En ce moment, Blake va de surprise en surprise. Il a découvert la sublime voix de son petit frère et son talent pour écrire des chansons, il a découvert que son autre petit frère est au minimum attiré par les hommes, ce qui n’est pas un problème d’ailleurs mais il ne se doutait pas que c’était un secret pour Blaise, du moins qu’il n’ait pas tellement envie d’en parler. Il a également découvert ou redécouvert, les sentiments qu’il a pour Andreas et qu’il se tue encore à enfuir parce que l’idée d’une relation lui fait énormément peur. Puis il y a cet appel qu’il a passé le jour même à Hazel puisqu’elle n’a plus aucune nouvelle d’elle depuis un moment. Il aurait peut-être pu passer par son ami de la dernière fois, mais pour être honnête, il a préféré faire les choses lui-même. Il ne sait même pas qu’ils sont passés à un stade au-dessus. Il ne sait rien du tout. La conversation téléphonique a quand même un goût un peu étrange. Ce n’est pas comme d’habitude. Et très vite l’inquiétude lui monte. Il ne sait pas quoi en penser, surtout quand elle lui parle d’accident. Il ne comprend pas… Et puis, pourquoi est-ce qu’il n’a pas été prévenu avant ? Qu’importe… Il s’arrange rapidement avec ses proches. Il donne à manger à son chat, avant de finalement partir de son appartement pour rejoindre l’adresse qu’elle lui a indiqué et qu’il a soigneusement écrite sur papier.

Il arrive vite dans le quartier, puis devant l’habitation. Luxueux, grands… Il en aurait des choses à dire. Ce n’est pas un endroit qu’il a l’habitude de fréquenter même s’il en aurait les moyens maintenant. Blake a décidé de vivre de manière modeste, c’est ce qu’il est et ce qu’il aime. Il reste dans sa voiture un moment, elle est à présent réparée. Puis finalement il bouge pour pouvoir sonner. Il est accueilli par un homme, qu’il ne connait pas. Il le suit simplement, jetant quelques coups d’œil autour de lui. Il a un peu du mal à croire à tout ça. C’est si… Différent. Posant les yeux sur Hazel quand il arrive enfin auprès d’elle, ses sourcils se fronce. Il avance, se pose à ses côtés. Et puis il écoute sans mot. Il ne sait même pas quoi dire. Alors quand elle lui demande de la prendre dans ses bras, il s’exécute. Il la serre doucement contre son corps, posant une main dans son dos. Il cherche ses mots. Beaucoup dirait un désolé, c’est toujours ce qu’on dit dans ce genre de situation. Alors qu’on n’est pas coupable. « - Je suis là, ça va aller. » Dit-il calmement. Il ne sait pas si c’est mieux, mais il préfère ça. Il ne peut pas faire des miracles mais il peut être présent pour elle. « - Tu… Qu’est-ce que les médecins t’ont dit ? Est-ce que c’est permanant ? Temporaire ? » Il pose quand même des questions, il est curieux. Il a besoin de savoir de toute façon. « - C’est une situation difficile pour toi, je peux le comprendre. On n’est jamais préparé… Mais restes forte. Tu es là. Tu peux encore te battre. T’en sortir. Vivre. » C’est important de rester positif et de garder de l’espoir. Pour Bear, cette situation n’est pas évidente… Voiture, accident. Surtout quand ça touche un proche. Ca fait remonter cette peur de perdre ses proches, ça lui rappel la perte de ses parents… Mais il est assez fort pour passer au-dessus de ça. Ca fait longtemps et il a beaucoup travailler sur lui. « - si tu as besoin de quelque chose… Quoi que ce soit, tu n’hésites pas. Même si tu sembles être très bien ici. » Dit-il en repensant à ces personnes qui sont présentes. Cette sécurité. Ce luxe… Ce n’est pas son truc à lui, mais il espère qu’elle sera bien, qu’elle trouvera son bonheur malgré cette épreuve. Il a également envie d’en savoir plus, concernant l’accident. Qui, quand, quoi, comment, pourquoi… Mais il attend, il évite pour le moment. Il n’a pas envie de remuer le couteau ou de lui faire mal plus encore.

Alors qu'elle l'attendait bien trop sagement assise sur ce fichu canapé devenu comme îlot au milieu de son océan de ténèbres, Hazel n'avait pu s'empêcher de repasser en son esprit les événements des dernières semaines, des derniers mois même. Elle avait repensé à cette soirée à l'Outpost où elle était encore tellement heureuse ! Cette soirée où, pourtant, elle avait presque rechigné à se rendre mais qui lui avait laissé le plus doux des souvenirs. Parce qu'elle était entourée de gens qu'elle aimait, de ces autres que ce soir là, elle avait appris à connaître. Elle repensa à ces instants sur scène où tous s'étaient succédé, de leurs rires presque enfantins et si légers alors qu'ils avaient laissé les cocktails de Bear leur couler à la gorge... De cette nuit qui avait aussi posé les bases de cette histoire d'amour qui, depuis, n'en finissait plus de croître … et de connaître les plus étourdissants des hauts et, malheureusement, des bas. Le mariage totalement iconoclaste de Harry, cette escapade à Philadelphie où, pour les si beaux yeux d'Aidan, elle avait laissé une opportunité insensée de jouer dans un groupe connu à Los Angeles. Si elle avait alors fait un autre choix... Si elle avait accepté ce contrat mirobolant où en serait-elle à présent ? Sans doutes en studio ou en train de prévoir une tournée. Elle vivrait de sa musique... et elle ne serait pas aveugle non plus, ça Hazel le savait. Et ça la rendait malade... Oh, pour elle évidemment ! Mais, plus encore, pour celui pour qui elle se sentait, chaque jour qui passait, devenir le pire des fardeaux. Aidan méritait tellement mieux que cela... Aidan méritait mieux qu'elle... non ?

Heureusement l'arrivée de Blake eut le mérite de la tirer de ses sombres pensées et, surtout, de mettre un peu de baume à son cœur trop tourmenté. Cela faisait si longtemps qu'elle ne l'avait pas vu ! Et elle s'en voulait. De s'être montrée si égoïste quand cela allait si bien pour elle, qu'elle n'avait eu de cesse de repousser le moment où elle se promettait de l'appeler. De lui dire à quel point elle était heureuse avec son prince pas toujours charmant mais si parfait pour elle. De lui raconter qu'elle acceptait enfin sa voie de musicienne et que, dès le début de l'année, elle entendait bien voir avec Blue pour mieux tenter d'accorder leurs voix et leurs guitares et de laisser leurs talents virevolter ensemble. De lui dire que, pour une fois, sa vie semblait prendre le plus apaisant des tournants. Mais elle ne l'avait pas fait, laissé le temps lui filer entre ses doigts juvéniles...Jusqu'à cet accident qui l'avait si fort touchée et l'avait trop bien rendue aveugle. Jusqu'à cette tragédie dont elle répugnait à parler mais qu'elle ne pouvait dissimuler. Alors, oui, les mots s'étaient écoulés de ses lèvres tremblantes, certainement confus mais nécessaires. Elle aurait voulu pouvoir les hurler plutôt que de les murmurer dans ces sanglots qu'elle jugeait idiots et presque pathétiques. Elle aurait voulu pouvoir accueillir d'un sourire celui qui comptait tant pour elle mais dont elle ne sut jamais que réclamer la chaleur d'un câlin. Parce qu'elle avait peur. Parce qu'elle se sentait perdue. Et ces mots qui vinrent tinter à ses oreilles, la berçaient si tendrement qu'elle s'y abandonna, s'y raccrocha avec une force que seul le désespoir peut faire naître. Cette main à son dos qui la fit frissonner tant elle lui faisait du bien et que, se reculant elle finit par saisir pour mieux y nouer ses doigts. Ceux qu'elle serra si fort tandis que, se rasseyant elle tentait de répondre aux questions que son presque frère avait la pudeur de ne pas lui poser directement.

« Merci d'être venu déjà... Et désolée de ne pas t'avoir contacté plus tôt mais... Mais ma vie m'a disons quelque peu échappée depuis la dernière fois où nous nous sommes vus ? »

Son regard éteint qui virevoltait sur ses lieux qu'elle ne pouvait pas voir, n'avait même jamais vus puisqu'elle n'y avait emménagés qu'une fois sa cécité apparue. Et un soupir alors que, lâchant la main du barman, elle se laissait tomber à la renverse, ramenait à elle ces genoux qu'elle enserra de ses bras fins et un soupir accompagné d'un haussement d'épaules alors qu'elle confessait d'une voix où perçait l'amertume

« Alors, comment tu trouves ce palace ? D'après ce que mes colocataires m'en ont dit c'est... grandiose... » un rire soupiré et désabusé et elle qui aurait presque pu en rire alors qu'elle ajoutait, lasse « C'est la richissime cousine d'Aidan qui nous le loue pour une somme dérisoire. En attendant que... » une grimace alors qu'elle ajoutait, nerveuse « Disons qu'entre Aidan qui a été déshérité par les siens il y a plus d'un an et moi qui ne suis plus en état de travailler... Sans la générosité de Sophia et le soutient de nos deux autres colocataires... Nous aurions sans doutes eu du mal à nous loger. » puis, tout bas « J'ai pas besoin ni même envie d'un palace moi... Tout ce que je voulais c'était pouvoir quitter la rue et vivre avec l'homme que j'aime... C'était quand même pas beaucoup, si ? »

Puis, soufflant bruyamment son agacement devant son propre renoncement et presque défaitisme, elle s'était redressée, relevée et les mains en avant, comptant mentalement ses pas, elle s'était dirigée de mémoire vers cet endroit où elle savait pouvoir trouver de quoi boire. Des bouteilles, qu'elle prit sans trop savoir même ce que c'était avant que de les reposer en riant et en lançant

« En fait je crois que si tu veux bien m'aider à nous préparer deux verres ce sera quand même plus simple... et moins risqué pour nos foies. Tu peux venir nous servir s'il-te-plaît Bear ? » puis alors qu'elle le sentait s'approcher pour mieux la rejoindre elle avait poursuivi ces explications qu'elle savait devoir donner, voulait aussi donner « Tu te souviens que je t'avais envoyé un texto pour te dire que j'avais une audition à Philadelphie avant Noël ? Aidan m'a accompagnée... Et si j'ai finalement pas voulu signer le contrat que l'on m'offrait j'y ai gagné de rentrer amoureuse et heureuse. C'est mieux non ? Des auditions j'en trouverais sans doutes d'autres mais un homme comme Aidan, je sais que non. » son regard voilé qui se tournait vers là où elle pouvait sentir la chaleur de son ami et un sourire, radieux, qui venait affleurer à ses lèvres alors qu'elle murmurait « Tu te souviens d'Aidan, n'est-ce pas ? Le grand blond qui était venue me surprendre à l'Outpost ? Ce fameux comédien en slip doré dont je ne cessais de vous rabattre les oreilles à Orion et toi ? L'homme qui, encore aujourd'hui et peut-être même plus encore aujourd'hui, veille sur moi et m'aime autant que je l'aime... »

Refermant ses doigts sur ce verre que Bear lui avait préparé, le remerciant d'un sourire un peu fané, elle l'avait laissé la reconduire jusqu'à son perchoir habituel et, s'asseyant doucement elle avait bu une gorgée et poursuivit sa longue confession

« Franchement je n'arrive toujours pas à réaliser comment j'ai pu basculer du rêve éveillé ou cauchemar... Tout ce que je sais c'est qu'en quelques heures, et merci Samara, je me suis faite virer de mon meilleur job, faite renversée par une bagnole et retrouvée à l'hosto où si j'ai évité de me retrouver à la morgue je n'en suis pas moins sortie aveugle... » une grimace alors qu'elle prenait une longue lampée qui lui brûla la gorge elle ajoutait avec mépris et colère «Et tiens toi bien... Mon père, celui qui m'a abandonnée il y a quatre ans pour se tirer avec une autre que ma mère... Celui sans lequel je n'aurais pas à fuir ma cinglée de mère pour mieux me retrouver dehors... Hé bien ce même géniteur a choisi ce jour là pour revenir ! Et en plus il veut, espère, que lui et moi nous retrouvions ? Que dalle ! Jamais ! »

Hazel avait bien trop souffert de cet abandon qui avait été le point de départ de sa descente aux enfers pour pouvoir encore, si jamais d'ailleurs, pardonner à celui qu'elle venait tout juste d'évoquer mais qu'elle s'empressait déjà d'oublier. Un haussement d'épaules suivi d'un long et pesant silence puis, comme si elle avait envie de parler d'autre chose

« Mais... Fini de s'apitoyer sur ma vie chaotique ! Parle moi de toi ! Andreas et toi vous vous êtes revus, rapprochés peut-être bien ? Et Blue ? Toujours aussi doué ? J'ai des nouvelles régulières de Blaise vu qu'il est chorégraphe pour la troupe mais pas des autres. Alors raconte moi Bear ! Comment va ta vie ? »

Pour être tout à fait franc, Blake ne se sent pas tout à fait à l’aise. Car il ne sait pas comment poser ses mots, ses actes. Il n’a pas envie d’être blessant ou maladroit. Surtout qu’ils sont proches, qu’elle compte pour lui. Il a peur de faire n’importe quoi. Il n’est pourtant qu’humain. Des erreurs il en fait, et il en fera encore. Les yeux sur elle, il est en partie soulagé qu’elle ne puisse voir son visage pour le moment. C’est mieux pour elle. « - Oui, je pense l’avoir un peu deviné. Au vu du temps qui s’est écoulé entre ces deux moments. » Enfin, pour lui ça ne lui a pas semblé si long, mais il semblerait que ça le soit quand même. Il aurait aimé être au courant, avoir plus de nouvelles et d’informations sur la vie de son amie. Mais peut-être qu’il n’occupe pas la place qui lui permet d’avoir ce genre de privilège. Puis quand bien même, elle ne lui doit rien et à le droit de faire sa vie comme bon lui semble. Et puisque ça n’est pas vraiment le moment pour en ajouter une couche, il se tait. Peut-être qu’elle savait qu’il penserait que c’est peut-être un peu trop vite ? Trop rapide ? Elle le connaît sans doute un peu et sait comment il est. Il regarde autour de lui rapidement quand elle lui pose la question sur l’habitation. « - c’est en effet, grandiose. Ce n’est pas trop mon style. Tu sais que j’aime la simplicité. Mais il semble y avoir tout ce dont tu as besoin ici. Et la sécurité également avec ces personnes autour de toi. Ce n’est pas si mal. Et c’est certainement mieux que la rue oui. » Ca ne fait aucun doute d’ailleurs. « - Peu importe l’endroit dans lequel tu vis, tu l’as, tu es hors de la vie. Et visiblement avec l’homme que tu aimes. » Puisqu’elle lui parle de lui également vivant là. Il ne connait pas bien cet Aidan, il ne l’a vu qu’une seule fois. Il ne sait pas trop quoi penser de lui. Il n’a pas voulu se fier à ce qu’on dit ou à sa première impression car elle est souvent bien mauvaise.

Il se redresse pour pouvoir servir ces verres quand elle le lui demande. La laissant parler sans l’interrompre, comme toujours. « - Oui, je m’en souviens t’inquiète pas. » Il n’y a pas de soucis là-dessus, il a une assez bonne mémoire en ce qui concerne les gens et les visages. « - Que ça soit mieux ou non. C’est ton choix. J’imagine que oui, tu auras d’autres possibilités. » Il espère pour elle en tout cas. Car c’est tout de même dommage d’avoir manqué une opportunité. Mais aux yeux de la jeune femme, le garçon en vaut la peine. « - Vous vous connaissez depuis combien de temps déjà ? Je ne me souviens pas. » Il s’y intéresse un peu. « - Et il a quel âge ? » Bon un peu beaucoup. Il veut connaître un peu plus de détail. Car il est quand même inquiet sur cette relation. Il poserait autant de questions s’il s’agissait de ses frères. Il se pose à nouveau auprès d’elle, jouant avec son verre. Il ne boit pas pour le moment. Il est encore sur le cul en réalité. Il a l’impression d’être… Un peu bloquer. Il soupire doucement, en imaginant les choses. « - Quelles horreurs… Je suis désolé que ça t’es arrivé à toi. Tu ne le mérites pas… » Et il est sincère. Personne ne le mérite en soit. Mais elle n’a rien demandé non plus. « - Mais, avec le temps, les choses peuvent redevenir meilleure. » Le temps guéris de toute façon. Et même si elle ne retrouve pas la vue, elle est envie, elle peut poursuivre sa vie et s’adapter. Il grimace encore une fois. Cette fois, il boit de son verre. « - Je ne suis pas très objectif quand on parle de parents tu sais… Ni pour ce genre de chose. Je suis de ceux qui pense que les gens méritent une seconde chance. De ceux qui ont perdu leur parent et qui pensent que s’il y a possibilité pour avoir quelque chose de bien, il faut essayer… Désolé. » il soupire doucement. Il ne veut pas la contrariée, surtout en ce moment. Mais il ne peut pas mentir non plus. S’il pouvait récupérer ses parents, il donnerait tout. Et peut-être que s’il arrive dans le moment où tout va mal, c’est peut-être un signe.

Il espère que ça ira. Il se mord la lèvre légèrement quand elle lui demande pour lui. « - Oh rien. Rien de bien nouveau en fait. Mes frères vont bien. On va bientôt se voir pour fêter l’anniversaire de maman. Pour ce qui est d’Andreas, rien de nouveau. Désolé, je n’ai pas tellement de bonnes nouvelles à te dire. Ma vie n’est pas très rebondissante de mon côté. » Dit-il avant de hausser les épaules. « - Mais je ne me plains pas. J’ai quand mêmes des idées, des envies pour l’avenir. Mais rien de très concret. » Juste des idées. Il n’a aucune chance de mettre ça en place, ni les moyens financier.