Les fêtes de Noël approchent à grands pas et si Malina ne veut pas être en retard dans ses achats, comme presque tous les ans en fait, elle doit se mettre à l’œuvre. C’est pour cette raison qu’elle avait proposé à sa sœur Leela qu’elles aillent courir les magasins en ce samedi chômé. Cian était occupé avec Maddi, ce qui laisserait tout le loisir à la coréenne pour vaquer à ses propres occupations, avant de les rejoindre au cinéma le soir. A moins qu’elle décommande pour faire une girl’s night avec Leela, ça restait encore à voir.

Vêtue d’une robe d’hiver et de collants chauds, la jeune femme s’est enroulée dans une large écharpe en laine et un manteau épais afin de ne pas tomber malade. Et au volant de sa voiture, elle finit par klaxonner un camion de déménagement qui barre la route depuis une bonne dizaine de minutes. La patience n’est pas son fort en temps normal mais si c’est pour qu’on lui reproche une fois de plus de ne pas être à l’heure… Oui, même pour du shopping, la ponctualité est primordiale ! Elle soupire fortement mais quelques minutes plus tard, la route de dégage enfin et elle peut poursuivre son chemin.

« Je suis en bas. » Envoie-t-elle comme message à sa sœur.

Garée en double file, car aucune place pour se garer, comme d’habitude. Vive New-York. Elle aurait dû prendre les transports en commun, ça aurait été plus simple, c’est sûr mais revenir avec les bras chargés de sacs dans le métro, autant dire que c’est un brin compliqué quand même. Apercevant Leela, elle lui fait un geste de la main, comme si c’était utile et déverrouille la portière, côté passager.

« Avant que tu ne dises quoi que ce soit, saches que ce n’est pas de ma faute ! Je suis partie il y a plus d’une demi-heure mais… le monde est contre moi. » Elle rit et fait une bise à sa sœur, heureuse de la revoir. « Tu as tout ? Carte bleue ? Téléphone ? Clé ? Tête ? » Sa tête, c’est souvent ce qu’elle oublie, elle.

Attendre sa grande sœur était devenue une compétition sportive autant physique que mentale. Tu avais fini par trouver des activités à faire pour l'attendre sans commencer à péter un plomb de tourner en rond, comme faire des boulettes de papiers avec les nombreux post-it que tu laissais pour tes colocataires lorsque tu étais absente et t'amusais à les lancer à l'autre bout de la pièce pour atteindre la corbeille de papier. Les 3/4 terminés dans la poubelle, les autres autour. Puis quand ce petit jeu finissait par te lasser, tu t'amusais à faire une pyramide avec les fruits se trouvant dans la cuisine. Généralement elle arrivait à ce moment là, mais si ta pyramide était complète, tu finissais par envoyer un message à ta sœur en la rouspétant pour son retard. Aujourd'hui, elle a fait un effort, en arrivant même avant le début de ta pyramide. Vêtue d'un pull coll roulé blanc et d'un simple pantalon noir, tu attrapes ta veste ainsi qu'un bonnet que tu enfonces sur ta tête avant de sortir de ton appartement après avoir lu son sms te disant qu'elle se trouve en bas. Rapidement en bas, tu remarques ta sœur dans sa voiture te faisant de grand signe de main. Tu ris en la voyant, comme si tu n'allais pas la reconnaître. Une fois dans la voiture, tu es prête à lui faire remarquer son retard, mais elle te devance en disant qu'elle est parti à l'heure de chez elle, mais c'est le monde qui est contre elle. Tu ne peux t'empêcher de lever les yeux au ciel en riant à cause de ses propos. « Pauvre Malina, le monde s'acharne contre elle. Bouh bouh bouh » tu mimes quelqu'un en train de pleurer, mais tu n'arrives pas à rester sérieuse très longtemps, avant de rire aux éclats. Tu finis quand même par faire la bise à ta sœur avant qu'elle ne te demande si tu n'as rien oublié. Tu préfères vérifier, parce que tu te moques de ta sœur, mais niveau tête en l'air, tu y tiens la première place. Une fois le contenu de ton sac passé au peigne fin, tu souris, presque triomphante. « Et non, tu vois, je n'ai rien oublié cette fois. » T'es plutôt fière de toi pour le coup. Malina démarre enfin la voiture, tu regardes sors alors ton téléphone et te rend dans tes notes. « Bon j'ai une idée de cadeau pour papa, j'ai passé la moitié de la nuit à y réfléchir, j'en ai attrapé un mal de tête. » C'est toujours comme ça avec toi, faut toujours que tu réfléchisses trop sur des sujets qui ne méritent pas autant de préoccupation. « Tu connais papa, il ne commence pas la journée s'il ne boit pas ses deux tasses de café minimum. J'ai vu une magnifique cafetière italienne où tu mets des vrais grains de café et qui moud les grains elle-même … Bon par contre elle est quand même à 800 dollars ... » Tu n'es pas radine, à vrai dire tu gagnes même plutôt bien ta vie même si tu n'es pas encore totalement chirurgienne, mais se sont tes parents qui vont plutôt t'en vouloir d'acheter une machine à café à un tel prix. Tu fais la moue. « Tu penses que c'est une bonne idée ou je vais me faire taper sur les doigt ? » L'avis de ta sœur est primordiale sur la question,

En d’autres circonstances, Malina aurait sans doute laissé agir son franc parlé face à un tel affront mais le tout venant de sa sœur, et sachant pertinemment qu’elle saura lui rendre la monnaie de sa pièce plus tard - aussi tendrement que possible, cela va de soi – la jeune femme se contente de rouler des yeux dans un sourire amusé. On lui a souvent dit qu’elle a le don de jouer les victimes, sans que ça ne soit fait dans une mauvaise intention, et ce trait de sa personnalité s’est d’autant plus accentué depuis qu’elle prend des cours de théâtre. Non pas que la coréenne soit une actrice hors pair mais pour jouer les dramaturges, ou faire une scéne spectaculaire quand il faut se sortir du pétrin, on peut toujours compter sur elle !

Voir sa sœur qui vérifie son sac avant de lui répondre la fait rire. Pour le coté tête en l’air, elles ont beau avoir été adoptée l’une comme l’autre, elles ont tout hérité de leur mère. Rapidement, Malina reprend la route en direction du centre commercial, et Leela en profite pour parler cadeau pour leur père. Une cafetière italienne. L’idée de base emballe la coréenne immédiatement. « Depuis le temps qu’il nous bassine avec les cafés qu’il a bu lors de son voyage en Italie… » Elle hausse les sourcils. Ils en entendent parler pas toutes les semaines mais presque… « Mais 800 €… Ouais, j’ai peur qu’il tique… » Son visage se referme dans une moue quelques instants. « Je le vois déjà nous faire la blague tous les jours du ‘c’est un café plein d’or, j’dois le déguster’. » Quelque chose qui énerverait sans aucun doute Mme Bridges. « Et on ne veut pas être la cause de divorce de nos parents ! Après 40 ans de mariage, ça serait quand même dommage ! » Malina se met à rire. Puis, elle reprend plus sérieusement : « Tu es sûre qu’il n’y en a pas des moins chères ? Ou sinon, on peut faire en cadeau commun, il tiquera moins. » Les moyens financiers des deux femmes sont assez similaires, ayant toutes deux de bonnes places, en plus de faire des métiers qu’elles aiment. Donc l’argent n’est pas le problème dans ce choix cornélien.

Excuse-moi pour le délai de réponse. Avec Noël, j'ai eu comme un passage à vide :(