Malina préparait cet anniversaire de rencontre depuis un petit moment déjà. Souhaitant marquer le coup pour ce tête à tête et le rendre un brin spécial, elle avait réservé une table dans leur restaurant préféré depuis deux mois déjà et avait cherché longtemps quelle petite attention elle pourrait faire à son cher et tendre. Son agenda avait été organisé de telle sorte qu’elle puisse finir tôt pour se préparer. Hors de question qu’elle ne soit pas sur son 31. Le week-end précédent, elles avaient profité d’une après-midi de libre avec Maddi pour aller faire les magasins et choisir la robe parfaite pour ce rendez-vous. Connaissant l’une comme l’autre, les goûts de Cian, Maddi avait été d’une aide primordiale et les deux femmes avaient passé un excellent moment en profitant de ces quelques heures de complicité seules.

De retour chez elle aux alentours de 17 heures, Malina prend aussitôt la direction de la douche. Elle est seule dans l’appartement pour l’instant, et elle compte bien mettre ce temps à profit pour se pomponner tranquille. Elle est le genre de femmes à prendre soin d’elle sans pour autant faire un tas de chichi. Passer des heures dans la salle de bains, le matin avant d’aller au travail, très peu pour elle par exemple. Par contre, lorsqu’elle a un rendez-vous, elle fait plus d’efforts. Et, là, pour Cian, c’est un million d’efforts qu’elle va faire. Une heure plus tard, elle est propre, en sous-vêtements et maquillée. Alors qu’elle sort sa robe de la penderie, la porte de sa chambre s’ouvre, laissant apparaître Maddi. Après les embrassades habituelles, c’est avec une certaine euphorie que Malina demande à Maddi de l’aide pour fermer sa robe, lui faire cette tresse sur le côté qu’elle ne parvient jamais à réaliser seule, et pour finir, lui demander comment elle la trouve. « Ravissante ! » La réponse lui convient parfaitement et à vrai dire, avec tout le mal qu’elle s’est donnée, elle n’en attendait pas moins. « T’as prévu quoi, toi, ce soir du coup ? » La conversation s’enchaine ainsi jusqu’à ce que 19 heures arrive sur la pendule, le moment pour Cian et Malina de s’éclipser pour leur soirée en amoureux.

Pendant le trajet qui les emmène au restaurant, Malina ne peut s’empécher d’observer son partenaire de son regard tendre. « 14 ans et tu es toujours aussi beau, voir même encore plus d’ailleurs avec ces cheveux blancs qui commencent à pousser. » Elle avait pris l’habitude de le taquiner avec ça de temps en temps, bien qu’il soit loin d’être véritablement grisonnant. En fait, c’était surtout pour lui faire un compliment dans le fond. « C’est dingue comme le temps est passé vite ! » Elle les revoit encore, jeunes et insouciants, dans leur petite vingtaine. Elle avait un peu peur à l’époque, notamment que Cian n’accepte pas sa manière de vivre l’amour, mais les années lui avaient montré qu’ils pouvaient tout partager. Ils en ont fait du chemin d’ailleurs, depuis. « Je suis contente qu’on sorte en tout cas. Ça va nous faire du bien d’être rien que tout les deux. » Elle lui sourit, pleine d’amour. Ce n’est pas comme si c’était rare, mais ce soir, c’est leur soir ; et surtout, ce n'était pas réellement arrivé depuis plusieurs jours entre leurs emplois du temps respectifs et leur mode de vie. « J’adore notre vie actuelle, notre vie à trois, mais tu sais, il y a ces quelques petits moments où j’ai envie d’être avec toi et rien qu’avec toi quand même. » Elle se met à rire. Elle adore voir Cian avec Maddi, voir le bonheur que cette femme lui procure, être elle-même avec Maddi, mais comme elle a besoin de moments rien qu'avec l’un, elle a aussi besoin de moments rien qu'avec l’autre. Ils avaient bien trouvé leur équilibre, pour ça, avec le temps et c’était juste… parfait. « surtout en des occasions aussi spéciales. » Elle n’est pas spécialement trop fleur bleue en général, ou pas au point de certains en tout cas, mais avec Cian, il lui arrive d’être un peu plus cucul que de nature. « D’ailleurs, je t’offre ton cadeau tout de suite ou à la fin du repas ? » Pétillante, elle avait hâte de voir sa réaction, même si ça n’avait rien de révolutionnaire, mais tout de même.

Ces deux-là n’étaient jamais avares en compliments, mots d’amour et marques d’affection. C’est peut-être le secret de la réussite de leur couple d’ailleurs, en plus de cette naturelle honnêteté entre eux. Malina ne s’en lasse jamais, d’entendre les mots doux de son époux, et son sourire est ravivé à chaque fois. Elle a son petit caractère mais dans le fond, elle n’en reste pas moins une romantique dans l’âme, tout au fond d’elle. « Mais mon secret, c’est toi mon chéri. » Elle le regarde, de son air malin, les yeux pétillants. Elle n’est jamais sérieuse très longtemps, même si dans tout ce qu’elle dit, il faut voir une vérité. « Ton amour inconditionnel est ma fontaine de jouvence. » Elle dépose un baiser sur sa joue, tout en faisant attention à ne pas le déconcentrer trop de la route tout de même. Sa main gauche se pose ensuite sur sa cuisse pour y rester, pour garder le contact affectueux qui les unit. N’empéche, il est vrai qu’elle n’avait pas pris de rides en 14 ans. Son visage avait toujours les mêmes traits et pour ça, on la jalousait régulièrement. Pourtant, ce n’est pas comme si elle mettait de la crème anti-rides matin et soir, ou qu’elle faisait de la chirurgie. Peut-être des avantages à être d’origine asiatique ? Toutes les personnes qu’elle connait qui ont les mêmes origines qu’elle paraissent bien plus jeunes, alors…

Heureux de ces retrouvailles, ils le sont tout les deux. « On avait tous besoin de trouver nos marques, ce qui est normal. Une fois que ce sera entièrement fait, tout roulera comme sur des roulettes. » Elle sourit à son bien-aimé. Quand il lui avait parlé de sa petite-amie, elle ne s’était pas vraiment posée de questions quant à cet emménagement. Depuis de longues années, et ce malgré son mariage, elle s’imaginait vivre dans un mariage à plusieurs où la complicité et le partage régneraient. Alors, Maddi avait vite été l’évidence pour accomplir tous ses rêves de famille les plus fous, surtout après qu’elle ait appris à la connaitre mieux, et qu’elle ait commencé à l’aimer, elle aussi. « Qui aurait deviné que j’accepterais un jour de me séparer de ce tableau que j’avais acheté, tu sais, celui qui était dans le salon ? » Elle se met à rire. Il avait trôné là pendant plus de dix ans, à côté de la télévision et honnêtement, si elle avait craqué au départ – surtout parce que le peintre était un ami, et que c’était sa première exposition publique dans une galerie et donc qu’elle avait voulu faire acte de charité un petit peu – le voir était devenu plus une habitude qu’autre chose. Alors quand Maddi avait exprimé le souhait d’accrocher une photo d’eux trois à la place, Malina n’y avait pas vu de quoi s’y opposer, bien au contraire.

Cian a raison sur un point tout de même : il faut qu’il fasse attention à leur couple. S’il n’est pas en péril à ce jour, il ne faudrait pas pour autant que ce soit le cas pour le futur. Et chaque couple a besoin qu’on en prenne soin et qu’on ne délaisse pas l’autre. Maddi est comme un nouveauté attrayante, qui engendre parfois un sentiment d’euphorie particulièrement intense, mais il ne faut pas pour autant délaisser ses « vieilles affaires ». « Je dois tout de même avouer que je pensais que ça se ferait plus naturellement, surtout pour elle. J’ai tendance à oublier que ce n’est pas si facile que ça d’arriver dans un lieu qu’on ne connait pas, qui a déjà son lot d’habitude, tout ça. » Elle émet une légère grimace. Au final, ils l’avaient bien aidé et c’était le principal. Ils avaient tout fait pour qu’elle se sente à l’aise, tout en faisant en sorte d’être eux-même à l’aise. Après tout, c’était un terrain inconnu pour les trois, pour le coup.

La voiture se gare. Malina embrasse son mari. « A toi aussi, bon anniversaire. » Son visage s’illumine, encore une fois. Elle espère qu’il y en aura encore et encore des anniversaires. Et d’ailleurs, impatiente qu’elle est, la coréenne demande à son beau brun s’il veut son cadeau tout de suite ou plus tard. Elle est coupée dans son impatience alors qu’il lui répond que ça peut attendre. Déçue le temps d’une seconde, la jeune femme ne se démonte pas pour autant, l’attente ne rendra le tout que meilleur, même si elle a également hâte de savoir ce qu’il lui a concocté. Elle hoche la tête. L’idée de passer à table est presque aussi attrayante que d’avoir son cadeau, dans ce restaurant. « Tu dis ça seulement pour calmer mon impatience, avoue. » Elle se met à rire aux éclats. Elle les connait, les petites tactiques de son bien-aimé pour calmer sa femme.

Elle profite de la galanterie de Cian pour descendre de la voiture et se diriger vers le restaurant. Elle le laisse lui ouvrir la porte, ça va se soi. Et rapidement, ils sont installés. Après de larges remerciements au serveur, qui a l’air absolument charmant, Malina ne peut s’empécher de se jeter sur la carte. Elle feuillette, jusqu’à trouver les menus. « Menu dégustation, regarde. On mérite au moins ça en une si grande occasion ! » 50 $ le menu, hors boissons, un peu au dessus de leur budget habituel, voir bien au dessus, mais ils ne fêtent pas leurs 14 ans de mariage tous les jours, tout comme ils ne mangent pas des plateaux de fruits de mer et autres mets de prestige tous les jours non plus.

Chaque mot de son époux est pour la jeune femme de l’eau à une fontaine qu’elle se fait un plaisir de boire. Profiter de la vie. Profiter de leur vie, chaque jour jusqu’à leur mort. C’est ce qu’ils s’étaient promis il y a 14 ans et ce jour-là, elle savait qu’elle serait heureuse en prenant le nom de Cian Wells, mais elle n’imaginait pas à quel point, ni qu’ils vivraient un jour une véritable relation à plusieurs. « Vous êtes si mignon, Monsieur Wells. » Son amour se lit dans ses yeux, une fois de plus. « Pas évident, certes, mais nous n’avons jamais eu peur des défis. » C’est le moins qu’on puisse dire.

A table, Malina choisit très rapidement un menu qui lui fait de l’œil, certes un peu cher, mais un plaisir qu’ils peuvent s’offrir en cette soirée si spéciale. Elle sourit à son cher et tendre. « Et en plus la meilleure bouteille. » Ajoute-t-elle dans un sourire amusé lorsque le serveur s’en va avec leur commande. Elle n’est pas de ces femmes qui s’attendent à ce que l’homme paye tout, et d’ailleurs, ils se sont toujours bien entendu avec Cian à ce sujet. Ce qui est encore mieux c’est que lorsque l’un a envie de se faire plaisir, l’autre aussi généralement alors ils y trouvent leur compte.

La jeune femme sert la main de son mari dans la sienne. Elle adore ce contact, sa peau plus rugueuse de la sienne, tout en étant douce. Ses grandes mains qui lui donnent une certaine sensation de sécurité. « Je ne suis pas la seule à les mériter ! » Les plaisirs. Tout les plaisirs du monde, même. Alors que leurs regards se font la conversation entre eux un long instant, le serveur revient bientôt avec la bouteille demandée, qu’il présente à Cian, avant d’en verser quelques gouttes dans le verre de chacun des amoureux. Malina ne se fait pas prier pour porter le tout à ses lèvres et faire comme si elle était une grande connaisseuse en dégustation de vin. « Exquis ! » mentionne-t-elle alors au serveur pour lui indiquer qu’elle valide le choix de la bouteille.

Puis, ils se retrouvent de nouveau seuls, et il prend l’envie à la coréenne de rattraper le temps perdu. « J’ai eu un appel ce matin ! Tu sais, j’avais postulé pour organiser un programme d’éducation sexuelle à destination des élèves du lycée de Staten Island ? Ils veulent me voir la semaine prochaine ! » Son excitation se trahit dans la vitesse de ses paroles, comme toujours. « J’ai déjà plein d’idées. Je pensais préparer une maquette avec tout ça, pour présenter à la personne que je vais rencontrer. » Une maquette ou plusieurs d’ailleurs. Malina attrappe de nouveau la main de Cian et la serre en y déposant des caresses de ses doigts fins. « J’espère vraiment être retenue ! C’est tellement important que ces jeunes ne soient pas laissés à l’abandon, qu’ils sachent qu’ils peuvent être eux-même. Si j’avais eu un intervenant qui avait su m’écouter et m’aiguiller à l’époque du lycée, j’aurais certainement passé moins de nuits à me demander si j’avais pas un problème… » Et elle, elle saurait écouter les jeunes. Après tout, cela fait partie de son métier et c’est une des choses pour laquelle elle a choisi cette voie.

Le bonheur déborde dans le regard de la jeune femme. Etre aussi épanouie dans sa vie personnelle, familiale et professionnelle n’est pas donné à tout le monde et pour ça, Malina remercie le destin chaque jour, à défaut de pouvoir remercier un quelconque dieu en lequel elle ne croit pas. Elle sourit à son amoureux qui a le don de la mettre en valeur à chaque fois qu’il parle d’elle, une des nombreuses qualités qu’elle aime chez lui. « A défaut, tu m’as eu des années plus tard. » C’est pas pareil, elle le sait pertinemment mais ça la fait rire de lui rappeler de temps à autre. Combien de discussions ils ont pu avoir ? Elle a aimé chacune d’elles, parce qu’il était attentif, avide d’apprendre sa manière de vivre à elle, et elle, heureuse de partager cela avec l’homme qu’elle aime. « En réalité, je ne sais pas exactement ce qu’ils me laisseront faire ou pas, mais rien que d’organiser ce genre de cours est un grand pas en avant par rapport à d’autres établissements. » Elle prend une inspiration. « Je m’adapterais ! » Quelque chose qu’elle a bien du mal à faire la plupart du temps mais quand il faut, il faut ; surtout quand c’est pour la bonne cause et que les enjeux derrière sont importants.

A la question suivante, le sourire de la coréenne s’élargit. « Je crois que non. » C’est faux. Il lui a dit avant qu’elle ne parte au travail, mais elle ne peut s’empêcher de faire la maline, trop heureuse d’entendre ce genre de déclaration à chaque fois. « Et moi, je t’ai déjà dit aujourd’hui à quel point j’ai de la chance de t’avoir ? » Sa manière à elle de lui dire qu’elle l’aime aussi, avec des mots différents.

L’entrée arrive, ce qui n’aura finalement pas mis trop de temps, à moins que ce soit juste la brune qui ne voit pas le temps passé en compagnie de son si charmant époux. « Et toi alors ? Raconte moi donc les derniers ragots à ton boulot ? »

Malina porte un coup de fourchette dans son assiette, tout en gardant une oreille attentive à son compagnon et à son histoire de chat. Le tout ensuite porté à sa bouche et mâché énergiquement, elle ne peut s’empêcher de sourire en coin quand Cian mentionne le beau pompier brun. « Laisse-moi deviner. Tu as terminé dans les finalistes ? » Comment pourrait-il en être autrement ? Cian n’est que beauté incarné, force surhumaine, corps sculpté, toutes les femmes de toutes les générations bavent devant lui, rien de plus normal. Et même si Malina ne s’est jamais privé de regarder ses quelques collègues ayant également des physiques avantageux, son mari restera toujours le premier dans son cœur en termes de beauté – et de tout le reste d’ailleurs. « C’est dingue comment le fantasme du pompier est intergénérationnel ! » Elle n’est pas jalouse, la coréenne, mais pour autant, elle n’aimerait pas trop que son homme sorte avec une vieille. Imaginer que son corps ait pu toucher celui d’une femme ridée de partout… Erk. Même elle a des limites. « Mais si je peux me permettre de choisir pour toi, opte plutôt pour les jeunettes que pour les retraitées. » Elle se met à rire, encore.

Le repas continue dans la bonne humeur et les échanges, jusqu’à ce qu’il soit l’heure du dessert. C’est à ce moment que la brune sort de son sac à mains, un petit paquet cadeau. L’écrin n’est pas très grand, à peine plus grand que s’il contenait une bague. Il est chic, et pour cause, ça vient de chez Vera. Son sourire s’élargit encore alors qu’elle s’imagine la réaction possible de son époux. Elle est toujours fière de ses petites bêtises. Elle lui tend la boite, de son air espiègle. « Etant donné qu’on ne fête pas ses 15 ans de mariage tout les jours, je me suis dit qu’il nous fallait un truc un peu spécial. Alors oui, on pourra se faire un super voyage en amoureux, et j’en ai d’ailleurs, bien l’intention, mais je voulais autre chose d’un peu plus… atypique disons. » Pas grand-chose, une babiole. Ou plus exactement, une petite télécommande. « Ouvre ! »

Malina rit. L’humour de son homme est à l’image de leur complicité, sans limite. Un haut de cœur lui vient quand il mentionne le vieil homme qui avait essayé de le tripoter. Si elle est polyamoureuse et n’a aucune préférence de genre, les personnes du troisième âge vicieuses l’ont tout de même toujours dégouté. Un frisson la parcoure. « Je comprends toujours pas qu’on ne t’autorise pas à leur mettre des coups à ces vieux pervers ! J’veux dire… Pas à leur faire mal mais pour leur faire comprendre quoi. » Frustration extrême pour la jeune femme qui a bien du mal avec les injustices, et le fait qu’on puisse s’en prendre à son mari. Inutile de péter le bras des vieux, c’est sûr mais un bon hématome ne leur ferait pas de mal. Oui, elle peut s’avérer violente quand on s’en prend à sa famille, même si jusque-là, c’est plus de la théorie qu’elle n’a jamais mise en pratique.

Quelques minutes plus tard, elle tend à son homme, la petite boite qui contient le cadeau qu’elle a choisi pour lui. L’effet est celui qui était escompté et son sourire malin s’élargit. Elle se demande s’il pense bien à la même chose qu’elle. « Je me suis dit qu’après 15 ans, on pouvait mettre un peu de piment dans notre vie sexuelle. » Non pas qu’elle n’aime pas leurs pratiques habituelles qui ont le don de toujours la faire monter au plafond. « Ça va avec un petit œuf. » Sans savoir pourquoi, une demi-fraction de seconde, elle ressent comme une gêne, ou ce sentiment d’être prise en flagrant délit, potentiellement jugée. « Tu es maitre de quand activer, de la puissance, etc. Enfin, voilà, ça peut… Je te fais pas un dessin. » Elle se met à rire nerveusement, quelque chose qui ne lui ressemble pas vraiment. Cela fait un bout de temps qu’ils n’ont pas essayer de nouvelles choses et avec Maddi qui est arrivée dans leur vie, leur propre couple est passé légèrement au second plan, restant sur leurs bases solides et leur routine habituelle.

Malina ne s’attendait pas à ce que Cian lui pose une telle question. Pourtant, elle aurait dû se douter qu’il sait lire en elle mieux que personne et donc qu’il remarquerait qu’elle se sent un peu étrange à ce moment-là. Mais la question qu’il lui pose la déstabilise doublement. Elle n’y avait pas songé une seconde, au fait que ça pourrait venir de ce nouvel équilibre dans leur couple. Maddi était tellement un vent de fraicheur apportant de l’enthousiasme chez Malina que la coréenne n’avait pas remis en doute une seule seconde la place de la nouvelle arrivante dans leur vie. Pour autant est-ce que son inconscient en a fait autant ? S’est-elle un peu voilée la face, formant alors des inquiétudes dont elle n’a pas pris conscience ? Elle se plait à croire que non, mais le doute grandit en elle et elle ne saurait le cacher à son époux. La deuxième question la sauve et c’est sur celle-ci qu’elle rebondit. « Oui. » Son sourire malin fait surface. Elle a tout prévu, évidemment et espère que son cher et tendre saura saisir sa chance, mais en attendant, elle veut tout de même lui faire part de pourquoi il a pu remarquer chez elle un comportement un peu étrange. « Je sais pas si ça a à voir avec Maddi. Je n’y avais pas songé… J’imagine qu’il y a peut-être un peu de ça quand même, ça parait un brin logique mais… » Une courte pause s’impose où elle tourne les choses dans son esprit pour savoir comment formuler ses idées. « C’est juste que je ne voudrais pas que tu t’ennuies avec moi après quinze ans de mariage. Notre routine roule, mais elle est tellement établie que j’ai à la fois envie de la chambouler un peu et peur de le faire. » Un rictus gêné se pose sur son visage. Il suffit qu’elle dise tout ça pour se rendre compte que c’est idiot de penser ça. Son chéri l’aime, elle le sait. Elle a besoin de l’entendre un peu plus et d’être rassurée, même si elle ne veut pas l’avouer. Fichu caractère de femme forte qui refuse d’avouer ses quelques fragilités. « C’est vrai que Maddi est plus jeune, extraordinaire, belle… Elle peut faire des choses que je ne peux plus faire. Je l’aime. Je ne me pose pas de questions mais peut-être qu’inconsciemment… j’ai un peu peur quand même, oui. » Et qu’est-ce que c’est dur à avouer. Si dur qu’elle n’ose plus regarder son bien-aimé dans les yeux. Faudrait déjà qu’elle ose s’avouer à elle-même ce qu’elle vient de dire, qu’elle prenne conscience de la part de vérité dans ses paroles.

Malina avait besoin d’être rassurée, comme c’est parfois le cas des personnes qui vivent trop pleinement toutes les situations, jusqu’à une forme de point de rupture avant que ça ne reparte. C’est dans ces moments de flottements que la femme a besoin de son petit cocon de stabilité qui réside en la personne de Cian, de son calme olympien, de ses mots, de son amour tout simplement. Il est toujours là et sait toujours quoi dire. Ce sont ces petites choses qui font la différence entre ses autres relations et lui. Elle aime toutes ses relations avec la même force, avec la même passion, et notamment Maddi mais on ne lui enlèvera jamais qu’avec Cian, il y a une petite étincelle en plus, ce je ne sais quoi qui rend leur amour spécial. Dans 50 ans, elle aura eu bien des fois le cœur brisé, elle aura vécu pleinement bon nombre d’amour, mais s’il y en a bien un qui sera encore là, c’est lui, son époux.

Elle reste silencieuse alors qu’il parle. Son sourire finit par s’agrandir et la gène par partir petit à petit. Elle ne trouve rien à redire, aucun questionnement supplémentaire, parce qu’elle sait qu’il ne dit que ce qu’il pense, sans faux semblant. Et le geste sur sa joue ne fait que raffermir l’amour qu’elle ressent pour lui. « Je serais vieille aussi alors je ne te considérerais pas vieux ! » dit-elle, reprenant enfin sa joie de vivre habituelle, avec un peu plus de retenue que d’ordinaire tout de même. Elle embrasse son époux, un baiser qui en dit long sur les sentiments qu’elle a à son égard, appuyé. « Je t’aime ! » Comme si elle avait besoin de lui dire. Elle fait signe au serveur avant de lui demander l’addition d’un geste rapide. Puis, regardant Cian dans le blanc des yeux, un sourire coquin au coin des lèvres, elle reprend de plus belle : « T’es conscient qu’après une telle déclaration, on paye et on rentre très vite à la maison pour… » Pas besoin de mot supplémentaire, elle peut lire dans ses yeux qu’il a très bien compris ce qu’elle voulait dire.