c'est quelque chose d’impressionnant, cette installation. il n'y a probablement rien qui ne l'habituera jamais aux scénographies souvent improbables des défilés, même si ceux-là l'ont emmené à des endroits qu'il n'aurait jamais imaginé visiter. il ne s'y fera jamais, au fond, ne saura jamais trop comment exactement il en est arrivé là, de vidéos virales, d'une chambre pas très bien isolée, à avoir sa place ici, derrière les murs du whitney, entrée de la highline, qui servent de coulisses. c'est qu'ils ont aménagé une grande verrière, le long de l'ancienne voie ferrée, privatisée pour l'occasion. que dans quelques heures, il y aura tant de monde qu'on y verra pas bien loin, et il sera dans le rush, à devoir vérifier le travail de pas mal de monde. et il n'est pas tout à fait remis de la, n'aura eu qu'une journée pour se remettre vraiment.

mais au fond, il ne pourrait aller mieux. c'est qu'il a pris ses médicaments, c'est que peut-être il n'est plus si seul à présent, et il ne sait trop qui remercier pour tout ça. et puis, il aime ce qu'il fait. profondément. assis face à un miroir, à jouer à un jeu idiot sur son téléphone en terminant son chocolat chaud. il a encore du temps pour s'approprier les lieux, avant que ce ne soit le chaos, que les portants prennent vie, et qu'il y ait un nombre ridicule de modèles à maquiller. oh, il ne sera pas tout seul. mais pour le moment, il n'y a que quelques corps pour habiter ces coulisses improvisées. sécurité, quelques personnes à s'activer encore autour de vêtements. le calme avant la tempête. et lui n'aura qu'à poser sur peau ce qui a été validé avec l'équipe créative, il y a quelques semaines déjà.

et si chaque mouvement force son attention, traîne son regard ailleurs, comme magnétisé, il y a bien une silhouette qu'il a vu il n'y a pas si longtemps qui attire vraiment son attention. et il y a une partie de son cerveau qui fait le lien. c'est que c'est sa mère, la créatrice. c'est qu'elle défile aujourd'hui. puis, c'est son jour de relâche au théâtre. mais elle a peut-être une bonne raison d'être là, alors, autant ne pas la mettre mal à l'aise. se rappeler qu'on ne fixe pas les gens lui prends une seconde, et peut-être qu'elle l'a déjà remarqué, avant que ses yeux ne retombent ailleurs. l'ombre d'un sourire un peu étrange sur son visage, un vague signe de la main. si elle veut lui parler, elle n'a que quelques pas à faire. autant ne rien forcer. les gens n'aiment pas les conversations forcées.