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(Leonah) Can i help you ?

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Sam 11 Jan - 17:28
can I help you ?
« Tu ne peux pas faire ça ! », lui disait sa mère, tous les jours au téléphone. « Regarde moi ! », répondait Hannah avec défi, avant de raccrocher. Si son père ne lui adressait plus la parole depuis qu'elle avait publiquement révélé sa sexualité, sa mère l'appelait en secret, essayant de la raisonner, de réfléchir à une ''solution'', comme si c'était un problème qu'il fallait régler. Hannah évitait les longs débats avec elle. Elle n'en voulait pas à sa mère. Pas vraiment. Elle avait toujours été une suiveuse. Une bonne catholique, une bonne épouse. Elle ne pouvait pas aller à l'encontre des désirs de son mari, parce que ce ne serait pas être une bonne épouse, une bonne chrétienne. Prisonnière d'une éducation qui l'avait transformé en objet pour un homme qui méprisait ce qui était différent de lui. Hannah était surtout triste pour elle.

Mais elle était en colère aussi. Contre sa famille, contre son univers tout entier. En colère d'avoir dû se cacher jusqu'à ce qu'il soit trop tard. En colère contre elle-même, pour les avoir laissés faire ça. Pour avoir fait que l'amour de sa vie était morte, pensant qu'elle n'était pas assez importante pour qu'Hannah l'affiche devant tout le monde. C'était faux et elle avait eu beau le dire encore et encore, elle avait toujours caché son amoureuse, ses gestes ne correspondant jamais à ses mots... Maintenant, c'était trop tard et Hannah avait en elle une colère sans fin contre elle-même et contre tout ce qui avait fait celle qui était morte quand sa fiancée avait lâché son dernier souffle.

Poussant la porte d'un bâtiment qu'elle savait appartenir à l'association Act Up, la brune replaça son bonnet sur sa tête, sa lourde écharpe autour du cou lui permettant de cacher une autre partie de son visage. Elle essayait d'être discrète. Pas parce qu'elle avait honte d'être ici, loin de là, mais parce qu'elle ne voulait pas être reconnue trop tôt. Elle avait une image publique (écornée récemment pour certains, enfin digne de ce nom pour d'autres) et elle ne savait pas si Act Up voudrait y être associé. Alors en attendant de discuter avec les bonnes personnes et de mettre en place une stratégie commune, Hannah ne voulait pas qu'on parle de sa visite dans les médias.

Elle annonça malgré tout son identité et la raison de sa présence à l'accueil et elle fut invité à patienter dans la salle d'attente. Assise un peu à l'écart d'un couple d'homme qui se parlait à voix basse, le nez dans son écharpe, la brune attendait donc patiemment, lisant divers prospectus sur le VIH et les actions de l'association.

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Sam 11 Jan - 19:18
« On ne pourrait pas organiser une soirée de collecte ? Type gala de charité ? »

« Tu vois vraiment tout le beau monde mettre un costume pour récolter des fonds pour les séropos ? Surtout après la manif’ … »

Assis face au comptable de l’association, Leone laissa échapper un soupir qui fit écho à celui du brave homme qui tentait vainement de colmater les trous de leur trésorerie depuis que plusieurs donateurs s’étaient retirés suite aux actions de leurs militants durant l’échauffourée autour du Miranda Heights. En soi, ce n’était ni la première, ni la dernière fois que ce genre de choses arrivait, car c’était dans l’ADN d’Act Up d’être au cœur de la mêlée. Cependant, il fallait admettre qu’à présent qu’il occupait une position autre que celle du simple bénévole combattif, et qu’il avait donc le nez dans les stocks de matériel, l’italien devait admettre qu’il comprenait mieux les soucis de leur pôle comptabilité. Et vu la situation politique, il ne fallait pas trop compter sur une augmentation des fonds fédéraux. Peut-être voir auprès de la mairie ? Quoique, après tout, c’était bien elle qui avait accepté l’installation de Netflix dans ces locaux, et elle n’avait peut-être pas apprécié leur participation à cette manifestation non autorisée. Bon sang, toutes ces complications lui donnaient de vrais nœuds au cerveau, et il avait l’impression que cela se répétait chaque semaine, que ce soit ici, au Planned Parenthood qui souffrait des coupes ordonnées par le gouvernement, ou encore à El Halito quand il y passait, car ce n’était pas un secret que Jan faisait tourner son petit édifice avec des bouts de chandelle. A croire que c’était là la destinée du milieu associatif, que de compter chaque sou. Posant une main encourageante sur l’épaule du comptable, Leone prit congé, promettant de chercher des solutions à proposer lors de la prochaine assemblée générale. Il se dirigea vers la petite salle commune et se servit un verre d’eau, le cerveau en ébullition. Peut-être qu’il devrait envoyer un SMS à ses amis pour qu’ils essayent de réfléchir en commun ? On était meilleur à plusieurs que seul, après tout. L’homme fut tiré de ses pensées plus tôt qu’il ne l’avait escompté, puisqu’on l’appelait à l’accueil.

C’est ainsi qu’il se trouva face à une jeune femme emmitouflée dans une écharpe proéminente. Elle tranchait avec le profil de la plupart des visiteurs du centre, ne serait-ce que parce qu’elle était une femme, et que la grande majorité des personnes se rendant dans les locaux d’Act Up se trouvaient être des hommes. Cela tenait tant aux origines de l’association qu’à l’épidémiologie du VIH, bien sûr, néanmoins, il avait beaucoup poussé depuis les débuts de sa résidence en gynécologie-obstétrique pour orienter certaines de leurs actions vers les femmes, en produisant des visuels leur étant spécifiquement destinés et en organisant une permanence genrée tous les lundis soirs, qu’il tenait la plupart du temps. Evidemment, les problématiques étaient à la fois similaires et différentes, et il y avait la formation à organiser, et tout ce qui allait avec. Autant dire qu’il était curieux, d’autant plus que le standard n’avait pas été dissert sur les raisons de sa présence. S’avançant jusqu’à elle, il déclara à voix feutrée :

« Madame … Decker c’est bien cela ? Vous vouliez voir quelqu’un de l’association ? Leone Castelli, je m’occupe du pôle médical d’Act Up. Nous pouvons aller dans un bureau, si vous voulez bien me suivre ? »

Il l’invita à le suivre, la fit entrer dans son bureau, précisément et lui indiqua une chaise avant de s’asseoir lui-même en face.

« Que pouvons-nous pour vous ? »

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Jeu 30 Jan - 23:57
can I help you ?
Quand on l'appela enfin, la brune se leva, serrant la main du ''responsable du pôle médical''. « Enchanté, monsieur Castellli », souffla la brune avant de le suivre dans un endroit plus privé pour discuter avec lui. Le simple fait de prononcer son nom dans la salle d'attente avait fait lever quelques têtes, elle l'avait bien remarqué. Decker n'était pas un nom de famille très apprécié dans la communauté gay. Sa récente sortie du placard et les prémices de ce qu'elle voulait faire pour la communauté le lui avait montré. Les gens étaient très frileux de voir une Decker parler des personnes queer. Il allait falloir du temps pour que son nom soit associé à elle-même et à ses convictions et pas à son père.

Elle s'installa sur la chaise qu'il lui avait présenté, ôtant son écharpe et son manteau pour être plus à l'aise et une fois assis l'un en face de l'autre, le jeune homme lui demanda ce que l'association pouvait faire pour elle. Elle sourit doucement, se redressant un peu. « En fait, la question, monsieur Castelli, est ''qu'est-ce que JE peux faire pour vous ?'' » Elle se racla un peu la gorge, avant de poursuivre. « Je ne sais pas ce que vous connaissez de moi, alors je vais essayer de faire un bref résumé. Je suis la fille du procureur général de l'état de New York et oui, c'est un républicain convaincu, conservateur et officiellement plutôt sensible sur la question de l'homosexualité... Soyons honnête, moi je dirais qu'il est carrément homophobe ! » Elle balaya le terme d'un geste de la main. Elle en avait terminé de prendre des gants avec sa famille ou avec qui que ce soit, d'ailleurs. « Quoi qu'il en soit, manque de chance pour lui, son unique filles est complètement lesbienne et après des années à me conformer aux désirs familiaux, j'en ai eu assez et j'ai annoncé publiquement ma véritable orientation sexuelle, il y a quelques semaines. Depuis, c'est un battage médiatique. Tout le monde veut ma version de l'histoire. Les médias s'arrachent la primeur d'une interview, de reportages et j'en passe. » Elle soupira. Elle trouvait cela tellement ridicule. « Sérieusement, qui s'intéresse vraiment de savoir qui je mets dans mon lit ? Bref ! Quoi qu'il en soit, ma parole intéresse et on me propose de grandes émissions, des heures de grandes écoutes... Alors je me suis dit que je devais utiliser cela à mon avantage... Enfin plutôt, à l'avantage d'associations qui en ont réellement besoin. Ma petite vie ne regarde personne, mais ce que vous faites à Act Up et ce qu'on pourrait faire ensemble pour aider les nôtres, ça, ça c'est intéressant ! »

Le discours avait été passionné, pour un œil averti, empli d'un certain feu rageur aussi, mais Hannah avait l'art et la manière de parler, la politique dans le sang, même si elle avait fait tout autre chose de sa vie. « Alors, je sais que vous associer avec la fille d'un politicien ouvertement contre notre communauté peut faire peur et qu'il y aura assurément de la mauvaise presse aussi... Mais je crois qu'Act Up est habitué à la mauvaise presse et que sur le principe, l'important est qu'on mette en place des actions concrètes et que ça se sache. Qu'au bout du compte, on puisse aider autant de gens que possibles. Qu'est-ce que vous en dites, monsieur Castelli ? »

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Lun 10 Fév - 18:12
Il y avait deux catégories de personnes qui franchissaient la porte de ce bureau : celles qui avaient un besoin viscéral de parler, et celles à qui il fallait pratiquement tirer les vers du nez. Manifestement, Hannah Decker appartenait à la première, vu son débit depuis qu’elle s’était assise. Non pas que cela dérange Leone : d’abord, objectivement, il gagnait du temps, et ensuite, il appréciait toujours d’avoir quelqu’un de décidé en face de lui, qui voulait apporter sa pierre à leur édifice parfois un peu branlant, mais toujours solidement arc-bouté à ses convictions. Bien sûr, maintenant qu’il l’avait en face de lui, et qu’elle s’expliquait, il associait le nom avec celui du procureur. Peu apprécié ici, et pas uniquement pour ses positions sociétales conservatrices : l’homme, dans une volonté de démontrer sa poigne, avait mis en place une politique au niveau de son bureau qui avait certes conduit à une augmentation des affaires gagnées par le représentant de l’Etat, mais qui s’était faite au détriment des minorités, et qui faisait un peu trop l’impasse sur la délinquance en col blanc. Bref, de manière générale, ce n’était en effet pas un nom associé en premier lieu à Act Up. Ou du moins, pas vraiment de cette façon.

Ainsi donc, sa fille unique était lesbienne. Ironique. Le destin avait parfois ses amusements. Ah oui, il se souvenait des manchettes dans les journaux et des commentaires sur les réseaux sociaux. Tiens, la comm’ n’avait pas RT certains messages à ce propos ? Si, il était presque certain de les avoir vu passer sur leur fil. Cependant, il avait encore du mal à voir où elle voulait en venir, et suivit donc avec attention le reste du développement. Manifestement, elle voulait mettre à profit la couverture médiatique de cet événement pour mettre en lumière certaines associations. Evidemment, il y avait tout à gagner à cela. Honnêtement, les accusations de récupération viendraient de milieux avec lesquels ils n’avaient pas franchement de très bonnes relations, donc ils s’en moquaient. Et pour le reste, avec un bon plan de communication ciblé sur quelques actions choisies avec soin … Il y avait une possibilité d’avoir une bonne exposition, et donc d’attirer quelques investisseurs échaudés par les problèmes liés à leur précédente manifestation. Même s’il faudrait faire du « damage-control » à ce propos, et préparer la jeune femme aux questions qui ne manqueraient pas d’arriver là-dessus. Et aussi, évidemment, cadrer les interventions de la jeune femme, vérifier que les valeurs en commun étaient là, au-delà des intentions – c’était toujours mieux, et aussi pour elle, qu’elle ne regrette pas ses choix. Quand elle eut fini, il prit donc la parole, un léger sourire aux lèvres :

« Non, en effet, nous n’avons pas peur de la mauvaise presse. Généralement, elle nous trouve sans trop de mal … et il arrive que nous la cherchions aussi. La question, c’est plutôt de savoir si vous êtes prêtes à la subir.

Qui vous avez dans votre lit, c’est privé. Mais le privé est politique, du moins, on peut en faire une arme de revendication. Ce qui semble être votre ligne de conduite, et qui est, pour beaucoup d’entre nous ici, la nôtre.

Mais je préfère vous prévenir : cela pourra affecter votre travail. Nous ne sommes pas une association consensuelle, et n’entendons pas l’être.

Et ensuite … Act Up est davantage tourné, malgré mes efforts personnels pour attirer un public plus féminin qui en a besoin, vers les hommes, pour des raisons historiques, et épidémiologiques. Et les femmes qui poussent notre porte sont presque exclusivement hétérosexuelles – même si ce n’est pas le cas de toutes nos militantes. »

Cherchant ses mots, l’homme fit une pause, avant de poursuivre :

« Donc … Il faut voir quelles actions vous intéressent ? Travailler sur des ateliers pour la santé sexuelle des femmes qui aiment les femmes ? Là, je dois avouer que ça m’intéresserait beaucoup, on manque de matériel et d’animatrices.

Ou simplement, être bénévole auprès de nous, et mettre en lumière cela ? »


Il la regarda doucement, avant de reprendre :

« Au fond, pourquoi Act Up ? Je ne vous demande pas pourquoi vous. Je l’ai bien compris, et chacun vient ici avec son histoire, ses motivations, parfois ses doutes ou ses résolutions. C’est juste … vous avez une chance de faire entendre une voix. Et il y a tant de projets à porter.

Je m’en voudrais d’utiliser une place qui pourrait être utile à d’autres … même si nous serions loin d’être contre une exposition médiatique plus positive pour faire connaître nos activités. »


Et attirer des investisseurs.

« En tout cas … à titre personnel, je trouve cela courageux, ce que vous faites. S’exposer, ce n’est jamais évident. Vouloir en profiter pour aider, c’est bien. Mais tout le monde n’a pas cette capacité à le faire. Pour d’excellentes raisons. Cela n’empêche pas … d’apprécier à sa juste valeur un tel acte. »

@ Invité

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Mar 10 Mar - 10:50
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Hannah savait que dans sa communauté, elle n'avait pas l'unanimité. Elle avait passé des année, toute une vie, à taire son homosexualité et ses positions sur la diversité. Une nécessité pour sa tranquillité qui avait volé en éclats et lui avait fait prendre un virage à 180° sur ses positions et sur sa façon de parler d'elle, de ses croyances et des choses qu'elle voulait défendre. Des causes qui étaient les siennes. Seulement, le monde n'oubliait pas. Elle n'oubliait pas les années de silence et les gens n'oubliaient pas leur aversion pour celle qu'ils avaient longtemps pensée hétérosexuelle et conservatrice.

Aujourd'hui, la jeune femme voulait se battre pour les siens, pour les femmes cachées comme elle et elle y mettait tout son cœur et toute son énergie, mais la première étape pour y parvenir était de créer la confiance dans la communauté. Elle avait besoin de temps, pour se faire accepter... pour qu'on la croie, tout simplement et pour prouver que ses intentions étaient réelles et louables. Qu'elle n'était pas partie dans un quelconque délire rebelle contre son père. On l'accusait de ça. De vouloir se défaire de son père et donc de prétendre être tout ce qu'il détestait, juste pour s'en libérer. C'était idiot, stupide. Son père ne lui adressait plus la parole et elle s'en foutait... Mais elle savait que les gens n'étaient pas dans sa tête, pas même dans sa vie pour la grande majorité. Ils avaient besoin de temps pour croire qu'elle disait la vérité et qu'elle n'allait pas subitement retrouver la « raison » et « redevenir » hétérosexuelle... Comme si elle l'avait été un jour... Comme ci c'était même les pires choses qu'elle avait pu entendre sur son compte ces dernières semaines.

Hannah avait été confrontée à l'inquiétude et au rejet lors de ses premières démarches. Les gens ne voulaient pas être associés à elle. Ils ne voulaient pas prendre le risque. Mais elle tenait bon, parce qu'elle voulait se battre pour ceux et celles qui, comme elle, ressentait l'interdit d'être eux-mêmes. Mais alors qu'elle le prévenait des problèmes que causerait une association avec elle, ce fut à son tour à lui de la prévenir des dangers d'une association avec Act Up et sur les différences entre le combat qu'elle voulait mener et celui que menait réellement l'association.

« Je pourrais vous dire que je me fous des conséquences... mais ça serait comme planter sa tête dans le sable », concéda-t-elle, aillant conscience de ce que cela impliquait. Elle avait vécu dans un monde terriblement fermé à la différence. Un monde élitiste, empli de croyances sur l'étranger, sur la sexualité ''déviante'', sur toutes ses choses auxquelles elle n'adhérait pas une seule seconde. « La vérité c'est que j'en ai marre de me taire, marre de faire ce que tout le monde veut que je fasse pour être la bonne petite fille. J'ai envie de faire des choses pour moi, aujourd'hui et pour ceux et celles qui sont comme moi. » Un petit sourire s'étira sur les lèvres roses de la brune. « Et puis, il faut savoir initier les changements qu'on souhaite, non ? Ne le prenez pas mal, mais vous êtes le cœur de cible d'Act Up. Un homme homosexuel. Difficile de convaincre des femmes de vous suivre si l'image reste totalement masculine. Vous entourez de figures féminines ! C'est ça qui vous ouvrira des portes vers le public féminin. »

Elle ne cherchait pas spécialement à dire qu'il fallait qu'il la prenne pour ce genre de mission, juste qu'elle était la candidate idéale et que s'il voulait vraiment attirer un public homosexuel féminin, il lui fallait trouver une figure de proue comme elle. « Je prendrais tout travail que vous souhaitez me confier. Ma pseudo-célébrité, bien évidemment et tout ce que j'ai. J'ai toujours su que j'étais homosexuelle, mais je devais le cacher. Je l'ai caché pendant toute ma vie. J'ai caché la femme de ma vie... » Sa voix vacilla pour la première fois. « Je ne veux plus jamais que cela arrive à quelqu'un. Je veux que tous les nôtres puissent trouver un endroit sécurisant, pour s'exprimer, pour trouver de l'aide, du soutien, des amis qui les épauleront dans les épreuves. Qu'ils trouvent un espace pour parler d'amour, de sexe, de santé, tout ce que mon père et ses partisans souhaitent offrir aux bons cisgenres hétérosexuels blancs et refuse aux autres. »

Elle se redressa un peu, réfléchissant à la manière d'amener pourquoi Act Up. La rage de vaincre, de nouveau. Le besoin de donner une utilité à toute cette souffrance enfouie sous la colère.

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Ven 24 Avr - 23:31
« N’oubliez pas séropositif. Je suis une vraie tête d’affiche. »

Le commentaire, lâché presque distraitement, était certes une plaisanterie, mais pas entièrement innocente. Leone aimait parfois l’annoncer de la sorte, pour jauger la réaction de ses interlocuteurs, sur leur capacité à faire face réellement, après lui avoir serré la main et consort, à leurs préjugés, voir leur réaction instinctive, parfois de malaise, il l’avait bien remarqué, et aussi pour tout simplement tester l’esprit Act Up de la personne en face. Beaucoup de militants avaient, un peu à l’ancienne parfois, un humour corrosif, et avaient appris à regarder en face certaines réalités, et à s’en moquer. Cela dit, il notait quelque chose qui revenait souvent : pour à peu près tout le monde, il était le prototype du militant Act Up essentiellement par sa sexualité, alors que cette dernière n’était que totalement incidente dans son engagement. Bien sûr, cela avait contribué à le rendre encore plus actif dans l’association, compte tenu du fait qu’il avait envie d’aider les membres de sa communauté … sauf que sa communauté première, ce n’était pas celle des hommes gays, mais bien celle des personnes séropositives. Lui avait connu ce mot avant même de savoir vers qui se portait ses intérêts. Au sein d’Act Up, il était d’abord séropositif, ensuite médecin, et enfin homosexuel, oui. Incidemment, presque, et pourtant, il avait conscience que, sans savoir son histoire, c’était l’essentiel de ce que l’on retenait, de ce qu’il projetait comme image : celle d’un gay blanc et plutôt aisé qui se mettait au service d’une association pour son propre public. Alors qu’avant tout, il avait été ce môme séropositif italien et aux vêtements de seconde main qui était là parce qu’il avait eu la chance de ne pas crever, comme ceux dont les portraits ornaient les murs de l’association. Mais cela, il n’allait pas le dire. A la place, il se contenta de sourire, toujours avenant et de demander :

« Et vous, vous arriveriez à parler à un public de femmes hétérosexuelles ? Parce que c’est de ça que nous parlons, majoritairement, ne nous y trompons pas.

J’ai des idées, comme je vous l’ai dit, d’ateliers au niveau de la prévention des IST entre femmes, avec par exemple fabrication de digues dentaires, les règles de base du safer sex … je dois avoir les derniers visuels que j’ai fait là … voilà.
Mais après, pour un travail plus quotidien ici … Je ne vais pas vous mentir. Vous aurez pour beaucoup des femmes qui ont des relations avec des hommes.

Cela dit, un tel atelier serait déjà bien. Avec peut-être une campagne. J’avais produit quelques montages pour les réseaux sociaux à l’occasion du Lesbian Visibility Day, c’est dans quelques semaines, donc on pourrait faire préparer des choses. Peut-être en relation avec votre interview ? »


Ça y est, l’esprit de Leone s’échauffait. Il avait commencé pour prévenir gentiment, et s’était trouvé presque malgré lui emporté par l’enthousiasme. C’était qu’il avait toujours des idées pour améliorer le pôle médical en termes de communication, pour toucher de nouveaux publics, aidé aussi bien par sa très longue expérience à Act Up que par son métier. Sans doute parce qu’il était un homme homosexuel, et en même temps un militant séropositif et gynécologue. A l’intersection de beaucoup de choses, du moins suffisamment pour observer et proposer. Evidemment, néanmoins, animer un atelier sur les digues dentaires à destination des femmes en tant qu’homme gay, ce n’était pas franchement évident. La présence d’Hannah Decker serait donc fort utile. Il allait pouvoir les ressortir, ces prospectus adorés. Mais il avait envie d’aller plus loin. Le discours de la jeune femme réveillait sa propre hargne. Elle voulait plus ? Oh, elle allait avoir plus. Bien que désormais plus calme, Leone n’avait pas oublié ses années de militantisme plus actif, et donc moins consensuel. On aimait les actions coup de poing chez Act Up. A nouveau, il se perdit dans les méandres des tiroirs de son bureau, et en ressortit un T-shirt de l’association avec son visuel classique, et la phrase « Homophobes = Assassins. » Très, très classique, vraiment. Mais si Hannah Decker voulait torpiller la carrière de son paternel, qui était-il pour ne pas lui donner un coup de main. Les élections pour le poste de procureur allaient approcher. Autant y aller à fond.

« Pour votre interview. Je pense que ça vous ira à ravir. Et surtout, les journalistes vont adorer vous poser des questions.

Je peux même organiser une manifestation en parallèle devant les bureaux du procureur. Avec caméras, et reportages pendant cette dernière.

Vous allez probablement faire perdre à votre père des soutiens. Et montrer aussi en direct notre message. »

Des gosses dans le placard qui regarderaient, ou entendraient parler, il y en aurait. Bon, il fallait faire cela proprement. Mais sincèrement, avec quelques contacts … Déjà, tout le plan se montait dans sa tête. La cellule communication allait adorer ! Et ça redorerait leur blason après les manifestations du Miranda Heights. Cela dit, ce n’était pas uniquement pour cela qu’il proposait, même si, évidemment, il était intéressé et n’avait pas fait semblant de le cacher.

« Je ne peux pas parler pour votre compagne. Mais je peux vous parler d’un petit garçon qui a grandi avec les gens d’Act Up, l’un des seuls endroits où être séropositif, c’est normal. Et qui plus tard, quand il a compris qu’il aimait les garçons, a trouvé des personnes comme lui à qui parler, et qui l’ont aidé à devenir la personne qu’il est.

On a tous besoin de savoir qu’il y a dehors, des gens qui nous aimeront quoi qu’il arrive. Quoi que l’on soit. Ici, on vous aimera pour qui vous êtes. Alors … peut-être que le dire en prime time, ça aura du sens pour ceux qui sont restés au bord du chemin. »

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