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Collision [PV Alejandro Estrella]

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Mar 24 Sep - 23:29
Le parquet grinça sous le poids des deux hommes qui venaient de sortir de l’ascenseur, pour une fois en état de marche, et s’engageaient sur ce dernier. Les murs, propres quoique ternes, semblaient les regarder avec leur lueur blafarde, le néon au plafond projetant leurs ombres soudain démultipliées. Leone savait que, vu sa situation, la surprise quant à son logement pouvait venir chez celui qui l’accompagnait. A vrai dire, depuis sa titularisation, il aurait dû chercher un autre appartement, plus proche de son travail, mieux isolé, plus grand. Sauf que cela voulait dire s’éloigner de sa grand-mère, et il n’arrivait pas à s’y résoudre. Il avait essayé de la convaincre, craignant pour la sécurité de la pétulante vieille dame, mais celle-ci n’avait rien voulu savoir. Little Italy, c’était chez elle, c’était l’un de seuls endroits de la ville où elle ne se sentait pas jugée en permanence pour son accent à couper au couteau, pour son phrasé heurté en anglais et ses manières de mama, venues tout droit de son Mezzogiorno natal. C’était là où elle avait son église, toutes ses amies, ses habitudes, les oreilles des gamins à tirer, y compris ceux des mafieux, qui avaient fini par considérer qu’elle faisait partie du décor, avec son petit-fils. Alors lui pouvait s’en aller, mais pas elle. Et s’il y avait une chose que Leone était incapable de faire, c’était quitter sa seule famille. Il avait donc acheté un appartement dans le même immeuble, deux étages plus bas, pour avoir son intimité. Ce qui aurait été pris pour un singulier manque d’indépendance était relativement courant, dans le quartier. On avait le sens de la famille, à Little Italy, ce n’était pas un vain mot. Les enfants habitaient en face des parents, et les grands-parents au paté de maison deux rues plus loin. Et ainsi, ça s’invectivait depuis les balcons, à la méridionale, ça discutait du petit dernier, des ennuis de la fille, mio dio, che orrore !

Inutile de préciser qu’une telle bousculade de pensées désordonnées et à mille lieux d’une vague idée romantique n’aidait pas beaucoup l’italien à se détendre, alors même que, nom de nom, il y avait Jan à ses côtés, soit l’homme à qui il faisait les yeux doux de très loin depuis plusieurs mois, avec une telle discrétion qu’il était évident que l’objet de son intérêt n’ait strictement rien remarqué. Et ce n’était pas avec ses avances à la subtilité un rien trop appuyée qu’il avait beaucoup progressé. Peut-être que partir dans une dissertation sur les saxophonistes les plus agréables à écouter n’était pas une bonne idée pour démontrer ses envies ? Etrange, étrange. Résultat des courses, il avait fini par se regarder dans une glace un matin, inspirer profondément, croiser Jan dans les locaux d’Act-Up où lui-même allait pour prendre sa permanence, et poser l’invitation à dîner la plus improbable au monde : qu’il aimerait que ce ne soit pas amical, mais vraiment, si ça devait l’être, c’était tout aussi formidable, bien sûr, qu’il n’attendait rien, mais enfin un tout petit quand même, et il faut vraiment que j’y aille, au secours, tu me dis, ou pas, si tu veux pas. Bref, Leone et ses brillantes qualités de séducteur avaient fait merveille par ce discours aussi fouillis que nerveux, au point qu’un ami ayant entendu ce magma informe de mots l’avait gentiment moqué tout l’après-midi, à sa honte redoublée.

Le miracle s’était pourtant produit. Il y avait eu nouveau contact, et pas uniquement amical. Enfin, pas à but uniquement amical. Puis dîner. La conversation avait considérablement dénoué les nœuds au creux de son estomac à cause de la nervosité. Ce n’était pas difficile en même temps, entre eux. Leone était sincèrement admiratif du travail de Jan avec El Halito, et l’écouter parler de ses gamins avait quelque chose de doux et agréable, comme un parrain qui racontait les exploits de ses multiples filleuls, avec leurs réussites et souvent leurs fêlures, celles qui les rendaient parfois instables, toujours attachants. Et lui pouvait discourir sur ses patientes préférées, celles qui, peu importe les difficultés, apportaient leur ensoleillement de maîtresses-femmes dans les couloirs de l’hôpital. Il y avait ces mères qui régentaient leur petit monde en attendant le nouveau numéro, ces dames qui s’habillaient comme pour l’opéra, même si c’était pour aller sur une table d’opération avec une blouse pas bien couvrante, parce que tout de même, il faut toujours bien présenter, enfin, les jeunes de nos jours ne savent plus quelles sont les bonnes choses. Et toutes les autres, tant de visages, tellement d’histoires.

L’heure avait avancé, et la nourriture avait diminué. Et au moment de se quitter, sur le pavé, Jan était finalement parti dans la direction de Little Italy, vers chez lui, parce qu’il voulait bien essayer. Et les papillons dans le ventre de Leone se transformaient en vautours géants, à mesure qu’ils tintinnabulaient dans ses entrailles, et que le pauvre galant essayait de contenir à la fois ses espoirs et sa nervosité grandissante. Ils étaient donc là, côte à côte, l’un avec le rouge aux joues et les bras ballants, dans ce long couloir un peu froid, si chaleureux par sa familiarité aux yeux de Leone, l’autre qui paraissait peut-être un peu amusé par son grand échalas de soupirant maladroit.

D’un râclement de gorge, Leone finit par dire, la bouche aussi sèche que le désert du Sahara :

« J’habite au bout, à droite. Ce n’est pas très grand, et euh … »

Ses mots se perdirent alors qu’il tentait de saisir les doigts du mexicain entre les siens rendus roides par ses angoisses puériles, afin de le mener. C’était toujours dans ces moments qui se précisaient que lui revenaient en mémoire les rejets d’antan, les angoisses de tous les instants, s’entrechoquant avec les espoirs de peut-être enfin, trouver lui aussi son petit coin de paradis, juste avec un beau garçon, des draps souples et du popcorn, au petit-déjeuner, parce que pourquoi pas, parce qu’il se sentait un peu fou ?

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Mer 25 Sep - 18:35



everything will be fine.
feat @Leone Castelli

Il ne sait pas si c’est une bonne idée mais c’est au moins une idée. Et ça faisait longtemps que Jan n’avait pas eu envie de tenter quelque chose qui dépassait les limites qu'il s'était fixé. Il y avait peut-être Oscar mais les deux hommes savaient qu’entre eux, ça ne serait jamais plus que quelques câlins au creux des draps, sans perspective d’avenir. Jan n’était pas prêt, savait que ça ne le ferait pas, que ce qu’ils avaient, leur convenait à tout les deux. Même lui n’avait pas envie que ça change mais parfois, il désirait plus. Plus que des baisers rapides dans un appartement qu’il ne voyait que quelques nuits par-ci, par-là, plus que des conversations qui menaient souvent à une impasse du côté du mexicain. Plus. Il voulait comme avant, se sentait peut-être prêt, à vivre l’instant. Leone avait su tisser un petit quelque chose au creux du coeur d’Estrella. Jan ne savait pas quoi mais ça lui plaisait et plus il passait du temps avec l’italien, plus l’envie d’essayer grandissait. Ce n’était pas un coup de foudre, encore moins un coup de tête. C’était réfléchi, peut-être trop quand il y pensait. Il s’était demandé si ce n’était pas précipité, si c’était bien d’accepter d’aller diner avec le chirurgien si… Des si par milliers, qui feraient rougir le plus virtuose des musiciens. Au final, il avait eu raison, le repas c’était passé sans accroche et au contraire, les deux hommes s’étaient trouvés de nombreux points communs qu’ils n’avaient su déceler lors de leurs nombreuses rencontres à Act-Up. Ça pouvait marcher, il pouvait essayer, il n’allait pas en crever. Ça ne pouvait que lui faire du bien, même si ça ne se finissait que par une nuit de tendresse, même s’ils n’allaient pas plus loin, Jan avait envie.  C’était déjà un grand pas. Et puis surtout, Leone le voulait, lui, pas un autre. Alors peut-être que finalement, Alejandro Estrella n’était pas si dégoutant, qu’après 8ans, il pouvait encore plaire malgré les ecchymoses au coeur et les blessures de guerre qu'il trainait depuis cet instant.

Le repas terminé, c’était Jan qui lui avait proposé de l’accompagner chez lui. Incapable encore de faire rentrer quelqu’un dans sa chambre, dans son intimité, son chez lui était une zone protégée. Peut-être que ça changera, qu’un jour, il réussira à laisser quelqu’un réchauffer ses draps. Mais en attendant, c’était chez Leone qu’il allait devoir se laisser aller, accepter que l’italien le touche, le déshabille peut-être. Le regarde même. Mais quelque chose lui disait que Leone comprendrait. Regarde moi dans les yeux s’il te plait, ça serait simple à murmurer, Jan sait séduire avec son accent quand il s’y met. Et si le chirurgien voulait l’ausculter, le mexicain fermerait les yeux pour ne pas visualiser son expression quand ce dernier laissera ses prunelles descendre trop bas. Ça ira, il le sait. Tout ira bien.
Amusé par la situation et par le ton de Leone qui se voulait un peu gêné, Jan se laissait guider dans l’ascenseur qui lui semblait trop petit. Ça ira, il se le répétait inlassablement, tellement de fois que ça devenait comme une litanie dans sa tête qui ne semblait pas accepter la défaite. Il était paniqué mais ne le montrait pas. Leone comprendra, Leone veut plus qu’une nuit à s’embrasser, que quelques instants à souffler. Lui aussi il veut ça, le désire, ça lui fera du bien, ça l’aidera à avancer.  Alors pourquoi ça tourne sans arrêt dans son crâne ? Pourquoi il se sent comme un adolescent prêt à s’élancer sans harnais pour le retenir ? Il doit arrêter de penser, il doit juste écouter les mots de Leone et les palpitations de son coeur qui veulent s’accélérer.  Ça ira.
- Je n’avais jamais remarqué que tu avais un accent italien aussi prononcé…
C’est dit en murmurant,  refermant ses doigts sur ceux du chirurgien. Se rapprochant de lui, une main contre sa hanche, les pensées furent mises aux murs comme le dos de Leone. Le baiser fut doux, innocent, inattendu aussi, la pression des lèvres d’un homme contre celles d’un autre tout simplement. Ça dura deux secondes, ce fut le premier sans tremblement. Ça ira, il sentait que tout irait bien.
Jan se recula légèrement, les yeux baissés, un sourire un peu gêné. Un sourire d’adolescent.
- Montre moi ton appartement por favor.
C’est à force d’y penser que ça n’irait pas. Alors à la place, Jan se concentra sur la saveur des lèvres de l’italien, sur son accent, sur tout ce qui lui permettait de penser, que tout irait bien.

@ Invité

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Jeu 26 Sep - 22:21
Les lèvres de Jan sur les siennes, Leone oublia instantanément tout ce qu’il aurait pu dire sur son accent dû à sa nervosité de grand dadais si peu sûr de lui dans ce domaine. Au bloc, il était ce chirurgien respecté, méticuleux, promis à un avenir brillant, que beaucoup voyaient prendre la tête du service dans quelques années, qui avait déjà des projets d’essais cliniques et surtout, qui courrait partout avec son grand sourire facile, à rassurer les enfants sur le sort de leurs mères et grands-mères, à secouer gentiment les époux sur le fait qu’ils fallait qu’ils prennent les choses en main … et qu’ils se prennent en main, parce qu’il y aurait de la fatigue, et que changer les couches du petit dernier, ça n’était tout de même pas bien compliqué, surtout quand on a fait Harvard comme vous monsieur. Dans le milieu associatif, il était le gaillard timide du fond qui écoutait plus qu’il ne discutait, qui était là pour tendre la main, éponger les peines des plus jeunes avec sa bonhomie proverbiale, consoler les plus âgés, se souvenir parfois aussi. Mais là, il était un homme, avec un autre homme, sans savoir où aller et tout en y allant, en voulant emprunter un chemin qu’il avait du mal à dessiner. Alors le souffle du mexicain mêlé au sien l’aidait, comme une boussole, à se souvenir dans un éclair que cela faisait du bien, d’aimer autrement que par des mots et des soins. Déjà ils se séparaient, cela avait été un effleurement, et Leone en resta coi, les yeux papillonnants légèrement, de surprise et de plaisir, sans qu’il ne sache vraiment ce qui avait pris le dessus. Peu importait, parce qu’un sourire lumineux se dessina parmi les ombres du couloir, et il chuchota, la voix un peu plus ferme, et avec une pointe de reconnaissance aisément reconnaissable à son ami pour avoir fait le premier pas, même d’un orteil :

« Avec plaisir, bello mio. »

Les langues aux origines ensoleillées se répondaient, tandis qu’apparaissait, l’espace d’une fugace seconde, une expression presque taquine sur le visage de Leone. Au moins, là, Jan n’aurait pas que l’accent, même si ce dernier avait un parfum certain d’oliviers, de vignes et de pauvreté du Mezzogiorno, de cette campagne profonde dont venait sa grand-mère et qui embaumait les pâtes à la puttanesca et la mafia, comme à Little Italy, au fond, qui portait décidément bien son nom. Puis, parce qu’il n’allait pas rester contre le mur plus longtemps, Leone se détacha de ce dernier, sans lâcher la main de son vis-à-vis, avant de l’entraîner à sa suite vers son appartement, donc. Devant la porte, il farfouilla de sa main libre dans sa poche de manteau pour trouver ses clés, avant de lutter un peu pour les enfoncer dans la serrure, ses doigts demeurant un peu gourds et les pensées se bousculant désespérément dans sa tête n’aidant définitivement pas à améliorer son adresse. Finalement, cela s’ouvrit, et il réprima presque un soupir de soulagement, avant de pénétrer à l’intérieur.

Une fois l’entrée passée, avec son porte-manteau, on pouvait trouver un salon de taille respectable avec une cuisine à l’américaine, un couloir traversant le tout et donnant sur les autres pièces, à savoir la salle de bain, sa chambre et une autre qui, bien qu’officiellement chambre d’amis, servait davantage de bureau qu’autre chose. L’ensemble était décoré simplement, sans ostentation, mais néanmoins habillé de couleurs chaudes grâce aux peintures accrochées au mur et à l’imposant canapé avachi trônant au milieu du salon recouvert de plaids colorés pour cacher son état de légère décrépitude, dans un patchwork aussi solaire que confortable. Plusieurs cadres de photos traînaient sur les étagères, la plupart montrant Leone avec sa grand-mère depuis l’adolescence, d’autres avec des amis, et un certain nombre avec les militants d’Act-Up. Aucune, néanmoins, ne faisait référence à son enfance, du moins, pas avant ses neuf ans, comme si cette période n’avait jamais existé.

Leone détacha ses doigts de ceux de Jan, pour balayer le tout d’un revers de la main avant de déclarer, un peu platement.

« Voilà. »

Agacé par son éloquence soudainement envolée, l’italien se râcla la gorge avant de proposer, un peu à brûle-pourpoint :

« Fais comme chez toi. Tu peux poser ton manteau où tu veux. »

Lui-même enleva le pardessus et le suspendit. Plus à l’aise avec une couche en moins, il s’ébroua légèrement, comme pour se donner une contenance, sans y parvenir totalement, mais parce qu’il avait un besoin désespéré de s’occuper l’esprit pour éviter que toutes ses angoisses ne reviennent, encore une fois, à la charge. Son regard se laissa agripper par le menton saillant du mexicain, par ses traits, par ses cheveux corbeaux … et l’instinct revint à la charge, de même que ces maudits papillons qui pétillaient décidément trop dans son ventre pour son bien-être. Alors, doucement, il s’approcha. Il hésita brièvement, ne désirant pas avoir l’air d’être insistant, ou juste … il ne savait pas. Aussi il se décida pour un baiser au coin des lèvres, pas tout à fait sur la joue, pas encore sulfureux, juste une promesse, une porte ouverte, avant de se retirer et de s’éloigner :

« Assieds-toi, je vais faire du thé. Après tout ce qu’on a mangé, ça nous fera du bien. »

Et puis, on pourrait discuter. Ils avaient tout le temps, toute la nuit, tout ce qu’ils voulaient. L’accent avait légèrement battu en retraite, alors que sa nervosité diminuait, maintenant qu’ils étaient chez lui, comme s’il s’offrait un répit. Cinq minutes plus tard, il revenait avec deux tasses fumantes, qu’il déposa sur la table basse, avant de dire, cherchant à reprendre le fil d’une conversation qui n’existait pas, du moins pas avec des mots :

« L’accent … il vient quand je suis nerveux. »

Il n’osait aller plus loin dans la confidence. Il ne voulait pas mettre Jan mal à l’aise, et en même temps, il ne savait comment lui dire qu’il l’intimidait, qu’il avait sans doute un peu trop d’espoir à décevoir, et qu’il préférait … de la lenteur. De la douceur. Oui, c’était bien comme programme, douceur et lenteur. Peut-être que ça mènerait à bonheur. Et ses doigts, déjà, cherchaient à nouveau ceux de Jan.

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Mar 1 Oct - 21:55



everything will be fine.
feat @Leone Castelli

Leone était de ces hommes calmes, peut-être nerveux mais qui réussissaient malgré tout, à détendre ceux autour d’eux. Malgré la légère gêne ressentie chez l’italien, Jan se sentait à l’aise à ses côtés et ne pu que sourire en entendant le surnom offert. Bello mio. Les deux langues latines étaient à la fois si différentes et si proches et il n’avait aucun mal à comprendre ce que le médecin signifiait. Ça lui plaisait, le ferait presque rougir s’il n’était pas plus occupé à penser à l’après. Il ne devait pas mais c’était toujours la même ritournelle et même s’il appréciait beaucoup Leone, Jan ne savait pas s’il allait réussir ce que lui-même espérait. Ce n’était pourtant pas compliqué de se déshabiller, de se laisser porter par le désir et le plaisir de l’autre. Pas si difficile non, sauf pour quelqu’un qui n’avait plus aucune estime personnelle et dont la moindre parcelle de peau lui rappelait tourments et erreurs d’une autre vie.

La porte fut ouverte, l’appartement découvert. Jan ne pu s’empêcher d’ouvrir légèrement la bouche en voyant le logement. C’était… deux fois plus grand que chez lui et bien plus… charmant. Même si le mexician avait réussi à faire de son petit appartement un lieu cosy, ça restait le Bronx et le Mranda Height. Ce n’était rien en comparaison avec l’immeuble où vivait Leone. Lui n’avait peut-être aucun soucis avec les souris et les infiltrations. Silencieux quelques secondes, il lui répondit d’un sourire en retirant son manteau et en le posant au même endroit que le locataire des lieux.
- Ton appartement est… vraiment sympa.
Il eut à peine le temps d’en dire plus que l’italien se rapprocha lentement et déposa un rapide baisser au coin de sa bouche. Jan eu un léger rire, attendri, touché par sa simplicité. Ça lui faisait du bien, une telle lenteur dans les gestes, il ne se sentait ni brusquer ni obligé d’aller plus loin et c’était surement ça, qui lui donnait envie d’essayer malgré tout. Leone était bel homme en plus d’être intelligent et pleins de bonnes attentions et ce serait mentir que de ne pas avouer que le mexicain n’avait pas imaginé ses lèvres contre la peau d’albâtre du second latin de l’appartement. Mais entre l'imagination et la réalité, il y avait un monde.
Prenant place en silence sur le canapé, Cala aurait sauté sur ses genoux s’ils avaient été chez lui. Mais pas de chat ici, ni de chien visiblement. Rien que Leone, qui était déjà parti préparer du thé. À cet instant précis, Jan aurait préféré du mezcal, histoire de ne pas avoir l’air d’un abruti de 16ans qui ne sait pas où poser ses mains et ses prunelles chocolat. Sur le canapé ? Sur ses cuisses ? Les mains, pas les yeux bien sûr. Et le regard, devait-il attendre que Leone arrive ou devait-il lui parler alors que le second homme était dans la cuisine ? Le brun se posait trop de questions, se sentait stupide et ne pu s’empêcher d’étouffer un rire quand le chirurgien revient à ses côtés, deux tasses chaudes en main. Sa remarque le fit sourire, les sourcils légèrement froncés alors que déjà, le liquide fumant fut bu en petites gorgées. Tisane, parfait pour le soir, Leone avait pensé à tout.
- C’est moi qui te rend nerveux ?
Lui et son accent qui sentait le soleil et les déserts mexicain, lui et ses prunelles qu’il avait décidé de garder hautes et dardées sur l’italien. Lui dont les doigts vinrent trouver la cuisse de l’homme pour simplement s’y poser.
- Si ça peut te rassurer, tu me rends aussi très nerveux, j’ai l’impression…
Il baissa la tête, le nez plissé comme un tic immanquable quand il n’osait pas trop avouer quelque chose. Il avait gardé cette habitude de son enfance et déjà petit, on lui disait d’éviter pour ne pas que des ridules se forment entre ses deux yeux. Il n’avait jamais écouté et bizarrement, avait vieilli sans ces dernières.
- ... d’avoir 16ans et de ne pas savoir ce que je dois dire ou faire.
La tasse fut attrapée une seconde fois, l’odeur de la tisane le détendait, la saveur de l’eau chaude, légèrement infusée, lui fit fermer les yeux, profiter de ces quelques secondes silencieuses. Les doigts de sa main droite caressaient tendrement le genou de l’italien, sans oser aller plus haut, plus loin. Sans oser tout court, ce n’était qu’une caresse d’adolescent alors qu’ils avaient tout les deux la trentaine bien tassée.
- Ou d’avoir 87ans et de prendre ma tisane avant de me coucher
Cette fois-ci, le rire fut bien plus vrai alors qu'il reposait la tasse. Oui, 87ans et l’impression de tout réapprendre.
- Tu...tu as envie de m’embrasser ?
Car Jan a beau avoir été le premier à s’élancer dans le couloir, à présent qu’ils étaient ici, assis l’un à côté de l’autre, il n’avait plus le même courage. Il aura besoin d’aide pour ne pas fuir avant d’avoir bu toute sa tasse.

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Lun 21 Oct - 17:12
Un léger sourire en entendant Jan complimenter son appartement, Leone avait conscience qu’avec ses tasses de tisane et sa prudence, il ne donnait peut-être pas l’impression d’être l’homme le plus passionné au monde, ni même de quelqu’un qui voulait autre chose qu’une simple soirée amicale à regarder la télévision en duo, à zapper entre les programmes du soir, se moquer des horribles talk-shows et séries diverses passant à cette heure avant d’offrir le canapé à son invité pour dormir et d’en rester à une saine complicité sans ambiguïté aucune. Mais il n’allait pas changer à trente-quatre ans : les histoires d’un soir, il ne savait pas faire, et de toute façon, il n’en voulait pas. A vrai dire, c’était assez rare qu’un homme pénètre dans son appartement après un seul dîner, et il s’agissait d’une preuve de confiance envers le mexicain, parce qu’ils étaient amis, pas le genre qui se connaissait depuis vingt ans certes, mais ils s’entendaient bien, ils se croisaient régulièrement, ils plaisantaient … Ils n’étaient pas des inconnus l’un pour l’autre, sans qu’ils soient suffisamment proches pour annihiler toute chance de « et si », ce qui avait en partie décidé l’italien à se déclarer, un peu à l’ancienne, parce qu’il avait conscience que sinon, l’amitié prendrait le dessus et éteindrait tout espoir qu’il pouvait avoir d’un autre type de relation. Non pas que la simple amitié ne lui suffisait pas, au contraire même : il appréciait sincèrement Jan et sa chaleur, son sourire solaire et sa … force tranquille ? Un peu, oui, il l’aurait décrit ainsi. C’était que le chirurgien aimait les hommes aussi calmes que lui, souvent, le genre à ne pas se moquer de ses petites manies de vieux garçon, et pas qu’au sens premier du terme. Il avait été élevé par une dame d’un certain âge, et cela se voyait, dans son côté un peu guindé sentimentalement, gauche parfois, surtout dans ces moments de flottement où il y avait tellement de possible qu’il craignait d’en attraper un pour voir tous les autres s’enfuir et le laisser seul avec un échec, avec des regrets, avec l’amertume de s’être trompé, d’avoir tout gâché. Alors, il se disait qu’au besoin, si finalement, Jan préférait en rester là, ils boiraient leur tasse, riraient, et puis … se séparaient. Tout doucement, tout simplement.

Mais non. Parce qu’il y avait son sourire, et sa main sur sa cuisse, posée doucement, puis un peu plus insistante, tandis que son vis-à-vis lui avouait être aussi nerveux que lui, ce qui mena le pauvre Leone à se brûler la gorge pour avoir avalé trop violemment, traversé qu’il avait été par une sorte de frisson de joie, de courant électrique un rien trop présent. Et soudain, il avait un sourire idiot étalé sur ses lèvres, au milieu de son visage éclairé par cent mille volts d’espoirs renouvelés. Peut-être qu’il était désespérant, à se sentir s’envoler juste pour quelques doigts remontant sur sa cuisse, pour un gentil aveu murmuré en retour du sien, alors que vraiment, ça n’était pas grand-chose. Oui, mais c’était tellement, en même temps, parce que cela lui donnait l’assurance dont il manquait tant, le petit coup de pouce nécessaire pour lui faire reprendre le cours normal de ses pensées. Et puis Jan le faisait rire, avec ses dernières paroles, comme s’il se moquait gentiment de sa prévention tout en le remerciant pour. C’était doux, là encore, et son sourire s’agrandit, alors qu’il osait répondre, badin enfin :

« Si ça peut te rassurer, tu es le grand-père le plus charmant au monde, dans ce cas. J’aimerai être aussi bien conservé pour mes 87 ans. »

Oh oui, avec ses yeux noisette, ses fossettes et son visage mince, Jan avait de quoi faire tourner les têtes. Il avait un charme mature qui ne devait pas plaire qu’à Leone, et la personnalité douce qui allait avec, du moins, de son point de vue. Il s’apprêtait à mettre sa main sur celle de Jan, pas pour l’arrêter, au contraire même, pour se rapprocher encore un peu, alors qu’ils échangeaient toujours … quand ce dernier lui proposa de l’embrasser. L’italien en resta coi trois secondes, avant que son inénarrable sourire irradiant ne revienne à la charge, encore plus large, encore plus joyeux. C’était comme si une porte s’ouvrait enfin devant lui. Voilà, il était certain. Il ne savait pas où cela irait, mais qu’importe : le plus important n’était pas de se fixer un but, mais d’apprécier le chemin parcouru, même s’il devait se terminer différemment de ce qu’il aurait pu espérer au fond de lui. Il n’y avait qu’un fossé à franchir, celui qui séparait leurs bouches, et peut-être aussi leurs vies. Il l’enjamba.

Sa main se souleva pour caresser la joue de Jan, et Leone se rapprocha donc, avant de s’arrêter à quelques centimètres des lèvres de son ami – amant ? , pour souffler dans les volutes de respiration mêlées :

« J’en ai très envie. Et tu sais très bien quoi dire, la preuve … »


Leone l’embrassa, d’abord chastement, comme un effleurement, pour goûter aux lèvres désirées, tentatrices, plus longuement qu’auparavant, pour chercher les saveurs interdites qui parsemaient cette bouche voulue, et aussi pour s’imprégner de l’odeur de Jan, pour laisser intact son sourire et le faire sien. Puis son autre main joignit sa comparse, sur la joue adverse, et le baiser se fit plus profond, toujours doux, néanmoins, même s’il transparaissait davantage dans ce ballet plus appuyé le désir réel et sincère de l’italien … ainsi que l’affection qu’il ne cherchait pas à cacher. Il lui semblait que le temps était en train de s’arrêter, et quand ils se séparèrent, cherchant un peu de souffle, il déclara, légèrement hors d’haleine, les joues rosées et les lèvres un peu rougies :

« Je suis moins nerveux maintenant. Quoiqu’il faudrait peut-être recommencer, pour en être certain. Le contact physique fait baisser la nervosité, c’est prouvé scientifiquement. »

La médecine pouvait bien servir à de menus arrangements, parfois. Ordre du docteur, aurait-il aimé ajouter malicieusement. Mais il se contint, quand bien même ses yeux pétillaient plus vivement que jamais, luisant d’un feu doux qui ne demandait qu’à s’embraser. Et pourtant, il reprenait légèrement ses distances, pour qu’ils aillent à leur rythme, un pas après l’autre. Même si une part de lui trépignait d’impatience à l’idée de plonger définitivement dans l’abysse qui le submergeait.

@ Invité

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Mar 22 Oct - 20:16



everything will be fine.
feat @Leone Castelli

Il était rassuré d’être un grand-père charmant ! Jan savait qu’il faisait plus jeune que son âge, que beaucoup ne s’imaginait pas qu’il venait d’avoir 40ans. On lui en donnait plutôt 34/35, grand maximum. Les petites rides d’expression qu’il avait au creux des yeux ne suffisaient pas pour qu’on l’étiquette quarantenaire. Car il avait quelque chose, chez Alejandro Estrella, d’enfantin et de naïf. Son sourire peut-être, on lui en parlait souvent de lui. Ou alors simplement sa facilité à prendre la vie comme elle venait, à l’accepter avec ses difficultés et ses malaises comme si, en ayant vécu le pire, il ne voyait plus que le positif dans ce qui pouvait arriver par la suite.
La main de Leone était chaude contre sa joue, il aurait voulu que ses doigts la caressent, découvrent les aspérités de sa peau, la barbe parfois mal rasée qui piquait le derme quand on s’y attardait. Mais ses lèvres lui suffiraient pour le moment. Toujours la même douceur, le même calme que le baiser du couloir. C’était apaisant, délicat, ça le mettait terriblement en confiance. Et puis… il mentirait s’il n’avouait pas que Leone n’embrassait pas bien. Ni que la suite ne le rendait pas pressé d’en découvrir d’avantage. Les secondes s’égrenaient alors que le baiser se fit plus envieux, plus adulte aussi. Et le recul obligatoire pour respirer le fit sourire comme un adolescent incapable de se contenir.

- La médecine a bon dos parfois…

Qu’il osa, avec un petit sourire sardonique, un sourcil relevé pour appuyer ses dires. Et cette fois-ci, il n’attendit pas que Leone s’approche, c’est lui qui prit les devants, lui qui agrippa tendrement sa joue, lui qui posa ses lèvres fines sur celles plus charnues de l’italien. Lui qui se colla un peu, abandonnant sa position assise qui le gênait, lui qui poussa lentement son compagnon à s’allonger sur le canapé pour s’installer au dessus de lui et le contempler.

- Voyons voir si la médecine a raison sur la nervosité… Dr Castelli.

Le sourire qu’il lui offrait était rayonnant, plein de lumière et de confiance. Les prunelles pétillaient un peu, comme lorsque le mezcal le faisait rire pour un rien. Ça lui plaisait, lui rappelait de bons souvenirs, quand aucune peur ne lui tailladait le bide lorsqu’il se retrouvait avec quelqu’un. Se baissant à nouveau, les lèvres effleurèrent la mâchoire de l’homme avant de descendre tranquillement dans son cou, les doigts curieux sur les bords du t-shirt, hésitant sur la suite du moment.

@ Invité

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Dim 3 Nov - 18:58
La lèvre inférieure mordillée laissa apparaître une expression taquine sur le visage de Leone tandis qu’il entendait Jan relever le fait que ses prescriptions médicales étaient davantage séductrices que professionnelles. Ses yeux bleus pétillaient de malice, mais également d’une lueur qui donnait une tonalité plus mutine à sa physionomie, comme s’il le défiait de le prendre au mot tout de même et de l’attaquer de ses lèvres à son tour. Quel doux siège, quel plaisir il aurait à se rendre ! L’italien n’avait jamais été un grand combattant, et à cet instant, il ne rêvait que d’être défait. L’homme le prit au mot, ou plutôt à la pensée, en se penchant à nouveau vers lui, bouche à bouche, souffle à souffle, et il savoura le contact, toujours plus appuyé, toujours plus profond. Il le sentit appuyer doucement pour qu’il bascule en arrière, contre le canapé affaissé et se laissa faire, tout entier emporté par leur baiser, ou plutôt leurs baisers, parce qu’ils commençaient déjà à se multiplier dans sa tête et ses comptes se faisaient déjà douteux. Mais ce n’était pas grave : il n’y en avait jamais assez, des baisers, entre deux hommes qui en avaient envie. Et finalement il souffla entre ses lèvres rosées, déjà légèrement gonflées par les échanges précédents :

« Je ne doute pas que l’auscultation fera s’envoler tous tes doutes à ce sujet … »


Jan descendit jusqu’à sa mâchoire puis s’attaqua à son cou, et Leone laissa échapper un très léger gémissement de plaisir, parce qu’il avait toujours adoré ces attentions particulières, chez tous ceux avec qui il avait partagé des moments intimes. La sensation de la barbe du mexicain râpant légèrement contre la peau sensible de sa gorge, alliée à celle plus humide de ses lèvres … c’était un cocktail suffisamment pour le rendre fou. Qu’y avait-il de plus délicieusement et délicatement érotique sur cette terre ? A ce jour, il n’avait pas la réponse à cette question, et ne désirait pas particulièrement l’avoir, parce qu’il estimait que rien n’irait jamais au-delà du plaisir qu’il éprouvait à cet instant. Ses mains, comme animées d’une vie propre, décidèrent de ne point rester en retrait comme elles l’avait fait jusqu’à présent, et partirent donc en exploration, en miroir de celle que Jan, à ce moment précis, faisait de son propre corps. Elles tentèrent de caresser tout ce qu’il pouvait atteindre, les bras secs de son amant – parce qu’il fallait dire que là, tout de suite, il avait du mal à appeler l’associatif son ami – pour descendre au creux des reins et s’aventurer vers ses fesses. S’allongeant tout à fait sur lui, un sourire joueur apparut sur ses lèvres tandis qu’il profitait d’un très léger coup de bassin pour faire basculer définitivement Jan avec lui, encastrant leurs corps emmêlés dans un tohu-bohu de jambes les unes sur les autres, au creux du canapé trop petit pour de telles réjouissances et qui grinça sous eux. Leone n’en avait cure, puisqu’il pouvait enfin épouser la forme galbée sous ses doigts à loisir, et il était entièrement possible que certaines de ses caresses, à travers le tissu, n’aient définitivement plus rien de chaste. Son index s’accrocha au rebord du pantalon, et il s’arrêta également, chacun restant à la lisière des vêtements de l’autre, dans une hésitation emplie de curiosité : est-ce qu’il fallait continuer ? Ici ? Ou … ?

Ces secondes de latence eurent le mérite de faire revenir légèrement l’italien sur terre. D’abord pragmatiquement, il gardait ses préservatifs dans sa chambre, et au rythme où les choses allaient … il vaudrait peut-être mieux être certain d’avoir tout ce qu’il fallait sous la main rapidement, pour ne pas s’interrompre au pic de l’intimité. Et ensuite, tandis que Jan titillait les bords du T-shirt, cela le ramenait à une réalité un peu prosaïque, qui était celle d’un corps en dessous n’ayant rien d’attrayant – du moins, qui pouvait surprendre au premier regard. Et il ne savait pas vraiment comment l’aborder. N’en avait encore moins envie, alors que tout se passait si bien, et qu’il avait l’impression d’avoir déjà un orteil dans les nuages. Et pourtant la peur et le doute s’insinuaient, revenant à la charge. Il les étouffa en attirant à nouveau Jan à lui pour un baiser particulièrement approfondi, espérant chasser toutes les pensées qui s’entrechoquaient dans sa tête ainsi. Le résultat fut à la hauteur de ses espérances. Se relevant légèrement, appuyé sur ses coudes, il murmura :

« On devrait peut-être … aller dans ma chambre. Parce que je crois que mon canapé ne va pas tenir notre rythme. »

Un grincement sourd confirma ses dires. Il se détacha, à regret, de Jan, se relevant, non sans rester près de lui, félin, ses mains effleurant son dos, sa paume, son souffle se reposant dans son cou, alors qu’il l’entraînait avec lui. Et une fois la porte dépassée, puis refermée, ce fut lui qui attaqua, plaquant Jan contre le mur et dévorant son cou de ses attentions, son corps collé au sien et son désir entièrement visible, dans ses yeux étrécis, ses mains avides et son bassin arqué vers le mexicain.

« Ti voglio, bell'uomo. »

C’était dit simplement, en italien, et il était certain qu’à cet instant, ses paroles se passeraient aisément de traduction.

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Ven 8 Nov - 16:18



everything will be fine.
feat @Leone Castelli


Il y avait dans le moment, de la poésie, de la tendresse, de la simplicité aussi. Le désir était là, du moins, commençait à pointer le bout de son nez mais ça n’était pas ça qui avait d’abord éveillé les envies d’Alejandro. Il faisait confiance à Leone, il voyait en lui quelqu’un de bien, quelqu’un de capable de le comprendre et de ne pas le juger. Peut-être que, comme dans toutes ses tentatives de relations (qui clairement se comptaient sur les doigts d’une main en l’espace de 8ans), c’était ça le problème de Jan. Il mettait inconsciemment trop de pression sur les épaules des hommes à ses côtés, leur demandaient, sans oser mettre les mots, beaucoup trop. Leone n’en avait certainement pas conscience, Jan n’en parlait pas mais pourtant c’était réel. Le mexicain attendait trop, avait besoin de trop. On ne guérissait pas grâce à l’autre, en avançant tête baissée sans tenter de regarder sur les côtés. Jan n’en avait pas encore conscience, ne le voyait surement pas de cet oeil mais c’était seul qu’il devait s’en sortir. Seul qu’il devait s’accepter avant de pouvoir demander aux autres de l’aimer.

Pourtant, sous les mains de Leone, sous ses baisers et sa façon de respirer, le mexicain n’y pensait pas, tentait simplement de profiter. Il y arrivait parfaitement bien, presque il ne tremblait pas de panique en sentant le moment lui échapper des doigts. Leone était doux, Leone prenait son temps, longeait sa peau chaude de ses mains habiles, n’allait jamais trop loin, jamais trop vite. Jamais trop tout court. Même quand le désir devenait plus franc, d’un côté ou de l’autre, les lèvres n’étaient jamais violentes, les langues restaient discrètes, les mains papillonnaient plus qu’elles ne pétrissaient. C’était ce qui leur fallait visiblement, aucun des deux n’avait l’air d’être mal à l’aise ou sur le point d’imploser avant l’autre. Ça pouvait arriver, quand le désir était plus soutenu d’un côté du duo mais ici... Non. Ils étaient comme en osmose.
- si…
Ce fut le seul mot qu’il pu murmurer à Leone, acceptant de se faire hisser debout, accompagné jusqu’à la chambre de l’italien. Jan n’avait pas visité cette pièce, ça le rendait un peu moins sûr de lui. Il aimait savoir où il allait, être observateur n’était pas seulement une qualité, chez lui, c’était aussi ce qui l’apaisait. Voir où était la porte, la fenêtre, si la pièce était trop exiguë, s’il n’allait pas prendre peur en se sentant oppressé par les couleurs… Il était sensible à tout ça depuis Tepito mais tentait de faire avec. Mais ça irait, ça irait parfaitement, il n’y avait aucune raison pour que ce soit le contraire.

Pourtant, la porte à peine refermée, Jan se sentit moins à l’aise. Peut-être la passion de Leone qui, même si elle lui plaisait, ne lui avait pas laissé le temps de se rendre compte de la pièce. Mais qui ferait attention à ça alors que les baisers étaient délicieux, le faisaient même souffler plus fort ? Qui demanderaient une pause pour observer les murs, les couleurs, le lit alors qu’un homme était plein de tendresse et d’envie ? Que ce même homme ne faisait que répondre au désir latent du mexicain ?
- Heureusement que l’espagnol… est proche de l’italien.
S’amuser, rendre la situation cocasse, tout pour le calmer alors que ses doigts entamaient eux aussi, l’effeuillage de son amant. Acceptant que Leone découvre la saveur de sa peau, s’enivre de l’odeur de son cou, Jan laissa ses mains relever le tshirt du chirurgien, pour le faire lentement passer par dessus sa tête.
- Excusez moi de vous couper dans votre élan docteur.
Il eut un petit rire alors que le tissu était lâché au sol, les yeux hauts, les mains découvrant enfin la peau nue de… Il s’arrêta subitement, l’index caressant une aspérité qu’il reconnaissait sans mal. Jan ne réagit pas sur l’instant, laissant son autre main courir sur le ventre de Leone. Une autre, plus grande, plus stressante. Il devait rêver, la panique le faisait imaginer des choses, ce… Non.
- At…
Se décalant légèrement, la syllabe déjà tremblante, sa main gauche abandonna le flanc de son ami pour chercher du bout des doigts l’interrupteur du plafonnier. La lueur était douce mais assez forte pour, à peine était-elle allumée, révéler l’insurmontable. Jan ne pouvait relever ses yeux du torse abimé, des brûlures qui alertaient tout son organisme, de son coeur à son esprit. Qui alertaient toutes ses émotions aussi. Il ne contrôlait plus rien. Ses doigts tremblotants se reculaient de la peau de Leone comme si elle le brûlait. Son corps entier frôla la porte pour s’éloigner du carcan douloureux de l’italien.
- C’est … c’est quoi ça ?!
S’il s’entendait, Jan aurait perçu de la colère, de la peur, mais aussi du dégout dans sa voix. Ce n’était pas lui qui articulait, pas lui qui regardait Leone avec les prunelles fixées sur ses brûlures. C’était l’homme qui les avaient vécu. L'homme qui avait toujours refusé d'en parler, de les regarder, de les accepter. C'était comme se regarder dans un miroir et Alejandro Estrella ne supportait plus son reflet depuis des années.

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Lun 18 Nov - 23:09
Lorsque la main chaude de Jan se figea sur l’une des cicatrices qui ornaient son torse et qu’il ne montrait jamais, toujours engoncé dans des chemises, des t-shirts, des polos, même des marcels pour dormir, Leone tenta de ne pas le remarquer, caressant doucement le bras du mexicain, comme s’il essayait de le convaincre que ce n’était rien, et peut-être de se convaincre lui-même que c’était bel et bien le cas. Et les doigts doux s’en allèrent, s’écartèrent, le fuyant pour allumer la lumière et pour voir ce qu’il taisait souvent, parce qu’il n’avait pas envie de s’y attarder. Le VIH, pour lui, ce n’était pas quelques pilules avalées à horaires stricts. La maladie était gravée dans sa chair, à jamais, parce qu’à huit ans, il était, les samedis matins, au sous-sol aménagé de l’hôpital afin de ne pas mettre en contact cette population de pestiférés avec le reste des patients, pour ne pas leur faire peur, pour ne pas les gêner … pour crever en silence, avec leur système immunitaire défaillant et le Kaposi qui rongeait leur corps de ses plaques purulentes, traçant un sillon noirâtre annonciateur de l’ultime fin, de l’obscurité finale, mais les marquant également comme contaminés, sans possibilité de les cacher. Il y était seul, parce que les séances de radiothérapie et de chimiothérapie étaient organisées très tôt le matin, pour eux, et que sa grand-mère finissait ses ménages à la même heure, dans les belles tours des beaux quartiers de New York dont elle lui montrait les photographies, mais qu’il ne voyait pas, enfermé dans sa chambre et trop petit pour arriver à la fenêtre. Il se contentait d’en rêver, dans ce grand couloir aux murs blancs, entouré de ces hommes adultes aux yeux perdus d’enfants, alors que lui, l’enfant, avait un visage grave d’adulte qui comprenait des problèmes auxquels il n’aurait jamais dû être confronté. Il n’y avait qu’une femme, dans son souvenir, une adolescente hémophile, qui lui tenait la main, comme elle le pouvait, dans la sienne qui tremblait, et il n’osait jamais demander si c’était de peur ou de froid. Il avait espéré que c’était de froid. Mais elle n’était pas revenue, un jour. Il en avait alors conclu que c’était de peur. Et il en avait pleuré, silencieusement, parce qu’il n’avait que huit ans, mais il savait ce qu’était la mort, qu’elle était injuste, et qu’il n’y pouvait rien, hormis attendre lui aussi pour monter sur le marchepied qui le collait contre la grande machine que les personnes en blouses blanches utilisaient, barricadées derrière leur grande vitrine, avec tous leurs masques et attirails divers. C’était cela qu’il voyait le matin, en se déshabillant, et parfois, le soir, dans les yeux et sous les doigts d’un autre homme. Et même s’il voulait que les prunelles soient douces, que la peau soit tendre, cela n’avait pas toujours été le cas. Enfant, on lui interdisait de jouer avec ceux de son âge. En grandissant, il avait appris que beaucoup de jeux d’adultes lui seraient interdits, parce que, quelque part, il n’arriverait jamais à ne pas être ce gamin terrorisé au torse trop petit pour tant de lésions, enfermé dans un sous-sol parce qu’on ne veut pas de lui, parce qu’il est sale.

Il y avait ceux qui fuyaient dès qu’il annonçait qu’il était séropositif. Ceux qui partaient parce que, ils avaient beau essayer, la peur dominait le plaisir, et ils n’arrivaient pas à mettre cela de côté, malgré l’absence de risques, désormais. Et ceux qui l’aimaient, mais ne regardaient pas les marques. Ceux, plus rares, qui l’embrassait pour tout ce qu’il était. Il avait espéré, et espérait toujours, que Jan serait de ceux-là. Déjà, pourtant, en voyant son choc manifeste, il regrettait de ne pas en avoir parlé, s’en voulait, laissant tomber son bras machinalement contre lui, pour le replier presque en une attitude défensive, comme pour se protéger, pour se forger un cocon, au cas où … Non, il comprenait, il aurait dû être plus explicite, quand il lui avait expliqué qu’il était atteint par le VIH depuis la naissance, qu’il avait été sauvé par l’arrivée traitement car il commençait à s’enfoncer dans la phase sida. Il avait pensé … Il avait été idiot. Bien sûr que Jan n’avait pas pu anticiper. Qu’il était bête, d’avoir pensé à cela, son cerveau probablement un peu trop embrumé par ses envies personnelles.

« Je … la chimio et la radiothérapie, quand j’étais enfant. J’ai fini par avoir du Kaposi … à cause du VIH. C’est parti, c'est pas contagieux, promis, c’est juste que les doses n’étaient pas vraiment faites pour … mais ça ne me fait pas mal, et tu peux toucher, je t’assure, ce n’est … »


Sans que Leone ne s’en rende compte, son débit de parole s’était accéléré et l’accent, le maudit accent italien revenait, parce que sa nervosité renaissait, entre les quatre murs de sa chambre, sur la couette d’un bleu doux que sa grand-mère avait cousu pour son trentième anniversaire qu’il aimait tant et face à des prunelles dans lesquels il aurait voulu se perdre, mais qui semblaient désormais vouloir l’aspirer dans un trou noir qu’il ne comprenait pas – comment aurait-il pu ? Il entendait la peur, mais la pensait liée à la laideur de ces vieilles cloques parcheminées, à la surprise, parce qu’il avait l’habitude d’y faire face, un peu trop, et chaque occurrence dessinait une nouvelle cicatrice, dans son cœur cette fois. Il espérait juste qu’elle se refermerait rapidement, que ce ne serait qu’une mauvaise parenthèse, qu’ils reviendraient aux quelques minutes d’avant, sur le canapé, à susurrer des mots doux un peu niais, un peu fat, et à s’embrasser comme des collégiens timides, parce qu’il avait aimé ce moment, plus qu’il n’oserait l’admettre à son âge, parce que c’était délicat et qu’il avait besoin de cela. Sa main chercha celle de Jan, et un rien d’espoir dans sa voix perça tandis qu’il déclarait :

« Si tu veux … »

Il ne savait pas quoi, mais s’il voulait, il était d’accord. Juste … Ses doigts essayaient de s’enrouler autour de ceux de Jan, de ne pas perdre le contact. La chaleur. Pour ne pas revenir dans le couloir froid de son enfance. Seul.

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Mer 20 Nov - 13:11



everything will be fine.
feat @Leone Castelli

Il n’entendait pas les mots de Leone, ses yeux étaient fixés sur les cicatrices de brulure qui s’étendaient ici et là. Il y en avait à la fois peu et trop. Des années auparavant, Jan n’y aurait pas fait attention, il les aurait caressé du bout des doigts par peur que ça soit encore sensible. Il aurait embrassé chaque cicatrice avec tendresse, y apportant un peu de plaisir aussi. Il aurait transformé ces douloureux souvenirs en quelque chose de plus positif. Il aurait fait tout ça pour Leone car Alejandro n’était pas de ceux qui jugeaient ou qui n’écoutaient pas. Il aurait été attentif, sensible, aurait enveloppé le corps de l’italien de ses bras puissants, l’aurait porté jusqu’au lit et aurait laissé ses lèvres caresser tendrement la peau abimée par des années de souffrance. Il aurait fait sourire le médecin certainement, souffler trop fort aussi, peut-être même gémir. Ses doigts auraient abandonné sa peau, se seraient nichés contre les cheveux onduleux de l'italien, caresser les racines, les agripper un peu. Il l’aurait embrassé, choyé, aimé pour une nuit, peut-être deux. Peut-être plus. Oui, Jan aurait fait tout ça des années auparavant car il était de ces hommes passionnés qui voyaient les obstacles comme des murs à faire tomber, pas comme des ravins impossibles à dépasser. Il aurait été capable de tout ça 8 ans auparavant, il aurait aimé Leone pendant des heures, lui aurait offert tout ce qu’il méritait. Aurait accepté aussi tout ce que le chirurgien voulait lui donné pendant cette nuit. Mais la réalité était différente et les si inexistants, dans un univers où le passé comptait plus que le présent.

Leone se protégeait, le bras remonté contre son torse alors que de sa main libre, il attrapait les doigts d’Alejandro. Le contact le fit frémir alors que ses yeux étaient rivés sur les cicatrices de son ami. Il était incapable de parler, incapable de bouger. Il ne voyait qu’elles. Une à droite, une autre sur la gauche un peu en diagonale. Elles étaient différentes des siennes mais ne faisaient que le renvoyer à des souvenirs où la douleur l’avait fait hurler durant des heures. Il se souvenait encore de l’odeur de la chaire brûlée, des tremblements de son corps comme si le froid avait pris possession de tout son être. Et les cris des autres, et le parfum métallique du sang qui coulait sur le sol en béton. Et la suite… Et les coups, et les hurlements, et la fin. Surtout la fin. Plus de bruits, plus de cris, plus d’odeurs. Rien que le silence et des images à jamais gravées. Rien que lui, ses phalanges détruites à force de donner des coups de poings, et sa culpabilité.

Jan lâcha brutalement les doigts de Leone, se reculant d’un pas vif. Il n’avait rien dit, avait entendu quelques mots mais était incapable de faire la connexion entre les explications et ce qu’il voyait. La tête dodelinait comme quand il avait trop bu. Il essayait de lever les yeux, de regarder Leone, mais rien n’y faisait. Ses prunelles étaient irrémédiablement attirées par les brûlures de l’italien. Lui aussi ça ressemblait à ça ? Lui aussi devrait s’expliquer quand quelqu’un les verrait ? Lui aussi devrait les cacher ainsi comme le faisait Leone ? Lui aussi devrait se retrouver avec des hommes comme lui réagissait ? Il se détestait d’être ainsi, donner cette fausse image de lui. Pourtant Jan était incapable de faire autrement. Il ne jugeait pas l'italien, il ne se moquait pas de ses cicatrices. Il était juste incapable de ne pas les voir. Sous les tissus, il avait les mêmes, plus nombreuses, moins bien soignées, plus visibles. Plus honteuses aussi. Il avait été attaqué dans son intimité la plus pure et si Leone… Si Leone réagissait comme lui en les voyant ? Si… Il ne pouvait pas. Il devait partir.

- No puedo… no puedo.

Je ne peux pas. Je ne peux pas. Ça voulait dire pardonne moi mais ça sonnait comme un au revoir.

La porte fut ouverte sans laisser le temps à Leone de réagir. Il attrapa sa veste et sortit de chez l’italien comme une furie. Il explosera plus tard, seul, contre un mur ou dans son appartement. C’était mieux ainsi, Leone n’avait pas à subir plus que ce que Jan venait de lui offrir. Un rejet pur et dur, sans baiser, sans caresse, sans tendresse. Violent et sans raison. Un rejet que l’italien prenait pour lui alors qu’au fond, c’était lui-même que Jan rejetait.

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Jeu 5 Déc - 21:59
Dégage.

No séropo.

Désolé, je ne peux pas.

Euh … attends, je crois que mon téléphone sonne, je …

No puedo.

Les oreilles de Leone sifflaient, tandis que la voix hâchée du mexicain résonnait. Déjà, quand il avait vu son expression, ce regard … Il aurait dû savoir. Que ce serait comme toutes ces autres fois, avec tous ces hommes qui ne voulaient pas de lui. Parce qu’il les dégoûtait. Le premier garçon avec qui il avait été dans cette situation avait eu cette même expression, en anglais, lui brisant définitivement le cœur. Et il se revoyait, à vingt-et-un ans, honteux de surcroît d’avoir dû expliquer maladroitement à son petit-ami que non, il n’avait jamais rien fait. Il en avait été incapable, ne se sentant jamais assez sûr, assez courageux pour faire face à quelqu’un dans l’intimité. Quand enfin, il avait pensé être prêt à laisser les dernières barrières tomber, à se voir dans le miroir qu’offrait le regard d’un autre, pour se dire qu’il l’envoyait valser, le VIH, qu’il ne dicterait pas sa vie … il avait compris que ce ne serait jamais le cas. Ce garçon, si gentil, si doux, soudainement, avait reculé, et avait bafouillé qu’il était désolé, qu’il ne pouvait pas. Puis l’avait planté là, signifiant la rupture sans avoir besoin de le dire. C’était ce jour-là qu’il avait su que son existence, malgré tout ce que sa grand-mère lui disait, lui assurait, lui promettait, ne serait pas normale. Alors, oui, il avait trouvé des hommes qui avaient bien voulu de lui, en dépit de ça. Qui avaient essayé de l’aimer. Mais il y en avait eu d’autres aussi, qui étaient partis. D’autres encore avec qui rien n’avait commencé, parce que sur leurs profils de site de rencontre, il y avait marqué qu’ils ne voulaient pas de séropositifs. Exit Grindr et autres Tinder donc : trop difficile, trop douloureux, de se voir renvoyé en pleine figure la réalité, celle de ses vingt-et-un ans et du lit trop grand. Alors, à trente-quatre ans, en entendant répétés les mots qui avaient été si douloureux à surmonter, et qui le hantaient encore, tant d’années après, il avait l’impression de ne plus pouvoir toucher terre. Que le monde s’effondrait, pour mieux l’engloutir.

Jan lâchait sa main, et une dague transperça son cœur, définitivement. Incapable de dire quoi que ce soit, il vit son bras tomber mollement devant lui, comme en dehors de son corps, alors que les deux voix se superposaient. Il n’essaya même pas de le retenir. Pourquoi ? A quoi bon ? Il était idiot. Il aurait dû … Il n’en savait rien. Au loin, la porte de son appartement claqua et il resta seul, encore, toujours, assis sur le lit qui resterait froid. Figé, transformé en statue, Leone regardait dans le vide, son esprit restant bloqué sur les scènes s’étant joués précédemment : les baisers, le désir qui était monté, l’envie, la douceur, tout ce qu’il cherchait chez un homme. Et puis plus rien, le froid et les mots qui tournaient dans sa tête. Inlassablement, chaque moment se retrouvait confondu avec ce premier rejet, et ceux d’après : ce beau blond en boîte, qui lui sussurait des mots tous sauf doux, et qui avait détalé aussi vite qu’un lièvre, lui aussi. Ce gentil gars rencontré par des amis, qui avait essayé, essayé, jusqu’à finir par se lever et prendre ses affaires d’un air vraiment contrarié, bafouillant qu’il n’arrivait pas à faire abstraction, qu’il n’avait pas envie de prendre un risque en fin de compte. Celui qui n’avait jamais réussi à avoir une réaction physique, trop stressé par l’éventualité de … Et celui avec qui il avait cru être aimé pour la première fois, jusqu’à celui qu’il aurait voulu aimer une dernière fois.

Les larmes lui montèrent aux yeux. Doucement, quelques gouttes perlèrent, descendant sur ses joues, sans qu’il ne cherche à les chasser. Puis ce fut son corps tout entier qui fut agité de soubresauts, tandis que son âme criait silencieusement de douleur et de déception. Il y avait cru. Il avait attendu, préférant ne pas nourrir trop d’espoir. Et précisément, ses espoirs, il venait de se les prendre en pleine figure, comme une grande claque sur son visage d’ahuri trop heureux et trop idiot pour avoir pensé que peut-être que non, Jan n’avait pas envie de se faire un type comme lui, en fin de compte. Qui en aurait envie ? Même pas lui. Il pleurait comme un enfant à présent, immobile, les mains arc-boutées sur la couette trop vivement malmenée.

« Leone ? J’ai entendu du bruit … Tout va bien, amore mio caro ? »


Anna Castelli n’obtint aucune réponse, mais perçut aisément les reniflements et pleurs étouffés au fond de l’appartement. C’est ainsi qu’elle trouva son petit-fils, torse nu et dans un état pitoyable. Son propre cœur se serra, et elle se contenta de s’asseoir à ses côtés, et d’attirer sa tête contre sa poitrine, le berçant délicatement, comme lorsqu’il était enfant. Bientôt, elle lui murmura ces petits riens qui apaisaient : que ce n’était rien, que tout irait mieux. Qu’elle l’aimait, et c’était suffisant, c’étaient eux contre le monde, ça l’avait toujours été, bambino, ne pleure pas, ne pleure pas. Et c’était vrai : le lendemain, ça irait mieux. Le lendemain, il s’excuserait, d’être encore un fardeau qui la tenait éveillée jusqu’à pas d’heure, partirait au travail, se proposerait pour toutes les gardes possibles pour se remettre, parce qu’il n’y avait que là-bas qu’il irait bien, fuirait tout le monde, puis dans une semaine, ou deux, un sourire reviendrait naturellement, il verrait un beau garçon qui lui plairait, et tout recommencerait.

Il aurait seulement voulu, pour une fois, ne pas attendre demain pour être heureux.

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