dernière pilule avalée il y a cinq heures. les effets se dissipent et sa conscience le rattrape. les pas qu’il entend se rapprocher de sa chambre. il tente de rassembler le peu de rationalité qu’il lui reste, sa mâchoire crispée et son pouls irrégulier lorsqu’il entend la serrure se crocheter. romeo, dans sa prison dorée. romeo, prisonnier de son propre foyer. son père qui ne lui adresse la parole que pour des formalités. ne s’intéressant en rien à sa vie, ses centres d’intérêt, simplement intéressé par sa scolarité, sa réussite inéluctable qu’il lui disait, de sa voix pleine de reproches, dépourvu d’amour, voyant en son fils qu’un tremplin financier. romeo, il subissait, se réfugiant dans son paradis perdu, parce qu’il ne parvenait à exprimer cette détresse émotionnelle auprès de ceux qui comptaient pour lui. parce qu’ils ne pourraient pas comprendre, il se disait, pour se rassurer. parce qu’en réalité, romeo, il avait simplement choisi la facilité.

les pupilles dilatées, ce besoin irrépressible d’être anesthésié pour supporter cette douleur qu’il dissimule sous des sourires enjôleurs, des blagues toujours bien placées. romeo, il sait mentir à son entourage. sa mère, la première. celle qui ne voit rien, et qui pourtant, tente de rattraper ses années d’absence durant lesquelles son fils est parti. elle n’avait jamais compris les choix de son fils, elle qui aurait offert un mode de vie plus sain que son ex-mari, elle qui lui aurait offert luxe et amour. elle, qui était aveuglée par sa naïveté, sans se rendre compte que son fils y avait été contraint. elle qui voyait du bon en chaque être humain, y compris en son ex-mari, en dépit des années tumultueuses qu’elle avait traversées à cause de lui. romeo, qui peinait à se reconstruire. souvent absent, il tentait de ne rien montrer, prétextant la fatigue dû au rythme universitaire soutenu. des mensonges que tous avalaient, parce que romeo, il excellait dans l’art de manipuler les autres.

un art qu’il avait exploité auprès de la gente féminine. son histoire qui l’empêchait de s’adonner dans des relations. cette peur de retracer le même schéma que ses parents, cette peur d’être trahi, abandonné. alors, romeo, il se contente de voler de coeur en coeur. ne s’attache pas, préférant l’éphémère au bonheur sincère.