Métro, boulot, dodo. Devise qui résume parfaitement bien la vie de Marlon en ce moment... sans le métro, en fait, vu qu'il se rend au travail à pied la plupart du temps. Du coup, quand son frère l'invite à passer un peu de temps chez Jojo's pour prendre un verre ou deux, il a l'impression que ça va être une soirée de pure folie. D'autant plus qu'il a vérifié, c'est soirée cocktail avec happy hour de 18 à 22h et il compte bien en profiter, d'autant plus qu'il ne bosse pas le lendemain matin, pour une fois!

Habillé sur son 31, ou tout du moins sa version à lui, à savoir un pantalon noir et une chemise blanche (son frère lui a bien rappelé "c'est un endroit chic, te pointe pas en jean!"), il en est à son deuxième Hugo lorsqu'il comprend enfin qu'il s'est encore fait berner. Son frère ne compte pas venir, comme la semaine précédente, et il va sûrement envoyer le fils de la cousine de ses voisins, ou encore le beau-frère de la meilleure amie de son collègue pour une blind date.

Comment Marlon a encore pu tomber dans le panneau, pour la deuxième fois en l'espace de 10 jours? Pour un policier de carrière, il est d'une naïveté confondante lorsqu'il s'agit de sa propre famille... Mais son frère ne paie rien pour attendre. Cette fois-ci, ça va barder.

Lorsque que le jeune homme/la jeune femme s'installe juste à côté de lui au bar, Marlon est furieux et pointe sur lui/elle un doigt accusateur. "Ah non, je suis pas d'accord, ça se passera pas comme ça cette fois-ci!" souffle-t-il, d'autant plus agacé par l'air surpris de son interlocuteur.

Jojo’s, Ann n’apprécie pas particulièrement l’endroit et elle ne l’a pas choisi. A croire qu’il est suffisamment centré et bien fréquenté pour parler affaire tranquillement. Affaires, oui, vous avez bien lu et même elle a du mal à y croire. Pourtant, c’est bien ce qui l’amène ici. Elle a rendez-vous ici-même pour parler de ce podcast féministe qu’elle compte bien lancer, rapport à tous ces abus qu’elle souhaite dénoncer au sein d’une scène qui l’a vue grandir et qu’elle aime pourtant autant qu’elle se prend à la haïr parfois. Une potentielle invitée, une potentielle aide logistique également, si tant est qu’Ann réussissait à la convaincre de la rejoindre sur le projet.

Envahie par l’angoisse, elle n’avait pas tenu. Faire les cent pas dans son appartement n’arrangeait rien à son stress et elle avait décidé de se rendre sur le lieu du rendez-vous une grosse heure à l’avance, histoire d’être certaine qu’elle serait à l’heure. Aussi, c’est bien trop tôt qu’elle passe la porte du restaurant, transformé pour la soirée en bar à cocktails, et qu’elle s’installe au bar pour passer commande. C’était sans compter sur ce type qui la pointe du doigt et lui beugle des âneries, l’agresse presque au point qu’elle lève les deux mains en signe de protestation – et de surprise, il faut bien l’avouer, on n’imagine pas se faire hurler dessus alors qu’on s’apprête à commander un sex on the beach en ruminant ses propres angoisses. « Wooooh, on se calme, je sais pas pourquoi t’es tendu mais j’ai rien à voir avec tes histoires. » Et tant que t’y es, baisse ce doigt, elle pense mais n’en rajoute pas. « Les inconnus sont pas responsables des trucs merdiques qui te rendent bougon, d’ailleurs, pas besoin de passer tes nerfs sur eux. Y'a de chouettes clubs de boxe pour ça. J’ai le droit de me commander à boire, maintenant ? »

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