Le soleil plombe dans la chambre claire de la jeune analyste. Elle cache ses yeux, éblouie par le soleil et la neige qui amplifie l'effet d'éblouissement, puis se replonge le visage dans son oreiller pour se cacher complètement, lorsque son téléphone se met à vibrer. 10h43. Merde. Elle voit le message de ce mec qu'elle a rencontré à la veille du Nouvel An, alors que Kyan était à l'étranger, comme aujourd'hui. Elle se lève alors de son lit inoccupé. Kenneth, lui, il avait été une rencontre surprise dans la vie bien rangée et organisée à la seconde près de la brune. Depuis quelque temps, ils échangeaient plus de messages, quelques appels, toujours bref. Après tout, Hania ne le connaissait pas, mais il apportait un vent de fraîcheur et de spontanéité à sa vie. Il ne lui donnait pas cette impression de vouloir quelque chose de sa part. Il la traitait normalement. C'était honnêtement un peu déstabilisant. D'ailleurs, il lui avait proposé de se rencontrer à Central Park, un lieu que la jeune riche ne visitait que très rarement, plutôt perdue dans son boulot et sa vie frénétique entre la famille, son petit-ami et les amis. Hania ne visitait pas souvent la ville où elle vivait. Elle ne savait pas trop à quoi s'attendre de cette sortie, mais selon la température, elle aurait à s'habiller plutôt chaudement, la neige tombait à gros flocons. Une température féerique. Et hors de son habitude, elle était en retard. Elle devait se dépêcher, mais coquette qu'elle était, elle voulait bien se présenter. Elle prévint directement son chauffeur qu'elle devrait se rendre à Central Park, malgré les contestations de celui-ci qui ne trouvait pas très prudent d'être dehors dans cette température. Hania n'était pas une poupée de porcelaine contrairement à ce que l'on aurait pu croire. Elle s'habilla rapidement et sortit une tuque rouge qu'elle n'avait pas mise depuis trop longtemps. D'une vie qui aurait pu être la sienne si elle n'était pas née avec son nom et les responsabilités qui allaient avec. Elle l'enfila rapidement avant de prendre la porte et entrer dans la voiture en précisant de la laisser à quelques blocs. Elle voulait un moment à elle et puis si elle était honnête elle n'avait pas envie que Kenneth voie tout ce paraître superficiel. Elle le chercha du regard, mais cet endroit était immense. Elle lui laissa un message pour lui dire qu'elle était proche d'un banc avant de s'y asseoir en observant autour d'elle, tous ces gens, qui ne s'arrêtaient pas en la voyant, elle respira, un sourire aux lèvres, un sentiment de liberté. Un moment où elle se fit surprendre par le grand brun qu'elle attendait. Elle essaya de se reprendre immédiatement et lui sourit plus timidement. « Hey. » lui dit-elle en bougeant un peu pour lui permettre de s'asseoir s'il le voulait. « Désolée, c'était‒ » Elle secoue la tête. « La neige, cet endroit, c'est‒ c'est stupide. » Elle ajouta maladroitement en riant gênée. Elle commençait bien.

Two strangers learn to begin again.

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J’ai essuyé mes mains moites pour la cinquième fois sur mon pantalon noir, tout en quadrillant le parc du regard, clignant des yeux pour voir à travers la poudre immaculée qui me saupoudrait le pardessus. Avec cette neige, il était difficile de distinguer quoi que ce soit. J’ai porté ma main en visière pour mieux y voir ; sans incidence. Fébrile, j’ai jeté un énième coup d’oeil à ma montre connectée, dans l’espoir d’y voir apparaître une notification, au cas où j’aurais manqué la vibration habituelle qui signale l’arrivée d’un message. Je crois m’être mordu la lèvre dans le procédé, tout à fait involontairement.  
Je me haïssais d’être aussi nerveux, comme si je tombais à nouveau en adolescence.
Foutu cerveau criblé d’angoisses ; j’avais mon lot de tracas à gérer ces derniers temps, et en aucun cas le moment présent était censé en être un. Si j’étais là, c’était avant tout pour me changer les idées ; ce dont j’avais plus que besoin.
J’avais besoin qu’elle soit là.

Ce elle, c’était Hania.
Je l’avais rencontrée au nouvel an, à Times Square, et à l’aune de la remarquable soirée que nous avions passé, nous avions échangé nos numéros. Je n’aurais su décrire précisément la relation qui nous unissait, si ce n’était que nous communiquions -trop- fréquemment, avec une spontanéité nimbée de candeur. Deux inconnus ayant le plaisir de se découvrir peu à peu, loin des a priori que l’on a généralement lorsqu’on rencontre quelqu’un par le biais d’une autre personne. Je lui avais donné rendez-vous à Central Park - un endroit que j’appréciais franchement -, et c’était la première fois que nous allions nous revoir.
La montre a vibré.
Je me suis surpris à sursauter légèrement puis à sourire.
Un banc. Elle était proche d’un banc. J’ai failli éclater de rire ; c’est vrai que c’était plutôt précis, quand on sait l’immensité du parc new-yorkais !Je me suis élancé à sa recherche, et après lui avoir demandé quelques précisions par message, j’ai fini par la retrouver.
Elle était là, assise sur le banc, les joues rosies par la fraîcheur du jour, ses cheveux clairs tombant sur ses frêles épaules.
«Salut. j’ai soufflé, avec un sourire hésitant, et j’ai coupé court à ses excuses. Hé, c’est moi qui ait choisi le lieu. S’il y a quelqu’un de stupide ici, c’est moi.» J’ai eu un rire gêné, et j’ai vite enchaîné. «Ca fait plaisir de te voir.» en sous-titré : j’en avais assez des échanges de message. J’ai porté mon regard un peu au loin, suivant l’allée bétonnée. «On marche un peu ?» J’ai senti qu’elle m’observait, et nos regards se sont croisés lorsque je tournais la tête vers elle. Je suis resté accroché à ses prunelles noisette un instant de trop, et j’ai rapidement détourné les yeux lorsque je m’en suis rendu compte.
J’ai joué les innocents et inspiré une grande goulée d’air, puis j’ai expiré lentement, formant un nuage de vapeur devant moi, en espérant qu’elle ne me trouverait pas bizarre.