@Nael Brahimi
Il y avait de ces soirées qui vous happaient et vous absorbaient comme un appel de la nuit, un cri pour vivre sa meilleure vie. C’était du moins la manière qu’avait trouvé Arco pour justifier ses trop nombreuses soirées aux quatre coins de la ville. La vérité, c’est que le garçon  se répugnait à l’idée d’envahir l’appartement de Levi et le déranger par sa présence. L’auteur avait beau lui assurer que ça lui faisait plaisir, au fond de lui, Arco se savait plus parasite qu’invité.
Ce soir pourtant, il n’avait pas grand-chose d’un nuisible, armé de son plus doux sourire, le regard tranquille et les doigts refermés sur un verre d’alcool de bien meilleure qualité que ce qu’il avait pour habitude de boire. L’ambiance était bonne et l’appartement était agréablement chauffé même si ce dernier était bondé, littéralement envahi de milles âmes. Il devenait presque difficile de circuler, mais ça non plus, ça ne dérangeait pas Arco pour qui les contacts physiques avaient toujours été bien acceptés. Appréciés souvent aussi.
L’envie de nicotine eut pourtant raison de son confort et habilement, il se fraya un chemin jusqu’au balcon et, pour une obscure raison, quelqu’un lui tendit un bédot qu’il accepta sans réfléchir. Terminant son périple une fois parvenu sur le balcon, il poussa malgré lui un petit soupir de soulagement, ne réalisant que plus tard qu’il n’y était pas seul. Un autre jeune homme avait eu la même idée, rien d’étonnant à ça finalement, et d’un coup d’œil, Arco reconnut Naël. Naël aux beaux yeux verts, peut-être bleu ? Mais Naël le garçon comète qui parfois était là puis ensuite ne l’était plus. Ce n’était pas la première fois qu’il le croisait et du peu qu’il le connaissait, il avait bien accroché avec le personnage.
« Salut »
Rien d’original à dire, il lui tendit néanmoins le joint qu’il avait entre les doigts. Arco avait sans doute plusieurs vices, mais la drogue non.

les étoiles ne sont vues que par ceux qui ouvrent les yeux
avec @arco ortolani

il ne se rappelait plus vraiment comment il avait fini par atterrir à brooklyn. il se souvenait du métro qu’il avait pris en fin d’après-midi, des rues du queens qu’il avait traversé, les mains dans les poches, l’esprit loin derrière. il y avait eu un visage vaguement familier, quelques paroles échangées auxquelles il avait à peine fait attention puis ses pas, presque mécaniques, qui suivaient un chemin qu’il ne connaissait pas. l’appartement était petit, chaud, rempli de choses, de personnes, d’autant de vie que ça l’avait presque effrayé. les corps des autres l’avaient toujours rassuré, comme un remède contre la solitude. maintenant, ils lui rappelaient la vie qui lui échappait doucement des doigts, un rappel cruel de sa propre mortalité. ses mains s’étaient remises à trembler dans la cacophonie alors il s’était réfugié dans le balcon. il avait expiré dans le froid, ses joues prenant seulement quelques minutes pour s’engourdir. en bas, la rue était aussi bondée que la pièce qu’il venait tout juste de quitter et les lumières des enseignes l’aveuglaient dans l’obscurité. il passa une main sur son visage, toujours incapable de rester immobile. il aurait aimé avoir bu quelque chose plus tôt ou apporté des cigarettes.

il n’avait pas tout de suite remarqué le jeune homme derrière lui, le sourire doux, les yeux attentifs posés sur l’algérien. arco. (salut.) nael avait souri instinctivement, sa présence comme un soulagement. il y avait le joint qu’il tendait vers lui. nael était venu avec l’idée de rester sobre, les mots de son médecin résonnant dans sa tête. il n’avait pas eu le temps de prendre une décision, sa main s’était automatiquement emparée de la cigarette. les doigts d’arco étaient brûlants contre les siens et il se demanda combien ça faisait de temps qu’il était dans ce balcon. il observa la fumée s'échapper de ses lèvres avant de proposer le joint à son tour. arco n’avait pas l’air d’en vouloir. "tu fais quoi ici ?" dehors. hors de l’action, des corps, de la chair, de la chaleur, de la vie.

@Nael Brahimi
L’air frais venant caresser son visage lui fit du bien et ce n’est qu’à ce moment qu’il comprit à quel point il avait eu chaud, à l’intérieur. Parce qu’entouré de la foule, il avait la sensation de ne faire qu’un avec elle. Maintenant qu’il lui avait échappé, le froid vint l’envelopper dans ses bras, lui arrachant un peu petit frisson jusqu’au bas du dos. Il y était habitué, les nuits froides n’avaient plus aucun secret pour lui. Seule la solitude lui glaçait le sang et par chance, Naël était là pour la chasser.
Naturellement, il le salua et dans la foulée, lui tendit ce joint qu’on lui avait donné en pensant qu’il le ferait tourner. Il n’en voulait pas, parce qu’il ne consommait pas. Parfois, il buvait, parfois même beaucoup trop, mais la drogue, il préférait la laisser aux autres, ceux aux épaules solides, capables d’encaisser les pires des voyages. Arco n’était pas de ceux-là. Il se savait beaucoup trop fragile pour tenter ces expériences-là et puis, il avait assez vu Pace en vrac pour ne pas avoir envie d’essayer. Et puis, même si ce n’était qu’un joint. Ce n’était jamais qu’un joint, au début. Quand le joint lui revint, il secoua lentement le menton. « Tu peux l’garder » ou le jeter, ou même le manger, ça lui était égal. Il s’avança alors vers la rambarde, se hissant dessus d’un mouvement souple, calant ses jambes pour lui assurer un bon maintient. Ça faisait toujours flipper, le vide dans le dos, Arco lui, ça lui plaisait. Ce flirt avec le risque, jeu de funambule qu’il ne gagnerait pas toujours. « Honnêtement, j’sais pas, j’sais même pas comment j’y suis arrivé, à la base » sans doute attiré par la lumière, tel un papillon de nuit. « ça faisait longtemps ! » Il se tortilla un peu, pour prendre une cigarette, beaucoup plus safe à ses yeux. Normalement, vu son amour pour le danger, pas dit qu’il parvienne jusqu’au cancer. Et puis, il était jeune et immortel, n’est-ce pas ? C’est ce qu’ils pensaient tous quand ils étaient encore jeunes et fous. « Tu sais chez qui on est ? »