16 ans et toute la vie devant eux. Alors que la journée ne fait que commencer, son sac à dos bien rempli sur le dos, en bon élève qu’il est – on y croit – Nell se faufile dans le gymnase du lycée, avant de descendre au sous-sol où est la piscine. Il a reçu un sms la veille au soir d’une fille de sa classe, amie qu’il apprécie, Isobel, lui disant de le retrouver là. D’aussi bon matin, il n’y a absolument personne et Nell fait attention à ne pas se faire repérer sur le chemin, car il ne faudrait pas qu’il se prenne des heures de colle par ses profs pour ne pas être là où il faut. Braver l’interdit ne lui a jamais fait peur, surtout quand c’est pour une jolie fille ; mais Nell n’a jamais été fan des surprises, qui ont tendance à toujours mal se dérouler en sa présence.

Arrivé au bord de l’eau, il inspecte les alentours. « Isobel ? » Il lance, ne voyant personne, mais pas trop fort au cas où un professeur se cacherait non loin. « Isobel ? »  Ce n’est qu’après quelques instants qu’il voit enfin apparaitre la demoiselle. « Ca va ? » demande-t-il, n’ayant qu’une envie : savoir ce qu’il fait ici à cette heure.

Izzy ne sait pas vraiment quoi faire, puis surtout, elle est sûre qu'il dira non. Alors hier soir, pour se changer les idées, elle a dansé jusqu'à une heure avancée de la nuit, si bien que ce matin, elle a failli loupé son réveil. Elle s'est coiffé, a enfilé une paire de collants colorés et puis elle a couru jusqu'au lycée, sa besace sur l'épaule. Un coup à droite, un coup à gauche, personne. Elle se faufile jusque la piscine et elle voit Nell de dos, ses mains forment deux poings et elle les décrispe en avançant. Elle pose sa besace sur le gradin en face du bassin et elle se rapproche de lui « Oui ça va, enfin je pense que ça va comme ça devrait aller. » Elle n'est qu'à quelques mètres de lui et elle reste là, sans bouger avant de murmurer « je voudrais savoir si tu voudrais bien aller au bal avec moi. » qu'elle prononce d'une petite voix fluette. Puis elle se rend compte qu'il ne l'entend pas. Alors elle se rapproche de lui, mais c'était sans compter la flaque d'eau, qu'elle n'avait pas vu et ces chaussures qui sont trop plates, trop lisses font qu'elle glisse et au lieu de se rattraper à Nell, elle pousse Nell dans l'eau. Ses yeux se font comme deux billes et elle pose une main sur sa bouche. Elle regarde alors à droite, à gauche et elle crie« NELL L'ECHELLE ! » Mais elle reste sur le bord et s'accroupit pour lui tendre la main, qu'il la récupère, même si elle se dit que ce n'est pas forcément une bonne idée, elle aura essayé.

Dans un monde idéal, les choses ne se seraient pas passées de manière aussi folles. Nell aurait rattrapé Izzy telle une princesse qui se serait tordu la cheville en sortant de son carrosse, et en la regardant droit dans les yeux, il lui aurait avoué qu’il adorerait aller au bal avec elle. Mais avec deux idiots pareils, c’était plus qu’évident qu’il allait se passer des catastrophes. Il la regarde, tout heureux de la voir enfin et elle lui parle, mais il ne l’entend pas. A peine le temps se de demander s’il n’a pas les oreilles bouchées, le voilà dans l’eau. Un cri. Le tout se passe à une visite folle qui ne permet pas de tout comprendre. Voilà Nell, à nager en vêtement, à une heure bien matinale. Il reste planté là quelques secondes, mais à force d’être immobile, il manque de couler et donc se ressaisi. « La prochaine fois, jette-moi là où j’ai pied. » Qu’il lance à l’intention d’Isobel sur un ton assez indéchiffrable. En quelques mouvements, il arrive près du bord. « T’es consciente que si j’attrape ta main, tu vas finir dans l’eau aussi ? » Mais en même temps… Il ne lui laisse même pas le temps de réfléchir à ce qu’il vient de dire et lui saisi donc la main avant de l’entrainer vers lui. Blagueur qui ne réfléchit pas vraiment aux conséquences… « T’es consciente qu’on a cours de piscine dans deux jours ? La baignade aurait pu attendre ! »

Pourquoi fallait-il qu'elle soit dotée de deux pieds gauches ? A croire qu'à sa naissance les petits fées ont décidé de lui offrir beaucoup trop de maladresse, et heureusement pour elle aussi, elle n'est pas maladroite quand elle danse. Quand elle danse, c'est une autre Izzy qui prend vie et elle est plutôt heureuse. Quand elle le voit dans l'eau, elle s'en veut parce qu'il est bien trop tôt. « Pardon pardon pardon ! » prononce t-elle bien trop rapidement, en faisant les cent pas sur le bord. Elle se rapproche pour l'aider à sortir de l'eau mais elle le fusille du regard quand il lui prend la main, elle n'a pas le temps de réagir et elle se retrouve à l'eau dans un cri étouffé. Elle remonte alors à la surface en reprenant son souffle et elle le regarde « mais... on va se faire disputer ! » prononce Izzy, et elle, elle ne l'avait pas fait exprès tout cela c'était à cause de sa maladresse. « Mais peut-être que j'avais envie de piquer une tête. » Elle hausse les épaules, restant dans l'eau avant de le regarder « Du coup.. Euh.. Est-ce que ça te dirait d'aller au bal avec moi ? Promis, je ferais attention et je ne te marcherais pas sur les pieds. »

Nell s’en fiche un peu qu’ils se fassent disputer pour tout dire. Maintenant qu’ils sont tout deux dans l’eau, il est un peu tard pour penser aux conséquences de leurs actes, donc autant en profiter un peu. Il se met à rire quand Izzy lui annonce qu’elle voulait peut-être piquer une tête, bien conscient que ça ne peut être la réalité. Puis, la question d’après le surprend, et au lieu d’y répondre, il répond machinalement par une autre question. « En quoi poser cette question nécessitait de venir dans la piscine ? » Maladroit aussi, pas autant que la blonde peut-être, mais dans ses paroles, c’est clair et net qu’il n’est pas très doué pour draguer les filles, ou même accepter qu’elles le draguent. « Parce que dans la cour, ça l’aurait fait tout aussi bien, tu sais. » poursuit-il sans se dire qu’elle pourrait attendre une réponse. La fameuse réponse, elle est évidente à ses yeux. « Je pensais pas qu’une fille comme toi me demanderait ça un jour. » ajoute-il, un peu penaud, et ayant perdu de sa superbe. « T’es si jolie… même quand t’es toute mouillée. » Pas de sous-entendu dans cette allusion, on vous rassure. Il est juste tout ému notre Nellou, parce que voilà, Isobel, c’est Isobel. Et Isobel, elle est belle. Il lui sourit bêtement, tout béat qu’il est.