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Theater party [PV Andrea]

@ Invité

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Dim 27 Oct - 18:13
« Vous êtes à la place 23, la troisième à partir d’ici … à côté du monsieur déjà installé. »

Glissant quelques pièces à l’ouvreur, Leone hocha la tête puis le remercia avant de se glisser dans la rangée de sièges du petit théâtre, son pardessus dans une main et son billet serré dans l’autre. Alors qu’il s’installait, il esquissa un regard en direction de son voisin, pour constater avec l’ombre d’un sourire qu’il connaissait l’homme en question, du moins, son visage lui était familier, entre ces murs. Cela faisait quelques années que le chirurgien avait l’habitude de fréquenter cette salle de Brooklyn, y appréciant, quand il n’était pas de garde le week-end, d’y aller pour apprécier seul l’un de ses péchés mignons, à savoir la représentation. Il aimait tous les genres, du classique à l’avant-gardiste, comme un glouton affamé, trop pressé de rattraper un sevrage ayant duré toutes ses années d’enfance et d’adolescence. En effet, sa grand-mère, malgré toutes ses qualités, savait à peine lire et compter, et n’avait jamais eu accès, au fond de son Mezzogiorno, à cette culture dont la plupart des présents, sans doute, ignoraient qu’elle fut si inatteignable pour les personnes vivants à quelques kilomètres de là, dans ce Bronx qui faisait peur à certains à peine le mot prononcé. Et à vrai dire, si le trentenaire, dans sa jeunesse, avait su que cela existait, beaucoup des pièces jouées appartenaient pour lui à ses livres de classe. Quant au reste … ce n’était pas pour lui, tout simplement. Il ne s’estimait pas légitime, et peut-être que, par fierté, il avait rejeté toutes ces merveilles sans les connaître, dans un mécanisme de défense, de honte aussi. Et puis, quand les études de médecine étaient arrivées, ses fréquentations avaient changé, et il avait eu accès à cet autre monde, peu à peu. Il en avait découvert la richesse, et ce passionné de la vie y avait trouvé du réconfort, puisant dans ces mots et ces émotions de la force parfois, et des réflexions, toujours. Il ne se l’expliquait pas : il était attiré par ces décors, ces costumes, ces paroles qui virevoltaient. C’était devenu, peu à peu, son plaisir secret, que de s’y rendre. Toujours seul, comme s’il craignait qu’une autre personne à entrer dans sa bulle ne vienne entacher sa jouissance, ou qu’elle ne se rende compte de ses lacunes. Parce que le sentiment de ne pas entièrement à sa place ne disparaissait pas totalement, malgré les années passées et le nouveau statut social. Ce n’était pas grave : il n’y avait que lui, une fois la lumière éteinte.

Cependant, il avait remarqué cet autre homme, d’environ son âge, au jugé, souvent là aussi, aux mêmes pièces. A croire qu’ils avaient les mêmes goûts, ou qu’il s’agissait d’un véritable afficionado qui ne ratait aucune séance ? Il aimait imaginer des choses, sur cet inconnu. Qui était-il ? Est-ce que, ce soir où il était arrivé, la mine défaite, il avait rompu avec quelqu’un ? Perdu une personne chère ? Un chat, un chien ? Ou juste égaré son portefeuille ? Et l’autre, avec le sourire : était-ce pour une promotion au travail, une avancée personnelle … une réduction chez le fleuriste ? C’était drôle, de s’inventer ces explications, alors qu’ils échangeaient un regard quand l’obscurité s’abattait sur la salle. Parfois, il se disait qu’une connivence s’était établie entre eux. Qu’ils se cherchaient du regard, en arrivant, puis souriaient, et reprenaient le cours de leur vie, sans se connaître, et en se sachant présent tout de même, comme un invariant dans une existence. Et cela l’amusait, sans qu’il ne cherche jamais à aller au-delà que ces secondes de reconnaissance mutuelle, qu’il s’imaginait d’ailleurs peut-être entièrement. Alors, en le voyant ce soir-là assis à ses côtés, il ne pouvait s’empêcher d’avoir envie de rire légèrement : enfin, le hasard avait fini par les réunir, après tant de temps passé à fréquenter le même endroit. Un instant, il se demanda s’il devait dire quelque chose, puis se ravisa finalement, n’osant déranger cet inconnu dont, précisément, il ne savait strictement rien, hormis qu’il aimait le théâtre, comme lui. Alors il se contenta de lui sourire, directement, et de s’asseoir. Sortant son téléphone, Leone pianota quelques minutes dessus, traitant ses mails en souffrance, renvoyant quelques messages à des collègues avant de confirmer sa participation à une soirée d’Halloween organisée par une de ses connaissances. Et enfin, la pièce commença. Il rangea son engin après l’avoir éteint, et se concentra sur la scène.

Ce qui s’ensuivit fut une longue, très longue première partie de soirée. L’acteur principal, manifestement débutant et très angoissé, jouait douloureusement mal, et perdait quelquefois ses mois, tandis que plusieurs de ses partenaires avaient du mal à se placer. L’ensemble dériva bientôt sur le comique, hélas involontaire. Par respect, le chirurgien essayait d’éviter de rire, comme certains, peu charitables, le faisaient, mais il devait admettre que l’ensemble n’était pas très bon … voir plutôt insipide. Et qu’il avait un peu pitié de ces malheureux qui, il en était certain, faisait du mieux qu’ils le pouvaient avec un texte au demeurant peu inspiré. Il fallait bien débuter un jour, non ? Finalement, l’entracte vint, mettant un terme au calvaire général. Il se tourna vers son voisin, qui affichait une expression similaire à la sienne, avant de souffler :

« Je crois qu’on a vu première plus heureuse. Depuis le temps que nous fréquentons tous les deux cet endroit. »

Avant de se rappeler qu’il était peut-être le seul à l’avoir remarqué. Oups.

« Je veux dire, j’ai remarqué que vous êtes souvent présent les mêmes soirs que moi. Enfin, non pas que je vous observe. Hum, bref … je … euh … ne voulais pas vous incommoder. Navré. »

Et voilà, il allait passer pour un cinglé ou un type qui passait sa vie à l’observer. Quelle première approche …

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Mer 30 Oct - 22:36
Andrea est un homme des arts. Sans doute, si sa vie avait été un tant soit peu différente, aurait-il fini sur les planches d'un théâtre lui aussi. Pas pour jouer simplement, mais surtout pour chanter. Chanter, il adore ça, et les gens qui composent son entourage proche le savent. Certains le poussent à reprendre, à oser, mais lui sait qu'il n'en n'est pas capable. Peut-être parce qu'il estime ne pas le mériter, en réalité. Il aurait voulu que son frère soit là, soit en mesure de partager avec lui cette vie. Quand il est mort, il a semblé logique au jumeau survivant de ne pas vivre la passion qu'ils avaient en commun. Alors il s'est plongé dans d'autres choses, dans d'autres passions, d'autres envies. Et parfois, souvent même, il s'autorise quelques incursions dans le monde du théâtre, des comédies musicales.

C'est le cas, ce soir. Il est abonné à une petite salle de Brooklyn dans laquelle il se rend régulièrement pour découvrir des pièces plus ou moins connues jouées par des acteurs plus ou moins célèbres. Ce soir, c'est une petite pièce indépendant qui est mise à l'honneur dans le vieux théâtre, et il a décidé de jouer le jeu. Lui, il préfère les versions chantées, ou les pièces qui souffrent de leur notoriété - mais pour une fois, il prend place dans les rangées sans se plaindre. Seul, comme à son habitude, parce que la solitude ne le dérange pas, et parce qu'il n'a envie d'embêter personne avec ses passions étranges. Pourtant, alors qu'il est installé depuis un moment, piochant occasionnellement dans un paquet de bonbons savamment planqué sous son manteau qu'il a déposé sur ses genoux, quelqu'un vient s'installer à côté de lui. Une personne aux traits familiers qu'il a l'occasion de croiser assez régulièrement. Un abonné, peut-être, un habitué pour sûr. Il n'ose pas lui offrir un sourire familier, le laisse prendre place, laisse l'obscurité envahir la salle quand retentissent les premières répliques.

Et là, c'est le drame. Il n'aime pas juger les gens, se dire qu'ils sont bons ou mauvais. Mais là... Là, il n'a pas le choix. La scène qui prend vie sous ses yeux est une catastrophe. Le rôle principal c'est ailleurs, non tenu - la réplique est douloureuse, difficile. Il se sent presque mal à l'aise quand il observe les mouvements des acteurs sur la scène, ce qui le contraint bien malgré lui à accélérer le rythme auquel il dévore ses bonbons. Quand enfin vient l'entracte, c'est un soupir de soulagement qui passe ses lèvres. Il accueille la lumière avec réconfort et hésite presque à s'enfuir, loupant ainsi la deuxième partie de la catastrophe - chose qu'il ne fait jamais, il aime trop l'art pour ça.

Alors que son cerveau hésite, voilà que son voisin lui parle, scellant son destin dans ce fauteuil à peine confortable. Lui aussi, a remarqué qu'ils se croisaient souvent, et ça arrache un sourire à Andy, enfin. Il rougit légèrement, parce qu'il est timide, de cette timidité nerveuse qui vous vient de l'impression que les gens qui vous regardent posent toujours sur vous des yeux emplis de jugement. Il inspire, et acquiesce lentement.

- Vous ne m'incommodez pas, j'ai remarqué aussi que vous étiez là.

Il hoche la tête, et son sourire s'élargit un peu, se souhaitant réconfortant.

- C'est l'enfer, cette pièce, nan ? Je déteste critiquer le théâtre, mais là... J'étais en train d'hésiter à partir, pour être tout à fait honnête avec vous.

Il s'autorise un rire léger et offre son sachet de bonbon à la main de l'inconnu pas si inconnu.

- Je m'appelle Andrea. Vous aussi, vous êtes passionné de théâtre ?

@ Invité

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Lun 4 Nov - 18:04
Malgré son approche reflétant l’intégralité de sa « social awkwardness » quand il n’était pas avec des amis proches ou des collègues de travail, Leone manqua de soupirer de soulagement lorsque son voisin ne prit pas la fuite ou ne lui lança pas une œillade de travers pour cette tentative d’engager la conversation. Au contraire, il lui offrit un sourire un peu timide, avant de reconnaître que lui-même avait remarqué également leurs présences communes à la plupart des soirées de la petite salle. Au moins, l’italien n’était pas le seul à avoir fait le lien, ce qui le rassura : non, il ne s’imaginait pas des choses et n’avait donc pas la berlue, mais de surcroît, il ne passait pour un fou en mettant le sujet sur le tapis. Finalement, c’était une entame de conversation convenable, du moins de son point de vue. Tandis que l’homme émettait le constat qui s’imposait sur le spectacle s’étant offert à eux, confirmant donc au passage que le chirurgien n’était pas bégueule mais avait un semblant de bon goût, il lui tendit son sachet de bonbons, ce que ce dernier accepta avec plaisir, ce long supplice sonore ayant creusé son appétit – à moins que ce ne soit le fait qu’il avait sauté le déjeuner pour finir plus tôt, et qu’il n’avait donc rien avalé depuis le petit-déjeuner.

En fait, ce geste et ces paroles lui offraient l’image immédiate d’une personne gentille, et à vrai dire, même si certaines apparences étaient trompeuses, il avait envie d’y croire, parce que c’était agréable de tomber par hasard sur des gens qui n’étaient pas contaminés par cette atmosphère des grandes métropoles qui poussaient certains à ne plus voir les autres et à être fatigués de doux, perdus dans des relations stériles ou une solitude dont on ne se rendait pas forcément compte. Et en déambulant dans ces quartiers plus cossus que ceux auxquels il était habitué, en étranger dans sa propre ville, il avait l’impression, parfois, de déranger tous les habitués pour qui, une soirée au théâtre, c’était une formalité, voire pire, une obligation, parce qu’on y emmenait les partenaires commerciaux, les vagues connaissances et ainsi de suite. Il s’était douté que son inconnu – oui, il parlait au possessif, parce qu’il avait l’impression de le connaître et d’être le seul à avoir remarqué l’étrange connexion entre eux – n’appartenait pas à cette catégorie, puisque sa fréquentation paraissait davantage solitaire et trop régulière pour rentrer dans cette case. Mais voilà, bêtement peut-être, il appréciait ne pas s’être trompé, et se retrouver à se mordre les doigts d’avoir engagé la conversation. Du moins, pour l’instant. Alors il lui rendit son sourire, croqua une sucrerie et répondit finalement :

« Leone. Et oui … enfin, je ne suis pas forcément un spécialiste, mais j’aime beaucoup. Un de mes amis pendant mes études avait une loge familiale louée à l’année, et comme je ne connaissais pas du tout le théâtre, il a fini par me donner ses billets.

Depuis, je paye les miens, je vous rassure. Même si là, tout de suite, je le regrette un peu … parce que oui, c’était vraiment horrible. »


Un très léger rire un peu gêné lui échappa : la critique, aussi directe, ne lui était pas familière. Mais bon sang, quel carnage !

« Je crois que c’est la première du jeune premier … mais qu’il a un peu trop le trac … Déjà que le texte nécessiterait quelques corrections … et pourquoi tout ce vert dans le décor ?»

Bon, il était en train de démolir l’ensemble en fait. Penaud, il se gratta la tête, avant de déclarer, amusé malgré lui :

« Si je comprends bien, j’ai interrompu votre tentative de fuite ? »


Avant de conclure, toujours souriant:

« Je voulais aller m'acheter à boire. Je vous rachète un paquet de bonbons, pour vous remercier de me les avoir prêté ? Si vous désirez rester, nous pourrons toujours nous noyer dans le sucre en guise de compensation pour nos malheurs. »

@ Invité

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Ven 8 Nov - 22:37
Andrea n'aime pas critiquer l'art de manière générale, c'est vrai. Il n'aime pas partir avant la fin d'un concert, la fin d'une pièce ou d'une comédie musicale. Il trouve ça irrespectueux, incorrect. Il a toujours voué un grand respect à l'art en général. En réalité, Andrea est un garçon respectueux de beaucoup de choses. Donc la vérité, c'est qu'il est torturé entre l'idée d'être une fois de plus un garçon gentil qui donne une deuxième chance aux choses - et donc de rester vissé sur son siège - ou bien de faire une entorse à ses règles habituelles pour s'offrir le luxe de la libération. Il culpabilise déjà rien qu'à l'idée. Andrea est ce genre de personne qui pense qu'il peut faire de la peine aux gens et qui, quand il le réalise, a de la peine de faire de la peine. Quelque chose du genre. C'est un problème récurrent, chez lui. Il passe son temps à se soucier des sentiments des gens, des animaux, même parfois arrive-t-il à avoir de la peine pour les choses. C'est dramatique d'être à ce point bienveillant - à l'excès, parfois - et d'avoir autant de mal à affronter sereinement les relations sociales. Il faut qu'il se fasse une raison.

- Il vous a donné de bonnes habitudes, alors.

Andrea offre un sourire, la pénombre de la salle l'aidant un peu à ne pas se sentir trop embarrassé par la situation. Il pourrait être rouge écarlate, parce qu'il est timide - mais pour une fois, il est plutôt serein.

- Honnêtement, il me fait un peu de peine. Dans quelques représentations, il sera sans doute plus à l'aise, mais c'est vraiment un terrible choix de pièce qu'il a fait là, pas certain que ça aide vraiment sa carrière...

Andrea grimace, se sentant l'audace d'apporter une critique qu'il n'a sans doute aucune légitimité à formuler. Profitant de l'absence de son voisin de gauche, un qui est sans doute parti chercher quelque chose à manger, un truc du genre, il chuchote une confidence.

- Cela dit, certains sont passionnés. Mon voisin, de l'autre côté, il n'a pas arrêté de d'approuver tout le long de la première partie.

L'art, les goûts, les couleurs, et tout le reste finalement.

- Je vais aller prendre un truc à boire, aussi. Et va pour les bonbons, ça m'occupera. J'ai toujours des remords à fuir les pièces de théâtre, il ne m'est quasiment jamais arrivé de le faire, c'est dire si cette pièce est nulle.

Les filtres ont disparu, et le jeune homme s'autorise même un rire léger, tandis qu'il se lève pour suivre Leone jusqu'au bar qui s'illumine, dans une salle séparée, pendant les entractes.

@ Invité

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Lun 11 Nov - 18:59
« Il n’a peut-être pas eu le choix … les acteurs confirmés ont peut-être fui en voyant le texte … »

C’était officiel : Leone détestait cette pièce. Dans le silence de sa conscience, vissé sur son siège, il avait tenté un peu désespérément de faire taire son malaise, se disant qu’après tout, il n’y connaissait rien, qu’il y avait sans doute des vrais amateurs à qui cette logorrhée infernale plaisait, ou alors qu’il était fatigué et n’aurait pas dû sortir après cette longue semaine à courir dans tous les sens et à étouffer ses propres problèmes. Bon certes, cela ne le changeait pas de d’habitude, mais quand même, cela ressemblait à une bonne excuse. Ou alors, précisément à cause de ses pensées désordonnées, il n’avait pas réussi à rentrer dans la mise en scène, dans la vision de l’auteur, et se trouvait être un mauvais spectateur. Sauf que, mis en position de lâcher ce qu’il avait sur le cœur, l’italien se rendait compte qu’il n’y allait pas avec le dos de la cuillère, et que son côté charitable avait des limites. Mais qu’il y avait-il de plus humain que de se laisser aller à la critique quand on trouvait un partenaire de vindicte ? Le pire était qu’il partageait le sentiment de son voisin, car il était toujours désagréable d’observer la lente décomposition d’une personne sous ses yeux, et qu’il n’y trouvait pas vraiment d’agrément, contrairement à d’autres qui adoraient ce genre de moments gênants. Peut-être que cela leur donnait l’impression d’avoir des vies plus faciles, à mépriser les autres ? Il avait toujours eu du mal à comprendre ce genre de comportements …

En entendant la confidence d’Andrea, le chirurgien laissa échapper un rire léger, un peu rauque, qui venait du fond de sa gorge, comme s’il craignait d’être trop bruyant et de voir d’autres spectateurs se retourner et lui adresser des regards noirs. A moins que ce ne soit sa gorge asséchée par la soif qui crissait, semblable à des pas cherchant une oasis au milieu du désert. Puis il répondit, définitivement amusé :

« Les goûts et les couleurs … Ou alors il s’agit de l’auteur venu incognito ! »


Pitié, il espérait que ce ne soit pas le cas … Il n’avait pas trop montré son horreur, non ? Il n’avait rien pu voir dans l’obscurité, tout de même … Il en aurait presque frissonné d’avance, ce qui était idiot, en soi. Cet homme lui était inconnu. Mais il y avait plus délicat que de soupirer face au travail de quelqu’un, sans savoir que ledit quelqu’un était posé à deux mètres de soi maximum. Au moins pouvait-il oublier son malaise soudain en se levant, suivi d’Andrea, pour rejoindre le point de vente des boissons et petits en-cas de l’entracte, lui rendant au passage son sourire tandis qu’il acceptait sa proposition, et commentait sur sa gêne à partir. Cela, il le partageait sans mal, ce qu’il ne se priva pas de dire, d’ailleurs, alors qu’ils étaient encore à quelque pas de leur destination :

« Oui, je suis pareil … Je me dis que ce n’est pas très respectueux du travail des artistes et des techniciens qui ont travaillé sur cette pièce … même si le résultat n’est pas forcément à mon goût. »

Ils étaient arrivés devant le bar, et Leone tritura ses poches un instant avant d’en sortir quelques dollars, et de commander :

« Une limonade et un paquet de bonbons … celui que monsieur voudra. »

Laissant Andrea faire son choix, l’italien récupéra quant à lui sa boisson, avant de payer son dû et de laisser la place à l’autre new-yorkais. Une fois les achats effectués, il indiqua une petite table à laquelle se poser, le temps de consommer … et de ne pas retourner immédiatement dans leur antre de l’enfer. Tandis qu’il débouchait sa bouteille, un bâillement lui échappa, qu’il tenta d’étouffer tant bien que mal, mais trop tard.

« Je suis désolé. J’étais de garde à l’hôpital ces derniers jours et je n’ai pas beaucoup dormi. D’ordinaire, les soirées théâtres me revitalisent, mais là … le résultat est moins certain. »

Avançant sa limonade vers la boisson d’Andrea, il conclut, en faisant mine de trinquer :

« A notre prochaine et douloureuse heure en commun ? »

@ Invité

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Mar 12 Nov - 22:22
Andrea rit un peu, étonnamment à l'aise face à un homme qu'il a, certes, déjà vu, mais qui reste tout de même un inconnu. D'habitude, les relations sociales avec des inconnus sont beaucoup plus compliquées que ça pour le jeune homme qui n'a pas franchement l'habitude de sembler à l'aise en société.  Il souffre depuis toujours d'une anxiété certaine, qui étaient autrefois atténuée par la présence à ses côtés d'un frère jumeau bien plus populaire, bien plus à l'aise et bien plus charmant. Depuis que son frère est mort, Andrea n'a plus de point d'équilibre pour tenter de gommer son malaise général, et les soirées passées entourées d'inconnus sont, en général, assez douloureusement vécues par le jeune homme.

L'ambiance du théâtre l'aide, sans doute. La pénombre, le bruit ambiant, les gens qui se déplacent pour profiter de l'entracte - cette pièce de théâtre vivante dans la pièce elle-même l'aide à se sentir plus à son aise, dans son élément.

- C'est vrai, je n'avais pas envisagé cette solution, mais vous avez raison, elle fait sens...

Il rit et se lève, abandonnant son siège pour quelques minutes salvatrices. Il sait qu'il va regretter d'être resté aussitôt que les lumières s'éteindront pour laisser apparaître la scène à nouveau.

- Ca m'étonnerait que l'auteur inconnu assiste à la représentation de sa pièce du trentième rang, si ça peut vous réconforter...

Il suit le jeune homme jusqu'à la petite pièce ronde ou des vendeurs dispensent boissons et autres sucreries à prix d'or pour profiter de la soif et de la faim des spectateurs.

- C'est exactement ça ; j'ai toujours beaucoup de remords pour tout le travail que la pièce a nécessité. Même si parfois, c'est de la torture, comme aujourd'hui... Et puis en même temps, on ne peut pas vraiment trouver toutes les pièces bonnes, j'imagine. Je me suis quand même demandé si ça n'était pas un canular, cela dit...

Il grimace rien que d'y penser, et s'accoude un peu sur le comptoir au niveau duquel ils viennent d'arriver.

- Celui-là, s'il vous plait.

Il désigne un parquet de bonbons et se tourne vers sa rencontre du jour sans se départir de son sourire.

- Merci beaucoup.

Il commande un coca puis suit Leone jusqu'à une petite table ou ils s'installent en attendant le retour de l'heure de torture. Il trinque volontiers, puis avale une gorgée de sa boisson avant de rebondir sur ce que son interlocuteur vient de dire.

- A l'hôpital ? Vous êtes médecin ?

Il avale une nouvelle gorgée, et lui offre un sourire réellement intéressé. Il est de ces gens qui s'intéressent aux autres, aux choses. C'est comme ça.

@ Invité

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Ven 22 Nov - 20:41
« Oui, disons que tout ne peut pas plaire, forcément, et ça m’arrive de trouver qu’une pièce n’est pas à mon goût. Bon, la différence, c’est que généralement, j’arrive à trouver de l’agrément dans la technique, le texte … enfin, quelque chose. Là, je cherche quelque chose à sauver. La partie technique ? Il y a manifestement un gros travail dessus … »

Autant dire que c’était fort maigre, et qu’avant de discuter avec Andrea, Leone s’était demandé sincèrement si la fatigue n’avait pas eu raison de lui, lui ôtant toute capacité à la réflexion critique au profit de l’agacement qui survenait si facilement dans ses moments où le corps était en tension et l’esprit lourd d’ennuis ou prêt à glisser lentement vers la somnolence. D’ailleurs, il avait hésité avant de venir, mais avait considéré qu’il avait été plus atteint que cela, surtout durant l’internat et la résidence en chirurgie. Et puis, cela lui faisait toujours du bien, de se détendre et de se vider la tête, surtout dans ces moments-là. Evidemment, cette fois, mal lui en avait pris. Pourtant, une petite voix au fond de lui considérait qu’il n’y avait pas de regrets à avoir : il avait pu changer d’air un petit moment, et engageait une conversation plaisante avec une tête connue et son propriétaire inconnu. Au moins, cela lui aurait octroyé un semblant de vie sociale en dehors du travail et de ses associations, ce qui n’était pas plus mal. Peut-être que, les prochaines fois, il aurait une connaissance réelle qui partagerait sa passion. Bon, c’était s’avancer, sans doute, mais voilà, in fine, il trouvait que l’échange était positif. En dépit de ce spectacle désolant, qui était pour le moment légèrement oublié, alors qu’ils étaient en train de trinquer puis de boire leurs boissons respectives, et de discuter, peu à peu, d’autres choses que de théâtre.

« Chirurgien. Je suis gynécologue-obstétricien, et chirurgien néo-natal. Autant vous dire que les bébés n’attendent pas que je puisse faire une sieste, hélas. »

Evidemment, les naissances, c’était la face relativement joyeuse de son métier, et ce que la plupart des gens retenaient. De manière générale, Leone n’aimait pas les détromper, du moins pas au départ, car en tant qu’obstétricien de garde, l’essentiel du travail consistait en effet à gérer le flot des accouchements, puisque ce genre de choses se programmait rarement, sauf circonstances particulières. Mais il y avait aussi, pour sa part, les interruptions de grossesse, soit la face pile de son occupation première, les cancers féminins et les maladies des nouveaux-nés, les complications sur les nourrissons, les chirurgies de réassignation sexuelle, les urgences gynécologiques … Il aurait pu parler de tout cela pendant des heures entières, mais ce n’était peut-être pas la meilleure entrée en la matière.

« Et vous ? Vous travaillez dans quel domaine ? Si ce n’est pas indiscret. »

@ Invité

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Dim 24 Nov - 16:47
- Je suis un peu comme vous, toujours à chercher la fibre artistique à sauver dans une pièce quelle qu'elle soit parce qu'après tout, ça reste de l'art, non ? Et je suis très mal placé sans doute pour juger de l'art...

Il rit un peu et avale une gorgée de sa boisson tout en haussant une épaule. C'est vrai, ça. Lui il n'a aucune légitimité pour juger tous ces gens qui se produisent sur scène et qui ont le courage d'apprendre des textes par coeur et de livrer des prestations aux spectateurs. Il aurait pu appartenir à ce monde là, ou du moins à une infime partie de ce monde là, mais il en a décidé autrement et sa vie a fait le reste. Il ne s'imagine pas qu'il puisse être un bon critique pour toutes ces pièces qu'il va voir. Il ne peut donc que comprendre ce que veut dire Leone.

Quand le sujet passe à leurs métiers respectives, Andrea ne peut retenir un soupir d'admiration. Il n'est pas souvent en contact avec des gens ayant poursuivi de longues études pour embrasser une carrière comme celle d'un médecin. Ses parents auraient adoré, sans doute, avoir un fils médecin - mais son père est mort bien avant d'avoir pu assister aux débuts de la vie de professionnelle de son fils, et sa mère est désormais bien trop ailleurs pour s'en soucier.

- Je suis impressionné. Ca ne doit pas être facile tous les jours, comme travail, j'imagine. Ce n'est pas trop difficile ?

Sa question est sans doute un peu idiote ; Andrea ne doute pas vraiment du fait que ce soit un métier difficile, avec de forts enjeux et de grosses responsabilités. Il ne retire pas sa question, mais rougit un peu néanmoins parce qu'il se sent idiot de l'avoir posée. Et il se sent d'autant plus idiot quand Leone lui retourne la question ; même s'il n'a pas honte de son métier, disons que le sien est nettement moins... passionnant, sans doute.

- Je travaille dans un refuge pour les animaux. C'est bien moins prestigieux.

Il rit un peu et hausse une épaule en prenant un bonbon. Il doit avoir l'air d'un enfant, il faut dire, à décrire son métier en mangeant des bonbons à l'entracte d'une pièce de théâtre.

- On recueille des animaux abandonnés, on les soigne si besoin et on les repropose à l'adoption.  

@ Invité

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Ven 6 Déc - 21:21
« Tant qu’on ne compte pas ses heures de travail, et qu’on est prêt à ne pas avoir d’horaires réguliers et beaucoup d’astreintes professionnelles … ça va. Ce qui dit, comme ça, ne fait pas très engageant. Mais quand on tient un nouveau-né dans ses bras, qu’on est la première chose qu’il voit au monde. Ou qu’on reçoit des remerciements de toute une famille, qu’on a la sensation d’avoir été utile … Je crois que ça efface tout. Ou quand on arrive le matin et que notre patiente préférée a préparé des scones pour tout le service, pour nous remercier. C’est ce genre de choses, qui fait qu’on est capable de surmonter les moments où tout ne se passe pas comme on le voudrait. »

Leone aimait son métier, et cela se voyait. Tout son être s’était animé alors qu’il parlait sans s’arrêter, la prononciation plus chuintante que d’habitude et ses mains s’agitant en tout sens pour marquer chacun de ses mots, comme un vrai italien. D’après sa grand-mère, bon sang n’aurait su mentir. A moins que ce ne soit le fait d’avoir grandi à Little Italy, dans cette atmosphère méditerranéenne où on s’apostrophait depuis les balcons et dans la rue, et où le discours du corps comptait autant pour se faire entendre que la voix. En plus, s’il y avait bien un sujet sur lequel il était intarissable, c’était son travail. Il était passionné, sincèrement, autant par l’art de la médecine que par ses patientes et patients, et souvent davantage par ces derniers d’ailleurs. Mais il ne pouvait pas nier que participer aux grandes étapes de leur existence, que ce soit les joyeuses ou les plus douloureuses était quelque chose de rare, et qu’on ne trouvait que dans bien peu de spécialités. Bien sûr, en neuro’ ou en cardio’, on sauvait des vies, on accomplissait des miracles, on était … un peu des dieux, à défier la mort et la maladie, d’une façon encore plus grandiose que dans d’autres services. Mais dans le sien, on aidait. On côtoyait la vie comme la mort. On célébrait, comme on souriait simplement face à une difficulté surmontée. C’était un mélange entre des parents heureux et des femmes soulagées, des familles assemblées et le bout du voyage. Il y avait de tout : il aidait à en fonder, des familles. Ou à ne pas en fonder. Il écoutait l’intimité des gens. Il opérait sur des nourrissons, parfois avant leur naissance, ou pendant cette dernière. C’étaient de petits miracles. Ou des grands, sur des petits humains. Au fond, Leone aimait son métier car il savait pourquoi il se levait le matin. Et rien que pour cela, il estimait être chanceux. Même si tout le monde n’était pas obligé de supporter son enthousiasme débordant, aussi un sourire un peu gêné orna bientôt ses lèvres, tandis qu’il passait une main derrière sa tête, l’air embarrassé :

« Désolé … J’ai tendance à beaucoup parler, quand on me lance sur le sujet. J’aime mon métier, sincèrement. »


Qu’y avait-il de plus à ajouter ? C’était bien le pan de sa vie qui ne connaissait pas de nuage, désormais, après de longues années de galère. Peut-être que le reste suivrait ? Il l’espérait. Au moins pouvait-il cesser d’arborer sa moue de gamin ne sachant où se mettre quand Andrea lui parla à son tour de son travail, car il afficha instantanément un joli sourire. Honnêtement, il ne voyait pas tant de différences que cela entre leurs univers : lui aidait des humains, et Andrea, des animaux. Mais c’étaient tous des êtres vivants, qui partageaient des choses. Les meilleurs amis de l’homme et l’homme en quelque sorte, réunis au détour d’une représentation. Même si le fait qu’il faille des personnes comme Andrea démontrait que le meilleur ami, en l’occurrence, pouvait être bien traître avec ses compagnons à quatre pattes.

« Vous soignez des animaux, et moi leurs maîtres ? Ça se ressemble, vous ne trouvez pas ? »

C’était dit gentiment, franchement, honnêtement, avec cette candeur toute « leonesque », parce qu’il restait de ces gens avec le cœur sur la main, qui aimaient rencontrer d’autres personnes qui partageaient, au moins en apparence, leur besoin d’aider, de faire du bien.

« Du coup, vous avez des animaux chez vous je présume ? »

Dans sa tête, Leone avait le fait le raccourci un peu simple qu’une personne travaillant dans un refuge devait forcément adorer être entourés de compagnons dans sa vie privée. Du moins, c’était ainsi qu’il se l’imaginait. Et la question apparut dans son esprit. Il la posa sans filtre, amusé malgré lui :

« Vous avez une tête … d’ami des chats ? »

@ Invité

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Ven 13 Déc - 19:20
Andrea offre un sourire à Leone, parce qu'il ne peut que sourire alors qu'il est témoin de la passion que le jeune homme éprouve pour son métier. Ça transparaît de chacune de ses paroles, ce n'est même pas questionnable. Il est indéniable que Leone aime ce qu'il fait, et comme ce qu'il fait est assez impressionnant, Andrea ne peut pas faire autrement que d'être impressionné. Il l'écoute avec attention, hoche la tête en sirotant sa boisson, ses doigts pianotant distraitement sur la table. Lui aussi, il aime son métier. Ce n'est pas la musique, ce n'est pas la scène, la chanson, les comédies musicales et tout le reste, c'est certain. Il ne vit pas de sa passion la plus ultime, de ce qui fait vibrer son cœur. Mais il aime ce qu'il fait, et ça le fait se sentir utile. Pas comme s'il sauvait des vies, pas comme s'il était en mesure de se dire indispensable à la bonne santé de quelqu'un, mais utile parce qu'il aime fondamentalement les animaux, que la souffrance le torture, qu'elle soit dirigée contre les hommes ou contre les animaux eux-mêmes. Il n'y peut rien, c'est comme ça.

- Ne vous en faites pas. Ca se voit que vous êtes passionné, et du coup, c'est passionnant ?

Andrea sourit et acquiesce.

- Moi aussi, je parle beaucoup quand je parle de mon métier. Ou de ce qui me passionne.

Ce qui n'est pas totalement vrai ; il parle quand il se sent en confiance. Dans une atmosphère propice et non anxiogène, ce qui n'arrive pas tout le temps. Le reste du temps, il est plus discret, il a du mal à s'ouvrir, à parler de lui ouvertement. Comme si les gens risquaient de s'imiter dans la moindre faille ouverte pour lui faire du mal. Il ne sait pas d'où lui vient cette angoisse permanente - il a tenté, maintes et maintes fois, de le comprendre, mais tout les psychologues qu'il a rencontrés dans vie avaient la même réponse - dans la mort de votre frère jumeau. Mais Andrea était déjà angoissé avant ça. Il s'en souvient alors qu'il ne se souvient pas de grand chose autour de cet évênement là. La réponse ne l'a jamais satisfait, et un jour, il a simplement arrêté de creuser, se contentant de son cercle d'amis et d'espaces safe pour évoluer et s'épanouir.

- C'est vrai que nos boulots se ressemblent, cela dit je n'aurais quand même pas la prétention de dire que je sauve les animaux comme vous le faites, vous, avec les hommes. Je ne suis pas vétérinaire, je fais juste ce que je peux pour leur offrir un foyer en attendant mieux.

Ce qui est parfois aisé quand un jeune chien débarque avec ses grands yeux joueurs, et parfois moins quand l'animal est un vieux chat qui doit finir ses jours quelque part.

- J'ai un chien et un chat, et parfois plus parce que j'ai du mal à laisser les animaux en souffrance au refuge. Mais je n'habite malheureusement pas un palais, alors je suis limité. Les gens me demandent toujours ce que je préfère, mais en réalité, je n'en sais rien. J'aime les deux, ils sont intéressants et différents ?

On dirait qu'il parle de ses enfants, alors il rit un peu.

- Vous aimez les animaux ?

@ Invité

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Mer 1 Jan - 23:03
« Tant que vous ne piquez pas du nez en m’écoutant déblatérer, c’est l’essentiel ! »

Le léger rire de Leone résonna, écho plus fort au sourire d’Andrea tandis que ce dernier lui expliquait que l’italien et sa longue litanie l’intéressait. Au moins il n’avait pas fait fuir sa rencontre du soir avec son côté quelque peu passionné, précisément. Rien n’y faisait, il avait beau tenter de se tempérer, les années avaient beau passer, une lueur de plaisir brillait toujours dans ses yeux quand il expliquait quoi que ce soit en rapport à son travail, que ce soit à un inconnu ou un collègue, du principe général aux multiples détails techniques de sa dernière intervention, sans parler de ses projets d’essais cliniques qu’il gardait dans un coin de sa tête, précieusement, ou de ses commentaires des articles qu’il avait lu récemment dans les différentes revues médicales de référence. Le trentenaire était, somme toute, un enthousiaste, qui aimait communiquer ce qu’il appréciait, et ce dans tous les domaines. C’était sans doute ainsi qu’il avait convaincu un certain nombre de ses collègues de l’aider au sein des associations dont il était membre, en … en parlant de la sorte, avec sincérité et joie, parce qu’il avait toujours eu à cœur de s’investir dans des actions qui avaient à ses yeux réellement de l’importance, et pour lesquelles il pouvait se sentir utile, surtout. Être un simple supporter était une chose précieuse, mais quand on en avait les moyens, il était bon de s’investir soi-même, de cultiver un rapport avec le sujet qui dépassait celui du mécénat et de la bonne volonté, quitte à se retrouver englué dans des montagnes de paperasse et goûter à des aspects moins reluisants. C’était peut-être aussi cela, s’engager : dépasser le vernis de l’envie pour mettre ses mains dans le cambouis et en ressortir crotté mais déterminé. Et il adorait partager et découvrir d’autres passions que les siennes. Alors, avant de porter sa limonade à ses lèvres une nouvelle fois, alors que son interlocuteur expliquait que lui aussi était un passionné, l’italien déclara :

« Alors … parlez m’en davantage ? Vous faites l’ensemble des soins dans ce refuge ou bien vous avez un partenariat avec une clinique vétérinaire spécialisée ? »

La conversation lui semblait devenir plus … fluide ? Ou en tout cas moins dans le simple échange de banalité ? Il en avait l’impression en tout cas, et l’espérait. Bien sûr, il était impossible, lors d’une première conversation, d’atteindre la même familiarité qu’avec une connaissance autre, cependant, c’était aussi la preuve que le courant passait bien, et que les sujets s’enchaînaient, un premier en entraînant un second, et ainsi de suite, jusqu’à complètement oublier le point de départ et aboutir à un point d’arrivée nullement imaginé au début. Et il y avait tellement de choses à échanger, quand on découvrait quelqu’un de nouveau, qui n’évoluait pas en plus dans les mêmes sphères que soi ! La plupart de son entourage était constitué d’amis glanés entre l’enfance et l’internat, ainsi que de collègues ou de membres de ses associations, bref, des personnes avec qui il avait partagé de longs pans de sa vie ou qu’il voyait souvent, et qui baignaient dans la même atmosphère, le même milieu que lui. Cela ne l’ennuyait pas, bien au contraire : c’était agréable aussi, de savoir exactement où l’on allait. Néanmoins, un peu de nouveauté demeurait excitant. Et Andrea, finalement, lui paraissait être à la fois mystérieux et comme faisant partie de son paysage, à force de voir sa silhouette dans le théâtre qu’il fréquentait autant que faire se peut. Aussi, peut-être, que le jeune homme lui semblait tout simplement sympathique, lors de leurs premiers vrais échanges, et qu’il s’était établi entre eux quelque chose de calme et de doux.

« Avoir un chez soi … c’est déjà beaucoup. Je suis sûr que les animaux dont vous vous occupez auront une vie meilleure grâce à votre action. »

Comme pour les humains. Mais cela, Leone préféra ne pas le dire, par pudeur, et aussi parce qu’il respectait le fait qu’Andrea préfère être modeste vis-à-vis de son propre travail, de ce qu’il avait pourtant accompli. Certains disaient que les chirurgiens pensaient être des dieux. Lui avait toujours su qu’il n’était qu’un mortel, tentant d’aider, et échouant parfois durement. D’autres aidaient, à leur façon : par leur métier, par leur temps bénévole, par leur argent aussi, car il fallait bien que ce monde tourne.

Andrea avait donc … un chat et un chien. Raté donc. Mais après tout, cela faisait plus d’heureux, et Leone trouvait amusant que l’homme embrasse l’ensemble du règne animal domestique. Point de jaloux.

« Je vous crois sur parole. »


Parce que son expérience était très limitée, comme la réponse à la question allait le prouver.

« A vrai dire, oui, mais … cela reste assez théorique. Je n’ai jamais eu d’animaux de compagnie. Ni enfant, ni maintenant. C’est sans doute pour le mieux : vu mes horaires, je n’aurai sans doute pas vraiment le temps de m’en occuper correctement. »

Et il était hors de question qu’il oblige sa grand-mère à assumer une charge supplémentaire, ce qu’elle finirait forcément par faire.

« C’est peut-être pour cela que votre métier m’intéresse tant … J’ai l’impression que c’est un peu un monde inconnu ? Je sais que ça a l’air ridicule. »

@ Invité

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Dim 16 Fév - 0:48
Andrea n'a pas l'habitude de parler de son parcours professionnel. Il est excessivement rare que les gens lui demandent ce qu'il fait effectivement au refuge, la plupart de ses interlocuteurs se contentant en général de prendre l'information de sa profession sans chercher davantage d'explications. Il ne les blâme pas ; en général, peu de personnes sont intéressées par l'idée d'avoir des informations sur le métier de soigneur. La vie ne l'aurait sans doute pas porté sur ce chemin s'il n'avait pas eu l'adolescence qu'il a eue. Mais ça, il ne va pas en parler ; il risquerait sans aucun doute d'attirer la pitié de Leone, de l'ennuyer avec des détails trop personnels, et ce n'est certainement pas son objectif.

- Je suis simplement soigneur, donc je m'occupe des animaux dans leur quotidien, et éventuellement en cas de petits problèmes de santé. Par contre, on travaille effectivement avec une vraie clinique vétérinaire avec lequel on a réussi à avoir un partenariat et qui s'occupe des animaux vraiment blessés à moindres frais. Heureusement, sinon on ne pourrait pas faire grand chose pour eux... Moi je n'ai pas suivi la formation nécessaire à pouvoir me prétendre vétérinaire.

Il grimace un peu. Le fait que des êtres vivants soient capables de faire du mal à des animaux pour la plupart sans défense, qu'ils avaient pourtant pris la décision d'adopter, ou pire, capables de les abandonner, a toujours été une incompréhension pour lui.

- J'ai toujours eu plus de mal avec les gens qu'avec les animaux, c'est sans doute pour ça que j'ai pris la décision de m'occuper d'eux. Et vous n'avez pas tort, pour les horaires de travail, les animaux se sentent rapidement seuls ou ennuyés s'ils n'ont pas suffisamment de compagnie. Je vais sans doute vous sembler un peu extrême, mais je pense que les gens ne réfléchissent pas assez avant d'adopter des animaux. C'est un engagement, en quelque sorte ? Un peu comme décider d'avoir un enfant. Enfin, je ne suis pas en train de comparer les enfants aux chiens, mais vous voyez ce que je veux dire...

Il rit un peu, pour cacher son embarras, sans doute. Parce qu'il doit un peu passer pour un fou, à défendre la cause animale comme si c'était le sujet le plus important de la soirée.

- Et non, ce n'est pas ridicule. Les histoires des gens sont différentes, vous vous y connaissez bien mieux que moi en maladie, ou en relations humaines par exemple, j'imagine. Votre métier doit impliquer pas mal de contact avec les gens, les familles, non ?

Ca le fascine un peu, Andrea, parce que lui il a besoin de temps pour être à l'aise. Ce n'est pas vraiment son fort, les échanges.

@ Invité

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Dim 5 Avr - 16:50
« Je vois, vous êtes en quelque sorte un aide-soignant pour animaux ! Eh bien … ce n’est peut-être pas aussi connu que vétérinaire, mais c’est comme à l’hôpital. On parle beaucoup des chirurgiens, parce que, bien sûr, sur le moment, nous avons les mains dans le cambouis. Mais après les opérations, il faut aider nos patients à reprendre une vie normale. Ou même juste … s’occuper d’eux, pour les laver, leur donner à manger … et ce travail de tous les jours est aussi important que le nôtre, c’est une continuité.

Donc … moi, je suis impressionné en tout cas. »


La comparaison valait ce qu’elle valait, mais Leone pensait sincèrement ce qu’il disait. Il avait du mal avec l’idée d’une hiérarchie de valeurs dans les métiers, surtout dans le domaine du soin, qu’il soit humain ou animal fondamentalement. Certes, les études n’étaient pas exactement les mêmes, bien entendu, les responsabilités non plus. Mais d’un autre côté, il n’était pas capable, lui, de prendre soin d’animaux abandonnés, au-delà de connaissances élémentaires en anatomie. Pas plus qu’il n’aurait pu, sans formation, être infirmier en réanimation – et même avec une formation, il n’égalerait jamais les personnes qui faisaient cela constamment. Il y avait une technique, des gestes particuliers … et tellement d’engagement, aussi. On oubliait toujours les petites mains qui faisaient tourner les grands paquebots de la civilisation, à tort. Il espérait sincèrement, à mesure que sa carrière avancerait, ne pas oublier ce constat. Parce que ceux qui avaient eu la gentillesse de l’aider, durant son internat, étaient bien davantage les aides-soignants et les infirmiers que les grands pontes de la médecine. Evidemment, il y avait des exceptions, en bien et en mal de chaque côté, la stupidité ayant cet avantage que d’être assez équitablement répartie. Néanmoins … il se souvenait des mains tendues, des yaourts apportés gentiment alors qu’il somnolait dans un couloir en attendant qu’un patient se réveille après trente-six heures de garde. Peut-être qu’il projetait ses souvenirs sur Andrea, mais en attendant, il était sincère dans ses mots. Et puis, il n’y avait pas de sot métier.

Leone hocha la tête aux paroles du soigneur, trouvant la chose parfaitement censée, et pas du tout extrême. A partir du moment où l’on prenait un engagement, quel qu’il soit, il était important de le tenir, d’y faire attention, parce que sinon, on se retrouvait avec des personnes qui fuyaient à la moindre difficulté. Cela lui rappelait un peu les gens qui poussaient la porte d’associations un peu en touriste, parfois pour se donner bonne conscience ou, au contraire, en ne comprenant pas du tout ce que cela pouvait impliquer dans leur vie de tous les jours, et disparaissaient du jour au lendemain lorsqu’ils se faisaient interpeller par des collègues, ou juste, quand ils se rendaient compte qu’un réel engagement impliquait bel et bien de passer des heures à tenir des permanences, à composer en permanence avec des budgets serrés et à, bien souvent, se débrouiller avec beaucoup de ruse et trois bouts de ficelle pour trouver des solutions dans l’urgence à des situations douloureuses. Et peut-être qu’il jugeait un peu trop rudement ces militants flottants, comme il les appelait, bien sûr qu’un coup de main, même rapide, cela aidait toujours. Mais en attendant, à chaque trou dans le planning car un tel avait décommandé à la dernière minute, il fallait trouver une bonne âme qui, elle, laisserait tout en plan et sacrifierait son temps libre pour venir. Pour en avoir été trop de fois victime, l’italien devait admettre avoir une patience plus limitée qu’auparavant. Vu qu’il en avait parfois un peu assez d’annuler des sorties prévues de longue date et attendues avec impatience pour faire un remplacement au pied-levé. Alors bien sûr, ses proches avaient l’habitude et ne lui en voulaient. Ils comprenaient, c’était important. Il n’empêche que ce n’était pas agréable. Perdu dans ses pensées, il laissa Andrea continuer, avant de reprendre entièrement le fil de la conversation et de répondre finalement :

« En relations humaines, je ne sais pas … En revanche, on en apprend beaucoup sur la nature humaine. Pour le meilleur comme pour le pire. Mais parfois, je me demande si, en fin de carrière, je serai réellement devenu plus sociable, parce que je me dis au contraire souvent que la misanthropie me guette. »


Un rire lui échappa. En même temps, quand il pensait à ce mari qui lui avait fait du rentre-dedans alors que son épouse venait littéralement d’accoucher – et accessoirement que lui-même venait de délivrer son gamin … Oui, non, il avait quand même plus de chance de perdre foi en l’humanité qu’autre chose. Sans parler de toutes ses patientes un peu âgées chez qui il observait une corrélation tout à fait élevée entre l’annonce de leur cancer et leur divorce. Etrange, n’est-ce pas ? Heureusement qu’il était plutôt optimiste de nature ! Ce qu’il s’empressa d’ajouter :

« Je plaisante. A moitié. Mais l’avantage de ma spécialité, c’est qu’on retrouve vite le sourire. Quand on tend un bébé à ses parents et qu’on voit une nouvelle vie qui commence … ça apaise celles qui s’en vont, pas très loin. Bref, comme vous voyez, on devient très philosophe, surtout le soir en bonne compagnie ! »

Clin d’œil à l’appui, Leone leva sa boisson en direction d’Andrea, pour le remercier d’égayer sa soirée.

« Et pour répondre à ce que vous disiez plus tôt … ce n’est pas ridicule. Un engagement envers quelqu’un, quelque chose qui dépend de nous … ce n’est pas à prendre à la légère. J’y réfléchissais en vous écoutant, parce que je fais pas mal de bénévolat, et parfois, certaines personnes arrivent pétries de bonnes intentions … puis déchantent en voyant la réalité de ce qu’il y a à faire et disparaissent.

Un peu comme les gens qui adoptent une ravissante boule de poils en voulant faire plaisir aux enfants, puis se rendent compte que l’adorable boule de poils en question a des besoins et qu’il ne s’agit pas d’une peluche animée. »


Bigre, lui aussi s’enflammait ! Avec un léger sourire complice, Leone conclut :

« Nous sommes tous les deux très extrêmes, vous voyez. »

@ Invité

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Mer 15 Avr - 21:15
C’est vrai que son métier est important au quotidien. Andrea n’est pas du genre à se plaindre, ni même à souffrir de l’impression qu’il vaut moins qu’un autre. Il n’aurait de toute façon eu ni le temps ni l’énergie nécessaire à se lancer dans une carrière de vétérinaire ; les études sont bien trop longues et bien trop épuisantes pour cela. Trop couteuses, aussi. Il fallait bien qu’il puisse se libérer du temps pour sa mère. Le job qu’il exerce lui convient très bien, de toute façon. Il aime le fait qu’il n’est pas là que pour voir les animaux qui souffrent ; au contraire. Il est là pour s’occuper d’eux et leur redonner un peu de tendresse, les remettre sur pieds quand ils sont trop blessés par la vie, et ensuite, leur trouver une nouvelle famille comme la promesse de perspectives plus joyeuses. Ce rôle-là lui convient parfaitement.

- J’aime bien la comparaison, ce n’est pas très éloigné de la vérité, franchement. Mais j’apprécie beaucoup ce que je fais. J’aurais été trop malheureux de voir des animaux en souffrance à longueur de journée, de toute façon.

Inutile de rentrer dans les détails du reste, de sa mère qui perd la tête petit à petit depuis de très longues années. Line ne s’est jamais remise de la mort de son mari et de l’un de ses fils, ce qui est sans doute normal ; Andrea a perdu un frère et un père mais il imagine bien volontiers que la souffrance de sa mère a été pire encore que la sienne. Une partie de lui, cependant, aurait apprécié qu’elle tente de sortir la tête de l’eau pour s’occuper de son fils. Au lieu de ça, elle s’est laissée sombrer lentement mais surement dans la douleur, puis dans la folie, se laissant à la charge d’un fils perdu et esseulé sans songer aux conséquences. Avec le recul, avec la vieillesse - et peut-être la sagesse - des années, il sait que sa mère représente un fardeau et qu’il faudrait qu’il apprenne, au moins un peu, à lâcher du lest. A décharger le poids de l’occupation d’une personne malade sur les épaules des professionnels qui savent le faire mieux que quiconque. Il a du mal à vivre sa vie tout seul, cependant, et c’est sans aucun doute ce qui en dit long sur sa situation actuelle et ses nombreux blocages.

- Moi aussi, il m’arrive de me dire que la misanthropie me guette, et pourtant je ne partage pas votre profession. C’est un mal qui couve en ce moment, apparemment.

Il rit un peu ; il n’imagine pas la difficulté de la profession de Leone dans les moments difficiles, cela dit. Il se souvient vaguement de l’hôpital qui a été le théâtre final de l’accident de voiture, des années plus tôt, et de médecins aux mines tirées et aux blouses froissées tentant d’employeur des mots simples pour lui faire comprendre l’incompréhensible. Les souvenirs sont flous, il a plus au moins effacé cette période traumatique de sa mémoire. L’accident, le transport à l’hôpital, la suite… Il a gardé de toutes ces étapes une peur presque panique des établissements de santé et un souvenir radicalement négatif, ce qui le contraint à faire particulièrement attention, dans sa vie de tous les jours, à ne pas se donner une occasion d’y retourner. En revanche, il a toujours eu beaucoup d’admiration pour les médecins dont c’est le métier de tenter de sauver les gens, et qui doivent aussi prendre leur part de responsabilité dans les annonces négatives et le désarroi des familles. A la place de Leone, lui qui a par exemple du mal à expliquer à une famille que son chat est décédé et que le corps de la pauvre bête a été ramenée au refuge, sans doute qu’il deviendrait lui aussi petit à petit misanthrope. Une chose est sure, Andrea n’excelle pas dans l’art des relations humaines de manière générale. Anxieux, timide, persuadé que son discours n’intéressera personne, il a conscience de cuver un complexe d’infériorité important – et parfois, handicapant.

- Promis, je ne parle pas autant d’habitude. Mais moi aussi, il faut croire que je peux me laisser aller à l’exercice de la philosophie… de comptoir.

Heureusement, finalement, que cette pièce était horrible.

La vie est ainsi faite, parfois. Il ne pensait pas, en prenant son billet et son manteau pour partir tout à l’heure, que sa soirée prendrait cette tournure, c’est certain. Il tend son verre vers Leone pour trinquer et acquiesce tragiquement à ses observations sur le bénévolat.

- Malheureusement, c’est un peu pareil chez nous. Mais les animaux souffrent, aussi. Comme les humains. C’est difficile pour eux d’être transportés de familles en familles sans trouver de point d’attache.

Il a toujours beaucoup de mal à recevoir les gens qui ramènent des animaux qu’ils ont tenté d’adopter quelques semaines auparavant. Même s’il peut comprendre que certaines difficultés surgissent, et empêchent ainsi l’adoption de se maintenir, il ne peut en revanche concevoir les adoptions faites sans prendre le temps de la réflexion sur l’engagement pris. Souvent malheureusement, c’est le cas.

- Je vois ça ! J’imagine que ces extrêmes peuvent aussi signifier que nous sommes des personnes passionnées. Enfin, je vous promets d’arrêter de vous assassiner avec toutes mes banalités sur les animaux et leur compagnie.

Il rit un peu, à nouveau, particulièrement détendu maintenant, et de manière un peu surprenant d’ailleurs.

- Vous avez prévu d’assister à d’autres représentations dans les prochains mois ? J’ai un abonnement, mais je ne me souviens plus quelle est la prochaine représentation que j’ai prévue.

@ Invité

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Jeu 11 Juin - 13:06
« Assassinez-moi quand vous voulez, alors. J’aime beaucoup les armes employées … qui sont tout sauf banales. »

Clin d’œil à l’appui, Leone adressa un sourire presque gentiment taquin à Andrea, avant de porter son verre à ses lèvres pour en finir le contenu. En d’autres circonstances, et dans d’autres lieux, peut-être aurait-il davantage appuyé sa phrase et le clin d’œil qui allait avec – car après tout, son interlocuteur était un bel homme, de bon goût, et dont il avait apprécié la conversation – néanmoins, cela ne s’y prêtait guère, d’abord parce qu’il n’avait aucune idée des préférences de ce dernier, et aussi tout simplement parce qu’il ne voyait pas l’intérêt de gâcher, en quelque sorte, une rencontre agréable et in fine amicale par autre chose. Il en resterait donc à une expression plus mesurée, quoique la plaisanterie soit réelle quant au fait qu’il avait sincèrement apprécié cette entracte en compagnie du soigneur, et discuter avec lui de tout et de rien, dans un flot qui ne semblait pas vouloir se tarir, et surtout qui entretenait une atmosphère à la fois complice et chaleureuse, sans la gêne ordinaire qui accompagnait ce type de rencontre au débotté, du moins, c’était ainsi qu’il l’avait vécu de son côté et il espérait sincèrement que ce soit pareil pour la personne en face de lui. A vrai dire, s’il avait pu sentir une forme de timidité chez ce dernier, il avait l’impression que cette dernière s’était atténuée avec le temps, et qu’ils étaient arrivés à un point où la fluidité de leur échange était actée, sans barrière, et vraiment très délassante. Finalement, il avait fait de venir, malgré l’horreur que constituait cette pièce. Comme quoi, il ne fallait jamais jurer de rien, et comme disait sa grand-mère, d’un mal pouvait naître un bien. Sortant son téléphone pour répondre à la question d’Andrea, sincèrement content qu’il la pose, car cela signifiait implicitement qu’il avait eu raison et que le jeune homme avait tout autant apprécié que lui cet intermède, Leone ouvrit l’application Google Agenda et commença à regarder rapidement l’ensemble … qui ressemblait pratiquement à un emploi de temps de ministre, compte tenu du nombre de plages horaires occupées par les diverses permanences et autres activités associatives, sans parler évidemment des journées entièrement consacrées à son travail. Il allait vraiment falloir qu’il pense à prendre des congés … dans un ou deux mois, disons.

« Normalement, j’ai mon samedi soir de libre dans trois semaines, donc je pensais venir à cette date. Enfin, ça peut changer en cas de grosse urgence, mais je ne suis pas sur la liste d’appel de ce jour-là et encore moins de garde, donc il n’y aura pas de problème. Ce samedi-là, tenez … »

Montrant le portable, il réalisa trop tard qu’Andrea pouvait aussi voire rapidement son agenda démentiel et aussi les associations dans lesquelles il militait. Bon eh bien, si jamais ça le dérangeait, ce serait le moment de se souvenir qu’il n’était pas libre ce jour-là, et voilà, ils s’en tiendraient là. Ce serait bien dommage, mais en soit … Leone avait l’habitude. Passe encore pour le LGBT Center ou El Halito, mais Act Up et le Planned Parenthood … Bon, cela annonçait la couleur. Enfin, de toute manière, cela faisait partie de lui, et s’il devait avoir des ennuis … Ils se sépareraient bien vite. Reprenant rapidement son téléphone, il le rangea dans sa poche avant de dire, afin de changer légèrement de sujet :

« Honnêtement, j’en suis à envoyer un Google Form à mes amis pour caler nos agendas histoire de pouvoir se voir, alors je suis une très mauvaise personne pour prévoir quelque chose. Mais normalement ce jour-là … j’essayerai d’être présent. En plus, cette fois, les critiques sont unanimes, ce qui est suffisamment rare pour prévoir un triomphe appréciable … »

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