau et elle ne dit rien, se contente de pincer les lèvres avant de se diriger accompagné du blond dans l'immeuble. Mais elle doute Jules et elle s'humidifie les lèvres une nouvelle fois quand elle l'entend « Tu seras le clou du spectacle pour sûr. » dit-elle en soutenant son regard avant de passer une main dans sa perruque. Ravie qu'il soit prêt, Jules souffle un peu pour se donner un courage dont elle n'a pas spécialement besoin et les lèvres contre la clavicule lui tire un frisson, elle se mord instinctivement la lèvre avant de le regarder. Pas besoin de ça pour les faire parler, pas besoin parce qu'elles voient bien la façon dont Jules le regarde. Et elle s'accroche à son verre comme on s'accroche à une bouée de sauvetage, sa paille qu'elle ne cesse de traumatiser, en jouant avec. Elle manque de s'étouffer quand elle entend la question de son amie et elle aurait presque envie de lui faire avaler son verre de travers pour qu'elle s'étouffe et qu'elle n'ait pas à répondre à la question. Mais elle sent les regards sur elle, et elle sait bien qu'elle va devoir répondre. Va t-elle opter pour une vérité déconcertante ou pour un mensonge bien huilé ? Elle n'en sait rien. « J'ai rencontré Charles au boulot. » Vérité déconcertante then. « Il faut savoir que j'ai demandé à une de mes collaboratrices de s'occuper de lui parce que je ne me sentais pas capable de le faire. Et visiblement ça ne lui a pas plu alors il est venu danser dans mon bureau. » rit Jules avant de le regarder, en face d'elle, en prenant une gorgée de sa boisson avec sa paille. « Puis visiblement, il a décidé de ne plus se marier... » explique t-elle en regardant son amie qui jette un oeil qu'elle connaît bien. Et Jules voudrait lui dire que c'est chasse gardée, mais elle n'en est pas capable. Elle boit alors son verre cul sec et se pince les lèvres « Alors comme ça Charles, vous êtes sur le marché ? » demande l'hotesse de la soirée déguisée en diablesse, et Jules le regarde en levant les yeux au ciel, pendu à ses lèvres et à sa réponse.

Si j’avais demandé son avis à ma soeur, je sais qu’elle m’aurait dit de ne pas y aller. Je n’ai parlé de Jules à personne mais Arya est loin d’être débile et lis en moi comme dans un livre ouvert, chose que je ne supporte pas, je ne peux pas le nier. C’est bien pour cela que je n’ai pas voulu la déranger - mais aussi le fait qu’elle est en week end avec Jaden. Je ne voulais tout simplement pas qu’on me dissuade de me rendre dans cet appartement où je ne vais connaître absolument personne. Cela risque de se transformer en la soirée la plus étrange de l’année mais je suis prêt pour cela. Et puis, y a-t-il plus étrange que les larmes de mon ex fiancée, avec laquelle j’ai rompu quelques jours après l’enterrement de notre enfant mort-né ? Non, vraiment, j’ai déjà monté la pyramide de l’étrangeté ce mois-ci alors ça, ce n’est presque rien. Sans compter que, lorsque je me retrouve face à Jules, je me retrouve à n’en avoir rien à faire de ce que l’on peut penser de moi, dire de moi ou autre. Pour ses yeux, je serais prêt à me damner dès ce soir. Pour ce regard perçant et pourtant souriant… Et ce corps ! Ce visage, ce caractère bien trempé mais pourtant si doux. Elle a tout ce qu’il faut Jules et j’espère qu’elle le sait. J’aimerais lui dire, lui redonner cette confiance dont elle semble parfois manquer et, de par son langage corporel, je vois bien qu’elle ne se sent pas si bien que cela à être ici. Est-ce à cause de ses amies ou moi ? Regrette-t-elle de m’avoir dit de venir ? J’aurais peut-être dû comprendre le message et refuser poliment. Seulement, avec moi, difficile de comprendre qu’il faut dire non quand tout ce dont j’ai envie est de dire oui. Et quand la question fatidique de notre rencontre tombe sur le tapis, je laisse la fausse blonde prendre la parole. Moi, je suis à côté d’elle et la regarde, acquiesçant ses mots, ne me rendant d’abord pas compte qu’elle dit la vérité. Shit. Est-elle vraiment prête pour cela, pour le jugement et tout ce qui va avec ? Il faut croire que oui. Une valse qui m’aurait valu un dix à Danse avec les stars ! Que je lance pour tenter de convaincre ces demoiselles, toutes pendues aux lèvres de la jeune Ainsworth. Je ne voulais pas lui faire perdre son temps. Je savais vers quelle finalité de mes fiançailles on se dirigeait mais la principale concernée n’était pas au courant... Voilà comment j’essaye de me dépatouiller de tout cela, comme pour sauver Jules sur la raison de sa volonté de ne pas vouloir s’occuper de moi. Mais je crois qu’au final, je comprends bien pourquoi elle a fait cela. Alors... À ce sujet… Je finis mon verre et regarde la Diablesse en face de moi. L’adéquation déguisement-personnalité est parfait. Officiellement, je suis encore en train de faire le deuil de mon mariage, de mon enfant décédé et du fait que je dors sur le canapé de ma soeur avec leur chat qui passe ses nuits à s’allonger sur ma tête. Sit on my face never sounds so disgusting. J’hausse les épaules et continue. Parce que s’il y a une version officielle, il y en a aussi une officieuse. Officieusement, je ne suis plus vraiment sur le marché. Je suis à la caisse, vous voyez. Quelqu’un a été plus rapide que vous. Et j’en hausse les épaules, mes yeux glissants sur les visages de toutes ces demoiselles, évitant bien le visage de Jules puisque c’est elle qui va me scanner dans très peu de temps. Je vais me resservir un verre, tu en veux un ? Que je demande, m’adressant exclusivement à Jules, faisant dos à toutes ces demoiselles un peu trop indiscrètes. Et mes doigts viennent se poser sur les siens, mon regard dans le sien, un mouvement oculaire pour lui faire comprendre que si elle veut s’enfuir, c’est sur la droite.

Pour une fois, Jules a peur. C’est un nouveau sentiment, elle qui a toujours eu l’habitude d’être sûre d’elle, d’avoir la tête haute, et cette prétention qui lui sied si bien au teint. Mais elle a peur parce que Charles, au fond, est venu mettre un coup de pied dans son quotidien, mettre sans dessus-dessous un monde qui était bien lisse, un monde qui était tout organisé, elle qui se vantait à qui voulait l’entendre qu’elle n’avait pas ou du moins, plus envie, de s’attacher. La voilà qui invite un ancien client qui a annulé son mariage et qui est désormais présent à ses côtés à un soirée auquel elle n’avait pas franchement envie d’aller mais qui semblait visiblement prendre un tournant qu’elle n’espérait pas. Mais un tournant plutôt agréable au fond. Elle sentait bien le jugement de ses prétendues amies, elle sentait bien qu’elles essayaient de prêcher le faux pour savoir le vrai et Jules n’a pas envie de leur mentir, de toutes façons, depuis le temps qu’elles se connaissent, elles savent pertinemment quand la jeune Ainsworth ment. Son corps la trahit, ses gestes, la façon dont son visage se ferme quand elle ment, elles ont cette capacité de déceler un mensonge d’une vérité alors Jules n’avait pas franchement envie de passer pour une briseuse de couple doublé une menteuse éhontée. Alors elle préférait nettement dire la vérité. Elle espérait sincèrement que Charles ne lui en tiendrait pas rigueur au pire, elle pourrait lui expliquer. « J’aurais pu te mettre un sept mais pas un dix. Désolée. » rétorque t-elle en riant et en le regardant, ses lèvres maquillées qu’elle humidifie. Jules regarde Charles en fronçant les sourcils quand il essaie de la défendre, alors il ne lui en veut pas de dire la vérité ? Et elle fronce les sourcils à l’écoute de la version officieuse. Qu’est-ce qu’il est en train de dire exactement ? Elle se mord la lèvre et se gratte nerveusement la nuque en se cachant derrière sa perruque. Puis quand la voix de Charles lui parvient jusqu’aux oreilles, elle relève la tête en souriant. Ses yeux qui se plantent dans ceux de Charles, et elle se mord l’intérieur de la joue. « Je veux bien un soda. » Parce que si ça vaut pour toi, ça vaut pour moi non ? Elle se lève alors et regarde l’assistance « Je dois y aller, je viens de me souvenir que demain j’ai une réunion tôt et vous savez ce que c’est, les soirées ne rapportent pas d’argent, sauf au Gotha. » Et Jules les salue en attrapant la main de Charles, leurs doigts qu’elle entrelace comme pour lui signifier qu’elle ne le laissera pas tomber et qu’elle apprécie ce qu’il vient de faire pour elle. Ils entrent dans l’ascenseur et Jules reste silencieuse, ses doigts qui cherchent, effleurent ceux de Charles qu’elle a lâché quand ils sont entré dans l’ascenseur parce qu’ils n’avaient plus besoin de faire semblant, mais avait-il déjà eu besoin de le faire ? Et quand ils sortent de l’ascenseur, elle sort de l’immeuble avant de le regarder « La proposition de mon canapé tient toujours. » murmure t-elle en rajustant la veste de Charles, ses bras qui se glissent finalement autour de la nuque du blond tandis qu’elle plante son regard dans celui du policier et qu’elle lui murmure au creux de l’oreille « Et dormir, sur ce canapé aussi. » Ou ne pas dormir, au choix. Mais ce choix là, ce n’est certainement pas elle qui le fera.

Pas forcément très intelligent de ma part de venir sans avoir vu avec Jules de quelle façon nous nous connaissons. Je n’ai pas honte de la manière dont elle s’est retrouvée sur mon chemin mais je ne sais pas s’il en est de même de son côté. S’il y a bien une chose que je ne souhaite pas, c’est la mettre mal à l’aise et la lancer au milieu d’une ronde de fauve. J’ai passé tellement d’années à regarder les gens autour de moi de la manière dont ces filles le font et je suis presque choqué, estomaqué de voir qu’elle porte un tel regard sur une femme aussi merveilleuse que Jules. Il y a des rencontres qui se font quand elles ne devront pas se faire. Il y a des rencontres qui ne sont que ça, des rencontres. Et d’autres qui sont un mélange de tout. Un mélange d’infinité, d’éphémère, de force et de faiblesse. Un doux équilibre qui paraît inébranlable, intouchable. Et je crois que c’est ce que l’on est en train de trouver avec la belle Américaine. On sait que notre rencontre est cocasse, qu’elle pourrait faire hurler et jaser mais qu’est-ce qu’on en a à foutre, sérieusement ? Moi, tout ce que j’ai envie de faire c’est d’ajouter que je n’ai pas quitter ma femme pour Jules. Parce que je ne veux pas qu’elle passe pour ma méchante de l’histoire alors que mon coeur, avant de la rencontrer, ne battait plus vraiment. Et ce constat est flippant. Mais je me reconcentre sur le groupe de demoiselles et joue l’offusqué. Je ne te ferai jamais danser alors ! Parce qu’elle ne mérite que la perfection, que le dix sur dix, l’excellence et l’élégance que je n’ai pas su lui montrer. Il faut dire que je gigotais de partout pour cacher l’effet qu’elle me fait. Aujourd’hui, je me contrôle plutôt pas mal mais ce n’est que le début de la soirée. Et si j’ai le contrôle sur mon anatomie, je l’ai bien moins sur ma langue bien trop déliée. Je ne crois pas qu’il fallait dire tout cela mais c’est fait. Et parce que j’ai besoin de m’éclipser, c’est après un clin d’oeil à la foule - pas en délire, Dieu merci - que je me tourne vers Jules. J’acquiesce et m’apprête à filer vers le bar pour lui récupérer un soft et - pour moi - un peu de bière sauf que sa voix m’alpague. Je tourne le visage et souris légèrement en l’entendant - à son tour - trouver une excuse bidon pour nous sortir de là. Sa main dans la mienne, je fais un signe de la main et lance un Ravi de vous avoir rencontré ! Ce n’est pas totalement vrai mais pas totalement faux non plus. Sa main quitte la mienne mais j’ai toujours l’impression de la sentir. Le silence de l’ascenseur est presque étouffant et le bâtiment est quitté toujours dans ce silence de mort. Je ne réfléchis pas et je dis, quelques secondes avant elle C’était la soirée la plus courte de l’histoire de la soirée. J’en ris légèrement, prêt à dire que je me suis préparée pour rien mais quand Jules se rapproche et réajuste ma veste de costume, je suis incapable de bouger, de dire quoi que ce soit. Elle m’hypnotise, la fausse blonde. Carrément. Ah oui ? Que je souffle, les bras ballants le long de mon corps, mon sourire qui s’agrandit un peu plus à chacun de ses gestes. Et mes mains finissent par se poser dans le creux de son dos. Je n’ai pas dis que je préférais dormir dans ton lit ? Un sourire carnassier prend possession de mes lèvres et j’exerce une pression dans son dos, la rapprochant de moi. J’accepte la proposition du canapé. Mais je te préviens, j’ai pris l’habitude de ne l’avoir que pour moi… Je souffle ces mots et glisse ma main sur sa chevelure blonde. J’espère que ce n’est pas trop bien attaché… Je lève les yeux vers sa perruque, à la recherche de la ligne qui me montrera que c’est du faux. Et je glisse l’index en dessous, découvrant sa couleur naturelle. Tu es beaucoup plus belle comme ça. Le blond c’est joli mais là, elle est carrément sexy.

Rien de tout cela n’était prévu, de sa rencontre avec Charles jusqu’à ce soir où elle était invitée à une soirée et où elle lui avait proposé de venir. Les entre-deux, c’était du bonus. Elle ne voulait rien prévoir Jules, ne pas s’attacher à quelque chose qui serait éphémère ou qui durerait plus longtemps que le temps d’une chanson. Elle ne voulait rien pas savoir de quoi le futur serait fait parce que ça enlèverait toute la magie de leur rencontre. Quelque chose d’imprévu, quelque chose de beau au fond. Elle ria un instant quand des souvenirs étaient évoqués et elle secouait la tête en levant les yeux au ciel « Je pourrais t’apprendre à danser. » Une promesse silencieuse de continuer à se voir malgré le fait qu’il n’était plus amené à venir à l’agence. Mais n’était-ce pas ce qu’elle était en train de faire? Le revoir sans raison valable, juste pour le plaisir de sentir son coeur qui s’affole un peu dans la cage thoracique. Mais elle ne voulait pas qu’on le remarque, elle préfèrait rester cachée et que ses pensées ne se remarquent pas alors c’était sûrement pour cela qu’elle avait envie de fuir si rapidement. Pour n’être plus qu’avec lui, égoïstement et que les mégères puissent parler comme bon leur semblait. Un signe à l’hôtesse de la soirée et les voilà parti. Jules ne sait quoi dire, ni même quoi faire, mais elle n’a pas envie de briser le silence pour dire des inepties, alors elle se contente de rire à la remarque de Charles, encore. A croire que le rire est facile quand on est en bonne compagnie. « Hm… » prononce t-elle tout en continuant ses gestes et un sourire en coin naît sur ses lèvres avant qu’elle ne se morde l’intérieur de la joue « Alors je t’ouvre volontiers mon lit. Mais dormir dans le canapé peut se révéler intéressant… Il a beau être grand, il faut se serrer pour dormir à deux. » Elle reste collée à Charles, là, dans la froideur New Yorkaise en fronçant un peu les sourcils face à sa remarque, ne comprenant pas forcément ce qu’il voulait insinuer. Et elle est libérée (délivrée) de sa perruque, ce qui lui fait émettre un soupir de soulagement, elle n’aurait sûrement pas tenu jusqu’à son appartement avec cette chose sur la tête. Quelle idée d’avoir eu l’envie de se glisser en une blonde platine alors que ses propres cheveux blonds auraient sûrement fait l’affaire pour un autre costume. Le céruléen de ses yeux qu’elle plonge dans le regard de Charles, elle se perd un instant, ses yeux qui dévient sur ses lèvres, elle se mord la lèvre avant de s’approcher de Charles lentement, et ses lèvres qu’elle dépose sur celles du blond, pour un baiser (trop) chaste, ses mains qui entourent le cou du blond qu’elle passe dans ses cheveux alors qu’elle reste là, à l’embrasser encore, comme si elle était accrochée à sa bouée de sauvetage avant de se reculer quand le souffle commence à lui manquer « On prend un taxi ? Ou tu veux marcher ? » Pas sûre qu’elle ait la patience d’attendre le long des trente minutes de marche mais s’il fallait ça pour garder l’esprit clair et discipliné, alors elle le ferait.

Je pense qu’il va sérieusement falloir que tu arrêtes de me dénigrer de la sorte jeune ingrate. Que je sors, ronchonnant comme le gamin que je peux être. Non, vraiment, on arrête les conneries tout de suite ! Je refuse de prendre parce qu’elle ne reconnaît pas mon talent. Je ne suis peut-être pas le meilleur danseur de la ville - je l’espère pour ceux qui en font leur métier - mais je m’en sors plutôt pas mal. Je sais bouger des hanches, c’est un point positif pour moi ! Et ça, je ne le crois pas, je le sais purement et simplement. Et tout cela, c’est aussi pour le show, pour la blague, pour la rigolade et le spectacle que nous offrons à ses amies. Aucun doute sur le fait que d’ici une demi-heure, elles seront toutes là à me complimenter sur ma danse qu’elles n’ont pourtant jamais vu. J’en souris, comme un idiot, et ne suis pas vraiment surpris quand Jules - bien qu’éclipsée du banc de requins par mes soins - décide qu’il faut y aller. Ce n’est pas plus mal. Moi qui suis un mâle habituée à avoir toute l’attention, je ne suis pas très fan de ce qu’il vient de se passer, je ne peux le nier. Le bout de viande, c’est quand j’ai envie de l’être que je le suis et non pas quand elles le décident. Pourtant, c’est toujours ce que j’ai fait à l’université et cela relève quelques soucis sur ma masculinité plus que toxique. Enfin, c’est une discussion pour un autre jour parce que celle que l’on entame avec Jules m’intéresse beaucoup plus. Je souris à ses mots et dis On verra ça plus tard alors. Parce que je ne vais pas déblatérer cent sept ans du lieu sur lequel je vais passer ma nuit alors que peut-être qu’on ne dormira pas du tout tous les deux. Pour sûr, je ne dormirais pas avec cette perruque platine qui lui rend les traits du visage bien plus anguleux et vicieux, chose que je n’aime pas spécialement. Elle l’est - Jules n’est pas un chaton, c’est un requin - mais il y a des limites et le ton pratique de la perruque ne me plaît pas. Je coince vulgairement cette dernière dans ma poche - elle en sort à moitié, c’est ridicule - et lorsqu’elle m’embrasse, je suis pris de court. Merde. Je ne m’y attendais pas. Absolument pas. Mais c’est agréable. Une chaleur parcourt mes veines et je l’écoute. En quelle langue parle-t-elle ? Il m’est terriblement difficilement de détacher mes yeux de ses lèvres et je finis par me ressaisir. Je ne sais pas Jules… Que je souffle doucement, tentant de me contrôler tant bien que mal. Tu habites loin ? J’en ai aucune idée pour être honnête. Enfin si mais d’ici, je ne sais plus trop me repérer. Ou c’est elle qui fait perdre le nord, oui c’est clairement ça. Et puis, t’as froid ? Dans sa combinaison. On est quand même en octobre et à New York. Je ne voudrais pas qu’elle attrape froid et sois clouée au lit plusieurs jours à cause de moi. Je lui apporterai de la soupe, promis juré. Mais pas de la faite maison, je n’ai pas cette option. Mais on a la nuit devant nous. Que je finis par dire, l’embrasser à la commissure des lèvres, prenant tout mon temps pour qu’elle me dise d’arrêter ou de continuer, de me décaler un peu et de l’embrasser réellement. Mais a-t-on vraiment envie de cela, comme ça ? J’en sais rien. J’ai envie de bien des choses depuis si longtemps que je ne sais plus.

Elle n'avait rien prévu de tout cela, pas même le fait qu'il la rejoindrait et pourtant, ce serait mentir que de dire que ça ne lui a pas fait plaisir. C'est le cas, elle ne s'attendait pas à avoir hâte qu'il la rejoigne ou même qu'il accepte de passer la soirée avec elle, mais il l'a fait et voilà que Jules ne sait plus comment se comporter, mais même si c'est le cas, elle sait qu'elle est en sécurité, elle lui fait confiance -peut-être ne devrait elle pas- et elle sait qu'il ne lui fera rien. Elle ne pouvait s'empêcher de rire en le regardant, les sourcils froncés, l'air amusé quand il râlait parce qu'elle était en train de le dénigrer, une main qu'elle balance au dessus de son épaule comme pour lui indiquer qu'elle s'en fichait et les voilà que quelques minutes plus tard, ils s'échappaient de cette soirée où elle avait l'impression d'être le spectacle de cette soirée, elle qui avait toujours dit qu'elle ne ramènerait personne lors de soirées de la sorte, la voilà qui abandonnait ses principes et qui s'en mordait les doigts. Elle acquiescait silencieusement, certaine que s'ils allaient chez elle, il franchirait certainement le point de non retour. Mais en avait-elle vraiment envie ? Ou était-ce une peur sourde qui se pointait dans le coeur ? Elle n'en savait rien. Et elle ne voulait pas savoir. Elle préférait foncer tête baissée, sans réfléchir, quand elle l'embrasse, quand elle prend les devants, on mettra ça sur le compte de l'alcool (ou pas) mais la chaleur qu'elle ressent au creux de son ventre, la chaleur qui irradie son corps quand leurs lèvres se scellent, elle ne peut pas nier l'effet qu'il lui fait. Peut-être qu'elle s'était leurré. Peut-être qu'elle avait espéré que ce ne soit que des chimères, qu'une passade, mais ça n'a rien d'une passade. Au contraire. C'est sûrement tout sauf une passade. « Non, je n'habite pas si loin. » Elle aurait pu marcher jusqu'ici mais elle n'avait pas prévu de cotôyer des gens à moitié ivre en pleine rue et de se faire enquiquiner par des types un peu trop alcoolisé. Elle secoua la tête à sa question, bien sûr que non, elle n'a pas froid. Ses mains autour de la nuque du policier, elle plonge son regard noisette dans celui du brun et elle s'humidifie les lèvres avant de murmurer « La nuit devant nous. » confirme t-elle avant de frissonner au contact des lèvres de Charles contre les siennes. Elle se recule alors un peu avant de demander d'une voix chaude « Embrasse moi » demande t-elle, comme si elle avait besoin de ça, ses yeux amusés qui cherchent ceux du policier, tandis que ses mains glissent finalement autour de sa taille pour qu'elle se colle un peu à lui, ses mains qui entourent la taille de Charles pour qu'elle se colle un maximum à lui « Ou alors, on peut toujours le prendre ce taxi, et rentrer. J'ai envie que tu sois à moi pour cette nuit. » Et pourquoi pas, les autres nuits aussi. Mais ça, seul l'avenir le leur dira.

Doucement mais sûrement, nous quittons cet appartement bruyant pour le calme de la rue. Et dehors, la fraîcheur du vent me prend de cours et je dois avouer que c’est étrange de se sentir aussi bien. Avec l’alcool ingurgité au cours de la soirée, je m’attendais à ce que ce retour dehors me fasse plus de mal que de bien mais force est de constater que ce n’est pas le cas. Souriant, bien heureux et presque un peu benêt, je lui demande si elle habite loin ou pas. Je suis capable de marcher mais je ne sais pas si j’ai envie de finir bleu pour autant. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il me faudrait un temps fou pour me réchauffer et je n’ai pas envie de passer une partie de la soirée assis devant son radiateur à me les geler. Le romantisme pourquoi pas mais nous sommes bien loin d’y être. Je ne sais même pas ce que ça va donner, que d’être avec elle chez elle. Va-t-on se sauter dessus ou rester civilisés ? J’en ai envie, de l’embrasser, terriblement. Mais je veux aussi que cela vienne d’elle, qu’elle nous guide selon ses envies et ce qu’elle veut bien faire ou non. Moi je suis partant mais je sais que ses histoires passées lui ont laissé des cicatrices toujours un peu ouvertes. Alors, je ne veux pas lui faire cela, lui faire ce mal. C’est quelque chose dont nous pourrons parler plus tard, si cela s’insère dans la conversation. Pour le moment, ce sont mes yeux dans les siens que je tente de me contrôler et de me répéter ces mots. Non, Charles, Jules n’est pas de celles que l’on plaque contre le poteau gelé parce qu’on est incapable de se retenir. Je voudrais que si ça se fasse, ce soit quelque chose de mémorable et pas à la version universitaire sauvageon. Je ne suis plus cet homme et les femmes, je ne les traite plus de la sorte - enfin, pas celles qui me plaisent. Et sa demande m’électrise complètement. Je la regarde, la bouche légèrement entrouverte, incapable de dire quoi que ce soit. Chacun de ses mots à l’effet d’une cartouche qui m’éclate sur le bras, dans le dos, sur les cuisses. La folie. De la folie. Moi qui voulait attendre son feu vert et bien… Je l’ai. Je déglutis difficilement et souffle Tout ce que tu veux Jules. Absolument tout. Mes lèvres sur les siennes, nous échangeons un doux baiser. Ce n’est pas fougueux, ce n’est pas incontrôlé, c’est une recherche, celles de deux paires de lèvres qui ont envie de se rencontrer, de se saluer. Mes mains dans son dos la rapproche à moi et lorsque je sens que mon corps réagit un petit peu trop, je me décale doucement. Je n’ai jamais été aussi respectueux - si ce n’est avec Jane - et c’est effrayant. Des bruits de pneus, je glisse ma main dans la sienne et l’embarque pour une marche rapide jusqu’à l’axe principal de circulation. Le bras en l’air, j’hèle un taxi et me tourne vers elle, l’attirant vers moi. T’es sûr de toi Jules ? Elle va avoir quelques minutes pour réfléchir. Mais une fois que la machine sera lancée, il sera bien plus difficile de l’arrêter - mais pas impossible. Par contre, il sera clairement impossible de faire comme si rien n’était arrivé. Tu pourras toujours changer d’avis mais je ne veux pas que tu te sentes forcée de quoi que ce soit. Et ce, avant même qu’on arrive chez elle. Si une fois devant le building, elle change d’avis, j’irai m’endormir sur ma béquille et c’est tout. Mais elle m’importe vraiment et tout comme Jane, je ne veux pas faire de mauvais choix, de trop mauvais choix.

Le silence pesant fait contraste avec la cacophonie qui était dans l'appartement et qui avait prit le pas sur son coeur, et dans son esprit. Jules ne savait plus réfléchir, elle n'arrivait plus à aligner un mot ou l'autre correctement, et elle n'avait pas envie de le faire. Et pourtant, les mots s'infiltrèrent dans l'air, elle ne s'entendit pas les prononcer, mais elle ne pouvait s'empêcher de se targuer d'un sourire en coin, c'est inédit, sage, docile. Elle ne s'en préoccupait pas, elle ne voulait pas penser à l'après, à ce qu'il allait certainement penser d'elle. Allait-il penser qu'elle avait tout planifier ? Qu'elle avait prévu son coup ? Allait-il se dire qu'elle était l'une de ses filles qui savait pertinemment ce qu'elle voulait au point d'être mesquine et manipulatrice. Elle laissait les pensées de côté en répondant à son baiser, ce qu'elle ne désirait pas, c'était d'aller trop vite. Mais à quel point iraient-ils trop vite alors qu'elle savait pertinemment ce qu'ils désiraient tout les deux ? Lorsqu'il prit la décision de s'éloigner, Jules resta interdite un instant avant de s'humidifier les lèvres comme si elle se réapprenait à respirer de nouveau. Elle entrelaça leurs mains, les liant comme pour ne plus jamais le perdre et elle le suivit jusqu'à l'artère principale avant de se coller à lui, quand il la rapprocha d'elle, comme si c'était une promesse silencieuse de ce qui allait se passer par la suite. Elle leva la tête en direction du visage de Charles et elle prononça, tentant de couvrir le bruit de la ville « Je pense que ça fait longtemps que je n'ai pas été aussi sûre de quelque chose. » d'une voix sincère. Pour le faire taire, pour qu'il arrête de dire des paroles qui semblerait sorti d'une comédie romantique, comme s'il était l'homme parfait, tout droit sorti d'un film de Noël, elle l'embrassa une nouvelle fois et elle lui murmura finalement au creux de l'oreille « Je ne veux pas changer d'avis. » Le taxi qui s'arrêta, elle entra dans l'habitacle, donna son adresse au type avant de se saisir de la main de Charles, pour entrelacer une nouvelle fois leur doigt, son regard qui se perdait sur leurs mains liées. Cela faisait bien longtemps qu'elle n'avait pas ressenti quelque chose d'aussi... intense ? Tout son corps n'avait de cesse de lui signifier avec ardeur ce qu'elle ressentait. Du sommet de son crâne à la pointe de ses pieds, passant par sa poitrine, son ventre et ses cuisses, tout brûlait de désir pour celui qu'elle n'avait pas eu le droit de regarder en premier lieu. Une fois arrivé devant l'immeuble, elle insista pour payer, balançant un billet bien trop important pour la course qu'ils avaient effectué, mais ça ferait sa soirée à ce pauvre type qui avait dû supporter toute cette tension dans l'habitacle exigu du taxi. La fraîcheur de la nuit la fit frissonner et elle se pressa d'entrer dans l'immeuble, attirant Charles à la hâte avant d'appuyer sur le bouton de l'ascenseur qui l'emmènerait directement à son penthouse. Elle s'approcha de lui, dans cette cage de fer étroite et elle embrassa d'abord sa clavicule, puis son cou, avant de glisser derrière son oreille pour parsemer sa peau de baiser avant de finir au creux de ses lèvres « Si tu changes d'avis, je ne t'en voudrais pas. » Après tout, tout était une question de consentement, elle ne voulait pas qu'il regrette, mais elle, elle était sûre de ce qu'elle voulait. Plus que jamais.