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hello, it's your old friend from another life - dexter

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Mar 12 Mai - 13:51
Il est six heures vingt-huit du matin. Jasmin a les yeux grands ouverts et fixe le plafond depuis douze minutes déjà. Ce dimanche marque le début de sa quatrième semaine à New-York. Demain matin, un entretien d’embauche l’attend, un job de libraire qui tombe à pic. Il est nécessaire que la brune décroche ce travail : prévoyante, elle angoisse à l’idée que ses économies soient intégralement sifflées et commence de toute manière à tourner en rond. Elle ne trouvera pas de nouveaux clients si elle ne les cherche pas, et pour ce faire, il lui faut du temps. Et Jaz ne peut se permettre de risquer de se mettre dans le rouge en attendant de se refaire un nom.

En trois semaines, elle a souvent eu le temps de se demander ce qui lui a pris. Ses parents n’ont pas manqué de la harponner à ce sujet, d’ailleurs. Pourquoi quitter sa ville natale, toute sa famille, encore moins un travail gratifiant et rémunérateur ? Jasmin avait eu trop honte pour leur dire la vérité. En clair, elle avait menti. Elle avait feint une mutation express quelques jours avant son départ, fait ses valises et était partie sans se retourner. Ils n’auraient pas compris ses motivations. Elle-même n’est pas sûre de les comprendre, pour être tout à fait honnête. Même après avoir cogité durant des semaines. Alors pour se donner bonne conscience, elle essaie de se convaincre qu’elle a fait le bon choix, qu’elle avait de toute façon besoin de changer d’air et qu’elle peut toujours faire machine arrière.

Sept heures deux. Jaz se lève, elle ne se rendormira pas. Elle a toujours été matinale. Son appartement peu décoré lui fiche le blues – elle qui a toujours adoré mettre ses lieux de vie en valeur n’a pas pu emporter le quart de ce qu’elle souhaitait garder et n’a que trop hâte de pouvoir se permettre quelques achats sans culpabiliser. Elle allume son portable, vérifie ses messages, ses mails, rien d’intéressant pour le cinquième jour consécutif. Pas ce qu’elle attend. La brune se mord la lèvre, agacée. « C’est pas grave. », essaie-t-elle de se convaincre. « C’est vraiment pas si grave. Mmh. » Elle pose son téléphone plus loin et se force à se faire un petit déjeuner correct, un thé, et à les prendre sans regarder son portable du tout. De fait, elle allume la radio et se concentre sur les émissions de la matinale, qu’elle trouve plutôt inintéressantes à son goût ce matin. Pour être honnête, rien ne sera à son goût sinon un signe de vie.

Lundi matin, elle avait trouvé une piste. Une adresse où logerait celui qu’elle était venue expressément retrouver, qu’elle avait traqué quand il avait disparu sans prévenir de San Francisco. Quand il l’avait abandonnée sans possibilité de faire le deuil non seulement d’un proche décédé, mais de cet ami également, qui l’était tout autant. Elle avait cherché sans trop savoir pourquoi – probablement que ça lui donnait un but, une raison de voir plus loin que le jour présent -, avait retrouvé sa trace, déménagé là où il se trouve aujourd’hui. Et lundi, elle avait reçu cette adresse. Alors, mardi matin, elle s’était rendue sur place. N’avait pas osé frapper à la porte. Laissé un mot dans la boîte aux lettres à la place.

Dexter,

Je suis en ville. J’aimerais te parler. On peut se voir ?

Je te laisse mon numéro et adresse au dos.


Jaz.


Jasmin engloutit son petit déjeuner. Elle s’accroche à un dernier espoir : celui de trouver son bonheur dans la boîte aux lettres. Sur les trois heures qui suivent, elle ira vérifier quatre fois. Rien. Toujours rien, nada. Alors elle n’y tient plus – elle emporte sa veste au vol et se rend à nouveau à l'adresse indiquée. Elle veut être sûre qu’elle a contacté la bonne personne. La brune a besoin de réponses à ses questions.

Une fois arrivée, elle se fige, plantée bêtement devant la porte. Elle attend plusieurs minutes comme cela, manque de faire demi-tour environ trois fois, change d’avis, tourne en rond. D’aucun penseraient qu’elle inspecte les lieux en vue d’un cambriolage. Le fait est qu’elle est terrorisée. Mais elle finit par sonner. Son cœur bat à toute allure et elle s’en veut déjà, mais il est trop tard pour faire volte-face.

Elle n’a plus qu’à prier que ce soit la mauvaise adresse.

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Dim 17 Mai - 12:26
Dexter a reçu la note ; il a eu le mémo. Lire ces quelques mots aurait pu ne pas lui faire le moindre effet s'ils n'avaient pas été signés par ce surnom qu'il connait bien. Jaz. Presque un fantôme venu d'outre-tombe ; de sa vie d'avant, en tout cas. Presque. Elle n'est pas morte, elle, elle était bien en vie quand il a fait ses valises pour rentrer à New-York. Il a mis Jaz dans un coin de son esprit, comme si la mettre de côté allait empêcher la souffrance.

Quand Evan est mort, il n'a pas pu supporter San Francisco une seconde de plus. Il fallait qu'il parte ; il fallait qu'il se venge. Il est revenu ici principalement pour essayer de savoir si sa mère pouvait être à l'origine de la plaie béante de son coeur. Et quand il a constaté que ce n'était sans doute pas le cas, il s'est jeté à corps et âme dans l'envie de se venger, sans que rien d'autre ne puisse occuper son esprit fatigué. Il a laissé Jaz de côté, pas parce qu'il ne l'estimait pas ou ne la respectait pas, mais parce que ses traits tristes lui rappelaient sans vergogne les moments consommés à trois, avec un Evan bien vivant qui ne demandait qu'à profiter de la vie. Il était comme ça, simple, du genre à inviter quelqu'un dans leur couple et à le faire dans la légèreté, comme si c'était la chose la plus simple et la plus normale du monde. Dexter a l'impression que ces souvenirs appartiennent à une autre vie, à une partie de lui-même qui est morte avec son mari ce jour-là. Y retourner ne sert à rien ; il ne redeviendra jamais cet homme. Sa vie est ici, maintenant, au Casino ; l'allégresse ne lui reviendra pas. A quoi bon revoir Jasmin dans ces conditions, si ce n'est pour faire souffrir son coeur à lui et la décevoir elle ? Aucun intérêt.

Alors il n'a pas répondu. Il a plié le mot et l'a mis dans son portefeuille, et il a continué à vivre sa vie. C'était sans compter sur le fait que la jeune femme est têtue ; il aurait dû s'en douter.

Il est rare que l'on sonne à la porte de Dexter. Il reçoit peu de monde ici, dans cet appartement dans lequel il vit à peine. La plupart des gens qu'il croise, c'est au Casino ; pas dans cet espace là qui est le sien. Quelqu'un qui sonne le surprend toujours - mais il se dit que ce doit être une erreur. Il ouvre la porte sans y penser, dans un geste machinal, à peine réfléchi - et se trouve rapidement face à la jeune femme. Il se fige, muré dans la stupeur qu'elle ait eu le courage ou le culot de venir frapper après son silence, incapable de lui fournir la moindre réaction. Son coeur s'agite et rapidement, il a l'impression de manquer d'air. Elle est irrémédiablement lié au souvenir d'Evan dans sa tête, et lui qui parvient habituellement si facilement à mettre ce passage douloureux dans un coin de son esprit, sous une bonne couche de déni, se retrouve envahi par le visage de son mari, par leurs souvenirs à trois, les rires entre les murs de leur appartement, leurs balades dans les rues de San Francisco.

- Jasmin, il finit par murmurer, troublé comme il ne l'a pas été depuis longtemps. Je ne pensais pas que tu viendrais.

Il ne le pensait pas, mais c'est logique. Le déni le retient sans doute prisonnier depuis trop longtemps maintenant, la réalité l'a quitté.

- Enfin, que tu reviendrais. Qu'est-ce que tu fais là ? A New-York ?

Il essaye de reprendre le contrôle des nombreuses émotions qui lui agitent le coeur et le cerveau, sa main figée sur la porte, prêt, aussi, à se prendre une vague de reproches dans la figure. S'il était elle, il se détesterait.

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Mer 17 Juin - 14:00
Il est là, dressé devant elle, et Jasmin reste figée. Elle a du mal à assimiler que c’est la réalité. Il faut le dire, elle a longtemps fantasmé une discussion avec Dexter. Elle s’est tout imaginé depuis des mois : elle le secouerait, lui expliquerait à quel point il avait été égoïste, combien elle l’avait maudit de l’avoir empêchée de faire son deuil, d’avoir fui sans accepter ni son amitié, ni son soutien. L’issue n’apparaissait cependant jamais. Elle n’osait pas imaginer de finalité positive où leur amitié reprendrait comme avant, la présence d’Evan en moins, son souvenir en plus. N’arrivait pas non plus à concevoir que Dexter puisse lui claquer la porte au nez en lui sommant de disparaître. Car elle n’avait pas été qu’une invitée de passage au sein de ce couple, ils ne partageaient pas que des moments charnels, qui aujourd’hui semblent d’ailleurs bien futiles aux yeux de Jasmin. Avant tout, ils avaient été proches. Elle les avait aimés sincèrement, le genre d’amour qu’on porte à des amis chers. Et aujourd’hui, la brune ne peut pas, ne veut pas, croire que cet allié du passé soit capable de l’éconduire alors qu’elle avait tant cherché à le retrouver. À trouver des réponses.

Et il ne le fait pas. Du moins, pas encore. Il est au moins aussi troublé que Jasmin, n’a probablement pas pensé à elle depuis plus de six mois, mais il ouvre la porte et pose des questions. Se souvient-il encore seulement de qui elle est ? Oui, évidemment que oui. « Je… » Ses mots butent. La brune se sent incroyablement bête, sans compter que pour la première fois, elle se rend compte du côté effrayant de sa démarche. Traquer une personne à des milliers de kilomètres jusqu’à sa porte, malgré les raisons qui l’y ont poussée, semble à présent effrayant, malaisant et terriblement triste. « J’avais besoin de réponses, et de changer d’air. San Francisco m’étouffait. », finit-elle par balbutier dans un souffle. « T’as disparu sans prévenir et je crois que me fixer l’objectif de te retrouver m’a tenue hors de l’eau. » Les yeux de Jasmin s’embuent, plein de larmes, mais elle refuse de se laisser emporter. Elle respire longuement et conclut, la voix se brisant au fil des mots : « Je suis désolée, j’aurais peut-être dû te laisser tranquille. C’est terriblement gênant. Et je comprendrais que tu ne veuilles pas me voir ici, et que tu refuses de me parler, mais j’ai besoin de l’entendre de vive-voix. Que je sache au moins ce que j’ai fait. »

Elle recule de quelques pas alors qu’une seule grosse larme coule sur sa joue, impossible à contenir. Jasmin croise les bras, prête à faire demi-tour, bien moins courageuse que les centaines de fois où elle avait imaginé la scène.

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Mar 23 Juin - 21:52
Ca lui déchire le coeur, de la voir là, sur le pas de la porte. Lui ramène automatiquement les souvenirs du rire d'Evan au petit-déjeuner, le matin. Leurs sorties à trois, leurs dîners en ville, le cinéma, le théâtre, la vie quoi. Jasmin a partagé de nombreux moments de bonheur avec le couple ; mais le couple n'est plus. Evan est mort, et l'équilibre qui les faisait tenir tous les trois est ruiné. C'était lui, l'homme drôle. Le gentil garçon, tendre, qui pensait aux autres. L'altruiste. Dexter n'est rien d'autre que le fils Sciarra, et si Evan avait réussi à lui faire dissimuler ses travers, à le faire évoluer, perdre son mari l'a inévitablement renvoyé dans ce monde auquel il s'était convaincu ne pas appartenir.

Et Jasmin est là, à la recherche de questions, les yeux humides puis une larme qui coule, pour chambouler ses plans, remettre les compteurs à zéro, raviver le souvenir de l'homme qu'il était. Celui qu'il n'est plus.

- Entre, il finit par dire, car il ne peut pas imaginer de la laisser plantée là, triste. Ce serait indigne de leurs souvenirs, indigne d'Evan.

Dexter n'arrive pas à savoir comment il doit se comporter, cela dit. Il a peur d'avoir oublié. Mais il lui doit au moins de lui expliquer que ce n'est pas sa faute, qu'elle n'a rien fait, qu'elle n'y est pour rien. Il ne comprend même pas comment elle peut penser autrement, d'ailleurs. Sans doute parce qu'il l'a privée du deuil, de l'enterrement, du reste. Il la laisse entrer, et referme doucement la porte derrière elle.

- Tu n'aurais pas dû venir. Je ne suis plus l'homme que tu as connu, c'était trop difficile. Je ne savais pas quoi faire. Je suis désolé pour l'enterrement.

Il balance les informations comme ça, sans ordre, sans logique. Il ne sait pas comment formuler sa pensée autrement. Il prend une inspiration, et l'entraîne vers la cuisine pour qu'elle puisse s'asseoir. L'appartement est impersonnel, vide - il n'est quasiment jamais ici, il faut le dire.

- Ce n'est pas de ta faute. Tu n'as rien fait de mal. Mais tu es associée à lui pour toujours, et je...

Il s'interrompt, pour attraper deux verres et lui donner de l'eau, maladroitement, d'une manière empressée qu'elle ne comprendra sans doute pas.

- Tiens.

L'espace d'un instant, il regarde le plafond. Il ne peut pas affronter son regard, il n'arrive même pas à assimiler sa présence.

- Je suis désolé. Pour tout.

Parce qu'il aurait dû mourir à la place d'Evan, que lui aurait su gérer la situation d'une manière complètement différente. Sans lui briser le coeur, à elle, sans doute.

@ Invité

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Ven 10 Juil - 10:55
Contrariée, Jasmin essuie d’un geste furtif la seule larme qui a réussi à s’échapper à sa vigilance. Elle a grandi dans une famille où on laisse difficilement passer ses émotions, ce qui, sans être toujours très bon psychologiquement parlant, est cependant un atout dans des moments comme celui-ci. La brune avait appris à rester stoïque. En général, elle gardait donc une poker face presque parfaite et déstabilisante, empêchant quiconque d’user de ses émotions. Craquer devant Dexter, aussi logique soit cette réaction, la frustre donc beaucoup.

« Entre », entend-elle alors. Elle relève les yeux qui jusqu’alors fixaient un point entre sa chaussure et le sol. Si elle a ravalé ses larmes pour de bon, en tout cas elle le pense, elle est persuadée que sa détresse est visible. Jaz hoche la tête et le suit à l’intérieur, accrochée à son sac à main comme à une bouée. Dexter est visiblement déstabilisé et elle comprend, se prend aussi à s’en vouloir de débarquer comme une tornade dans les affaires de son – ancien ? – ami qui tentait probablement aussi de se reconstruire à sa manière. Venir tout chambouler des mois plus tard n’est probablement pas juste. L’abandonner sans rien dire ne l’avait cependant pas été non plus.

Il parle, parle, pour dire bien peu finalement, mais les phrases se bousculent, s’entrechoquent sans ordre logique et la brune hoche la tête après chacune d’elles. Elle accepte le verre d’eau, formule un « merci » inaudible avec sa bouche. Ne sachant pas si elle doit l’encourager à continuer ou le couper au vol, elle attend encore quelques secondes lorsqu’il s’excuse. Prend une longue inspiration, une gorgée d’eau. L’atmosphère est pesante, pressée, et Jaz ne sait même plus si elle est vraiment là ou si elle fantasme encore des retrouvailles et si Dexter est bel et bien là.

Alors, elle grimace un peu dans une vaine tentative d’organiser un discours cohérent. « Je ne peux pas te blâmer. » finit-elle par articuler. Elle ne sait pas si elle pense le moindre mot de ce qu’elle dit. Bien sûr, c’est ce que la logique voudrait. Personne ne réagit à la mort de la même manière et le bon sens voudrait qu’elle accepte la décision de Dexter, qu’elle lui ait plu ou non, mais ses émotions en décident autrement. « Je ne devrais pas te blâmer. », elle corrige, sèche d’un coup. Après la honte et la tristesse, c’est la colère qui s’empare vicieusement de Jasmin. « On était amis, Dex. Toi et moi. Et Evan. Vous étiez mes amis les plus proches et du jour au lendemain, j’apprends qu’Evan est… » Le mot ne sort pas, elle bute dessus et décide de ne pas se battre. Alors, elle passe à la suite. « Et que toi, tu as disparu. Volatilisé. »

Elle s’oblige à respirer. Jasmin sait que s’énerver et remettre les fautes sur son ami ne fera pas avancer la situation. C’est plus facile à dire qu’à faire, mais elle se force. Boit une nouvelle gorgée d’eau. Se pose quelques secondes. « Ecoute, tout ce que j’essaie de dire c’est que… » nouvelle inspiration. « J’aurais compris si tu m’en avais parlé. Je t’aurais soutenu si tu en avais eu envie et j’aurais disparu si c’était ce dont tu avais besoin. Je ne dis pas que j’aurais accepté, mais j’aurais compris. Et je suis désolée que ça te soit arrivé, Dexter. Sincèrement. »

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Dim 9 Aoû - 19:10
Il traverse toutes les phases de l’angoisse, à voir son joli visage fatigué dans son appartement impersonnel. Evan aurait détesté cet endroit, cela ne fait aucun doute. C’est d’ailleurs sans doute la raison pour laquelle Dexter l’a aménagé ainsi ; pour qu’il ait la certitude que son défunt mari aurait haït cet endroit autant que ses nouvelles activités et tout le reste. Rapidement, maladroitement, Dexter a déposé les fondations d’une nouvelle vie qui ne lui rappellerait en rien la précédente. Il a contourné la souffrance tant qu’il le pouvait, pour s’offrir du répit. Jasmin, sur le pas de sa porte, ou qui se manifeste par des petites notes abandonnées ci et là, c’est comme une piqure de rappel. C’est comme si elle avait pris Evan par la main pour venir lui montrer l’étendue de la catastrophe - de sa catastrophe, à lui. Les deux vies de Dexter ne peuvent jamais se rencontrer ; du moins, c’est ainsi qu’il voit les choses. Que dirait-elle, sous ses airs égarés, si elle savait ? Si elle rencontrait Ornella ? Jasmin est une femme intelligente, et Dexter ne doute pas qu’elle aura rapidement une idée sur ce que la famille dissimule avec plus ou moins d’audace. Que pensera-t-elle de lui quand elle comprendra ce vers quoi il est revenu ? Et pourquoi est-ce important ?

Elle ne maîtrise pas l’entièreté du problème, et Dexter pêche par excès de confiance en lui. Il a l’impression que ce monde trop complexe dans lequel elle tente de le rejoindre ne lui appartient pas, la rejettera forcément. Mais il la sous-estime, sans doute - et son seul avantage, dans cette bataille perdue, c’est qu’il connait ses erreurs.

- Si, justement. Tu devrais me blâmer, il réplique avec un peu de colère. Personne d’autre que toi ne peux le faire, tu comprends ? Ici, personne ne se soucie de savoir ce qu’il s’est passé ce jour-là. Mais toi, toi tu l’aimais. Tu devrais m’en vouloir, parce qu’il est mort par ma faute, d’une manière ou d’une autre. Il est peut-être mort à cause de mon nom, et peut-être pas, peut-être simplement parce qu’il m’aimait et qu’il voulait me faire plaisir ce jour-là, mais quoi qu’il arrive, s’il était resté entre les draps de l’appartement, il serait toujours en vie, et cette conversation n’existerait que dans nos cauchemars.

Il secoue la tête, agacé maintenant parce qu’il lui semble que son coeur vient subitement de recommencer à battre ; et cette sensation le torture. Il se souvient soudainement du corps sur les pavés, du sang, des flics, de l’odeur, de la détresse. Du sentiment d’impuissance et de déchirure qui lui a bouffé les entrailles quand son cerveau l’a autorisé à comprendre la situation.

- Ensuite je suis parti comme un lâche sans me retourner et tu te pointes ici en prétendant que tu ne devrais pas être en colère ?

Il ne comprend pas. Il s’énerve pour rien, contre la mauvaise personne. Il se sait injuste, intolérant, comme sa mère. Il est en train de céder, il le sait. Il se tient droit, au bord du précipice qui attend chacun des membres de la famille Sciarra, et lentement, il lâche prise. Se laisse pousser par le vent. Bientôt, il sombrera, parce que sombrer signifie qu’il n’aura plus jamais à ressentir cette douleur qui lui agite le coeur.

- J’ai besoin que quelqu’un me déteste, tu comprends ? C’est pour ça que je suis parti, comme ça, sans rien dire. Parce qu’entre Evan et moi, c’est lui qui méritait d’être aimé, et c’est lui qui aurait mérité de vivre. Toi, tu es la seule qui connait la vérité. Tu es la seule qui peut me détester pour ce que j’ai fait.

Ou pas fait, peu importe. Epuisé par cette confession qu’il n’a même pas tenté de retenir, Dexter se laisse tomber sur un des fauteuils de son appartement vide. Il passe une main tremblante dans ses cheveux, chassant la transpiration qui dévale ses tempes. Il a presque l’impression d’être fiévreux.

- Je suis désolé. Je ne voulais pas me mettre en colère... ce n’est pas contre toi, c’est profondément égoïste et j’en suis conscient. Je suis désolé parce que tout ça, ça t’est arrivé à toi aussi. Une part de moi espérait que si je partais, tu serais suffisamment en colère pour ne pas chercher à me retrouver et pour refaire ta vie loin de mes fantômes.

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Jeu 3 Sep - 12:24
Jasmin veut sincèrement faire les choses bien. Si elle ne prétend pas avoir fait le bon choix en débarquant sans prévenir, elle en avait eu besoin. Des mois durant, elle avait laissé les ténèbres prendre le pas sur sa joie de vivre, la consumer lentement jusqu’à ressentir le besoin terrible de tout plaquer – un sentiment dont elle n’a jamais été familière, elle qui avait toujours attaché une grande importance à vivre proche de sa famille et de là où elle avait grandi. Maintenant, Dexter est devant elle. Elle ne sait pas tout à fait à quoi elle aurait dû s’attendre et les différents scénarios imaginés n’ont rien à voir avec ce qui se passe sous ses yeux. Il se dit coupable de la mort d’Evan et Jaz tombe des nues. Jamais elle n’avait pensé à la culpabilité qu’il pouvait ressentir. Pour elle, il va de soi que ce qui était arrivé n’était en effet rien de plus qu’un malheureux coup du sort qui peut frapper n’importe qui, se trouvant au mauvais endroit au mauvais moment.  Elle n’a même pas imaginé que Dexter puisse croire que ce qui était arrivé était sa faute.

Elle l’écoute parler, s’énerver. Jasmin ne prononce pas un mot - trop choquée pour parler, le cœur en miettes, elle ne comprend pas toutes les informations qui lui arrivent. Puis, il se calme. S’excuse. Et le silence.

La brune hoche la tête de longues secondes durant, essaie de trier les informations qu’elle vient d’entendre. « Ne crois pas que je ne suis pas en colère et que je ne t’en ai pas voulu. », articule-t-elle finalement, la voix tremblante et le regard rivé à ses pieds. Elle relève les yeux. « Je l’ai été longtemps et je le suis encore parce que tu as disparu sans me laisser l’occasion de vous dire au revoir. J’ai ruminé si longtemps, j’ai passé des nuits entières, des semaines durant, à réfléchir à la question. J’ai essayé, Dexter, j’ai essayé de passer au-dessus mais j’avais besoin qu’on m’explique et que ça vienne de toi. Maintenant, j’ai deux choses à te dire et je veux que tu m’écoutes, pas juste m’entendre, mais m’écouter sérieusement. »

Elle hausse le ton pour se donner confiance. Juste assez pour montrer à Dexter qu’elle n’entrera pas dans son jeu d’auto-destruction, pas encore assez pour avoir l’air énervée. Elle a l’impression d’entendre dans sa voix celle de sa mère lorsqu’elle tentait de lui donner une leçon importante. « Pour commencer, je ne sais pas ce qui te fait penser que ce qui est arrivé est ta faute, mais je n’y crois pas une seule seconde. Il est sorti et c’est arrivé. Tu n’as physiquement rien fait, tu n’es pas responsable, de fait je n’ai pas la moindre raison de te haïr pour ce qui est arrivé. Toi non plus, tu ne devrais pas te torturer, mais je sais que c’est facile à dire. » Jaz se sent maladroite. Il n’est pas évident de parler de ce genre de choses sans toucher de cordes sensibles, sans faire mal ni prononcer d’énormités. Elle prend une seconde pour respirer et continue : « Ensuite, je suis en colère contre toi, indéniablement. Mais je ne te déteste pas. Ça n’arrivera pas et j’en suis désolée. »

D’un pas hésitant, elle s’approche de son ami et pose une main sur son épaule. Elle ne sait pas comment il réagira et reste suffisamment à l’écoute de son non-verbal pour retirer son geste au besoin. « Je t’aimais autant que lui et tu ne mérites pas de te culpabiliser à ce point. J’aurais aimé pouvoir être là pour toi. Tu ne m’en as pas laissé le choix à ce moment-là, et je ne t’oblige pas à accepter ma présence si tu n’en veux toujours pas aujourd’hui, mais ça me ferait plaisir que tu m’autorises à rester et à t’aider si tu en as besoin. »

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Mar 27 Oct - 15:03
tw: évocation de meurtre, personnage mort

Les jours qui ont suivi l’annonce de la mort d’Evan ont comptés parmi les pires de sa vie. Il a fallu prendre des décisions par centaines - que faire du corps, où organiser les funérailles, faire des dépositions, repenser la soirée de la veille, la matinée, la nuit. Décider, encore et toujours, et il a réalisé à ce moment là qu’il n’avait pas eu suffisamment de temps pour connaître tous les détails d’Evan. Ses souhaits, ses volontés. Il avait beau se répéter cette idée inconcevable dans la tête, la mort lui apparaissait toujours comme une chose stupide et manquant cruellement de sens. Il est idiot, quand on y pense, qu’Evan ait été vivant, jeune et vivant, la veille, et qu’il soit mort le matin. Tout ça n’a aucun sens, aucune explication logique. Aujourd’hui encore, rien n’explique la mort d’Evan. Dexter la tolère tout juste.

Il écoute ce qu’elle dit, il prête attention à ses paroles. Il fuit un peu son regard, par pudeur sans doute. Il n’a pas envie d’être celui qui la renvoie d’où elle vient, et pourtant il sait que ce serait mieux. Quand il l’a rencontrée, il était libre, indépendant. Amoureux. Aujourd’hui, il a retrouvé les rangs familiaux, et Jasmin n’a absolument rien à faire là. Ce serait la mettre en danger que de l’autoriser à rester - mais il n’est pas propriétaire de la ville, ce n’est pas lui qui décide.

- Je n’ai pas besoin d’aide, j’ai besoin d’oublier. Je te remercie pour tes mots, tu sais ? Mais j’aurais pu être avec lui. S’il n’avait pas été aussi bon avec moi, s’il n’avait pas toujours voulu faire les choses pour me faire plaisir, on en serait pas là aujourd’hui. Et puis...

Et puis il l’a tiré loin. Loin des Sciarra, en pensant que le danger finirait par venir de l’intérieur même de sa famille, ce qui aurait peut-être fini par être vrai. Mais n’auraient-ils pas pu être plus en sécurité, aussi ?

- Attendre, c’était trop difficile. Organiser son enterrement, la vente de l’appartement, le départ, tout ça c’était trop difficile. J’avais besoin de vivre le deuil sans que personne ne vienne m’en parler. C’était terriblement égoïste, parce qu’Evan était solaire, je le sais Jaz. Il aurait voulu que vous soyez là. Il aurait voulu que je laisse la chance à ses amis de pouvoir pleurer sur son cercueil. Mais je suis un homme égoïste et moi, j’avais besoin de le garder pour moi, même mort, dans une boîte.

Il y a bien longtemps qu’il n’a pas mis un pied au cimetière. Il n’y arrive pas, c’est trop difficile pour lui.

- Je ne vais pas t’ordonner de partir. Mais je n’ai pas besoin d’aide.

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Dim 29 Nov - 13:14
La situation semble irréelle, comme tirée d’un mauvais film ou d’un rêve un peu trop intense. Jasmin se sent comme extérieure à son propre corps. Les émotions arrivent dans tous les sens, repartent aussi vite, remplacées par d’autres dans un ballet incessant dont son esprit se détache pour se protéger. Il faut dire que c’est inédit. Elle s’était accrochée si longtemps à ce besoin de retrouver Dexter pour recevoir des explications qu’elle n’ose pas imaginer ce qui viendra après, quand elle aura passé la porte d’entrée dans l’autre sens et qu’elle rentrera chez elle. À quoi « commencer son deuil » pourra bien ressembler maintenant qu’elle a reçu quelques réponses.

Elle recule d’un pas ou deux, écoute Dexter avec beaucoup d’attention. Il a compris ce qu’elle voulait dire et c’est tout ce qu’elle demande, rien de plus. Elle hoche la tête par moments, presque frénétiquement. Elle n’excusera probablement jamais son ami mais elle est en mesure de comprendre. Au moins, elle peut faire la paix avec son esprit. Lorsqu’il termine, un sourire triste se dessine sur le visage de la brune. Il clame ne pas avoir besoin d’aide. Elle n’en croit pas un mot. Si vous voulez son avis, il a l’air en grande détresse, mais elle respecte sa décision. « D’accord. », murmure-t-elle les yeux baissés, plus pour elle-même que pour son interlocuteur.

D’une traite, Jaz termine son verre d’eau qu’elle pose sur le plan de travail le plus proche. « Je suis si désolée pour Evan, Dex. » Elle ne l’a pas encore dit, trop centrée sur son propre vécu, son propre besoin. « Si désolée. He was a good man. » Et ils auraient mérité de passer une longue vie tranquille ensemble, elle en est persuadée. Il lui manque, à elle aussi, et n’ose imaginer la peine de son ami. Pourtant, épiloguer ne servirait à rien, alors elle relève la tête et serre son sac contre sa poitrine : « J’avais besoin de quitter San Francisco, alors je resterai encore dans les parages un petit moment. Si tu voulais, je ne sais pas, disons boire un verre, manger une pizza, juste discuter, je ne t’imposerai pas ma présence mais n’hésite pas à m’appeler. Tu as mon numéro et mon adresse. La porte est ouverte. » Ca lui fait une avance sur elle. Elle ne lui parlera de rien s’il n’en a pas l’envie, ne l’obligera jamais à se confier, mais elle sent – et elle a besoin, aussi, égoïstement – qu’une présence de là-bas pourrait lui faire du bien, parfois. « Merci d’avoir ouvert. »

N’attendant pas de réponse, elle fonce vers la porte et retourne d’où elle vient. Il a toutes les cartes en mains pour revenir vers elle s’il en ressent l’envie, elle essaiera simplement de ne pas s’imposer.

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