Le réveil qui sort tire Izzy de sa léthargie et elle pose une main sur son front parce qu'elle a la tête qui cogne un peu. Il faut dire qu'hier, deux bouteilles de vins ont été bues et ils n'étaient que deux. Alors autant dire que ça fait beaucoup de verres pour sa seule personne même si elle était peu enivrée hier soir, sa tête lui rappelle qu'elle a un peu trop bu et qu'elle aurait dû se limiter sur le vin. Mais elle n'y peut rien si c'est son pêché mignon. Quand elle entend du bruit dans la cuisine et Chaussette qui fait les 100 pas devant la porte, elle se résigne à se lever et enfile un sweat trois fois trop grand pour elle avant d'avancer, les yeux encore à moitié fermé pour se diriger jusque la cuisine, traînant des pieds, la tête encore bien trop endormie. Quand elle arrive dans la cuisine, elle voit tout le chantier qu'elle a laissé hier soir et se rappelle qu'elle s'était promis de se lever avant tout le monde pour ranger, mais visiblement, tout le monde a décidé de se lever avant elle. Elle fait alors un petit signe de la main, et s'applique à ranger ce qu'elle a laissé traîné hier, en remettant la tarte au frigo, et en récupérant les deux verres de vin pour les mettre dans le lave-vaisselle. Elle est tellement dans le brouillard Izzy qu'elle ne voit même pas que plus personne ne parle. Elle se tourne alors vers les filles après avoir appuyé sur le bouton de la cafetière pour enfin prononcer un mot « J'ai une pustule sur le nez ? Une tâche aux fesses ? Pourquoi vous ne parlez plus ? » elle récupère alors sa tasse de café en demandant par la suite « Quelqu'un veut un café ? »

J'étais arrivée il y a très peu de temps à New York, et j'étais donc la dernière venue dans la colocation. Ma chambre n'était pas encore bien rangée, il me restait encore quelques cartons à défaire, quelques meubles à acheter pour la décorer. Et s'il y avait bien quelque chose que je n'avais jamais eu à faire avant dans ma vie, mais bien une activité que je me découvrais à détester était de ranger des cartons. Qu'est-ce que j'aurais aimé être dans Harry Potter et pouvoir lancer Wingardium Leviosa pour faire voler toutes mes affaires dans leurs rangements. Malheureusement, j'avais vingt cinq ans et je n'avais toujours pas reçu ma lettre de Poudlard, donc j'allais devoir faire ça à la main.
Ce matin-là, je m'étais réveillée un peu plus tôt que prévu, alors je décidai de me lever, prendre ma Nintendo Switch et la brancher sur la télévision du salon. Un petit peu d'animal crossing de bon matin, c'était devenu un rituel quand je me levais trop tôt à mon goût. Je m'apprêtais à aller me servir un verre de jus de fruit dans la cuisine pour accompagner ce fameux rituel matinal quand je découvris le bazar dans la cuisine. « Mais qu'est ce qu'il s'est passé, ici... » je murmurais, avant de tourner les talons, ayant abandonné l'idée du jus de fruit. Je retournais dans le canapé, la manette de switch en main, levée trop tôt pour investiguer seule. Petit à petit, tout le monde se leva après moi, jusqu'à ce que ce soit au tour d'Isobel. « Non, mais tu as l'air d'avoir passé une sacré soirée, » je lui réponds, un petit sourire sur mon visage. « Et, oui, je veux bien un café s'il te plait, » dis-je tout en sauvegardant mon jeu pour éteindre, par la suite, ma console.

Faire la grasse matinée n'était pas dans les habitudes de Candace, pas plus que de se laisser intimider par qui que ce soit mais elle avait encore besoin de trouver ses marques dans cette colocation. Ou, en tout cas, de déterminer qui se levait aux aurores et qui serait potentiellement dérangée par le bruit qu'elle pouvait faire en préparant son café à six ou sept heures du matin. Aussi restait-elle dans sa chambre, généralement le nez dans un bouquin ou plongée dans un énième épisode de Star Trek, écouteurs vissés sur les oreilles et capuche de hoodie rabattue sur son bonnet de nuit, jusqu'à ce qu'elle entende l'une ou l'autre de ses colocs émerger, notant mentalement qui et quand for future reference. Une fois n'est pas coutume, elle s'était toutefois rendormie quelques minutes à peine après le début de son épisode et n'avait rouvert les yeux, ses lunettes largement baissées sur son nez, qu'au son du générique de fin, un peu perdue et engourdie. Le déménagement, pas spécialement prévu au programme, l'avait vidée et elle avait encore un peu de mal à récupérer, même si ça remontait déjà à plusieurs semaines. Rien qu'une tasse de café ne l'empêcherait de vaincre aujourd'hui cela dit.

Ordinateur éteint et bonnet abandonné sous son oreiller, elle avait donc quitté sa chambre sur la pointe des pieds d'abord, craignant de réveiller les autres occupantes de l'appartement avant d'arriver à la cuisine. Ou, en tout cas, dans ce qui ressemblait vaguement à la cuisine. Quel chantier, murmura-t-elle en attrapant une pomme. De toute évidence, quelqu'un s'était fait plaisir la veille. L'espace d'une seconde, elle se serait presque crue de retour chez son père, après les petites sauteries qu'organisaient ses frangins et leurs potes à la dernière minute. C'était elle, souvent, qui récupérait cadavres de canettes de soda et emballages vides au petit matin. Pas cette fois cela dit. Mâchonnant sa pomme en silence, elle salua les filles d'un bref signe de tête, pas suffisamment réveillée pour engager la conversation. L'arrivée d'Isobel et, surtout, la décision de cette dernière de ranger la cuisine attira néanmoins son attention et Candace la suivit des yeux un instant, un vague sourire aux lèvres. C'était donc elle, la coupable. Café pour moi aussi s'il te plaît. Est-ce qu'on doit s'attendre à une bouche de plus au petit-déjeuner ou tu as juste l'habitude de boire dans deux verres pour faire passer le temps plus vite ? Un poil étrange mais on avait sans doute vu plus bizarre à New York.

Izzy sait pertinemment qu'il faut qu'elle mette un réveil tôt quand elle passe une soirée arrosée pour pouvoir ranger parce que ses colocataires se lèvent avant elle. Tout le temps. Sauf quand elle travaille, Izzy est toujours la première debout. Alors voilà que quand elle débarque dans la cuisine, elle se sent jugée et sa tête d'aigrie et elle, elles ne supporteront pas ça longtemps. Surtout avec un éléphant qui twerk dans chaque recoin de son cerveau. Et quand elle émerge de sa léthargie, elle sourit en voyant ses colocs. Et elle sert deux tasses de cafés en plus, restant silencieuse. Parce que pourquoi pas. Elle cherche que dire, même si de toutes façons, elle sent ses joues qui rosissent au fur et à mesure que le temps passe. Elle les regarde tour et à tour et sort la pecan pie du frigo « J'ai fait de la pecan pie. » Et elle voit bien leur regard. Elle se pince la lèvre avant de répondre à leurs interrogations « Non, il n'y aura pas de bouche en plus à nourrir ce matin. Et non, je ne bois pas dans deux verres pour faire passer le temps plus vite. Et oui, j'ai passé une bonne soirée. » Le ton est rapide, presque trop. Et elle leur tend leurs tasses de café avant de les regarder « Un ami est venu pour boire un verre. C'est tout, et on a un peu trop bu, alors quand il est parti, je suis allée me coucher. »

Vu la tête d'Isobel, les bouteilles vides dans la cuisines ne s'étaient pas vidées toutes seules. Voir les gens heureux autour de moi avait tendance à m'aider à avancer, et là, c'était particulièrement le cas. Je comprenais bien qu'elle avait dû passer une bonne soirée, et j'avais même envie d'en savoir plus. Se nourrir du bonheur des gens pour faire un pas de plus. C'était ma stratégie. « Et c'est qui, cet ami qui t'a aidé à faire des tartes ? » Je lui demandai, sans aucune indiscrétion une fois que ma console était posée. Je m'approchai de la cuisine, et tentais d'échanger un regard avec Candace, qui semblait éprouver le même intérêt que moi envers la situation. Je sentais qu'on allait lui faire subir un véritable interrogatoire, et si elle n'en voulait pas, tant pis pour elle. J'pense qu'on avait déjà enclanché le truc. « Moi j'veux tout savoir. Et j'suis sûre que je ne suis pas la seule, » je dis à Izzy, souriant à Candace. On n'avait pas encore passé énormément de temps toutes ensemble depuis que j'étais arrivée, mais je sentais que mes trois colocataires étaient des bonnes personnes et que je pouvais bien m'entendre avec elles. J'essayais donc de m'intégrer dans le groupe, espérant être appréciée et pourquoi pas, me faire de ces jeunes femmes de bonnes amies. J'en avais vraiment besoin ces derniers temps, et elles ne pouvaient que me tirer vers le haut. Alors, je m'intéressais à elles, à leurs vies, comme ce matin-là, où j'étais bien déterminée à essayer de comprendre ce qu'il s'était passé la veille. A peut-être avoir droit à des ragots croustillants, qui sait. Fallait bien mettre du piment dans ma vie en ce moment, alors si ça devait passer par les histoires racontées par les autres, ça se passerait comme ça.

La subtilité n'avait jamais été l'un des talents de Candace, surtout pas au saut du lit, dans un état d'extrême manque en caféine. Et, certes, elle aurait pu prétendre ne pas remarquer le deuxième verre, ne pas faire la moindre remarque sur le sujet et attendre patiemment son café mais le filtre vie-en-société généralement branché entre son cerveau et sa bouche n'était pas encore fonctionnel. Pas qu'il le fut vraiment le reste du temps mais au moins, si Isobel prenait mal la question, Candace pourrait prétendre ne pas être assez réveillée pour être polie. Fort heureusement, l'institutrice semblait plus gênée qu'irritée. Oh, oh, oh. Il y avait quelque chose de louche là-dessous. Une fois le café servi, Blaise, bless her heart, dit tout haut ce que, clairement, elle et Candace pensaient tout bas. Le nez dans sa tasse, l'étudiante retint à grand peine un ricanement et, après une brève gorgée, se redressa pour offrir une mine faussement solennelle aux deux filles. Question de sécurité franchement, New York est plein de gens, um, étranges. D'où sort-il, que fait-il dans la vie, comment s'appelle-t-il ? Tu sais, juste pour nous rassurer. Ou pour s'assurer des résultats lors d'un petit background check sur Facebook et autres plateformes. Rien de bien méchant. Juste de quoi se rassurer. Et, ok, satisfaire sa curiosité.

Elle aurait dû nettoyer hier soir, elle le savait. C'était mal compter sur ses colocs que de se lever après elle, après une soirée où elle avait pas mal bu et picoler. Quelle idiote. Mais bon, elle apprendra de ses erreurs, c'est ce qu'elle se dit. Elle faisait une grimace à Blaise avant que Candace ne prenne la relève, Izzy noyait sa gêne dans sa tasse de café, buvant une gorgée peut-être un peu trop rapidement si on en juge à la grimace qu'elle fait, elle qui a l'habitude d'attendre cinq bonnes minutes que la boisson refroidisse. « Il sort de chez lui, il fait le travail qu'il... » Izzy se rend compte qu'elle ne s'en sortira pas, et elle s'humidifie les lèvres en soupirant, levant les mains en l'air pour dire qu'elle va arrêter de blaguer, que ce n'est pas drôle et qu'elle en a conscience « Il s'appelle Rhys, il est banquier, je crois, et euh, il sort de l'école où je bosse ? » Elle lève les yeux au ciel avant de poser ses deux mains sur le visage pour arrêter d'être rouge écarlate avant de les regarder chacune leur tour « C'est un parent d'élève. » Oui, voilà, et elle se dit qu'elles vont lui dire que c'est une aberration, qu'elle ne devrait pas. Et Izzy se demande bien si elle ne serait pas d'accord avec elle, au fond. Elle hausse les épaules « Mais le point positif, c'est qu'il reste de la tarte, dans le frigo. Si vous voulez. » Non Izzy, tes tartes ne te sauveront certainement pas pour cette fois. Malheureusement.

Les questions de Candace, me firent ricaner. Je ne le cache même pas, c'est clairement digne d'un interrogatoire d'une série policière. D'ailleurs, elle pose les questions au second degré -enfin, je crois- mais au final, je pense que les questions en sont de bonnes. Moi je veux vraiment avoir toutes ces réponses, on ne sait jamais quand même. « Oh ben... » je bois une gorgée de mon café bien chaud, une boisson que je ne refuse jamais par ces temps-ci, avant de poursuivre. « un parent d'élève ? » je m'étonne, souriant comme une gamine qui vient d'apprendre un secret qu'elle ne va pas garder pour soit très longtemps. « Tu perds pas le nord, Isobel. » Et à ses mots, je lève mes fesses de ma confortable assise et me dirige vers le frigo. Je sors la dite tarte et fouille le tiroir à couverts pour prendre un couteau. Je lève les yeux vers mes deux colocs en faisant un signe de tête vers la pâtisserie, pour leur demander silencieusement si je leur en coupe une part. Parce que moi, on me propose du gâteau: j'accoure. Mais ça ne va pas non plus m'empêcher de poursuivre la conversation trop intéressante dans laquelle nous étions plongées.

L'espace d'une seconde ou deux, Candace eut presque l'impression d'être de retour chez son père, quelques années en arrière, à interroger l'un ou l'autre de ses frères. Presque, oui. À la place d'Isobel, ils auraient sans doute tenté de fuir. Ou de balancer des menaces aussi vides que ridicules, voire d'acheter son silence. Au lieu de ça, sa colocataire préféra le chemin de l'humour. Ou du mensonge ? Il était un peu trop tôt pour les nuances et Candace haussa un sourcil derrière son café devant la posture clairement défensive adoptée par sa colocataire. Mais y'a pas une close dans le règlement de ton école pour ce genre de choses ? s'enquit-elle, feignant le choc tandis que Blaise s'occupait de la tarte. Une excellente distraction, si Isobel avait été seule du moins. Une toute petite part pour moi s'il te plaît, lança l'étudiante à Blaise avant de reporter son attention sur Isobel, et il a juste envie de se faire un peu de tarte de temps en temps ou il a l'intention d'acheter la pâtisserie ? Rien de mieux qu'un peu de caféine pour élever la conversation. Ou les sous-entendus.

note to self : ranger avant d'aller dormir. Isobel se sent un peu mal à l'instant T parce qu'elle n'avait pas prévu d'avoir un interrogatoire digne des plus grandes séries policières du monde. Izzy ne peut s'empêcher de glousser face à la remarque de Blaise « J'aurais préféré que ça en soit autrement figure toi. » Et Candace semble avoir compris, Izzy la pointe alors du doigt pour appuyer ses propos « Je n'en sais rien, je vais pas non plus aller demander à mes collègues... J'en veux bien un petit bout aussi s'il te plaît. » Et Izzy baisse la tête avant de poser ses mains contre sa nuque, elle a besoin de réfléchir. Elle ferme les yeux avant de les rouvrir pour regarder Candace en riant « J'en sais rien. Acheter la pâtisserie, des tartes de temps en temps... » Elle hausse les épaules en soupirant avant de boire une gorgée de café et regarder ses colocataires « C'est une mauvaise idée hein ? » Parce que oui, ça l'ait forcément. Elle sait qu'elle va sûrement devoir faire un choix un jour et Isobel n'est pas douée pour les choix. Absolument pas. Mais ce qu'elle sait c'est que les filles seront là pour elle. Toujours.

Alors que je coupe une part pour chacune de mes colocataires, je garde l’oreille tendue pour écouter ce qu'elles disent. Parce que faut bien le dire, j’ai beau adorer les tartes, elles, elles me détestent, et je galère un peu à faire des parts droites et à ne pas briser la patte en mille morceaux. Mais je m’en sors quand même, et je dépose trois parts, dans trois petites assiettes. « J’pense que la réponse est dans la question, Iso. » je réponds simplement à l’institutrice. J’ose même pas imaginer comment j’aurais réagi si ça m’était arrivé quand j’étais encore prof moi aussi, dans le Minnesota. Oh boy, ça aurait été un sacré dilemme. « Si ça se sait, tu sais toi-même les risques que t’encoures. » Je viens placer les assiettes en face de mes deux colocs, accompagnées de petites cuillères. On va faire semblant que les parts sont droites et se valent, hein, s’il vous plaît. « Ca fait longtemps que tu le connais ce type ? » Parce que si jamais il lui plaît vraiment, moi je crois assez en le destin avec un D majuscule pour lui dire que ça pourrait se tenter. Mais il faudrait que le mec en vaille vraiment le coup.

Candace était plutôt mal placée pour juger qui que ce soit et leur vie privée. Sentimentale. Sexuelle. Whatever, peu importe la nature de la relation, si il s'agissait de la voir s'épanouir, ce n'était certainement pas auprès de Candace Jordan qu'il fallait s'orienter. Ce qui ne l'empêcha pas d'approuver la remarque de Blaise d'un humhum discret, hochant la tête. Après tout, il y avait des leçons à retenir des désastres. Et l'échec amoureux ? Candace en connaissait un rayon. Elle oublia un instant les problèmes de cœur de sa colocataire, fermant les yeux au dessus de son café, avant de les rouvrir pour découvrir sa part de tarte. Remerciant Blaise d'un bref sourire, elle s'attaqua à son petit-déjeuner sans grande élégance. Qui pouvait refuser de la pecan pie de toute façon ? Personne, pas même Candace et son habituel manque d'intérêt pour le petit-déjeuner. Je veux pas me mêler de ce qui me regarde pas, commença-t-elle, la bouche pleine, avant de s'interrompre. Il était un peu tard pour ça. Bon, clairement, c'est exactement ce qu'on est en train de faire déjà mais peu importe. La question, ce serait pas plutôt est-ce que t'as envie qu'il se passe un truc avec ce type, et quoi. Deux questions, du coup. Pas besoin de le connaître depuis des lustres pour avoir envie de se servir de son rouleau à pâtisserie, you feel me ? ajouta-t-elle avec un grand sourire innocent. As far as weird analogies went, that one was not her worst. Loin de là même.

Ce qu'elle aime chez ses colocataires, Isobel c'est qu'elles lui disent les choses avec tact et fermeté, elle ne tourne pas autour du pot et surtout, elle ne lui dise pas ce qu'elle espère entendre. Alors quand Blaise lui répond, Izzy souffle et passe une main derrière sa nuque, elle pourrait se cacher derrière sa tasse de café si ça lui était possible. « Oui, je sais. » Et ça lui fait bizarre d'être autant sur la défensive, elle qui aurait aimé ne serait-ce qu'une fois ne pas se prendre la tête, voilà qu'un baiser et tout ses principes se font la malle. « Depuis la rentrée scolaire. » Pas plus loin et elle l'avait bien remarqué la première fois, mais comme habituellement, elle avait fait preuve d'un excès de dépréciation de soi et de manque de confiance en elle que cela en était affligeant. Et tandis qu'elle tentait de répondre à Candace, elle manquait d'exploser de rire à l'entente de ce sous-entendu. Elle se calme en pinçant ses lèvres avant de regarder Candace « Je ne sais pas si j'ai envie qu'il se passe quelque chose. Mais il me fait du bien en tout cas. » Et elle écarquille les yeux face à ce qu'elle vient de dire « Mentalement parlant. Et oui, je confirme il ne faut pas le connaître depuis des lustres pour vouloir utiliser son rouleau à pâtisserie. Mais je n'en ai pas encore vu la couleur si c'est ce que vous voulez savoir. » explique t-elle innocement avant de regarder tour à tour ses colocataires « est-ce que c'est normal d'être morte de trouille comme ça ? » Parce qu'au fond, c'est inédit pour Izzy de commencer à ressentir des choses comme ça et surtout, que la perosnne assume ressentir les mêmes choses qu'elle. Ou peut-être qu'elle a rêvé. Elle n'espère pas en tout cas.

J'avoue que je n'ai pas essayé une seule seconde de me retenir de pouffer de rire, entre les allusions de Candace et Isobel qui s'emmêlait les pinceaux. Debout, un coude appuyé sur le comptoir, je me coupe un morceau de ma part de tarte, en écoutant ce que les filles sont en train de dire. « Que t'en ai vu la couleur ou pas... » j'avale mon morceau de tarte avant de finir la phrase, un léger sourire dessiné sur mes lèvres, « je veux pas le savoir. » Je n'ai pas envie de connaître tous les détails, Dieu merci. Même si c'est toujours bon à savoir, parce que ça veut dire qu'il n'est pas trop tard pour tourner les talons si jamais elle n'est pas sûre de vouloir risquer son job pour l'homme. « Mais oui, c'est normal d'avoir la trouille, comme tu dis. Tu sais, on ne peut pas vivre sa vie guidé par la peur, sinon, on ne fait plus rien. » Vous vous imaginez, si j'avais écouté ma peur quand je suis partie de chez moi, je n'aurais jamais atterri à New York, je n'aurais pas fais les rencontres que j'ai faite, je n'aurais pas recommencé ma vie comme j'ai décidé de le faire récemment. La Blaise d'il y a six mois aurait dit à Izzy de tout arrêter, que c'est trop risqué, qu'il faut suivre les règles. Mais la Blaise d'aujourd'hui a simplement envie de lui dire : « Il faut que tu t'écoutes. Si t'as vraiment envie de jouer au rouleau à pâtisserie avec lui et que tu pense que c'est une bonne idée, fais le. » C'est une adulte, elle sait à quoi elle joue et les conséquences que cela pourrait avoir. Tant qu'elle en est consciente, c'est le principal. Et puis, je ne la connais pas encore super bien Isobel, mais je sais déjà que si jamais ça se passe mal, elle saura retomber sur ses pattes.

Un ricanement amusé échappa à Candace devant l'aveu innocent d'Isobel. Des années à supporter le locker talk de ses frères l'avaient définitivement préparée à entendre — et à adopter, sans doute aussi — les plus graveleuses des expressions quand il était question de sexe. Il en fallait plus pour la choquer ou, peut-être, bien moins. Tant de candeur avait quelque chose de rafraîchissant, de déstabilisant aussi, d'autant que Candace n'était pas certaine de pouvoir formuler la moindre réponse à pareille question. Elle avait rayé toute mention de romance de sa vie après Esteban et avait tendance à foncer tête baissée sans s'interroger dans la facilité quand il s'agissait d'interactions physiques. Dénuée d'inspiration, elle ouvrit la bouche sans très bien savoir quoi dire, finalement sauvée par Blaise et une autre de ses fulgurances de sagesse. Plus ou moins d'accord sur le fond, l'étudiante acquiesça vivement, agitant un index d'approbation dans la direction de leur very own personal Yoda des relations. Totalement d'accord avec Blaise. Si t'en as envie, qu'il en a envie, franchement, fonce. Dans le pire des cas, bon, il est pas très doué pour se servir de ses ustensiles ou il sait pas manger une tarte correctement, je sais pas, cette métaphore va trop loin. Au moins, t'auras tenté l'expérience, tu vois ? Et qui sait, peut-être que vous allez faire une super tarte ensemble. Surtout n'hésites pas à partager la recette, tout le monde ne rencontre pas le pâtissier de ses rêves au boulot. Ou au Starbucks du coin. Définitivement pas, non, non. Le nez dans sa tasse, Candace retint une grimace en imaginant une seconde ses collègues, ignorant soigneusement toute autre suggestion de son esprit à moitié réveillé. Oui, non, il était beaucoup trop tôt pour ce genre de conneries. Pas que je sois jalouse. J'ai absolument zéro envie de coucher avec un de mes collègues. Ou n'importe quelle personne je peux croiser au boulot, ew, non, ajouta-t-elle avec un frisson.

C’était une conversation bien trop sérieuse pour Izzy dès le matin, il lui aurait fallu au moins deux ou trois tasses de cafés supplémentaires pour qu’elle puisse deal with cette conversation mais elle assumerait ses inquiétudes et ses doutes avec ses colocataires sans aucune honte ni aucun regret. Elle ne peut s’empêcher de glousser face à la demande de Blaise et elle se note intérieurement d’être discrète si jamais un jour, elle voit la couleur du rouleau à pâtisseries de Rhys. Et elle ne peut s’empêcher de sourire face aux mots de ses colocataires qui savent comment la faire rire, la détendre et lui mettre du baume au coeur. « Well, j’espère qu’on ne fera pas qu’une tarte ensemble, ce serait du gâchis de ne rester que sur une seule tarte, mais bon, c’est uniquement mon avis. » rit-elle, en sentant ses joues qui se teintent de rouge. Elle a l’impression d’être une adolescente qui fait face à ses premiers émois. Izzy hausse les épaules face à l’assomption de sa colocataire et elle les regarde chacune leur tour avant de prendre une gorgée de café « Je peux toujours voir s’il a pas des ingrédients supplémentaires pour les tartes, si vous voulez. Si c’est de même qualité que les siens, moi je dis que vous ne perdriez pas au change. » Mais pour cela il faudrait qu’Izzy lui explique qu’elle a parlé de lui, qu’elle veut des numéros pour ses colocataires et peut-être qu’elle risquerait de griller toutes ces chances de faire des tartes avec lui, et rien que de penser à cela, ça la rend triste. Mais elle assumerait pleinement, ce ne serait pas la première fois.

Un regard furtif vers Candace, car sa remarque me fait tilter un peu. Ce qu'elle avance, est-ce que c'est vrai ? Ou a-t-elle un crush sur l'un de ses collègues de travail ? « Quelque chose s'est passé au boulot, Candace ? Besoin d'en parler ? » Je dis ça avec un petit sourire, parce que je la taquine un peu, si ça se trouve elle pense sincèrement ce qu'elle dit.
« Faites un buffet complet, si jamais. » Je hausse les épaules, poursuivant la métaphore toujours plus loin. Mais après tout, je pense qu'Isobel a bien besoin de se faire plaisir à elle-même, ce sont les petites choses de la vie qu'on a tendance à se refuser, parce que ce n'est pas bien ou encore, on se demande ce que les gens diront de nous si jamais ça se sait. Oh, je ne blâme pas cette manière de penser, je la comprends même, je suis la première à avoir peur du regard des autres. J'admire cependant ceux qui vivent leur vie comme ils l'entendent, sans regarder l'opinion du voisin de palier. J'aimerais pouvoir en faire autant. « Si jamais, précise bien à ton pâtissier que perso, je sais pas pour Candace, mais j'aimes toutes les types de tartes. Pour l'entrée, le repas, le dessert, sucrées, salées, ou même les deux. » Je porte mon mug de café à mes lèvres, marmonnant dans la tasse « je mange de toutes les tartes, moi. » avant de boire de ma boisson chaude pour me remettre les idées au clair après toutes ces allusions qui se sont glissées au fil de la conversation.

Il était certainement bien trop tôt pour ricaner aussi fort mais there was only so many euphemisms un esprit mal placé pouvait encaisser. Et Candace avait clairement atteint sa limite. Secouée par un rire qu'elle avait bien du mal à contrôler, elle reposa sa tasse de café sur la table, tâchant tant bien que mal de retrouver ses esprits. La question de Blaise, curiosité à peine voilée, l'aida à recouvrer son calme et un sourcil arqué, elle haussa les épaules. Au boulot ? Non. Sur le chemin ? Peut-être. Disons juste que j'ai un nouveau Starbucks préféré et c'est une affaire en cours, éluda-t-elle avec légèreté. Nul besoin de s'attarder sur une histoire qui n'en était pas une. Pas vraiment. Elle porta sa part de tarte à ses lèvres, espérant que ses colocataires n'insisteraient pas, et se laissa bercer par le bavardage de Blaise. Si elle était tout à fait préparer à entendre une nouvelle métaphore tendancieuse vaguement liée à la pâtisserie, Candace n'avait cependant pas anticipé la moindre confession. Surprise, elle se redressa dans une quinte de toux et lâcha le reste de sa tarte sans grande délicatesse. Um, je, euh. 'N'avais pas l'intention de faire le moindre coming out au saut du lit' était une option, jouer le combo vague déni/hétérosexualité implicite était une autre, qu'elle connaissait bien d'ailleurs. Je mange de toutes les tartes aussi, je, euh. Je laisse juste pas d'avis sur TripAdvisor parce que ma famille n'est pas spécialement au courant, ajouta-t-elle en baissant la tête. Hello guilt and shame my old friends.

Izzy n’est pas assez éveillée pour remarquer la remarque de Candace et il faut dire qu’elle s’en veut un peu mais elle se rattrapera plus tard. Mais la réponse de Candace tire un petit sourire en coin à Isobel « On aime les affaires en cours mais parfois, on peut faire le choix d’en parler ou non. » rétorque Izzy en souriant, comme pour lui indiquer qu’elles ne jugeront pas. Et Izzy rigole encore plus fort quand Blaise parle de buffet « Je verrais, ce n’est pas une décision qui n’appartient qu’à moi. » explique t-elle, encore à moitié brouillée par le sommeil et la petite nuit qu’elle a passé. Une nouvelle gorgée de café, elle imprime la phrase de Blaise et ne peut s’empêcher de sourire, les confidences au petit-déjeuner, c’est ce qu’elle préfère dans cette colocation. Une nouvelle gorgée de café et Izzy lève un pouce au niveau de Blaise pour lui dire qu’elle a imprimé l’histoire avant de regarder Candace qui manque de s’étouffer « Ça va, Candace ? » demande Izzy, les sourcils froncés, un peu inquiète. Et elle comprend un peu pourquoi sa réaction. Elle sourit alors et dépose une main sur celle de sa colocataire « Pas besoin de donner d’avis sur tripadvisor. » explique t-elle en haussant les épaules. « Tu sais, je n’ai pas mis d’avis sur tripadvisor non plus, même si ma famille est au courant, je n’y pensais pas. » Une main toujours celle de Candace, elle reprend « Mais je suis autant sucré que salé, et ça ne dérange personne. Heureusement encore. » Et Izzy se lève pour rallumer la cafetière, consciente de toutes les confidences qui viennent d’être faites. « Quelqu’un reveut un café ? » Histoire de faire passer la pilule de ces conversations.

Faut croire que de rouleau à pâtisserie fictif, on en est venu à faire des révélations de bon matin. La discussion semble partir dans tous les sens, et ce n'est pas pour me déplaire, tout le monde sait que j'aime passer du coq à l'âne sans transition. « Vous avez toutes des affaires en cours, la chance. Ne me jugez pas si je prends votre vie amoureuse comme un feuilleton télé, c'est juste que la mienne est plus vide que le Sahara, alors bon. » Je hoche vivement la tête une première fois quand Izzy dit à Candace qu'elle a le choix d'en parler ou pas, puis une seconde fois quand elle avoue que ce n'est pas seulement son choix à elle en ce qui concerne le parent d'élève.
Un regard pour Candace, qui se veut compréhensif, mais surtout pas antipathique. Je comprends totalement pourquoi elle n'a jamais laissé d'avis sur TripAdvisor -comme elle dit si bien-, les gens peuvent être amené à juger très rapidement. Trop rapidement. Je ne connais pas sa famille, donc je ne me permettrai pas de donner mon avis sur la situation, de toute façon ce n'est pas ma place. « Je suis sûre que parfois, on a peur de la réaction des personnes autour de nous et on s'en fait pour rien. » Et je m'arrêterai là, parce que je ne veux surtout pas aller trop loin et dépasser la limite. « Je veux bien. » Parce que je ne dis jamais non à un second mug de boisson chaude pour me donner un coup de fouet dès le matin. Je frotte la paume de ma main sur mon front et lâche un long soupire. « Sinon, je vais aller me balader un peu dans la ville, repérer les cafés et les boutiques sympas. Vous avez des adresses à me conseiller ? » Après tout, je suis nouvelle en ville, et les filles ont l'air d'habiter ici depuis bien plus longtemps que moi, j'ai donc besoin d'un conseil ou deux pour éviter les endroits craignos.

Dans la longue liste des scénarios dans lesquels Candace s'était imaginée un jour évoquer sa sexualité, un petit-déjeuner avec ses colocataires n'était clairement pas en pole position. Blaise et Izzy n'étaient pas non plus le public cible qu'elle avait en tête lorsqu'il lui arrivait de se faire peur et de penser à ce qui se passerait si elle admettait sa bisexualité à voix haute. Et rien, nada, nothing, nichts, niente. Le ciel ne lui tomba pas sur la tête, ses colocataires ne bondirent pas en arrière en affichant leur dégoût, rien de tout ce que Candace avait pu imaginer dans ses cauchemars les plus tristes et dramatiques n'arriva — une petite voix dans sa tête lui rappela qu'elles ne la connaissaient pas tant que ça au final et qu'elles étaient bien différentes de son père et de ses frères. L'étudiante se tassa néanmoins un peu plus sur sa chaise, vaguement mal à l'aise. Elle n'était pas encore assez caféinée pour supporter cette double dose de confidence — Jo et, well, the rest — si tôt dans la journée. Par bonheur, Izzy n'insista pas, la gentillesse incarnée — on l'imaginait sans mal dans sa salle de classe, à envelopper ses mini-humains dans une couverture de bienveillance — et Candace se contenta d'un sourire un rien forcé, préférant ne pas corriger Blaise. Sa vie amoureuse, ha, ha. Ce qu'elle faisait avec Jo n'avait rien de romantique, loin de là mais elle s'était assez confiée pour la journée, voire pour l'année. Eut-elle été moins bien élevée qu'elle les aurait planté là, sans un mot, pour aller se réfugier sous les draps et oublié ce moment de gêne mais elle pouvait déjà entendre son père lui faire la morale. Candace ne bougea donc pas en sentant la main d'Izzy recouvrir la sienne, parvenant même à lui offrir une version sincère de son sourire, une vague de chaleur lui réchauffant le cœur sans prévenir. Elle n'avait jamais expliqué à qui que ce soit ce qui l'empêchait d'être tout à fait honnête avec sa famille, pétrifiée dans sa crainte du rejet et sa honte d'avoir de telles appréhensions à propos de daddy dearest et de sa fratrie. Il ne lui était même jamais venu à l'idée qu'en parler à des gens susceptibles de comprendre ou même d'avoir des expériences similaires pouvait la rassurer de quelque manière que ce soit — and yet, here she was. The human experience, wild. Je v-veux bien du café aussi. Merci, ajouta-t-elle après une brève pause de réflexion. Pas juste pour le café mais, um. J'en ai jamais parlé à personne. Des tartes ou, um, du reste. Donc, you know, merci. You're pretty cool people. An understatement, if you asked her mais Candace n'était pas en capacité d'être plus éloquente.

Un peu plus à l'aise avec le changement de sujet offert par Blaise, elle se redressa, pensive. Le Lost Planet est un bar très cool mais tu connais déjà, non ? Je t'enverrai une liste. Pour les cafés, en tout cas, le reste... je fais pas vraiment les boutiques, j'ai jamais le temps donc j'y connais pas grand-chose, lâcha-t-elle en fronçant le nez. Faire du shopping, quel cauchemar.

Izzy adorait ses colocataires et elle était ravie de pouvoir les découvrir un peu plus, même si c’est à ses dépends, elle aurait prit le temps de ranger cette foutue cuisine, rien de tout cela ne serait arriver. Elle aurait prit le temps de ranger avant d’aller se coucher, elle aurait été tranquille. Maintenant, elle devait assumer cette conversation mais aussi ranger cette foutue pièce. Et autant dire qu’elle avait une flemme qui lui aurait valu un médaille d’or aux jeux olympiques. A la deuxième tournée de café qu’Izzy offrit avec plaisir -et que tout le monde a payé, soyons bien clair- elle regardait Candace et lui offrit un doux sourire « Avec plaisir, je ne te dirais pas qu’on parle de tartes et de rouleaux à pâtisseries quand tu veux, mais si tu en ressens le besoin, je peux essayer de te trouver la recette du bonheur. Et toi aussi, Blaise. » rajouta Izzy, à la fin de sa phrase en se tournant vers sa deuxième colocataire. Elle prit une gorgée de café et réfléchit un instant en regardant Blaise « Oui, le Lost planet j’ai dû y aller une fois… Les patrons sont sympas. Après si tu veux des fringues un peu vintage je peux te conseille : Hamlet's Vintage » Izzy réfléchit aussi vite qu’il ne lui était possible de réfléchir et elle plissait les yeux et fronçait les sourcils « tu peux aussi aller à Greenwich Village ! » C’était l’un des seuls endroits où elle allait pour faire du shopping. « Sinon il y a aussi le Meow Parlour, un bar à chats, et Mira Sushi, pour les sushis ! » Izzy ne retenait souvent que les endroits pour se nourrir et était certainement catégorisé comme un estomac sur pattes, mais elle n’en avait pas honte, loin de là.

Comment aurais-je pu croire, ce matin en me réveillant et entamant une discussion avec les filles sur la soirée mouvementée d'Izzy d'hier soir, qu'on allait finir par se faire des confidences de la sorte les minutes à venir. Candace nous remercie, et je ne suis pas trop sûre de quoi exactement. D'avoir écouté ? De ne pas avoir jugé ? Ou juste d'être là ce matin, à glousser en sa compagnie ? Incertaine, mon sourire s'attendrit tout de même, parce que quelque soit la raison de ses remerciements, c'est pour moi totalement normal de pouvoir avoir ce genre de discussion avec mes colocs, qui, j'espèrent bien, finiront par devenir de vraies amies. « La recette du bonheur ! Sympa celle-là ! Mais oui, en vrai quelque soit le sujet, je suis toujours là aussi si jamais vous avez besoin les filles. » Parce que c'est comme ça que commencent les bonnes amitiés, il faut pouvoir compter les unes sur les autres, et pouvoir discuter de tout pour se donner les meilleurs conseils entre nous quand il le faut.

Un changement de sujet par la suite, parce que j'ai besoin d'aide pour me trouver les endroits sympa de la nouvelle ville dans laquelle je viens d'atterrir. Et je compte bien me balader dans New York aujourd'hui pour faire du repérage. Il va d'ailleurs falloir que je me renseigne un peu mieux sur toutes les lignes de métros, car je ne peux pas faire tous les quartiers que j'ai prévu de visiter aujourd'hui à pied, et malheureusement pour moi, je ne possède pas de gyropode pour me soulager dans ma balade. Il faut aussi que je fasse attention aux endroits dans lesquels je me retrouve seule, je ne suis plus dans ma petite ville tranquille du Minnesota, mais bien dans une sacré mégalopole, et j'ai vu assez d'histoires de true crime pour savoir que quand on est une fille seule, si on ne veut pas se retrouver face à des canidés, il faut éviter certains quartiers. « Oui, le Lost Planet, j'y ai été plusieurs fois déjà ! J'ai connu grâce à un ami d'internet, j'ai d'ailleurs galéré à trouver la première fois, j'avais mis un gps et il m'a fait passer par un chemin plus alambiqué qu'autre chose. » Mais dès la seconde fois où je m'y suis rendue, j'ai trouvé l'adresse beaucoup plus facilement. Parfois la technologie nous complique la vie plus qu'autre chose. « Oh j'irai voir la boutique vintage, ça peut être super cool ! Il n'y en avait pas beaucoup là où j'habitais avant. » En même temps, il n'y avait pas grand chose, là-bas, comparé à ici. Le truc le plus incroyable que j'ai vu dans mon ancienne ville, c'était un spectacle, d'un piètre prestidigitateur. Enfin, c'était ce qu'il faisait croire, puisqu'il n'y avait rien de spectaculaire dans son show, on voyait très bien les fils de pêche briller sous la lumière des spots. « Oh il font des commandes à emporter au Mira Sushi ? Si vous voulez, je nous en ramènerai ce soir, enfin, si vous n'avez rien de prévu. » Je ne veux pas non plus m'imposer dans la vie des filles. « Sinon on peut se faire ça un autre jour, comme vous voulez. »