La nouvelle version a été installée cute ! Pour découvrir les nouveautés c'est par ici & pour commenter c'est ici
S'intégrer sur un gros forum, le mode d'emploi excited A découvrir par iciii avec toutes les initiatives mises en place !
-28%
Le deal à ne pas rater :
Brandt LVE127J – Lave-vaisselle encastrable 12 couverts – L60cm
279.99 € 390.99 €
Voir le deal

take a deep breath, today is over.

@ Invité

avatar
   
#
Mer 13 Jan - 14:29

Confortablement installée dans le canapé, je sirote un jus de fruits tout en parcourant les pages du journal sans grand intérêt. Je suis fatiguée de ma journée de travail et un peu contrariée de ne pas être avec Aleks. Il travaille et n’est pas encore rentré à la maison. Ayant été à l’initiative de sa reprise professionnelle, je ne peux pas me plaindre d’être seule alors qu’il est 18h30. En général, je ne suis pas encore rentrée non plus à un tel horaire mais les récents événements étant ce qu’ils sont, j’ai décidé de me ménager. J’ai repris les cours de Danois mais en ligne, le temps de la saison hivernale. Cela m’évite de devoir reprendre les transports en commun et d'enchaîner les allers-retours en risquant de me casser une jambe sur le bitume gelé de New York.

Apparemment épuisés de notre balade de tout à l’heure, Maroon et Boule sont dans leur panier commun et s’adonnent à leur activité préférée, j’ai nommé le roupillon. Un sourire amusé étire le coin de mes lèvres avant que mon attention se reconcentre sur le journal que j’ai entre les mains. Des articles sur la récente tempête de neige, sur les objectifs de chacun pour la nouvelle année… On ne peut pas dire que les éditorialistes soient très inspirés ces temps-ci. N’est-ce pas le contre-coup des fêtes ? Comme beaucoup, je n’aime pas le mois de janvier et ce, même si c’est mon mois anniversaire. J’ai toujours l’espoir que ce mois passe vite mais cela ne se produit malheureusement jamais. Alors, comme tout le monde, j’essaie de rester occupée pour ne pas tomber dans une espèce de morosité maladive en partie due au mauvais temps.

Je suis en train de lire un article sur Drive Safe quand j’entends le bruit d’une clé dans la serrure. Sans attendre, je pose le journal et mon verre de jus de fruits sur la table basse et me lève pour accueillir Aleksej à la maison.

- Salut bel homme, dis-je alors que la porte s’ouvre sur un homme en doudoune imposante. Mon homme s’est transformé en bonhomme Michelin. Ce temps nous aura tous jusqu’à la moelle.

@ Invité

avatar
   
#
Ven 15 Jan - 22:15

Si Aleksej adorait l’hiver, la neige, les lumières si particulières du mois de janvier et ses jours qui se rallongeaient à mesure qu’ils passaient, leur retour à New York n’avait pas été une franche partie de plaisir. Il tentait comme il pouvait de donner le change à Solveig. Elle était excitée à l’idée de retrouver leur chez eux, son travail et ses habitudes. Il ne voulait pas lui gâcher ça. Pas après l’avoir laissé tomber au moment où elle en avait le plus besoin. Elle avait besoin d’avancer et il ne voulait pas être celui qui la retiendrait en arrière, qui la freinerait dans son élan.

Alors il avait accepté de retourner travailler sans opposer la moindre objection. Tous les matins, il observait la jeune femme s’affairer avec enthousiasme. Il aimait la voir comme ça. Il n’avait pas non plus besoin de lui rappeler d’y aller mollo. Il savait qu’elle savait. Il l’écoutait avec attention parler de tel ou tel collègue, des nouveaux projets sur lesquels elle voulait travailler, des clients qui lui donnaient du fil à retordre. Il profitait de chaque instant qu’il passait avec elle. Et venait le moment de prendre des chemins différents, des métros différents. Un instant tout à fait anodin. Elle se tournait vers lui et l’embrassait doucement à la commissure des lèvres avant de lui souhaiter une bonne journée. Quelques secondes mêlées de tendresse et d’affolement. Il détestait la voir partir et pourtant il la regardait s’éloigner jusqu’à ce qu’elle disparaisse à l’angle d’une rue ou dans une bouche de métro.

Et le masque retombait. Dans un soupir. Il reprenait sa route sans plus aucun enthousiasme. Las rien qu’à l’idée de devoir traverser cette journée sans aucun but ni objectif. La pile de dossiers en attente qui trônait sur son bureau, qu’il éplucherait une énième fois et qu’il poserait sur une nouvelle pile “en attente”. En attente d’autorisation, en attende de formulaire, en attente de nomination à un poste vacant. La machine administrative américaine et particulièrement New Yorkaise était en berne. Chaque autorisation, chaque dossier, chaque décision devait attendre plusieurs avals pour pouvoir enfin être traité. Aleksej avait l’impression qu’il n’en verrait jamais le bout. Il n’était pas un bureaucrate, il était un avocat et il avait dû mal à se rappeler la dernière fois qu’il avait mis les pieds dans une salle d’audience.

Seule la pensée de rentrer chez lui et l’espoir d’y retrouver la jeune femme lui permettait de tenir tout le jour durant. Mais ce jour-là, il était peut-être plus fatigué que les autres. Plus agité. À midi moins dix, sa veste était déjà posée sur ses genoux et il fixait la trotteuse de l’horloge de son bureau avec une avidité certaine. Il n’avait pas encore de projet pour le déjeuner mais il avait besoin que cette matinée se termine. Besoin de sortir de ce bureau. Il envoya un sms à Solveig pour lui proposer de se rejoindre pour manger ensemble mais la jeune femme n’était pas disponible. Il envoya un autre sms.

“Jeg takkede dig ikke for at tage dig tid til at lytte til mig. Vil du acceptere frokost med en gammel ven som taknemmelighed?”

“Du kom endelig tilbage fra Montauk …”

“Ja ^^”

“Jeg afviser aldrig en gratis frokost.”

“Jeg kender det godt.”

“Min sidste klasse slutter kl. 13 Skal vi mødes den 55?”

“Vi ses der.”

À midi, il décida de faire le trajet à pied. Il n’avait pas spécialement envie de rester dans son bureau à attendre. À 13h, il retrouva Lena devant le New York City Center for Music and Drama, où résidait le City Ballet. En observant les affiches de spectacles placardées sur les murs et se demanda depuis combien d’année il n’avait pas vu un ballet, depuis combien d’année il n’avait pas vu Lena danser. Elle lui indiqua un petit café où il pourrait manger une salade et divers autres plats végan tout aussi affriolants. Ce qui ne dérangeait pas tellement Aleksej au final. Il s’était habitué à ne plus manger de viande.

Le déjeuner avait tiré en longueur et quand il réalisa l’heure il décida qu’il n’était plus réellement la peine de retourner au bureau. Personne ne l’y attendait de toute manière. Alors ils continuèrent un moment à pied. Discutant de toute et de rien. De la politique américaine, de leur Danemark natal. Et puis finalement de Solveig. De l’opération et de la vie qui reprenait son cours. Des difficultés que rencontraient Aleksej à reprendre sa routine à New York. Ils se quittèrent devant le pont de Brooklyn qu’Aleksej était sur le point de traverser. Il était 17h passé mais Solveig ne serait probablement pas rentrée du travail tout de suite alors autant continuer à pied. Juste lui et ses pensées.

Quand il arriva finalement à l’appartement, il fut surpris de voir que les lumières étaient déjà allumées. En ouvrant la porte, un sourire étira légèrement le coin de ses lèvres en entendant la voix de la jeune femme. Il avait attendu ce moment toute la journée. Se retrouver chez lui, se retrouver avec elle. Il retira doucement ses chaussures et laissa tomber sa sacoche contre le mur avant d’accrocher sa veste au porte-manteau. Généralement, les chiens venaient lui faire la fête à la seconde où il passait le pas de la porte, même Boule avait pris le pli, imitant son grand frère avec excitation. Aleksej en déduit que Solveig les avait probablement déjà sorti et qu’il s’adonnait à leur seconde activité favorite après manger, dormir.

Il s’approcha du canapé où était installée la jeune femme et passa ses doigts dans ses cheveux jusqu'à sa nuque qu'il caressa avec tendresse.

“Je ne pensais pas que tu serais déjà rentrée…”

@ Invité

avatar
   
#
Sam 16 Jan - 8:55

Le problème quand on est avec quelqu’un, c’est qu’on finit par savoir quand ça va et quand ça ne va pas. Je connais Aleks, et là, je suis capable de dire que quelque chose ne va pas. Ce n’est pas quelque chose de dramatique. Mais il y a cette petite chose que je dénote en surface chez lui, dans son comportement, si bien que je suis capable de dire qu’il y a un hic.

- Je préfère rentrer tôt, il faut que je garde le cap dans mon objectif de « garder du temps pour moi et me ménager ».

Je ne dis pas ça gratuitement. La raison pour laquelle je dis ça, c’est parce que je veux qu’Aleks sache que j’étais sérieuse lorsque je lui ai promis de faire attention à moi ainsi qu’à ma santé. Ce qu’il s’est passé en cette fin d’année 2020, nous ne l’oublierons jamais, ni lui ni moi. D’ailleurs, je ne souhaite pas l’oublier. J’ai conscience d’avoir toujours eu un régime alimentaire ainsi qu’une activité physique corrects, malheureusement, cela ne m’aura pas empêché d’avoir un cancer. Comme quoi, cela peut réellement tomber sur n’importe qui. Au fond, je pense que c’est ce que l’on se dit tous : que ça ne nous arrivera pas. Et puis, un jour, un médecin vous parle de cancer, de chimiothérapie ou autre et là, c’est la douche froide.

- Est-ce que tu veux quelque chose de chaud à boire ? Tu as l’air gelé.

Oui, sur ce coup-là, je joue un petit peu à l’autruche. Le fait est que je sais que quelque chose ne va pas, et pourtant, je ne pose pas directement la question. Pourquoi ? Parce que je connais Aleks. Si je lui saute dessus avec des questions à la mords-moi-le nœud, ça va très mal se passer. Attention, il n’est pas question d’énervement ici. Mais il ne répondra pas à mes questions comme j’ai envie qu’il le fasse. Je sais que tout n’est pas réglé du côté du danois. Et je ne veux pas le brusquer. Il a déjà fait beaucoup d’efforts lorsque nous étions sur la côte, en me parlant notamment de sa fille et de son passé. J’ai conscience qu’il n’a pas parlé de tout, et pour être honnête, je ne sais pas s’il le fera un jour, cependant je sais reconnaître l’effort quand il y en a un de fait. Et pour cela, je lui en serai toujours reconnaissante. Il n’y a plus qu’à croiser les doigts pour que cela continue ainsi, j’imagine.


Ni une ni deux, je file à la cuisine pour préparer quelque chose. Je sais qu’il va me répondre donc je n’aurai plus qu’à m’affairer à la tâche lorsque je saurai quoi faire exactement. J’en profite pour me retourner vers lui, et lui dire :

- J’ai eu le temps de sortir les chiens donc nous ne devrions pas avoir besoin de le faire tout à l’heure.


Impossible d’être sûre de moi à cent pour cent, mais ça vaut le coup d’espérer. Je connais ces deux énergumènes, et vu la manière dont ils se sont défoulés tout à l’heure, il est possible qu’ils dorment vraiment toute la soirée.

@ Invité

avatar
   
#
Sam 16 Jan - 18:39

Aleksej sourit à la jeune femme en l’entendant dire qu’elle souhaitait se ménager. Et garder du temps pour elle. Pour eux aussi peut-être. Après avoir passé le plus clair de ses journées avec elle pendant plus d’un mois, revenir à leur précédente routine était difficile. Elle lui manquait continuellement et il aurait besoin d’un certain temps d’adaptation pour se faire à l’idée que c’était ça leur vie et que leur séjour à Montauk n’était qu’une parenthèse et non l’inverse. Il l’observa se lever du canapé pour se rendre à la cuisine.

“Je veux bien un de tes espèces de thé…”

Il rejoignit la jeune femme qui s’affairait dans la cuisine. Alors qu’elle allumait la bouilloire, il se glissa derrière elle, passa ses bras autour d’elle et posa son menton sur son épaule, fermant les yeux quelques instants. Là, ce moment précis. La chaleur de son corps, son odeur. Il avait attendu ça toute la journée. Il maugréa quand elle lui confirma qu’elle avait déjà sorti les chiens. Ils auraient pu y aller ensemble mais étant donné la météo ce n’était peut-être pas plus mal qu’elle y soit allée avant la tombée de la nuit. Et puis il savait qu’elle avait besoin de prendre l’air en rentrant du travail.

“Je serais rentré avant si j’avais su…”

Sa voix était teintée de regrets. Non pas que la balade ne lui ai pas fait de bien mais il aurait aussi pu rentrer en métro et passer plus de temps avec elle. Il saisit la tasse de thé fumante qu’elle lui tendit et l’embrassa doucement au coin de l’oreille en guise de remerciements. Si Aleksej avait toujours été très pudique en publique, c’était pourtant un homme très tactile. C’était probablement dû au fait d’avoir été élevé entouré de femmes et d’avoir toujours été très proche de sa mère. Ses sœurs l’avait toujours taquiné à propos de ça et “fils à maman” était une expression qu’il avait entendu maintes fois dans sa jeunesse. Il n’en avait cure. Il avait toujours chéris les moments passés en sa compagnie.

Depuis le début de sa relation avec Solveig, il avait rapidement réalisé que les grandes effusions de tendresse n’étaient pas dans sa nature et s’il se permettait certaines choses, il respectait aussi une certaine limite. Cela dit, la jeune femme avait été plus flexible durant leur mois passé hors de la ville, plus disposée à se laisser dorloter et papouiller pour le plus grand bonheur d’Aleksej. Les après-midi passées à lui caresser les cheveux, à frotter son nez contre son visage, simplement à l’embrasser pendant de longs moments, tout ça semblait bien loin à présent.


@ Invité

avatar
   
#
Sam 16 Jan - 20:33

- Comment ça ?

Je ne suis pas certaine de comprendre pourquoi Aleksej me dit une telle chose. Il était au travail et ce n’est pas comme s’il était rentré particulièrement tard. Je le regarde avec tendresse et lui caresse la joue avant de lui tendre un mug chaud contenait un thé vert. Ça le détendra et le réchauffera en même temps.

- Tu as passé une mauvaise journée au boulot ? Tu veux en parler ?

C’est une habitude que nous avions prise assez rapidement lui et moi, parler de nos journées et demander conseil à l’autre quand un dossier nous posait problème.
Évidemment, quand nous avons été en congé, nous ne pouvions pas en discuter. Ce n’était pas à l’ordre de jour, nous avions d’autres choses à faire, à organiser. Aujourd’hui, cependant, tout est différent. Je suis de nouveau sur mes jambes et de retour au travail. Il en est de même pour le Danois, donc j’estime que nos conversations professionnelles peuvent reprendre, elles aussi.


Je l’entraîne autour de l’îlot central où nous nous asseyons en face, l’un de l’autre. Mes doutes n’étaient pas fondés mais ils se révèlent bien vrais malgré tout. Il y a quelque chose qui ne va pas avec Aleks et je compte bien découvrir ce qu’il se passe. Si quelque chose s’est passé au travail, j’ai conscience qu’il ne sera pas en mesure de me donner tous les détails s’il est question d’un dossier sensible mais je prendrais tout ce qu’il sera en capacité de me partager. Au fond, je n’ai besoin que des grosses lignes de manière à pouvoir le rassurer. Je ne suis pas en train de dire que j’aurai la solution à son ou ses problèmes mais rien ne m’empêche d’essayer.

@ Invité

avatar
   
#
Sam 16 Jan - 22:25

Aleksej n’avait pas envie de se plaindre, il n’en avait pas le droit. Reprendre leur vie faisait aussi partie du processus de guérison de Solveig. Ils devaient aller de l’avant. Mais il n’était pas assez naïf pour penser que Solveig se contenterait d’un ou deux sourires et de quelques vagues banalités à propos de sa journée. Ce n’était pas comme ça qu’ils fonctionnaient. S’il y avait bien un sujet sur lequel ils avaient toujours parlé librement, c’était bien leur travail. Les bons comme les mauvais aspects. Plus qu’en s’avouant de grandes vérités, c’était par ça qu’ils avaient appris à se connaître. Les petites discussions quotidiennes, les petits détails qui en disent long.

“Ni bonne, ni mauvaise. Sans grand intérêt, vraiment. J’ai déjeuné tardivement avec Lena et j’ai décidé de ne pas retourner au bureau. Ils n’avaient pas besoin de moi.”

Si Aleksej rechignait à l’idée de se rendre tous les jours au travail, il n’en perdait pas pour autant son sérieux et sa conscience professionnelle. Quand il arrivait au bureau aux alentours de 8h30, il s’attelait directement à la tâche. Il était organisé et efficace, peut-être pour son plus grand mal. Une fois les dossiers traités et le rush des premières heures passé, les journées devenaient longues à attendre que quelque chose se mette finalement en mouvement.

“Personne ne veut prendre la moindre décision ou de quelconques responsabilités. Tout le monde attend de voir quelles seront les directives données par le nouvel exécutif et en attendant, rien ne bouge. On est au point mort et la plupart des discussions tournent autour des probables renvois, nominations ... “

Aleksej était un peu agacé par le comportement de ses collègues. Il avait un travail à faire et il voulait qu’il soit fait. Mais s’il vivait là depuis de nombreuses années, il n’était pas américain et les nouvelles élections ne le touchaient pas de la manière dont elles touchaient les gens d’ici. S’il connaissait l’histoire des USA, il n’arrivait tout de même pas à se faire à l’idée qu’on puisse s’opposer à des résultats d’élection. Mais tout ça était vu d’un point de vue tout à fait extérieur. Aleksej n’était pas un politicien, il ne faisait pas de politique. Il ne votait pas ici aux États-Unis et même si le Bureau du Procureur avait un fort impact politique, c’était bien le dernier aspect qui avait poussé à sa candidature.

“Je ne fais pas de politique… je déteste ça… je suis avocat, pas gratte-papier.”


Il releva la tête de sa tasse de thé pour poser son regard sur la jeune femme. Il grimaça de gêne en réalisant qu’il s’emportait légèrement.

“Excuse-moi… c’est juste que… tout ça m’agace profondément. J’ai l’impression de perdre mon temps.”

Ou plutôt qu’on lui volait un temps précieux. Un temps qu’il pourrait passer avec elle plutôt qu’à écouter les élucubrations des bureaucrates et des cols blancs.

@ Invité

avatar
   
#
Mar 19 Jan - 13:21

Je sais qu’il me parle, qu’il me dit plein de choses très importantes mais je n’arrive pas à passer au-delà du “j’ai déjeuné tardivement avec Lena”. Impossible d’empêcher mon cœur de se serrer brutalement sous l’effet de cette annonce qui, pourtant, devrait presque passer inaperçue. J’ai toujours assumé ne pas être jalouse et je continue de le dire. Je ne suis PAS jalouse de Lena. Je sais pertinemment que son ex-femme n’est pas une menace pour mon couple. Alors pourquoi ne suis-je pas en mesure de passer au-dessus de cette information ?

    Hej, elskede. Tu déjeunes avec moi ? -A
    J’adorerai mais la séance photo prend plus de temps que prévu… Je me rattrape ce soir, promis. -S


Cette séance photo m'est un peu tombée dessus par hasard. C’est un photographe professionnel qui m’a vu dans la rue et qui m’a exposé son projet sur les femmes. Il m’a de suite plu. J’en ai parlé à Aleks mais sans chercher à obtenir son consentement, je n’en ai pas besoin. Et puis, tout s’est enchaîné. En deux jours de temps, j’avais une date et un horaire fixe. Je me suis arrangée avec le cabinet et me voilà ce midi en train de faire cette petite séance dont je verrai le résultat sous peu.

Pourquoi n’ai-je pas été capable de demander un break pendant le shooting photo pour aller déjeuner avec Aleksej ? Ce n’est pas comme si cela m’aurait pris toute la journée. On aurait déjeuné sur le pouce et j’y serais retournée, je le sais pertinemment. Et pourtant, il a fallu que je décline pour qu’au final...son deuxième appel soit auprès de son ex-femme. Que je le veuille ou non, cette réalisation me blesse.

- Tu...as déjeuné avec ton ex-femme ?

Quand nous évoquons Lena, je parle toujours d’elle en utilisant son prénom. Le fait que je dise les mots “ex-femme” devrait donc faire tiquer Aleks d’une manière ou d’une autre. N’étant pourtant pas du genre à m’inquiéter, je suis incapable de me concentrer sur quoique ce soit d’autre. Je lui ferai répéter le reste après coup.
[/quote]

@ Invité

avatar
   
#
Mar 19 Jan - 21:43

Aleksej était tellement absorbé par la contrariété qu’il n’avait pas pris le temps de demander à Solveig comment sa journée à elle s’était passée. Solveig lui avait parlé de la séance photo à laquelle elle devait participer aujourd’hui. Peut-être que ce n’était pas tout à fait sans rapport avec l’évolution de son humeur du jour. Il aurait bien eu besoin d’un break à midi, de s’extraire du bureau et passer un peu de temps avec elle. Si le temps s’était dilaté d’une manière douce et agréable lorsqu’ils étaient à Montauk, celui-ci paraissait passer bien plus lentement à présent. De la manière la plus désagréable.

Si ce n’était pas déjà suffisant pour irriter le Danois, l’indisponibilité de Solveig lui faisait l’effet de se gratter une piqûre de moustique. La sensation de démangeaison ne disparaissait jamais. Et malgré la promesse faite par la jeune femme de se rattraper, Aleksej était contrarié. Elle reprenait du poil de la bête et par la même occasion son indépendance. Elle n’avait plus besoin qu’il prenne soin d’elle et un sentiment d’inutilité s’emparait de lui. Rapidement suivi par la culpabilité. Il était content qu’elle retrouve son engouement et son enthousiasme qui la caractérisait temps.

Peut-être qu’il avait aussi été un peu froissé qu’elle prenne cette décision sans le lui demander. Non pas qu’il aurait opposé la moindre résistance. Il trouvait l’idée plutôt bonne et il était très fier d’elle. Mais il s’imaginait peut-être qu’ils étaient arrivés à un stade de leur relation où ils prendraient leurs décisions ensemble. Peu importait leur objet. Mais apparemment ce n’était pas le cas et le ton engagé par la jeune femme dans sa question lui fit froncer les sourcils et relever la tête vers elle.

“J’avais besoin de changer d’air. Tu n’étais pas disponible. Callie travaillait. Jens est en voyage d’affaires...”

Aleksej avait soudain l’impression désagréable de devoir se justifier et il n’était pas tout à fait sûr de savoir pourquoi. Solveig savait qu’il avait revu Lena plusieurs fois au cours des derniers mois, avant leur départ pour Montauk. Il avait besoin de tourner la page sur leur passé et de panser les anciennes blessures et ça n’avait jamais semblé lui poser de problème. Mais ce soir, le ton de la voix de la brunette était différent.

@ Invité

avatar
   
#
Mar 19 Jan - 22:00

Tu n’étais pas disponible.
Que je le veuille ou non, cette phrase ne me convient pas. À vrai dire, elle me contrarie énormément. J’ai du mal à concevoir le fait qu’il puisse décider d’aller voir son ex-femme sous prétexte que je ne suis pas disponible. Au fond de moi, je sais pourtant que je ne dois pas faire une montagne de cela. Mais je n’y arrive pas. Il y a quelque chose qui me perturbe, quelque chose qui me gêne.

- …donc Lena devenait une solution logique.

Je n’ai pas envie de jouer à ça, je n’ai pas envie d’être l’une de ses femmes qui se méfie de son compagnon sous prétexte qu’il a vu son ex. Je ne suis pas comme ça je ne le serai jamais. Malheureusement, ce soir, ça me prend la tête. Lorsqu’ils ont commencé à se revoir pour parler de leur fille et de leur passé commun, ça ne me dérangeait pas. D’ailleurs, c’est moi qui l’ai encouragé à le faire. Aleks avait besoin de mettre de l’ordre dans sa vie, et cela devait passer par une rétrospective dans laquelle Lena était un élément central.

- Je… Je vais aller prendre une douche.

Oui, il est rare venant de moi que je choisisse la fuite mais ce soir c’est pourtant le choix que je fais. J’ai vraiment très peur de la conversation que nous pourrions avoir et bizarrement, je n’ai pas envie de me confronter à quelque chose qui pourrait me dépasser. Impossible de dire ce qui me tracasse, si ce n’est le fait que j’ai soudainement l’impression que l’ombre de son passé est en train de planer sur nous comme un danger imminent. Comme c’est son ex-femme devenir un élément majeur de notre vie à deux, un élément que je ne pourrai pas effacer aussi facilement que je le souhaiterais. Pourtant, je n’ai jamais voulu effacer cette femme de sa vie. Au contraire, je voulais que leur relation s’améliore, qu’ils se pardonnent mutuellement des erreurs du passé dont je n’avais même pas connaissance. Peut-être qu’à force de vouloir faire le bien, j’ai entraîné mon compagnon dans les bras de son ex-femme sans même m’en rendre compte.

Je secoue brutalement la tête. Je commence à me raconter n’importe quoi. Personne ne dit qu’Aleks va retourner dans ses bras, il faut que je me calme, je file un mauvais coton.

@ Invité

avatar
   
#
Mer 20 Jan - 21:36

Aleksej n’avait pas besoin d’être Einstein pour sentir que le vent était en train de tourner. Depuis le début de leur relation, il avait appris le langage de son corps. Et cette soudaine raideur, le fait qu’elle ne le regardait pas en face. Si Aleksej essayait de faire part de ses doutes et de ses craintes à Solveig quand il le pouvait, ce n’était pas un chemin à double sens. La jeune femme n’était pas capable de partager quelque chose qu’elle ne comprenait pas, les choses dont elle n’était pas sûre ou le moindre doute. Pas avec lui en tout cas. Il avait compris qu’elle avait besoin de trouver des réponses en elle-même avant de pouvoir s’ouvrir. Parfois c’était pour le préserver qu’elle s’empêchait de partager certaines pensées.

Mais ce soir, il s’agissait de tout autre chose. Son air contrarié se suffisait à lui-même, pas besoin de plus d’explication. Quand elle se leva pour se diriger vers la salle de bain, Aleksej quitta l’îlot pour la rattraper et la saisit par les hanches pour l’empêcher d’aller plus en avant.

“Non. Solveig… Regarde-moi…”

Ses mains vinrent se placer en coupe sur ses joues et il releva le visage de la jeune femme vers lui.

“Regarde-moi, s’il te plait… Je ne suis peut-être pas l’homme le plus subtil en matière de sentiment mais je ne suis pas complètement idiot. J’ai bien compris où était le problème.”

Sa voix était douce et calme. Il n’était pas question de s’énerver ou de se disputer. Simplement de remettre les pendules à l’heure. Parce que pour lui, il n’y avait pas de doute, pas de question à se poser.

“Et il va falloir qu’on aille au fond des choses à propos de ça et qu’on crève l’abcès avant que ça ne dégénère réellement.”

La situation était délicate. Évidemment, Aleksej ne pouvait pas nier le fait que cette pointe de jalousie flattait gentiment son égo. Mais elle remettait aussi en cause la confiance que Solveig avait en lui, en eux. C’était la raison qui le poussait à aller au charbon. Il voulait être certain qu’elle sache où ils allaient, dans l’expectative que c’était dans la même direction. Il caressa doucement sa joue, plongeant ses grands yeux bleus dans ceux de la jeune femme.

“Écoute-moi… Il n’y a vraiment aucune raison d’en faire toute une histoire. Il s’agissait d’un déjeuner. Rien de plus. Et ce ne sera jamais rien de plus.”

Il espérait que ce serait suffisant. Comme ça avait été suffisant quand il s’agissait de lui qui réagissait à la relation qui existait entre elle et William. Elle l’avait rassuré, il avait choisi de croire ce qu’elle lui disait et de lui faire confiance. Il fallait aussi dire que le contexte avait poussé le Danois à fréquenter l’Irlandais et qu’il appréciait le type plus qu’il ne l’avouerait jamais.

@ Invité

avatar
   
#
Jeu 21 Jan - 12:17

Plutôt du genre à respecter la distance avec les autres, je ne m’attends pas à ce que Aleks m’attrape par les hanches comme il le fait. Je suis freinée dans mon élan, risquant presque de perdre l’équilibre. Heureusement, Aleks me tient. Dans l’instant, il se place face à moi et pose ses mains sur mes joues, me forçant ainsi à le regarder droit dans les yeux. Je n’ai pas envie de le faire, j’ai peur de le confronter, de confronter mes craintes qui n’ont, je le sais, aucun sens. Parce que je connais le passé d’Aleks, je sais que le lien qu’il entretient encore avec son ex-femme est précieux mais fragile. Je suis sincère quand je dis que jusqu’à présent, cette relation ne me dérangeait pas. Je sais que cette femme n’est pas un danger pour moi, du moins c’est ce que je me suis toujours dit. Impossible alors d’expliquer ce retournement de situation. Pourquoi est-ce que tout à coup, en entendant son prénom et en sachant qu’elle a déjeuné avec Aleks, je perds les pédales ?

Il me dit qu’il faut qu’on crève l’abcès. Il a raison et j’en ai parfaitement conscience, pourtant, mon esprit rebelle semble s’être réveillé et avoir pris le pas sur tout le reste. Je ne veux pas lui avouer mes peurs et ce qui semble bien être de la jalousie. Ce sentiment ne m’est pas familier, tous les gens qui me connaissent bien le savent. La jalousie n’a jamais fait partie de mon vocabulaire. J’ai conscience que les gens entretiennent des relations, et que celles-ci sont compliquées et parfois même indescriptibles. Voilà pourquoi quand j’ai su qu’Aleks revoyait son ex-femme pour discuter de leur passé commun, j’ai trouvé cela formidable. Je suis incapable de dire quand la balance a commencé à pencher du mauvais côté.

Je lève finalement des yeux embués vers ceux de l’homme qui me dit que ce n’était qu’un déjeuner et qu’il n’en sera jamais rien de plus que cela. Je déglutis avec une certaine difficulté, comme si j’allais me mettre à pleurer. C’est ridicule. Depuis quand suis-je du genre à laisser mes sentiments prendre le dessus sur mon aptitude à réfléchir ?

- Mais si ça redevenait autre chose ? dis-je en chuchotant.

Je crains tellement sa réaction que je ne trouve même pas le courage de m’exprimer à haute voix. Où est passée Solveig Lazzari ?

- Et si…

Mes yeux se ferment de peur de dire quelque chose qui pourrait faire valser toute notre histoire.

- Et si vous vous redonniez une chance ?

La vérité, c’est que je ne pourrai pas leur en vouloir. Ils ont traversé une épreuve tellement difficile qu’au fond, peut-être que la vie est en train de les remettre sur le même chemin. Le problème, c’est que mes sentiments pour cet homme sont sincères. Lorsque nous nous sommes rencontrés, ou du moins retrouver, je ne m’attendais pas à ce que mes sentiments à son égard soit aussi fort. En fait, je ne savais pas à quoi m’attendre, tout court. Et puis, il a été là, il s’est montré présent et ne m’a pas jugé. Et nous nous sommes habitués à la présence de l’autre et…aujourd’hui, je ne me vois pas vivre sans lui à mes côtés. J’imagine que décider de vivre ensemble n’en est que la preuve ultime.

- Et si vous cherchiez à refonder une famille ? Elle pourrait encore te donner des enfants et…

..et voilà le véritable problème. Voilà sur quoi j’aurai dû mettre le doigt depuis plusieurs semaines déjà sans jamais oser le faire. On m'a retiré mon droit de faire un choix et cela me bouleverse plus que ce que je veux bien admettre.

@ Invité

avatar
   
#
Jeu 21 Jan - 21:11

Aleksej observait la jeune femme avec attention, absorbant la moindre de ses paroles, le moindre de ses gestes. Son air courroucé, la contrariété qui transpirait de son comportement n’était en réalité que la partie immergée de l’iceberg. Il glissa l’une de ses mains contre sa nuque alors que son autre bras l’enlaça pour l’attirer contre lui.

“Solveig…”

Il était désolé. Sincèrement. Parce qu’elle devait ruminer ça depuis plusieurs semaines. Parce qu’elle n’avait pas été capable de mettre des mots sur ses émotions depuis tout ce temps. Il savait parfaitement ce que ça faisait. Il embrassa doucement sa tempe et la serra un peu plus contre lui, caressant ses cheveux avec tendresse. Il voulait lui laisser quelques secondes de répit. Quelques secondes pour encaisser les paroles qui lui avait échappées. Pour elle comme pour lui. Il inspira profondément en réfléchissant par quel bout reprendre la conversation.

“Écoute… C’est vrai que Lena et moi avons passé la plus grande part de notre vie ensemble. Et ça facilite certaines choses. La compréhension qu’elle a de moi, par exemple. Ou qu’elle a pu avoir en tout cas.”

Ils avaient grandi ensemble, avait partagé la plupart de leurs premières expériences ensemble et s’étaient construit ensemble. C’était un fait indéniable. Quand ils discutaient, c’était plus simple. Il n’avait pas besoin d’expliquer, Lena comprenait. Mais c’était aussi une solution de facilité. Avec Lena, il n’avait pas besoin de faire d’effort.

“Toi et moi on apprend encore l’un sur l’autre, l’un de l’autre. Et tu me pousses à en apprendre plus sur moi-même. Et parfois c’est effrayant. Avec Lena, les enjeux sont différents. Notre amour s’est brisé il y a longtemps. Mais j’ai besoin de parler avec elle. Pas seulement pour faire le deuil de Rebecka mais pour comprendre pourquoi notre vie à implosée de cette manière. Pour ne pas répéter les mêmes erreurs…”

Aleksej s’était posé la question plusieurs fois. Et si Rebecka n’était pas morte ce jour-là ? Où en serait sa vie aujourd’hui ? Où en serait son couple ? C’était une question rhétorique. Il ne cherchait jamais de réponse. Le décès de leur enfant était la pierre angulaire de la destruction de leur famille. Mais était-ce tout ? Certains couples sortaient plus forts de ce genre d’épreuves. Mais pas eux.

“J’ai déjà ruiné un mariage, je ne compte pas laisser ça arriver une seconde fois…”

Tout en parlant, il frottait doucement le dos de la jeune femme lovée dans ses bras. Il espérait qu’elle entendrait ses paroles, qu’il serait capable de lui apporter un peu de réconfort. Apaiser ses craintes. Aleksej pris une profonde inspiration, intégrant les derniers mots de la jeune femme. Après l’opération, elle n’avait pas beaucoup parlé et il avait mis ça sur le coup de la fatigue. Il ne voulait pas non plus la brusquer. Elle s’était forgée une telle armure, feignait l’indifférence avec tellement d’habileté qu’il en oubliait parfois à quel point elle était vulnérable.

“Rien de tout ça n’arrivera Solveig. Je te l’ai déjà dit. Ma famille c’est toi…”

Il ne voulait pas qu’elle puisse s’imaginer qu’elle ne lui suffisait pas. Il se détacha d’elle, ses mains glissèrent le long des bras de la jeune femme pour venir prendre ses mains. Il fit quelques pas en arrière tout en l’entraînant dans son sillon. Il s’assit sur le tabouret et l’attira une nouvelle fois vers lui, la calant entre ses jambes. De cette manière, c’était elle qui le dominait. Elle qui reprenait l’ascendant. Si elle devait baisser les yeux, ce serait sur lui. Ses deux mains dans les siennes, il les observa quelques instants avant de relever le visage vers elle.

“Est-ce que tu voudrais m’en parler ? L’opération… la possibilité d’avoir des enfants... ce que tu ressens ?”


[

@ Invité

avatar
   
#
Jeu 21 Jan - 21:27

Je l’écoute en lui accordant toute mon attention. Ce n’est pas le moment pour moi de faire la sourde oreille alors que je viens de lui ouvrir une partie de mon cœur, mettant en lumière l'une de mes craintes peut-être infondée mais pourtant bien réelle. Quand le chirurgien m’a annoncé que l’opération me rendrait totalement stérile, l’information ne m’a pas tant perturbée que cela. En réalité, je n’y ai pas accordé beaucoup d’attention. Et puis, quand je me suis réveillée après l’opération, tout s’est bousculé dans ma tête et mes fondamentaux se sont comme...effondrés. Je ne comprenais pas pourquoi je me souciais soudainement d’un élément sur lequel j'avais pourtant tiré un trait depuis longtemps. Seule ma carrière comptait. Et puis ma route a (re)croisée celle d’Aleksej et ma vie entière a changé. Je pensais mes fondamentaux solides, de ceux qui ne sont jamais fragilisés et ce, même après une rencontre aussi décisive que celle-ci. Et pourtant.

Alors que d’ordinaire je m’en fiche, entendre Aleksej me dire que tout est facile avec son ex-femme parce qu’ils se connaissent par coeur me bouleverse. J’ai peur de ne pas être à la hauteur de la femme qu’elle a été pour lui. Là aussi, il s’agit d’un élément nouveau. Je n’ai encore jamais ressenti le besoin de me comparer à une autre femme sur le plan personnel. Professionnellement parlant, cela m’est souvent arrivé mais jamais dans la sphère privée.

Ma gorge se resserre quand je l’entends me demander si je souhaite évacuer les tensions accumulées en lui dévoilant mes craintes, mes appréhensions. Je ferme les yeux et pose mon front contre son épaule tandis qu’il m’a rapproché de lui au point que je ne puisse pas m’échapper aussi facilement que je le souhaiterai.

    Il va falloir que tu lui en parles, Sol. -A
    Pourquoi faire ? Il n’y a plus rien à en dire. -S
    Il est temps que tu t’accordes à dire la vérité. -A


- On m’a privée d’un choix qui me revenait, dis-je avant de m’effondrer, maintenant en larmes dans les bras du Danois.

@ Invité

avatar
   
#
Jeu 21 Jan - 21:57

Aleksej redoutait ce genre de réaction. Même si Solveig avait toujours fait preuve de déférence au sujet d’avoir des enfants. Cela faisait partie d’une des premières choses qu’elle lui avait dites sur elle. Elle semblait sûre d’elle à l’époque et il avait pris cette déclaration pour un acquis. Il respectait les gens qui ne souhaitait pas avoir d’enfant. Cela valait mieux que de se rendre compte qu’on n’en voulait pas une fois qu’ils étaient là. Et malheureusement, il avait vu bien trop d’exemples au début de sa carrière. Les gens ne réfléchissaient pas toujours. L’idée était attrayante, les nuits d’insomnies et les couches sales beaucoup moins.

Mais il y avait une différence entre faire le choix et se retrouver au pied du mur. Alors que Solveig s’effondrait dans ses bras, il resserrait un peu plus son étreinte. Il la berça un moment dans ses bras. Parfois il était plus avisé de laisser la pression lâcher une bonne fois pour toute. Pleurer toutes les larmes de son corps même si le Danois exécrait la voir pleurer. Ça n’était pas arrivé souvent depuis qu’ils étaient ensemble mais quand c’était le cas, un profond sentiment d’impuissance s’emparait de lui. Peu à peu, il avait appris à laisser ce sentiment de côté pour se concentrer sur elle. Lui apporter son soutien.

“Et tu as le droit d’être en colère ou frustrée ou triste… et tu peux m’en parler si tu en as envie. Ou à n’importe qui d’autre… Mais tu peux aussi juste pleurer dans mes bras aussi longtemps que tu en auras besoin.”

Il frottait doucement son nez contre la joue de la jeune femme. Peut-être que dans ce genre de situation, les gestes avaient plus de pouvoir que les mots. Si elle n’était pas prête à vider son sac, peut-être qu’au moins elle retrouverait un certain réconfort dans ses bras. Il n’ajouta rien de plus. Il ne la pousserait pas à lui parler. Elle faisait preuve de la même indulgence envers lui quand les rôles étaient inversés. Étrangement, la douleur de la jeune femme le frappait avec la même intensité que ses propres démons.

@ Invité

avatar
   
#
Jeu 21 Jan - 22:15

Dis-lui, me crie une petite voix intérieure, cette même petite voix qui me sommait de garder le silence, de passer à autre chose, d’avancer et de devenir l’avocate impitoyable que je suis devenue.

- Le soir de mon mariage, Alice a refusé de me laisser seule, alors on est allées chez elle. Elle et Mark étaient ensemble mais ils ne vivaient pas encore sous le même toit. J’étais dévastée et je ne savais plus quoi faire. Je ne comprenais pas ce qui venait de me tomber dessus, l’homme que j’aimais venait de me quitter, devant l’autel, le jour qui devait être le plus important de nos vies. On a commencé à picoler parce qu’il n’y avait que ça à faire, j’imagine. J’étais inconsolable. Et puis, est venu le moment d’aller aux toilettes et c’est là-

Mes paupières se serrent brusquement tandis que les images me reviennent en tête. Je m’étais promise de ne plus penser à ça.

- Ca te prend comme une douleur lancinante, comme si on te poignardait d’un coup sec dans l’utérus… J’ai baissé les yeux, il y avait du sang par terre et j’ai compris.

Une décennie plus tard, le même sentiment de honte me noue l’estomac. Je n’ose pas regarder Aleksej dans les yeux. Je sais pourtant que je n’y suis pour rien, que mon corps a fait un choix ce soir-là. Un choix dont je n’ai jamais parlé à personne hormis Alice qui était là mais à qui j’ai fait promettre de ne jamais rien dévoiler à personne.

- Je ne savais pas que j’étais enceinte.

Je me retiens de justesse de lui crier que personne ne doit jamais savoir, que c'est un secret. Je ne veux pas que quiconque sache que mon corps m'a trahi ce soir-là.

- Alice m'a emmenée à l'hôpital et le reste...c'est du passé.

Un passé qui m'est revenu brutalement à la figure lors de ce réveil post-opératoire. C'était comme revenir dix années en arrière sans rien pouvoir faire. Sauf que cette fois, on m'avait officiellement privé du choix d'avoir un jour des enfants, problème de stérilité ou non.

@ Invité

avatar
   
#
Ven 22 Jan - 20:22

Aleksej était loin de s’attendre à ça. C’était la première fois que Solveig entrait dans les détails de son mariage avorté et Aleksej n’avait jamais tenté d’en savoir plus à ce sujet. Elle lui avait affirmé avoir tiré un trait sur son histoire avec William et il avait choisi de la croire. C’était plus simple comme ça. Et puis cet aveu. Comme une avalanche de souvenirs qui venait la frapper de plein fouet et l’emportait avec elle, la submergeait. Le choc était réel pour Aleksej aussi. Il pouvait sentir le corps de la jeune femme se replier sur lui-même. Ployer sous le poids de sa confession. Instinctivement, il raffermit son étreinte.

Son cœur saignait pour elle. Pour lui-même aussi. La perte d’un enfant était un sujet qui ne le laissait jamais complètement indemne, évidemment. Il n’avait pas de mots pour décrire à quel point il était compatissant. À nouveau ce sentiment d’impuissance. Il ne pouvait que tenter d’imaginer ce qu’elle avait traversé et même avec toute la volonté du monde, il ne pourrait pas faire disparaître cette peine. Ça aussi il le savait.

“Je suis vraiment désolé…”

Il n’y avait rien de plus à dire. Rien qui ne pourrait effacer les souvenirs ou les émotions qu’ils faisaient affluer. Lovée contre lui, il la berçait doucement en caressant ses cheveux. Ils restèrent comme ça un certain temps. Le temps qu’il fallait. Pour la jeune femme, d’épuiser son quota de larmes. Quand il eut l’impression que le plus gros de la crise était passée, il s’écarta légèrement pour l’observer. On aurait dit qu’elle venait de traverser une tempête, ce qui était le cas finalement. Elle semblait exténuée. Les larmes et les sanglots avaient aspiré toute son énergie.

Il se leva en l’entraînant avec lui, la forçant à se tenir sur ses pieds. Tout en la soutenant, il l’incita à se mettre en marche jusque dans la salle de bain. Le regard de la jeune femme était embué, vide, lessivé. Il alluma la douche et entreprit de la déshabiller avec douceur. Une fois qu’il en eut terminé avec elle, il retira ses propres vêtements et la rejoint sous le filet d’eau chaude. Sans un mot, il prit le savon et commença à le passer contre sa peau. Sous l’effet de la chaleur et des caresses, elle se détendit un tout petit peu. Il la nettoya avec application, comme s’il était possible de la nettoyer des maux qui la hantaient.

Une fois terminé, il quitta la cabin, laissant à la jeune femme quelques minutes de paix sous la douche. Il avait enfilé rapidement un tee-shirt et un jogging et était revenu dans la salle de bain avec l’un des pyjamas de la jeune femme. Le plus confortable. Le pilou-pilou, c’est comme ça qu’il l’appelait. Parce qu’il était aussi peu sexy qu’il devait être confortable et il la taquinait toujours quand elle le sortait. Il aida la jeune femme à sortir de la douche et l’enveloppa dans une grande serviette. Après l’avoir séchée comme on sécherait un enfant, il l’incita à enfiler ses vêtements.

Solveig était las. Elle tenait à peine sur ses jambes alors il l’assit sur la cuvette des toilettes. À genoux devant elle, il frottait délicatement ses cheveux dans une serviette pour les lui sécher.

“Je vais aller dans la cuisine maintenant… prends le temps qu’il te faudra et rejoins-moi. Ou pas. Mais je me sentirais plus serein si tu avalais quelque chose…”

Le temps passant, il avait appris qu’elle avait parfois besoin de temps et d’espace juste pour elle. Il ne voulait pas qu’elle se sente acculée ou obligée de quoi que ce soit. Ils étaient très différents sur ce point là. Quand il était en détresse, la simple idée qu’elle le quitte ne serait-ce qu’une seconde l’horrifiait. En se relevant il embrassa son front avant de venir y poser le sien. Il frotta son nez contre celui de la jeune femme et déposa un baiser tendre sur ses lèvres. Un baiser d’amour. Un baiser qui disait : “Je t’aime et je suis là pour toi.”

Il quitta la salle de bains et se rendit dans la cuisine. Il savait qu’elle ne serait pas d’humeur à manger. Il n’avait pas très faim non plus. Un bouillon était probablement le meilleur des compromis, il s’attela donc à la tâche.

@ Invité

avatar
   
#
Ven 22 Jan - 21:39

Où j’ai trouvé le courage de lui dire ce que je viens de lui avouer quand on sait que je n’en ai parlé à personne c’est dernières années, je n’en ai pas la moindre idée. En réalité, je ne pensais pas avouer cela à quelqu’un un jour. Je pensais ne jamais en reparler. C’est un sujet tabou entre Alice et moi, cette dernière le sait parfaitement. D’où le fait que je l’ai trouvée particulièrement audacieuse d’oser évoquer le sujet par SMS l’autre jour.

Entendre Aleks me dire qu’il est désolé ne me surprend pas. Je ne m’attendais pas vraiment à ce qu’il dise quoi que ce soit, car j’ai conscience qu’après ma révélation, il n’y a rien à dire. Il n’y a pas de bonne réponse, il n’y a pas de bonne phrase toute faite. Au fond, il ne peut y avoir qu’un silence gênant entre deux personnes qui ne savent plus quoi se dire. C’est un peu mon cas. Heureusement, Aleks est là pour changer la donne.

Ce qui suit, je suis incapable de le décrire. Aleks prend les devants, il mène la barque et moi je me laisse faire. Je ne sais pas combien de temps j’ai pleuré dans ses bras. Tout ce que je sais, c’est que ça a duré un moment et qu’il ne m’a pas laissé tomber. Maintenant nous nous trouvons dans la salle de bain. Je le laisse me déshabiller sans poser de questions, sachant pertinemment ce que nous allons faire. Une fois sous la douche, je le laisse me savonner, tandis que j’essaye de reprendre mes esprits tout doucement. Ce n’est pas chose facile. En réalité, je ne sais pas comment je vais tenir ce soir. Je ne pensais pas qu’avouer ma fausse couche allait me faire autant de mal. Je ne pensais pas que ça allait me retourner à ce point.

Aleks finit par me laisser seule dans la douche comme pour me laisser un peu de temps avec moi-même. Comme s’il voulait me laisser suffisamment d’espace pour que je reprenne mes esprits tranquillement. Pour cela, je lui suis extrêmement reconnaissante. Malheureusement, je n’arrive pas à prononcer ces quelques mots qui pourrait traduire ma reconnaissance à son égard. J’espère qu’il comprend. Pas ma souffrance, mais mon silence.

Il vient me retrouver lorsque j’ai terminé. Il m’enroule dans une serviette bien chaude, comme s’il l’avait sorti du sèche-linge. Je ne sais pas si c’est le cas et je ne vais pas poser la question. Il me dit qu’il faut que je mange quelque chose et je sais qu’il a raison. La vérité, c’est que je n’ai pas très faim et cela, il doit s’en douter. Malheureusement, faim ou non, il va falloir que je mange. J’ai subi une opération en fin d’année et je n’ai pas le droit de faire n’importe quoi avec mon corps. Ne serait-ce que sauter des repas. Quel intérêt de survivre à un cancer si c’est pour faire n’importe quoi derrière ?

Aleks repart et me voilà de nouveau seule, bêtement assise sur la cuvette des toilettes. Je n’ai pas envie de rester seule. Alors, je prends sur moi et je le rejoins, enveloppée dans ma tenue de nuit.

- Qu’est-ce qu’on mange ? dis-je en entrant dans la pièce.

Ce n’est pas du tout comme cela que je prévoyais cette soirée. D’abord, on parle de son ex-femme, et me voilà qui lui avoue avoir fait une fausse couche il y a plus de dix ans. Non, ce n’est définitivement pas la soirée que j’imaginais. Mais comme je n’ai pas le choix, je vais faire avec. On dit souvent qu’il nous revient de faire des choix de manière à être heureux dans la vie. Ce soir, le choix me revient quant à savoir si nous restons dans un état lamentable ou si on se reprend.

@ Invité

avatar
   
#
Sam 23 Jan - 22:01

Aleksej s’était installé derrière le plan de travail et venait de terminer la préparation du bouillon qu’il avait tout juste mis sur le feu. En voyant Solveig revenir dans la pièce à vivre, il lui adressa un sourire timide. Une sorte d’encouragement. Il n’était pas sûr qu’elle aurait le courage de refaire surface ce soir. Et c’était tout à fait compréhensible. La discussion qui les avait mené là était compliquée et sinueuse. Tout ce que le Danois pouvait espérer c’était qu’il finisse par en ressortir quelque chose de positif sur le long terme. La jeune femme vint le rejoindre de l’autre côté de l’îlot pour voir ce qu’il avait décidé de faire à manger. Tout en continuant de remuer la soupe d’une main, il passa l’autre dans son dos qu’il cajola doucement avant de se pencher vers elle pour déposer un baiser sur son front.

“Ça va ?”


Ses sourcils étaient un peu froncés. Il était préoccupé par son état même s’il tentait d’en montrer le moins possible. Il connaissait trop bien Solveig pour savoir que s’il faisait état de ses inquiétudes, elle tenterait de le rassurer coûte que coûte. Même au détriment de ses propres sentiments. Elle ne se laissait pas être vulnérable. Pourtant il était bien le dernier qui essaierait de la juger dans ses moments de faiblesses. Elle avait été le témoin de tous les siens. Il remua doucement le bouillon dans lequel flottait à présent les légumes et coupa rapidement quelques herbes fraîches directement au-dessus de la casserole.

“Peut-être d’exceptionnellement on pourrait manger dans le canapé…”

Si Aleksej avait un nombre incalculable de règles de vie et de manies, certaines d’entre elles s’étaient adoucit depuis qu’ils vivaient ensemble. Évidemment, il n’était toujours pas question de manger au lit et celle-ci serait probablement immuable. Rien que l’idée de trouver des miettes dans le lieu de leur intimité le révoltait. Mais en ce qui concernait le salon, il s’assouplissait. Il avait d’ailleurs été le premier à enfreindre certaines de ses propres règles comme la présence des chiens sur le canapé, par exemple. Aleksej avait pris l’habitude de prendre Boule sur lui et comme il ne voulait pas faire de jaloux, Maroon était autorisé à monter lui aussi.

S’il avait essayé de garder ces distances avec leur nouveau compagnon à quatre pattes par pur principe, il n’avait pas tenu longtemps face à la mignonnerie du chien. Il adorait regarder le chiot maladroit manœuvrer dans leur appartement. Son petit boulet. Aleksej se comportait parfois avec eux comme de vrais enfants quand il pensait que personne ne le regardait. Alors à l’heure de la sieste, ils s’installaient confortablement tous les trois. Maroon s’étirait de toutes ses pattes et s’installait le long du flan d’Aleksej. Et si Boule commençait la sieste sur le ventre du Danois, il se retrouvait par une incroyable gymnastique à dormir affalé sur la figure du mâle qui se réveillait souvent en grommelant.

“Je ne te pousserais pas à en parler si tu n’en as pas envie. Mais je pense qu’il faudra tout de même reprendre cette conversation un jour ou l’autre. Et je ne veux pas que tu fasses les mêmes erreurs que moi… à force de me fermer à tout et à tout le monde, je suis à peine capable d’exprimer ce que je ressens…”

Il savait ce que ça faisait de garder un secret, de porter un fardeau et de le ruminer pendant de longues années. Peut-être qu’Aleksej aurait été plus à même d’en parler tout de suite après l’accident. Il était évident qu’il aurait dû consulter alors. Mais il avait tout nié, tout rejeté. Il s’était enfermé dans une bulle et avait bâti une forteresse autour de son cœur et de ses émotions. Sans que personne ne puisse vraiment l’expliquer, Solveig avait fait une percée, elle avait fini par trouver son chemin jusqu’à lui. Mais certaines murailles restent infranchissables. Parfois il fallait juste les contourner.

@ Invité

avatar
   
#
Dim 24 Jan - 11:50

Je ferme les yeux quand je sens ses lèvres se poser contre mon front. Alors c’est ça, se laisser choyer par quelqu’un ? Admettre ses failles et accepter que l’autre veuille faire tout en son pouvoir pour nous aider ? La seule raison pour laquelle je ne suis pas habituée à tout cela est parce que je n’ai jamais laissé quiconque le faire. Je me souviens sans mal que mon comportement rendait William totalement chèvre, à raison. Je ne lui ai pas rendu la vie facile, je m’en rends compte maintenant.

Je hausse les épaules en guise de réponse à sa question. Je ne sais pas trop si ça va. En vérité, je ne sais pas exactement ce que ça me fait d’avoir révélé cette partie sombre de mon existence. J’imagine qu’il va me falloir du temps pour réaliser ce que j’ai fait ce soir.

Aleks me dit qu’exceptionnellement, nous pourrions manger sur le canapé. Cela est particulièrement surprenant car je sais combien il déteste ça. Je dois vraiment faire peur à voir pour qu’il me propose une chose pareille.

Je secoue la tête doucement.

- Tu détestes ça. On va manger à table, c’est très bien.

Ce n’est pas parce que je semble être au bout du rouleau ce soir qu’il faut que nous prenions de mauvaises habitudes. En soi, que je le veuille ou non, c’est Aleks qui a raison de ne pas vouloir manger autre part qu’à table ou autour du plan de travail de la cuisine. Il y a des endroits aménagés pour chaque chose, il faut les respecter et en faire bon usage.

Évidemment, il ne faut pas très longtemps au Danois pour évoquer le sujet qui « fâche ». Je ne lui en veux pas, j’imagine que mes aveux doivent le travailler autant que moi.

- Ce n’est pas que je ne veux pas en parler, c’est juste… Je ne sais pas quoi dire. C’était il y a longtemps et je pensais tout cela derrière moi.

Au final, il n’aura fallu qu’un cancer et une opération pour me ramener des années en arrière. Pour me faire croire que je ne vis pas bien une chose que j’ai pourtant accepté il y a longtemps maintenant.

- Je ne veux pas que tu prennes mal ce que je vais dire, d’accord ? Mais la vérité est que je ne comptais jamais en parler. Seule Alice est au courant et elle sait que c’est la seule chose qu’elle n’a pas le droit de révéler à quiconque. Je ne voulais pas que ça me définisse. Je ne voulais pas qu’on me résume à « tiens, elle a perdu son bébé le jour de son mariage ». C’était suffisamment compliqué comme ça et…il fallait que j’avance.

Donc j’ai tout enfoui. Loin, très loin. A un tel point que je n’en ai même jamais parlé à Bedelia qui était pourtant ma psy à une époque.

@ Invité

avatar
   
#
Dim 24 Jan - 17:07

Tout en écoutant la jeune femme, il l’invita d’un geste de la main à aller s’assoir à sa place habituelle. Il sortit deux grands bols. Il avait toujours été habitué à manger les soupes dans des assiettes creuses. Il avait d’ailleurs insisté pour qu’ils en achètent des grandes. Mais elle l’avait converti au bol très rapidement arguant que parfois les soupes se buvaient plus que se mangeaient. En y pensant, elle lui avait fait changer bon nombre d’habitudes depuis qu’ils s’étaient installés ensemble, sans probablement sans rendre compte, parfois oui. Et l’inverse était certainement vrai aussi. Il servit les deux bols et les posa sur la table ainsi qu’un petit saladier de croûtons qu’il avait fait revenir.

Il l’observait alors qu’elle vidait son sac. Il n’avait pas trop de mal à concevoir qu’elle ait voulu tirer un trait sur cet épisode de son passé, il avait agi exactement de la même manière. Et puis le passé était revenu la tacler par derrière sans crier gare de la même façon qu’il l’avait fait avec lui. Vicieusement, et avec violence. Et parce qu’il avait expérimenté le même genre de vicissitudes, ses inquiétudes envers la jeune femme étaient encore plus vives.

“Je comprends.”

Il comprenait qu’elle ne voulait pas le heurter, qu’elle ait gardé ça pour elle et qu’elle ait voulu aller de l’avant. La connaissant il avait parfaitement conscience également de l’impact qu’aurait pu avoir une telle révélation sur sa vie. Il avait vécu les bruits de couloir, les discussions qui s’arrêtaient quand il entrait dans une pièce, les silences gênés et les expressions de pitié qu’il pouvait lire sur le visage des gens. Tout ça n’avait fait que renforcer la distance qu’il avait commencé à mettre entre les gens et lui, à relever les remparts de la forteresse dans laquelle il se murait.

“Je dois probablement être le moins bien placé pour pouvoir te donner des conseils sur la manière de gérer tes émotions.”

Assis face à elle, il tendit son bras pour venir caresser le bout de ses doigts.

“Mais je veux être sûr que tu sais que tu peux tout me dire. Si tu en as envie. Ou besoin. Tu m’en as parlé ce soir et ce n’est pas tout à fait anodin. Je ne te jugerais jamais sur les décisions que tu as prises, tu le sais. Et si tu veux garder ça dans le passé, je respecterais ta décision. Mais nous devrons parler d’ici et de maintenant. Cette porte s’est ouverte et nous devrons la traverser que nous le voulions ou non. Un jour ou l’autre.”

Si la décision de ressasser ses anciens souvenirs ne revenaient qu’à elle, le sujet de leur discussion était tout autre. Il aurait un impact sur leur couple. Solveig avait toujours déclaré ne pas vouloir d’enfant. Aleksej n’était pas prêt à ne serait-ce que penser à la question. Il semblait que le temps ne jouait pas toujours en leur faveur mais à présent il avait besoin de savoir ce qui se passait dans la tête de la jeune femme, dans ses tripes et dans son cœur. Pour le Danois qui avait l’habitude de faire les choses dans l’ordre, de manière très traditionnelle, c’était déstabilisant. Ce n’était pas la prochaine étape normalement mais il n’avait pas vraiment le choix. C’était un sujet au bout duquel ils devraient aller. Peut-être pas aujourd’hui, peut-être pas d’un bloc mais ce chapitre là était bel et bien ouvert.

@ Invité

avatar
   
#
Dim 24 Jan - 20:36

Nous nous installons pour commencer à manger. Je ne dis rien, je sais pertinemment qu’Aleks commencera la conversation pour nous. Je ne sais pas trop ce qu’il va me dire. En réalité, je ne suis pas sûre qu’il y ait quoique ce soit à dire. Qu’est-ce qu’on est censé dire à une femme qui vient de vous avouer qu’elle a fait une fausse couche ? Si j’étais à sa place, je ne saurai pas quoi dire. Peu importe qu’il soit mon compagnon ou pas. Le fait est que ce genre de sujet est tellement tabou, tellement compliqué à gérer émotionnellement parlant que, ne serait-ce qu’évoquer le sujet paraît délicat. Mais Aleks étant qui il est, il finit quand même par en parler. Il ne prononce pas les mots qui me brisent le cœur, ce pourquoi je lui suis reconnaissante, cependant il me fait vite comprendre qu’il est là, et qu’il veut être à mon écoute si j’ai besoin de parler. Au-delà du fait d’avoir besoin de parler, il me fait également comprendre qu’il va falloir qu’on en discute à un moment ou à un autre. Parce que cela a soulevé autre chose, quelque chose d'encore plus profond. Les enfants.

Comme je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, avoir des enfants n’a jamais été une priorité dans ma vie. Bien au contraire. Tout ce qui m’a toujours intéressé, c’était de réussir ma carrière professionnelle. Sur ce point, on peut dire que j’ai réussi jusqu’à atteindre une chute mémorable. J’étais sur un piédestal et j’en suis tombée. Violemment. Mais aujourd’hui, je me dis que cela est arrivé pour une raison et que c’est un mal pour un bien. En effet, si le scandale n’avait pas éclaté à l’époque, rien ne me dit qu’Aleks et moi nous serions retrouvés.

Pour revenir au sujet des enfants, je ne sais plus trop quoi en penser. J’ai toujours été bercée par l’idée que je n’en avais pas besoin, et mon opinion était forgée là-dessus. Au fond, quand on se force à penser quelque chose très fort et qu’on se le répète maintes et maintes fois, on finit par y croire. La question maintenant est de savoir si je me suis persuadée de quelque chose de faux ou si ce non désir d’enfant a toujours été réel.

C'est sa main touchant la mienne qui me ramène à la réalité. Je lève les yeux vers lui et croise un regard déterminé, perdu mais déterminé quand même. Il a l’air de souffrir, comme s’il partageait ma peine alors qu’il ne la connaît pas. Ou pas vraiment. Peut-être qu’il s’identifie à ce que j’ai vécu en rapport avec l’accident qu’il a eu avec sa fille. Je n’en sais rien.

- Pour être tout à fait sincère avec toi, je ne me sens pas d’en parler pour le moment. Je ne dis pas que ça n’arrivera pas. Je dis juste que pour l’instant, c’est trop frais.

Rien que le fait d’avouer ma fausse-couche à quelqu’un m’a épuisé, alors parler enfant…non, ce n’est vraiment pas le moment. Et puis, je n’oublie pas qu’un jour, Aleksej m’a dit qu’il n’en voulait plus, qu’il avait tourné cette page. Je ne suis personne pour qu’il commence à remettre cette certitude en question.

- Est-ce qu’on peut juste dîner et profiter d’une soirée ensemble, s’il te plaît ? Je te promets que je n’oublie pas ce qui s’est passé ce soir et qu’on n’en parlera. Mais pas ce soir.

Contrairement à ce que beaucoup pourraient penser, je ne choisis pas la fuite. Je n’ai juste pas la force d’affronter ça ce soir. Et connaissant l’homme en face de moi, je sais qu’il peut le comprendre.

@ Invité

avatar
   
#
Dim 24 Jan - 21:08

Aleksej ne s’attendait pas à ce que Solveig se livre corps et âme mais il voulait qu’elle entende ce qu’il avait à dire ce qui était chose faite. Il leur arrivait parfois de dévier des sujets d’origine et de laisser certaines discussions en suspens. Même si cela semblait insurmontable au Danois, qu’il n’était pas prêt à se poser ce genre de question, il serait bien obligé de le faire. Il ne pouvait tout simplement pas faire comme si de rien n’était. Pas après l’aveu de la jeune femme. Pas après avoir réalisé que sa rémission n’était pas aussi facile que ce qu’elle l’avait laissé penser. Sur le plan psychologique tout du moins. Et c’était assez sérieux pour qu’elle en vienne à s’imaginer qu’il pourrait vouloir retourner vers son ex-femme, pour pouvoir imaginer la possibilité qu’il refonderait une famille avec elle.

“Je pense qu’on a tous les deux eu notre dose pour aujourd’hui.”

Il lui adressa un sourire tendre. Il n’était pas là pour la tourmenter et il sentait bien dans sa voix qu’elle était exténuée. Quand ils eurent fini de dîner, il se leva pour débarrasser leur vaisselle. Il alluma la bouilloire pour leur préparer une tisane qu’il ramena dans le salon où la jeune femme vint le rejoindre. Ils s’installèrent confortablement dans le canapé et Aleksej tira un plaid sur la jeune femme qui s’était installée contre lui. Le Danois ouvrit l’ordinateur qui se trouvait devant eux sur la table basse.

“J’aimerais bien regarder la nouvelle saison de The Crown. Enfin la suivante… Et je te serais gréé de ne pas me spoiler…”


Elle ne pouvait pas voir le sourire malicieux qui s’était affiché sur ses lèvres. Solveig avait déjà vu une bonne partie des épisodes de cette série et ne pouvait pas s’empêcher de réagir en avance. Quand il lui avait fait la remarque la première fois, elle lui avait simplement dit qu’il était difficile de spoiler une série basée sur des faits historiques déjà passés. Aleksej s’était décomposé qu’en elle lui avait balancé que de toute façon, on savait tous que LadyDi était morte, ce qui avait déclenché le rire de la jeune femme. À peine installé que Maroon était déjà aux pieds de Solveig la regardant avec son air suppliant. Aleksej secoua la tête en le regardant monter sur le canapé. À ses pieds, Boule tentait en vain de faire de même. Pris de pitié mais surtout de tendresse, Aleksej attrapa la boule de poil qu’il cala contre lui. Il passa un bras autour de la jeune femme et l’embrassa doucement au creux du cou.

“Merci... de me faire suffisamment confiance.”

@ Invité

avatar
   
#
Dim 24 Jan - 21:21

Passer la soirée dans les bras d’Aleks me convient parfaitement. Nous nous installons dans le canapé, il enclenche l’ordinateur et me demande si nous pouvons regarder la nouvelle saison de la série que nous regardons actuellement. Évidemment, j’accepte volontiers. Je l’ai déjà vu, mais cela ne veut pas dire que je n’ai pas envie de la regarder de nouveau. Et puis, je suis contente qu’Aleks intéresse cette série. Ça nous fait un nouveau, dira-t-on.

- Je te ferai toujours confiance, dis-je en soupirant, soulagée de le savoir près de moi ce soir.

Le reste de la soirée se passe tranquillement. Nous regardons Netflix et j’essaye de ne pas spoiler Aleks comme il me l’a demandé. Je ne dis pas que c’est facile. Parce que en réalité, ça ne l’est pas du tout. Je sais déjà ce qu’il va se passer alors forcément, j’ai envie de partager ça avec lui. Mais il n’apprécie pas tellement mon engouement sur ce coup-là. Alors je me tais. Du moins, je fais de mon mieux pour me taire. Il y a bien une ou deux fois où le Danois finit par poser sa main contre ma bouche pour être sûr que je vais la boucler tandis qu'une scène décisive va se jouer. Ça me fait sourire, il me connaît bien maintenant.

C’est sur les coups de dix heures et demi du soir que nous laissons tomber la plateforme de streaming pour aller retrouver le confort de nos draps chauds. Ce soir, il n’y aura pas de grandes effusions d’amour dans notre lit. Je crois que ni lui ni moi n’en avons la force. Je suis particulièrement rincée de cette soirée. Tant de choses ont été dites, avouées… Je crois que nous avons simplement besoin de mettre les batteries en charge pour la nuit.

Demain est un autre jour et je compte faire en sorte que ce nouveau jour soit formidable.

Fin

@ Contenu sponsorisé

   
#

Poster un nouveau sujetRépondre au sujet

permissions de ce forum

Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum