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(tw) never without you - samara

@ Invité

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Mer 8 Jan - 20:45
Une main qui glisse sur ton visage, avant de passer le portique de sécurité. Les cernes sous tes yeux témoignent de la fatigue qui te gagne, du manque évident de sommeil dont tu fais preuve. Ton téléphone, tes clés, et ton porte-feuille que tu récupères, ainsi que ton sac, t'avançant rapidement vers la porte d'embarquement. T'en viens à te demander comment vous en êtes arrivés là. Ce que tu as bien pu faire de mal pour qu'elle disparaisse, volontairement cette fois. Une voix au micro qui annonce le départ imminent de cet avion, alors que tu observes une dernière fois cet écran. Paris. Capitale des amoureux, et bizarrement, tu trouves tout cela bien trop ironique pour y croire. Ta tête qui se secoue lentement, laissant à cette hôtesse le loisir de déchirer ce papier, t'invitant à aller prendre place dans cet oiseau de ferraille. Le regard de ces étrangers sur toi qui en deviendrait presque pesant, le coeur lourd face à ce trajet qui t'attends. Les questions qui se bousculent dans ton esprit, l'incompréhension qui reste bien ancrée au fond de ton coeur. Tu n'es pas sûr d'avoir le courage d'aller jusqu'au bout de cette épreuve, mais il le faudra bien.

☾ ☾ ☾

Deux jours plus tôt,
appartement de Clay


A peine as-tu déposé Andy à l'école, que tu es déjà en train de tambouriner à cette porte, le coeur battant. Les larmes pourraient bien se mettre à se déverser sur tes joues si tu ne les retenais pas, de rage. Ton poing qui s'écrase sur ce morceau de bois, à t'en briser les os s'il le fallait. Dévasté, une nouvelle fois. C'est à ne plus rien comprendre, et pourtant...
« Curtis putain, tu sais que je dors à cette heure-là.
- Elle est où ? C'est ici qu'elle est venue se planquer ? Elle est passé ou putain ?! » Ta voix qui résonne dans le couloir, laissant ton frère écarquiller des yeux, sans comprendre ou tu veux en venir.
« Attend, tu parles de qui là ?
- Sam ! Tu veux que j'parle de qui d'autre ?! » On peut sentir tout ce désarroi dans ta voix, on peut lire dans tes yeux, à quel point tu te sens perdu. Alors, dans un geste fraternel, Clay te fait entrer dans l'appartement, te laissant rapidement remarquer qu'il est bel et bien seul. Tu ne saurais supporter cette vérité qui se dessine devant toi. Samara s'est enfuit, emmenant avec elle Killian. Partie loin de toi, sans un mot, sans que tu ne saches pourquoi. Clay t'invites bien rapidement à t'installer sur le canapé, te donnant sa tasse de café, sans perdre de temps pour aller s'en préparer un autre.
« Dis moi ce qu'il s'est passé.
- J'en sais rien Clay… » Tu arrives un tant soit peu à te calmer, tu t’y sens forcé, et bois une gorgée de ce liquide noir brûlant. Une grimace sur ton visage, tes sourcils qui se froncent. « Je me suis levé ce matin, ses affaires avaient disparues, celles de Killian aussi. J'ai rien vu venir... Elle s'est simplement barré pendant la nuit. Pourquoi ? » Voilà la question qui tourne en boucle dans ta tête, pourquoi... Comme si plus rien n'avait de sens, en fin de compte. Même Clay ne saurait y répondre alors qu'il pose sur toi ce regard rempli d’empathie.
« Tu n'as aucun moyen de savoir ou elle est ?
- J'en sais rien… » L'impression de faire un bon de quelques semaines en arrière, ce triste soir de Thanksgiving. A quelques différences près, cette fois, sa disparition est volontaire. Et tu n'arrives pas à savoir ce qui a pu lui passer par la tête, pour qu'elle décide de faire ses valises et partir. Aurais-tu fais quelque chose de mal ? Un geste, une parole qui aurait pu être mal interprété ? Tout ça tourne en boucle dans ton esprit, sans que tu n'arrives à t'en défaire. Et ça te bouffe depuis ce matin, ce réveil bien plus difficile que tu ne l'aurais cru. Bien trop déstabilisant pour toi. Et même les mots réconfortants de ton frère ne changeront rien à cette inquiétude qui te gagne. De plus en plus vive, au fur et à mesure du temps qui passe.

~~

Le même balai incessant. Son appartement, la maison au bord de la plage - même si celui-ci était bien trop impensable, les bars, restaurants où elle a l'habitude d'aller. Tout y est passé, tous ces lieux qu'elle aurait pu fréquenter. Rien, aucune trace d'elle. Tes pas t'ont guidé aux quatre coins de la ville, sans succès. Tous tes rendez-vous annulés, tes impératifs mis de côté. T’as peur pour elle, peur de la savoir seule, de ne pas être là pour la protéger. Une certaine panique à l’idée que ce cauchemar puisse recommencer. Mais bien vite rattrapé par tes obligations, t'as fini par te résigner, en allant récupérer Andy à l’école. Il n'a pas compris, pourquoi il était seul dans sa chambre ce matin. Pourquoi Killian n'était pas là pour le réveiller, ni même pourquoi Sam n'avait pas préparé le petit-déjeuner. Et tu n'as pas vraiment su quoi lui dire. A vrai dire, s'il pose de nouvelles questions, tu n'auras rien à lui répondre. La main du garçon que tu attrapes, un sourire sur les lèvres, teinté d'une peine certaine qu'il ne pourrait pas comprendre. Des banalités que vous échangez, vieille habitude ancrée depuis des années. Mais il ne tarde pas à faire ce que tu redoutais.
« Tonton, ils sont ou Sam et Killian ? C'était bizarre sans eux ce matin. » Tu peux voir cette moue se former sur son visage. Lui aussi semble triste sans eux. Quoi de plus normal après avoir partagé ce même toit pendant de longues semaines.
« Ils avaient besoin de se retrouver tous les deux, mais ils vont revenir, t'en fais pas bonhomme. » De ta main, tu ébouriffes ses cheveux. Un simple geste qui le fait sourire, qui soulage un tant soit peu ton coeur.

Un trajet jusqu'à chez toi qui te paraît bien long, rythmé par les aventures d'Andy à l'école. Ca te permet de penser à autre chose, le temps d'un instant. Et tu te dis qu'il va falloir aider Andy avec ses devoirs, sortir les chiens, préparer à manger. Et d'un seul coup, tu te demandes si tu la force nécessaire pour ça.

Tu auras attendu qu'Andy s'endorme, non sans difficulté, pour te mettre à tourner en rond dans ton appartement. A chercher le moindre indice qui pourrait te mettre sur une piste, te dire ou elle aurait pu aller. Mais tu as du mal à te concentrer, alors que tu tentes encore de comprendre pourquoi elle a fuit comme ça. Tu aurais pu entendre qu'elle avait besoin de se retrouver. Tu aurais pu entendre n’importe quelle excuse, finalement. Mais de là à la voir s'échapper comme ça... Rien ne le présageait, ou alors, tu n'as rien su voir.
Une nuit entière à cogiter, sans trouver le sommeil. Ces nuits d'horreur après Thanksgiving qui reviennent à ton esprit encore et encore. T'as fini par allumer ton ordinateur, te rappelant l'avoir vue l'utiliser à quelques reprises. Tu ne penses pas y trouver grand chose, mais tu oses espérer que ça sera le cas. Et te voilà à analyser tout un historique, de longues heures durant. Alors que tout le reste de la maisonnée dors paisiblement. Il faudra attendre le levé du soleil, pour te voir te jeter sur ton téléphone, troublant encore le réveil de ton frère. Dieu qu'il doit te détester à cet instant précis...
« Clay ! J'crois que je l'ai trouvée !
- Ok ... J'arrive … » souffle-t-il sans attendre d'autre explication. A vrai dire, tu ne sais pas ce que tu ferais sans lui ces dernières semaines. Témoin de tes efforts pour la retrouver la première fois, il a vu les séquelles de Samara, et tout ce que tu as tenté de faire pour elle. Il sait à quel point elle compte pour toi, mais surtout, que tu remuerais ciel et terre pour elle. Et il faut croire que ça lui fait peur aussi. Si toi tu t'inquiètes pour Samara, lui s'inquiète tout autant pour toi. Et il te le prouve encore une fois, se dépêchant déjà d'arriver chez toi, sans même avoir pris le temps de se changer. Tu bouillonnes au fond de toi, à peine a-t-il eu le temps de franchir la porte de ton appartement.
« Paris... T'y crois toi ? Paris ! Qu'est-ce qu'elle est allée foutre là-bas ? J'ai si mal agit qu'il fallait foutre un putain d'océan entre elle et moi ?! » Difficile de trouver quoi répondre à ça. Tes nerfs à vif, excédé par cette découverte qui te fais froid dans le dos. Et ton frère devra attendre de longues minutes avant que tu n'arrives à te calmer, le tout autour d'une autre tasse de café.
« Tu veux aller la retrouver, pas vrai ?
- J'peux pas tout lâcher comme ça...
- Mais tu peux pas rester dans cet état non plus. Ca crève les yeux que tu veux aller la retrouver. Vas-y, je m'occuperais d'Andy et des chiens. »
Ton frère, ce sauveur. Celui qui saura toujours connaître mieux que toi ce dont tu as besoin, ce que tu dois faire. Et qui saura te le faire comprendre en toutes circonstances.

☾ ☾ ☾

Un billet acheté à la volée, et te voilà en route pour la capitale française. Tu te maudirais d'en être arrivé là, tu te demande encore ce que tu as bien pu faire pour ça. A te voir, tu te dis que tu n'es qu'un fou, que tout ça ne rime à rien. Et pourtant, ton coeur s'emballe. Comme si tout ce que vous aviez traversé ces dernières semaines n'avaient rien changé. Pourtant, aussi dramatique que cet événement puisse être, il te fait comprendre que tu l'aimes, trop pour la laisser s'échapper comme ça. Que toutes ces années n'ont fait que renforcer l'évidence même. Car sans ces sentiments, tu ne serais certainement jamais monté dans cet avion. Sans ce désir fou de l'avoir près de toi, tu ne traverserais pas le pacifique, simplement pour t'assurer une nouvelle fois qu'elle va bien. Le sentiment stupide de n'être qu'un acteur d'un de ces films romantiques de mauvais goût. Et même en sachant que tu pourras bientôt la retrouver, le sommeil te manque encore, laissant ces cernes se creuser un peu plus sous tes yeux.

Quelques heures plus tard,
devant le Mandarin Oriental Hôtel


Ton regard posé sur le bâtiment, ton oeil que tu frottes par mécanisme pour ne pas sombrer. En cherchant sur internet les différents hôtels, celui-ci est le premier qui t'a fait penser à elle. Tu ne connais que trop bien ses goûts. Et après ces heures interminables de trajet, tu espères sincèrement ne pas t'être trompé. Un regard à gauche, puis à droite, avant de traverser la route, t'engouffrer rapidement dans ce luxueux bâtiment. Tu fais tâche dans le décor, tu le conçois. Mais ça ne t'empêche pas de te diriger vers la réception, espérant effacer ces doutes rapidement.
« Bonjour, je voudrais avoir le numéro de chambre de Mademoiselle Nemirowsky Samara s'il vous plait.
- Je suis navrée monsieur, il m'est impossible de vous communiquer cette information.
- Je suis un ami proche, je dois la voir de toute urgence.
- Toutes mes excuses, mais Mademoiselle Nemirowsky a été claire, elle ne souhaite pas être dérangée. » Tes coudes qui se posent sur le comptoir, et ton visage qui se rapproche de cette réceptionniste. Tu sens cet énervement certain s'emparer de toi, et ne saurais mesurer tes propos.
« Ecoutez, j'ai traversé la moitié du globe pour débarquer ici. Si je vous dit que c'est urgent, c'est que ça l'est vraiment. Maintenant vous m'donnez ce numéro de chambre ou je vous jure que je vais faire le tour de toutes vos suites pour la trouver. Suis-je bien clair ?
- Donnez moi un instant… » Le ton sec, le regard appuyant tes propos, tu ne partiras pas d'ici sans avoir eu cette information. Tout ça ne te ressemble pas, tu le sais, mais tu ne contrôles plus rien, obnubilé par le besoin de la retrouver. T'assurer une nouvelle fois qu'elle va bien. Même si tu sais que cette fois, c'est elle qui a pris la décision de disparaître.

Le sésame obtenu, il ne t'en faut pas plus pour te diriger vers les ascenseurs, retrouver la suite dans laquelle elle loge. Tête baissée, une main qui passe dans tes cheveux. Tu es nerveux, agité. Tous ces sentiments qui se bousculent en toi à cet instant précis. Et tu oses enfin toquer à cette porte, qui ne tarde pas à s'ouvrir.
« Salut Samara. » lances-tu simplement, ne te faisant pas prier pour forcer l'entrée, et fermer la porte derrière toi. D'un coup d'oeil, tu t'assures que Killian ne soit pas dans les parages, avant de poser ton regard sur elle. Ton coeur qui rate un battement, alors que la fatigue prend le pas sur le reste.
« T'avais l'intention que je te retrouve pas cette fois ? C'est quoi ce p'tit jeu auquel tu joues ? Ca t'amuse de m'faire subir tout ça ? » Ces questions qui trottent dans ta tête depuis deux jours déjà, et que tu lances, comme une bouteille à la mer, espérant avoir une réponse.
« Tu crois quoi ? Que ça m'fait rien de te voir disparaitre comme ça ? Que ça m'éclate de te chercher partout, de m'inquiéter pour toi ? Tu peux pas faire ça aux gens Sam ! Tu peux pas te barrer en pleine nuit sans rien me dire ! Qu'est-ce que j'ai fait de mal ? Vas-y, dis-moi ! Quelle connerie j'ai encore faite pour que tu te barres comme ça ? Pour que je me retrouve comme un con à te chercher partout ! J’peux pas passer ma vie à ça ! Est-ce que tu te rends compte du mal que tu fais au moins ? » Ta voix se fait plus virulente que tu ne l'aurais cru, alors qu'à la voir comme ça devant toi, tu aurais simplement besoin de la prendre dans tes bras pour que toutes ces craintes disparaissent. L'inquiétude dont tu peux faire preuve à son égard a beau s'estomper, elle ne laisse place qu'à cette incompréhension, cette impression de faire mal les choses. Et t'as besoin d'en avoir le coeur net. Tu as besoin de savoir ce qui ne tourne pas rond chez toi, à tel point qu'elle a décidé de te fuir.

@ Invité

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Ven 10 Jan - 5:00

Now I've tried to talk to you and make you understand All you have to do is close your eyes And just reach out your hands and touch me Hold me close don't ever let me go More than words is all I ever needed you to show Then you wouldn't have to say that you love me 'Cause I'd already know.



Chez Terry,
il y a soixante-douze heures,

«  T'es pas mon Papa ! J'veux Papa ! T'es pas mon Papa ! »

Les cris, déchirants, de cet enfant qui de ses touts petits poings fermés, frappaient de toutes ses forces le torse de cet homme qui, les yeux hantés par les plus étincelantes des foudres, refusait de le poser au sol. L'enfant hurlait, se débattait lançant les plus désespérés des regards dans ce vide qui l'entourait et au milieu duquel il ne parvenait pas même à voir la silhouette de sa mère. Celle qui, le souffle coupé et le cœur déchiré, s'était relevée si vite que sa chaise en était tombée à la renverse. Déjà, Samara se maudissait d'avoir cru, encore une fois, que son ex parviendrait à se maîtriser. Déjà, elle se détestait pour avoir eu, une fois encore aussi, la faiblesse de le croire quand il lui avait dit, de sa voix mielleuse et enjôleuse, qu'il ne voulait que bavarder. Que ses avocats s'étaient montrés bien trop agressifs mais que, lui, ne désirait que trouver un terrain d'entente avec elle. Pauvre sotte... pauvre conne oui ! Elle l'avait cru... Pire, elle avait voulu le croire ! Parce que, quoiqu'il ait bien pu se passer entre eux deux, elle avait si longtemps espéré que leur enfant serait, lui au moins, préservé de la folie de son père. Et dire qu'elle l'avait maudit pour ne pas avoir été présent pendant toutes ces années... Et dire qu'elle avait été jusqu'à prier pour qu'il revienne et assume enfin sa paternité... Quelle sinistre ironie !

«  Terry ! »

Avait-elle hurlé à plein poumons alors que, se précipitant vers l'endroit où l'homme serrait à l'étouffer son fils, elle blêmissait. Ses mains qui se tendent, en un élan désespéré, vers son enfant. Celui qui n'en finit plus de pleurer, réclamant à cœur et à cris tonitruants celui qui, à ses yeux innocents, est la seule figure paternelle qu'il ait jamais connue. La seule, même, qu'il ait acceptée, presque voulue. Et Samara le devine, à ce regard que son ancien compagnon lui lance, Terry sait. Il sait qui est ce père qui n'a pas encore de prénom mais que, dans sa colère, il entend bien faire confesser au petit. Pauvre petit bonhomme qu'il secoue maintenant si fort que sa tête dodeline d'avant en arrière tandis que ses larmes ne cessent de couler.

«  Lâche le ! Terry ! Ne fais pas ça ! Terry ! Rends moi mon fils ! »

Dit celle qui, implorante comme elle ne l'a jamais été, tente de son mieux d'arracher Killian à ces bras qui l'enlacent maintenant si fort qu'ils l'étouffent. Elle agrippe enfin le tissu de sa petite chemise, tente de l'attraper. Elle y parvient même, dans un soupir de soulagement et en laissant ses paupières se fermer un instant tandis que, de ses mains, elle protège, caresse cette chevelure brune qu'elle embrasse encore et encore... Elle le berce, tente de l'apaiser de ces mots qu'elle murmure, de sa voix rendue tremblante par la peur, à son oreille. Tout ira bien maintenant. Maman est là... Maman est là et, bientôt, Papa le sera aussi. Oui, Papa sera là... Le petit qui, comme s'il avait pu comprendre, qui se calmait et se blottissait plus encore contre le sein maternel. Elle, ne rouvrit les yeux que pour mieux les braquer sur celui qu'elle tance de son mépris, de sa haine même. Elle aurait voulu hurler, le fustiger de toutes ces horreurs qui lui viennent à l'esprit. Elle ne le fera pas. Pour ne pas déstabiliser un peu plus cet enfant qui, plus que tout autre, à besoin de calme . Et Terry ne le sait que trop bien alors que, l'air mauvais, il s'approche d'eux.

«  Papa hein ? Et peut-on savoir qui mon fils appelle-t-il ainsi ? »

Des mots qui claquent dans l'air comme vicié de ce trop immaculé et grand salon tandis que, dans un geste qui fait remonter le plus glacé des frissons à l'échine de Samara, il roule pour mieux les remonter, les manches de sa chemise. Elle qui recule, peine à déglutir alors qu'elle protège de son mieux l'enfant. Déjà elle est acculée contre le mur, prise au piège de ce corps massif qui se dresse de toute sa stature devant eux. Et la main de Terry qui, se faisant si faussement caressante, effleure avec fébrilité la tête du petit. Son regard, d'acier, qui vient s'ancrer à celui de la jeune femme.

«  Allons Sam... Dis-moi... Dis moi qui mon enfant ose-t'il prendre pour son père ? Qui ?! »

Elle ne répond pas, trop bien consciente de ce que cette réponse pourrait bien leur valoir à l'enfant et à elle. Et, subitement, elle se souvient. De toutes ces horreurs par lesquelles elle avait du passer pendant son histoire d'amour tordu avec l'aîné des O'Leary. Tous ces instants où elle avait cru mourir, aurait même sans doutes préféré mourir, mais qui étaient bien trop ignobles pour qu'elle veuille seulement s'en souvenir. Tous ces cauchemars que, pour mieux se protéger, son esprit avait transformé en doux songes. Mais, là et maintenant, elle se souvint. De la violence, de l'humiliation et de la peur... La terreur qu'elle sent de nouveau la gagner alors que, secouant la tête, elle le supplie.

«  S'il-te-plaît... Terry... S'il-te-plaît... Pas devant le petit... S'il-te-plaît... »

L'homme semble hésiter, plongeant au fond des prunelles de celle dont il ne se rapproche que pour mieux la saisir d'une main forte à la gorge. Sous ses doigts Terry sent les os, si fragiles, de sa nuque. Ceux qu'il rêverait de briser pour mieux la tuer. Lui faire payer sa trahison. Son visage qu'il approche de celui de Samara pour mieux frôler sa joue de ses lèvres avant que celles-ci ne viennent promettre au creux de son tympan

  « Toi et moi n'en avons pas fini ma chérie... Très loin de là même ! » puis, sans même se reculer, il hurle, faisant se figer la mère et l'enfant «  Anita ! » et, quelques secondes à peine plus tard, une domestique qui arrive, tremblante elle aussi, tant elle connaît les fureurs de son employeur.   «  Prenez l'enfant ! Et emmenez-le au parc ! Sa mère et moi avons à parler ! Seuls ! » puis, affichant le plus sardonique des sourires, il demande à Samara dont il effleure le visage du revers de sa main «  N'est-ce pas, amour, que nous avons à parler toi et moi ? » comme elle est incapable de parler il répète, aboyant presque «  Plus fort ! Anita ne t'entend pas ! »

«  Sil-vous-plaît, Anita, pourriez-vous emmenez mon fils ? »

La femme s'exécute, bien trop habituée aux colères de Terrence pour encore oser s'y opposer. Et tant pis si son cœur se déchire alors que, prenant le petit dans ses bras, elle croise le regard affolé de Samara. La domestique ne peut rien faire et, elle le sait. Tout comme le sait celle qui, à peine la porte refermée derrière l'enfant et sa nounou du jour, se recroqueville sur elle-même et, oui, supplie.

«  Terry... S'il-te-plaît... Terry... »
«  Cela faisait longtemps hein, Sam ?! » une première gifle qui tombe, drue et cinglante, sur le derme de celle qui en glapit de douleur. «  Avoues que cela te manquait ! » un coup, le premier, porté au ventre de celle qui, le souffle coupé, se sent glisser jusqu'à ce sol où, comme résignée, elle attend déjà la suite. Celle qui ne tarde pas à venir quand, l'agrippant par une poignée de cheveux, il la contraint à se relever «  On dirait que tu as oublié à qui vous apparteniez Killian et toi ! Tu as vraiment cru que tu pourrais refaire ta vie ? Avec lui en plus ? »
«  Il n'y a rien entre Curtis et moi ! Je te le jure ! Nous ne sommes que des amis ! Je t'en prie Terry écoute... »
«  Ta gueule ! »

Il ne l'écoute pas, ne l'entend sûrement plus d'ailleurs. Pour l'instant le monstre en Terry n'a qu'une envie, frapper. Encore et encore. Et sa victime elle, pas d'autre choix que d'endurer. Sa seule consolation : que son enfant, lui, soit sauf.

☾ ☾ ☾

Le soir,
Chez Curtis,

Dans le salon, les enfants jouent tranquillement. Comme si de rien n'était, elle est passée chercher Andy à l'école. Les enseignants ne s'étonnant plus même de la voir venir chercher ce petit qui, de toutes façons, n'est jamais aussi heureux que lorsqu'il les voit, Killian et elle, l'attendre à la sortie. Comme bien des jours, Samara s'était surprise à se détendre auprès de ces deux enfants, de ces presque frères, qui étaient même parvenus à la faire rire quand, de concert, ils avaient braqué leurs grands yeux vers elle pour mieux la convaincre de leur acheter des bonbons. Evidemment, ils avaient eu gain de cause. Et le salon était probablement jonché de tous ces papiers à l'heure actuelle. Elle les entendait. Ils riaient, plaisantaient, jouaient. Et son cœur se serra alors que, rabaissant son pull sur les marques encore visibles des coups reçus plus tôt, elle réalise que cela ne peut pas durer. Que ce bonheur que Curtis avait si bien su leur offrir, n'est qu'une illusion. La plus dangereuse de toutes... Parce qu'elle s'est mise à y croire à cette vie de famille qu'ils ont, ces dernières semaines, menées tous ensemble. Une famille... De celle qu'elle n'avait jamais connue et n'aurait jamais songé pouvoir fonder un jour. De celle que, surtout, elle aurait tant voulu pouvoir conserver. Un tremblement qui la saisit alors qu'elle l'entend rentrer. Vite, elle se dépêche d'ajouter un peu de fond de teint aux traces à son cou. Curtis ne doit pas savoir ! Ni ce soir ni jamais ! Il ne mérite pas cela ! Il mérite tellement mieux ! Sa voix, si chaude et chantante qui s'élève alors qu'elle devine les enfants se précipiter vers lui. Et, elle sent son cœur saigner... Curtis... Elle sort de la salle de bain, se dirige vers ce salon sur le seuil duquel elle s'immobilise devant ce spectacle qu'elle veut conserver à jamais gravé dans son esprit. ,Curtis et les enfants. La joie, les rires et le bonheur... Celui qu'elle fera exploser cette nuit. Cette-fois elle est décidée. Elle n'a que trop repoussé cette échéance qu'elle savait pourtant inéluctable. Elle doit partir. Rendre sa liberté et sa vie à celui vers qui elle se précipite à son tour pour mieux lui sauter au cou. La chaleur de ce corps tout contre le sien qui la rassure mais qu'elle sait avoir déjà perdue. Ce parfum, celui de sa peau, dont elle s'enivre comme pour mieux le garder en elle, sur elle. Et ce baiser qu'elle lui vole mue par un désir irrépressible. Leurs yeux qui se fondent quand, enfin, elle y met fin. Ses joues qui rosissent alors que, le prenant par la main elle murmure

« Je sais que nous devions sortir ce soir mais que dirais-tu d'annuler ? On renvoie la baby-sitter et on cuisine toi et moi ? Un dîner en famille, juste tous les quatre... Tu veux bien, s'il-te-plaît ? »

Pour profiter de ce bonheur qui, dans quelques heures à peine, ne sera plus. Pour se faire un ultime souvenir. Celui qu'elle chérira de toutes ses forces quand, demain, elle se décidera à partir. Non pas parce qu'elle ne l'aime pas. Mais parce qu'elle ne l'aime, au contraire, que trop.

☾ ☾ ☾

Aujourd'hui,
Paris,
Le Mandarin Oriental,

« J'arrive... »

Une voix, comme éteinte, alors qu'elle entend frapper à la porte de sa si somptueuse suite. Le temps se serait-il une fois de plus précipité, envolé pour la mener jusqu'à cet instant où la nourrice est supposée lui ramener son fils ? Si elle avait seulement regardé l'horloge dorée à l'or fin trônant sur la table du salon principal, alors la jeune femme aurait su qu'il n'en était rien. Mais, depuis son départ pour le moins précipité, sa vie s'était comme suspendue. Elle était arrivée dans l'une des plus belles villes du monde, logeait dans le plus beau des hôtels mais, pourtant, Samara se sentait désespérément vide. Plus d'une fois, elle avait voulu renoncer. Faire demi-tour et retourner à celui qui ne lui manquait que trop. Plus d'une fois aussi, elle avait composé son numéro. Besoin de l'entendre. Envie de lui parler. De lui expliquer ce qui la rongeait de l'intérieur et l'effrayait tant qu'elle avait préféré le fuir. De lui demander pardon pour sa lâcheté. Pour l'aimer aussi si fort qu'elle aurait fini par le détruire si elle était restée. Oui, elle était néfaste... Pour Curtis plus que tout autre. Lui qui n'était jamais que bonté et douceur... Il méritait mieux ! Tellement mieux que les ennuis et la femme dévastée qu'elle était ! Alors elle avait jeté son téléphone, ne s'en était pas même encore racheté un autre. Et avait refermé à jamais ce chapitre bien trop doux de sa vie. Du moins était-ce ce qu'elle pensait. Jusqu'à ce qu'elle n'ouvre cette porte et que ses yeux ne s'écarquillent devant celui qui, après l'avoir si brièvement salué, entrait d'autorité dans sa chambre.

« Curtis ? Mais... Que... ? »

Elle n'a ni le temps d'encaisser ni d'exprimer sa surprise que, déjà, il l'accable de tous ces plus légitimes reproches qui fusent de ses lèvres rendues tremblantes par la plus flamboyante des colères. Et, elle, tremble devant toutes ces accusations qu'elle ne peut ni même ne veut récuser. Il a raison ! Elle l'a trahi, blessé et...

« Je suis désolée... Curtis... Je suis sincèrement dé... »

Mais il ne lui laisse pas même le temps de finir sa phrase qu'il continue, la blesse et la meurtrit de chacune de ces phrases qu'il lui crache pour mieux laisser la dureté de ses mots l'atteindre en plein cœur. Et, elle, sent la colère désespérée monter à son tour en elle. Oui, tout ce qu'il dit est vrai ! Oui, elle est un monstre mais pas sans cœur hélas qui lui a fait du mal en partant sans même un mot ni même une explication ! Oui, oui et encore un million de fois oui, Samara sait qu'elle mérite tout cela ! Pourtant... Alors que, enfin, il se tait, elle le tance de son plus embrasé regard et, à son tour, s'avance vers lui. Lui vers qui elle lance d'abord d'une voix encore fluette et mal assurée

« Oui ! C'est ça que tu veux entendre ? Hein Curtis ?! Tu as fait tout ce chemin pour m'entendre te confirmer que je suis une lâche qui t'as blessé ? Et bien voilà, tu le sais ! C'est ce que je suis tu ne vois pas ? Pourquoi n'as-tu jamais voulu comprendre ce que j'ai à mille et une reprise tenté de te dire ?! Pourquoi refuses-tu de voir ce que tous les autres pourraient si facilement te dire ? Je suis mauvaise ! Alors à quoi t'attendais tu en venant hein ? Je ne suis pas celle que tu penses ! Je ne suis pas celle que tu veux... Si tant est que tu m'aies seulement jamais voulue ?! »

Elle semblait en colère, fulminait de ses mots mais ses yeux, eux, ne mentaient pas alors qu'ils se baignaient de ces larmes qui se mettaient à rouler sur ses joues pâles. Un doigt tremblant qu'elle tendait vers lui avant que, de sa main libre, elle n'attrape ce cousin en passementerie qu'elle lui lançait à la figure, ne le manquant que de peu.

« Pourquoi es-tu venu ?! Pourquoi ?! Tu crois que c'était simple pour moi peut-être ? Tu crois que j'en avais seulement envie de partir, de vous quitter les chiens Andy et toi ?! Idiot ! Crétin ! » crie-t-elle maintenant alors que tous les coussins volent, allant s'écraser sur la porte derrière celui qu'elle regarde, le souffle précipité et la douleur ancrée à ses traits «  Tu as mal ? Mais ce n'est rien comparé à ce qui se serait passé si j'étais restée ! Tu ne le vois pas ? Tu ne comprends toujours pas ?! Curtis... Mais à quel jeu, toi, tu joues ? » ce pas qu'elle fait vers lui et qui la rapproche dangereusement de celui qu'elle ne quitte pas du regard alors qu'elle livre, dans la virulence et la maladresse, les maux de son cœur « A quoi ça rime ce semblant de vie de famille , ce jeu auquel  nous avons trop bien joué tous les deux ?! A quoi ?! On est amis mais on vit ensemble, on mange ensemble, on s'endort et on se réveille ensemble ? On est amis mais je crève de jalousie quand je te vois te pavaner dans les sites people au bras de cette réalisatrice mexicaine de merde ? C'est ça l'amitié ? Vraiment ?! Tu es un hypocrite Curtis !  Ou un sadique pour penser que je pourrais endurer cela éternellement ! Et ne me dis pas que tu ne me comprends pas ! Tout le monde le sait, le voit ! Même Clay sait ! Et, toi, tu saurais pas ? T'es aveugle ou quoi ?! »

Puis, alors qu'elle se retient de faire ce pas qui la mènerait à ses bras dont elle rêve pourtant si fort de retrouver la chaleur elle défait fébrilement le nœud du foulard à son cour et envoie voler l'étole de soie au sol. Puis, sans pudeur, elle défait la glissière de cette robe qui, à son tour, choit. Et les traces encore présentes des coups reçus qu'elle lui montre en les commentant

« Cadeau de Terry ! Et tu sais pourquoi ? Parce que Killian en a appelé un autre Papa devant lui ! Parce qu'il a compris, lui, que c'était de toi dont mon fils parlait ! Même ce monstre que tu oses encore appeler ton meilleur ami le sait... mais toi, non ? Tu vois pas que mon fils s'est attaché à toi ? Tu ne vois pas qu'il t'aime?!

Un pas, le dernier. Celui qui la mena si près de lui qu'elle pouvait sentir son parfum l'enivrer. Et ces mots qu'elle ne pensait jamais dire, qu'elle n'était pas prête à dire mais qui lui échappèrent pourtant.

« Je t'aime Curtis ! Pas comme un foutu ami avec qui je vais voir un match ! Je t'aime ! C'est clair là ? Je t'aime Curtis ! »

Et, oui, cela faisait mal et peur. Tellement même...

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Ven 10 Jan - 10:15
Une dizaine d’années plus tôt,
Restaurant The 12th Grant, Manhattan


La fête battait son plein, les convives affublés de leurs plus belles tenues tenaient pour la plupart une coupe de champagne à la main. D’autres plus raisonnables se contentaient de piquer au buffet ces amuses-bouches finement préparés. Au coeur de la salle, Cassidy, vêtue de la plus soignée des robes blanches, le visage illuminé par ce sourire rempli d’un amour incommensurable, dansait aux bras de celui à qui elle venait de dire oui. Un tableau somptueux, dans un décor de rêve, alors que votre père avait maintes et maintes fois supplié d’être celui qui réchaufferait davantage encore les coeurs de sa cuisine. Un bonheur certain qui émanait du lieu, privatisé pour l’occasion. Un mariage en grandes pompes, scellant l’avenir de ce couple déjà lié depuis si longtemps déjà et qui, tout à chacun le savait, ne saurait se séparer.
Une pause, un verre qui glissait dans les mains de l’aînée, alors qu’elle venait attraper ta main, t’obligeant à la suivre loin des regards de tous ses convives. Un air agréable sur les traits de ta grande soeur qui allait se cacher avec toi dans la cuisine. Une interrogation bien vite effacée par les propos que celle-ci avait voulu t’adresser.
« Tiens, prends ça. » Une bague qu’elle glissait dans tes mains. Vestiges d’une famille qui tenait encore aux traditions, et ce, depuis des générations. « C’est la bague de fiançailles de grand-mère. John m’a offert celle de sa mère lorsqu’il m’a demandé de l’épouser, et je pense qu’avec ça, elle te revient de droit. » Tes lèvres qui s’étaient pincées dans un geste fin, observant le bijou avant de relever ton regard vers elle.
« Tu me connais Cass, je pense que t’en attends trop de moi. Clay se mariera bien avant moi, on le sait tous les deux. » Un léger rire qui ponctuait ta phrase, alors qu’au loin, la demoiselle observait l’une des convives, t’invitant à faire de même. Samara, aux bras de celui qu’elle disait aimer. Celle qui depuis toujours avait eu une place si particulière, sans que tu ne veuilles réellement le voir. Bien trop obnubilé par cette vie qui t’emmenait sur des sentiers cachés de la haute sphère de votre société.
« Tu te fous de moi ? Cass… Il n’y a jamais rien eu entre Samara et moi, et il n’y aura jamais rien. Regarde la, elle est heureuse avec Terry, ils vont avoir leur enfant. Je crois que tu te plantes sur toute la ligne.
J’en suis pas si sûre. » avait-elle simplement répondu, avant de te laisser seul dans cette immense pièce, rejoignant alors les convives. Ton regard s’était à nouveau posé sur cette bague, de longues secondes, avant de retrouver la silhouette de Samara, au loin.

☾ ☾ ☾

A y repenser, tu te dis que Cassidy a toujours eu un don pour voir l’amour là ou on s’y attend le moins. Et avant même de passer le pas de cette porte, tu sais désormais, qu’elle avait raison. Bien avant tout le monde, bien avant que tu ne comprennes, que toutes ces histoires qui se terminaient prématurément n’avaient qu’une seule raison : Samara. Pendant tout ce temps, toutes ces années, elle avait peu à peu réussi à capturer ton coeur. Sans que tu n’y penses, sans que tu ne le vois venir. Mais désormais, alors que tu t’apprêtes à la retrouver dans cette suite, tout devient plus clair. Bien plus encore qu’en ces tristes jours ayant suivi Thanksgiving. Parce qu’il n’y a que l’amour qui aurait pu te faire faire quelque chose d’aussi fou. Traverser tout un océan, pour espérer la voir, même une dernière fois.
« Curtis ? Mais... Que... ? » Sa stupéfaction n’a rien de surprenant, alors même que tu te glisses dans cette suite.

« Je suis désolée... Curtis... Je suis sincèrement dé... » Mais tu n’es pas là pour l’entendre dire qu’elle est désolée. Tu doutes même avoir envie d’entendre ces explications à cet instant précis. Tant de questions que tu lui lances, alors que tes pensées se retrouvent embrouillées à la simple idée de l’avoir à nouveau en face de toi. Tu aurais du te douter pourtant, que cela pourrait créer en elle un énervement certain. Et ça se confirme bien trop rapidement, alors qu’à ses mots, tu peux déjà deviner ces larmes qu’elle se mettra à verser.
« Oui ! C'est ça que tu veux entendre ? Hein Curtis ?! Tu as fait tout ce chemin pour m'entendre te confirmer que je suis une lâche qui t'as blessé ? Et bien voilà, tu le sais ! C'est ce que je suis tu ne vois pas ? Pourquoi n'as-tu jamais voulu comprendre ce que j'ai à mille et une reprise tenté de te dire ?! Pourquoi refuses-tu de voir ce que tous les autres pourraient si facilement te dire ? Je suis mauvaise ! Alors à quoi t'attendais tu en venant hein ? Je ne suis pas celle que tu penses ! Je ne suis pas celle que tu veux... Si tant est que tu m'aies seulement jamais voulue ?! »
« Putain mais pourquoi tu t’obstines à croire tout ce que les autres veulent te montrer ? J’te connais assez pour savoir que t’es pas comme ça ! » Tu n’es pas sûr qu’elle puisse entendre ces paroles, alors qu’un premier coussin vient frôler ton bras, te faisant reculer d’un pas. Un étonnement certain face à cette attitude, mais qui ne t’empêchera pas de rester là, face à elle.
« Pourquoi es-tu venu ?! Pourquoi ?! Tu crois que c'était simple pour moi peut-être ? Tu crois que j'en avais seulement envie de partir, de vous quitter les chiens Andy et toi ?! Idiot ! Crétin ! »
Tu bouillonnes, ne comprend pas. Pourquoi est-elle partie si elle ne le voulait pas ? Tu continues d’éviter ces oreillers qu’elle lance dans ta direction, la laissant finalement exprimer ce qu’elle a sur le coeur. T’empêchant malgré tout de répondre comme tu l’aurais voulu.
«  Tu as mal ? Mais ce n'est rien comparé à ce qui se serait passé si j'étais restée ! Tu ne le vois pas ? Tu ne comprends toujours pas ?! Curtis... Mais à quel jeu, toi, tu joues ? »
« Ah parce que c’est moi qui joue ?! » Rien n’a de sens, pas encore. T’as simplement essayé d’être présent pour elle, pendant toutes ces semaines. Sans vouloir la brusquer, sans un geste de trop qui aurait pu la faire fuir. Est-ce alors ça, qui l’a poussée à partir ? Ce temps perdu à n’agir que comme des amis, sans que tu ne vois finalement, qu’elle en attendait plus.
« A quoi ça rime ce semblant de vie de famille , ce jeu auquel  nous avons trop bien joué tous les deux ?! A quoi ?! On est amis mais on vit ensemble, on mange ensemble, on s'endort et on se réveille ensemble ? On est amis mais je crève de jalousie quand je te vois te pavaner dans les sites people au bras de cette réalisatrice mexicaine de merde ? C'est ça l'amitié ? Vraiment ?! Tu es un hypocrite Curtis !  Ou un sadique pour penser que je pourrais endurer cela éternellement ! Et ne me dis pas que tu ne me comprends pas ! Tout le monde le sait, le voit ! Même Clay sait ! Et, toi, tu saurais pas ? T'es aveugle ou quoi ?! »
Tu aurais voulu être capable de répondre à cet affront. Mais il n’en est rien, lorsque le bout de soie se détache de son cou, laissant apparaître ces bleus qui te ramènent instinctivement à ces semaines en arrière, ce moment même ou tu l’as retrouvée nichée dans le dressing de cette maison. Un haut le coeur, plus puissant encore lorsque sa robe glisse sur son corps pour en dévoiler bien plus encore.
« Cadeau de Terry ! Et tu sais pourquoi ? Parce que Killian en a appelé un autre Papa devant lui ! Parce qu'il a compris, lui, que c'était de toi dont mon fils parlait ! Même ce monstre que tu oses encore appeler ton meilleur ami le sait... mais toi, non ? Tu vois pas que mon fils s'est attaché à toi ? Tu ne vois pas qu'il t’aime?! »
Tu n’es pas sûr de comprendre ce qu’elle te dit, ne voit plus que les stigmates que sa peau ose encore porter. Un vent de panique alors que tes yeux scrutent chacune de ses formes pour y découvrir l’effroyable. Toi qui voulait la protéger semble avoir échoué, lamentablement. Une vérité à laquelle tu ne t’attendais pas, mais qui est pourtant bien là. Toi qui aurait voulu chérir cette enveloppe charnelle, la combler de baisers au lieu de la voir meurtrie par les coups. Cette femme que tu as toujours désiré mais pour laquelle tu t’es effacé bien trop longtemps. Qui n’apparait désormais que comme la femme la plus forte que tu ne connaisses.

☾ ☾ ☾

Quatre jours après Thanksgiving,
Le Ceegee’s


La porte du bar que tu pousses dans un soupire. Une vie qu’il va falloir reprendre après avoir cru vivre un véritable enfer sur terre. En serais-tu capable ? Les doutes restent bien ancrés en toi, alors que tu poses déjà tes affaires derrière le comptoir. D’ici deux heures, la salle sera pleine, la musique à son maximum, alors que certains viendront chanter, jouer. La bonne humeur sera de mise, comme à chaque fois. Pourtant, ton coeur lourd te distrait, tu n’as pas la tête à la fête ce soir. Le visage de Clay qui apparaît devant toi, de cet air si inquiet à ton égard. Tu ne le devines que trop facilement, à le voir sourcils froncés, bras croisés contre son torse.
« Qu’est-ce qui a ? »
« T’as rien à faire ici. Je t’ai dit que je vais gérer le bar ce soir. » Une main qui glisse sur ton visage, ton pouce et ton index marquant un temps sur l’arrête de ton nez, de tes yeux clos.
« J’peux pas Clay, c’est trop dur. »
« Tu l’as retrouvée, c’est le plus important. Elle finira par s’en remettre, mais elle a besoin de toi. »
« C’est ma faute… J’aurais du insister. J’aurais du… Je sais pas. Forcer la porte de cette putain de maison. Elle aurait pas subit tout ça. »
« Tu pouvais pas savoir, il faut que tu arrêtes de t’en vouloir. Maintenant c’est terminé. Allez, je sais qu’au fond de toi t’en crèves d’envie. Va retrouver ta dulcinée. » Ce sourire qu’il t’offre, rassurant, réconfortant. Bien sûr que lui aussi arrive difficilement à encaisser ce qu’il s’est passé. Mais vous vous devez d’être forts, pour elle, pour la soutenir. Alors, tu finis par récupérer ton sac, te dirigeant vers la sortie, prêt à aller à son chevet. Avant que tu ne quittes l’endroit, ton frère t’interpelle une dernière fois, t’arrêtant dans ton élan et te tournant vers lui.
« Curtis, elle t’aime, tout autant que toi tu peux l’aimer. N’en doute pas. » Et tu ne saurais quoi répondre à ça, préfère oublier bien rapidement ces quelques mots. Et ce soir, comme tous ceux qui suivront, tu seras là pour elle. A prendre soin d’elle, comme tu le pourras. Ces regrets qui resteront invisibles, mais qui te donneront la force d’être présent à ses côtés. A tenter maladroitement d’effacer un tant soit peu ces blessures auxquelles elle doit maintenant faire face.

☾ ☾ ☾

« Je t'aime Curtis ! Pas comme un foutu ami avec qui je vais voir un match ! Je t'aime ! C'est clair là ? Je t'aime Curtis ! »
Ton regard qui se relève vers son visage, pour y plonger dans le sien. Y découvrir toute la sincérité dont elle arrive à faire preuve. Clay avait raison, une fois de plus. Tout comme Cassidy l’avait découvert, il y a bien longtemps déjà. Paralysé par ces mots, ta mâchoire qui se crispe sans que tu ne saches réellement comment agir. Alors, le plus simple reste de laisser ton coeur te guider, la colère s’échapper. Tes mains qui se posent sur ses joues, ton visage se rapprochant dangereusement du sien jusqu’à ce que vos lèvres se rencontrent. Comme si c’était la première fois. Douloureux par ces épreuves mais si libérateur, à t’en couper le souffle. Deux âmes simplement faites pour être ensemble qui se trouvent enfin.
« Je t’aime Sam. Je t’aime et ça me tue de ne pas avoir été là avant. » Tes mains qui ne sauraient quitter son visage, laissant finalement quelques centimètres vous séparer. « Qu’est-ce qu’il faut que je fasse pour que t’arrêtes de fuir ? Dis-le moi, je le ferais. Est-ce que je dois te passer une bague au doigt pour que tu comprennes que je pourrais crever pour toi ? Que je voulais juste te voir aller mieux, sans te brusquer ? Et que j’en ai rien à foutre de ce que les autres peuvent penser de toi ? » Aussi sincère que tu puisses être, tu ne l’as jamais été autant qu’à cet instant. Et ça crève les yeux, de cette lueur qui s’en échappe pour qu’elle puisse voir que jamais, tu ne saurais la laisser s’échapper.

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Sam 11 Jan - 12:47

Now I've tried to talk to you and make you understand All you have to do is close your eyes And just reach out your hands and touch me Hold me close don't ever let me go More than words is all I ever needed you to show Then you wouldn't have to say that you love me 'Cause I'd already know.



Il y a dix ans,
Dans la villa des Hamptons des O'Leary,

Encore une fois, tout le Gotha avait répondu présent à cette soirée qui, ils l'attendaient tous, devrait être plus mémorable que la dernière en date. Et, pendant les jours qui avaient précédé le lancement de cette réception, ce n'avait été que ballet incessant de camionnettes de livraisons en tous genres. Depuis ces fleurs toutes plus odorantes et somptueuses les unes que les autres... En passant par tout ce mobilier que Terry avait loué pour l'occasion... Jusqu'à ces différents buffets qui avaient été commandés aux meilleurs traiteurs du pays, rien que cela... Oui, tout était fin prêt pour la soirée de la décennie. Terry, lui-même, ne cachait plus même son impatience de voir les festivités débuter. Il souriait avec une douceur et une sincérité plus qu'étonnantes pour qui le connaissait vraiment. Et il parlait... Encore et encore... Imaginant déjà la tête de leurs invités quand, pour son plus grand plaisir, il leur annoncerait ses fiançailles.

Ou, plutôt, les leurs. Samara ne répondait rien, assise dans son coin, et entre ses mains cette lettre manuscrite qui lui était arrivée le matin même. Signée de la main même de Curtis... Il lui contait par le menu toutes ces choses qu'il découvrait lors de ses diverses pérégrinations. Et, elle, en souriait de le voir ainsi s'extasier de ce que si peu de gens pouvaient encore voir. De ce que, elle aurait pu le jurer, aucun de leurs invités ne sauraient jamais voir, eux pour qui seuls les signes extérieurs de richesse comptaient. Si vous aviez de l'argent, alors vous avez la position. Et alors, seulement, vous deveniez quelqu'un. C'était ce que lui offrait Terrence. La force combinée de leurs fortunes, de leurs noms et de leurs cercles d'influence... Il serait le roi et, elle, serait sa reine. Leur fils, il n'en parlait jamais, s'y intéressait à peine. Contrairement à Curtis qui, perdu dans ses errances, n'en oubliait jamais de prendre de leurs nouvelles au petit et à elle. Au travers de ses lettres ou de ses mails, c'était la beauté du monde qu'il lui offrait. C'était la simplicité de ces gens qui n'avaient rien mais seraient sans doutes plus riches qu'elle ne le serait jamais. Parce qu'ils détenaient la vérité du cœur. Le cœur... Une palpitation un peu trop vive, presque comme un soubresaut, au sien alors qu'elle laissait son esprit vagabonder jusqu'à celui qui ne lui manquait que trop. Quand bien même, à chaque fois, elle tentait de se persuader du contraire. C'était inutile, il était parti. Et il avait l'air tellement heureux ! Loin du Gotha et de ses requins. Loin d'elle, aussi ? Peut-être... Sans doutes... Tant mieux pour lui, Samara le pensait sincèrement. Tant pis pour elle, ça aussi elle le pensait trop fort. Profitant du fait que son fiancé soit occupé aux derniers préparatifs, elle avait saisi son téléphone et envoyé un texto à Cassidy.



– Hé ! Tu as deux minutes stp ?
– Toujours pour toi. Que se passe-t-il ? Nerveuse pour ce soir?
– Nerveuse ? Pourquoi demandes-tu cela?
– Sam... Terry cries partout que la réception de ce soir n'a qu'un seul but : annoncer à tout le monde vos fiançailles !
– Ah...
– Toi, pour une femme prête à faire le grand saut, tu n'as pas l'air d'aller. Raconte!
– J'ai reçu une lettre ce matin. De ton frère...
– Clay t'écrit plutôt que de te téléphoner maintenant ? Joking ! Curtis va bien?
– Il semble même heureux. Très heureux je dirais.
– Mais, toi, tu n'as pas l'air de l'être. Tu veux en parler?
– Je sais pas...
– Tu sais pas quoi ? Si t'es heureuse ou si tu veux en parler?
– Les deux ?
– Sam... C'est pas très compliqué tu sais?
– Non, justement, je sais pas.
– Aussi borné que Curtis tiens... T'as besoin que je sois encore plus précise?
– Franchement, oui. Stp.
– Tu n'es pas heureuse parce que tu sais que tu vas faire une bêtise en épousant un homme que tu n'aimes pas. Tu le sais Sam, c'est un autre auquel tu penses. Non?
– J'ai déjà dit oui à Terry. Je peux pas tout annuler maintenant !
– Pourtant c'est ce que tu voudrais, n'est-ce pas ?
– Oui.
– Tu as parlé à Curtis ? Pourquoi ne pas l'appeler ?
– Tu veux que je demande à ton frère paumé à l'autre bout de la planète de me conseiller sur mes fiançailles?!!!
– Non sombre idiote ! Je veux que tu lui dises enfin !
– Que je lui dise quoi ?
– Que tu l'aimes pour commencer ?
– T'es pas drôle là Cass...
– Je ne cherche pas à l'être. Curtis et toi... On dirait deux enfants !
- ???
– Pas un pour rattraper l'autre hein ? Dieu que vous êtes fatiguants...
– Si tu pouvais m'épargner tes énigmes stp là je n'en ai ni le temps ni la patience.
– Tu aimes Curtis, non ? Et ne me mens pas je te prie ! Notre amitié vaut mieux que cela.
– Oui, ça te va là ?
– Oui ça me va adorable andouille ! Ce n'est pas non plus comme si je l'ignorais remarques...
– Et là je dois te remercier je suppose ?
– Non, tu dois annuler tes fiançailles idiotes et parler à mon frère.
– Pour foutre en l'air ses voyages et son amitié avec Terry ? Non merci.
– Et si tu le laissais décider seul de ce qu'il veut ?
– Il a décidé, il est parti...
– Et tu n'as rien fait pour le retenir non plus ma belle.
– Parce que je veux qu'il soit heureux. Et que c'est partir qui l'a rendu heureux.
– Amusant... C'est à peu près ce qu'il m'a dit de toi à mon mariage...
– Hein ?
– Ah ah je t'intéresse là ?
– Cass !
Curtis a dit que tu avais l'air heureuse avec Terry, que vous alliez avoir votre enfant...
– Je comprends pas.
– Je venais de lui donner la bague de notre grand-mère pour qu'il l'offre à la femme de sa vie.
– Hein ? Curtis a une femme en vue ? Qui ?! Qui c'est ?!
– Oh mais dis-moi ? Serait-ce de la panique ou de la jalousie que je perçois dans tes mots ?
– Les deux ! Cesse de te moquer et réponds moi ! Qui ?!
– Appelle le Sam. Il n'est pas trop tard. Et peut-être auras-tu une agréable réponse à ta question ?
– Franchement Cass ça t'arrive d'être plus claire ?
– Désolée ma belle mais je dois filer. John et moi allons visiter des appartements. Et, toi, tu as un appel à donner, non ? Bisous ma belle et à ce soir... ou pas ?

Samara était demeurée un long moment, troublée bien plus que de raison par ces échanges qui n'avaient pas du tout tourné comme elle l'avait, si naïvement, escompté. Elle avait voulu se rassurer, se convaincre qu'elle faisait le meilleur des choix. Elle était encore plus perdue que jamais ! Ou pas... Un regard, presque effrayé, qu'elle lança à celui à qui elle se promettait de parler. Cassidy avait raison. Elle ne pouvait pas faire cela... Elle ne pouvait pas épouser un homme qu'elle n'aimait pas ou du moins pas assez pour avoir envie d'être sienne et rien que sienne. Ce serait un mensonge, une trahison. Envers Terry, envers elle-même... envers cet autre aussi auquel elle ne cessait, souvent malgré elle, de songer. Etait-elle vraiment éprise de lui ? C'était idiot ! Entre eux il n'avait jamais été question que d'amitié ! De celles que la brune ne pensait jamais pouvoir construire. Curtis ? Il lui était encore plus opposé qu'il ne lui ressemblait. Curtis ? Il était la clarté de ses propres ténèbres à elle. Et pourtant... Parfois... Plus d'une fois même... Samara s'était laissée aller à penser que... Un soupir et sa tête qui se secouait. C'était idiot, vraiment ! Ses doigts qui composaient sans même s'en apercevoir un numéro. Et sa voix, si douce et chantante, qui résonnait dans cette chambre où elle était venue se réfugier, se cacher.

« Curtis ? Tu vas bien ? J'espère que je ne te dérange pas ? » une hésitation et ces mots qu'elle murmurait avec bien trop de tendresse « Non, non, tout va bien rassure-toi ! Je crois... Je crois que j'avais juste envie d'entendre ta voix. »

Un seul être vous manque et tout est dépeuplé, non ? En ce cas l'être portait le prénom de Curtis.


☾ ☾ ☾

La Thaïlande,
Il y a cinq ans,

Elle n'avait pas même réfléchi. Pour une fois dans sa vie, Samara n'avait pas daigné qui que ce soit l'influencer et décider de ce qu'il convenait de faire. Et, alors qu'elle récupérait son maigre sac sur les tapis roulants, c'était un bien radieux sourire qu'elle arborait. Surtout quand elle songeait à ce que, à des milliers de kilomètres de là, se passait dans cette ville qu'elle avait abandonnée sans le moindre regret. Sans même la moindre hésitation non plus d'ailleurs... Comme si tout cela avait été une évidence. La sangle de son sac à dos qu'elle faisait passer à son épaule et son passeport qu'elle rangeait dans la poche arrière de son jean. Et ce rire, si léger, qu'elle eut alors qu'elle se dirigeait vers la sortie de ce hall. Dehors, elle se savait attendue. Dehors, elle savait qu'elle le retrouverait. Et son cœur se mit à palpiter plus fort en son sein. C'était fou ? Elle était folle ? Non, pour une fois aussi la jeune femme savait qu'elle faisait ce qu'il fallait. Et tant pis si personne ne la comprenait ! Alors, oui, à cette heure, elle aurait du revêtir sa plus belle et bien trop onéreuse robe de gala. Se coiffer et se maquiller comme une poupée qui aurait pris vie... En ce moment elle aurait du se pavaner, une flûte de champagne millésimé à la main, dans l'une de ces réceptions dont le Gotha avait le secret. En gros, en ce moment, elle aurait du n'être qu'apparences et futilités. C'est ce qu'elle était au quotidien. Mais, non, ce n'était pas ce qu'elle désirait vraiment être. Samara se demandait parfois qui elle était vraiment. Ce qu'elle découvrirait sur elle-même si, dépouillée de ses bien trop beaux oripeaux de richesse, elle avait le courage de se voir dans sa plus parfaite nudité de l'âme et du cœur ? Mais cela lui faisait toujours si peur qu'elle n'avait jamais osé le faire. Du moins jusqu'à ce jour. Jusqu'à cet instant où, épuisée par ces heures interminables passées dans un avion de ligne et non un jet privé, elle découvrait les yeux étincelants le paysage qui s'offrait à elle.

Et, en son esprit étrangement serein, elle sut qu'elle avait pris la bonne décision. Que partir après avoir reçu cette autre lettre de Curtis était une bonne idée. La meilleure qu'elle ait eue depuis longtemps d'ailleurs... Il lui avait fait part de son amour pour ce pays et ses habitants. De tout ce qu'il aurait voulu pouvoir y faire pour mieux aider ceux qui en avaient tant besoin si l'on consentait à poser les yeux ailleurs que sur les attractions touristiques si rutilantes. Curtis était un homme avec un tel courage, une telle volonté de bien faire, d'aider ! Mais, comme souvent, il se heurtait aux engrenages administratifs et à tous ces écueils qui ne cessent de jalonner la route des ouvriers du bien. Alors, depuis New York, Samara avait commencé à s'impliquer. Lançant des appels à tous ceux qu'elle connaissait et qui seraient susceptibles d'aider son ami. Elle s'était démenée comme une belle furie... et elle s'amusait encore de voir que c'était bien l'une des rares fois de sa vie qu'elle agissait pour quelqu'un d'autre qu'elle-même. Pour tous ceux que son ami entendait aider ? Un peu, certainement. Pour lui, bien plus sûrement encore. Lui qui avait toujours su faire ressortir le meilleur d'elle-même. Celui qu'elle ne soupçonnait franchement pas même avoir en elle. Pourtant elle était là, prête à donner de sa personne. L'argent, les contacts, c'est facile d'en jouer. Mais venir aider en personne ? Peu de gens le faisaient. Elle-même ne s'en pensait pas capable. Mais elle était là, non ? Oui. Et alors qu'elle voyait Curtis arriver, courir vers elle Samara en avait fait de même. Jetant son sac au sol pour mieux se jeter au cou de celui qu'elle embrassa sur les deux joues avant que de se perdre un long moment dans ses yeux sombres. Que cela faisait du bien de le voir ! Son cœur, en tous cas, n'avait pas battu aussi fort depuis longtemps. Depuis leur dernière entrevue. Se sentant rougir, elle avait enfoncé sa casquette jusqu'à ce que celle-ci dévore ses yeux trop clairs et, laissant l'homme à ses côtés prendre son sac, se pendant à son bras encore libre elle avait simplement dit dans un clin d'oeil complice

« Alors ? Par quoi on commence ? On va la monter ton école ou on a le temps de manger un bout ? J'ai la dalle ! » puis, nouant ses doigts à celui de son ami de toujours « Tu m'as trop manqué Curtis... Promets-moi qu'on restera plus jamais aussi longtemps sans nous voir ? Comment je fais pour vivre sans toi moi hein ? » des mots prononcés sur le ton de la plaisanterie mais qu'elle pensait bien plus qu'elle ne voulait se l'avouer à elle-même. Oh oui, bien plus ! Et quand elle le réalisa, elle avait rougi et, baissant la tête pour mieux tenter de cacher son trouble, elle avait ajouté dans une toux gênée « Alors dis-moi tout ! C'est comment la Thaïlande ?! »

Parler de tout pour éviter de parler d'eux. Parler des autres pour ne pas en revenir à eux. Et, pourtant, le eux existait déjà. Ce voyage, le premier des nombreux autres que Samara fit ensuite pour mieux rejoindre celui qu'elle regardait comme jamais elle ne regardait les autres, ne faisant jamais que renforcer encore un peu plus leur lien, leur tandem... leur couple . Celui qu'ils formaient déjà sans même s'en rendre compte. Parfois même la plus évidente des choses demande du temps avant que d'éclore.


☾ ☾ ☾

Aujourd'hui,
Paris,
Mandarin Oriental,


Le temps s'était suspendu, comme figé. Dès qu'il lui était apparu, revenu, Samara avait su. Que, quoiqu'ils puissent bien avoir à se dire, tout basculerait. Parce qu'ils étaient allés bien trop loin, avaient surtout bien trop vécu et enduré, pour que continue leurs valses hésitations. L'impression de mourir, peut-être pour mieux renaître ensuite, quand défilaient en son esprit tous ces éclats de vies qui avait jalonné leur chemin commun. Ces rires qu'ils avaient si souvent laissé éclater pour mieux ne pas s'attarder sur ces rêves que, toujours, ils s'étaient confiés du bout de lèvres toujours si tremblantes. Ces éclats de voix qui, aussi, avaient ponctué leurs rares disputes. Pour ces choses qui n'étaient que broutilles et vétilles et le plus souvent prétextes pour ne pas se hurler à la face ce que, aujourd'hui, ils se lançaient. La colère au bout de la langue, la tendresse au fond des yeux. Et elle sut. Qu'il avait raison, comme toujours... Elle prétendait fuir Terry et sa violence, ce n'était jamais que le sommet d'un iceberg bien plus grand. C'était lui, et surtout lui, qu'elle avait si bêtement tenté de fuir. Parce que toutes ces semaines passées sous le même toit... Toutes ces semaines passées à vivre la plus parfaite des vies de famille... de couple... cela l'avait terrifiée. Et il lui avait fallu entendre son propre enfant appeler Curtis «  Papa » pour qu'elle comprenne que lui et elle étaient allés trop loin. Tellement trop loin... Une famille ? Ils en formaient une, et Samara n'en avait que trop conscience. Mais... un couple ? Elle le désirait si fort et depuis si longtemps ! Mais, jamais, elle n'aurait pu imaginer qu'il en soit de même pour celui qui, s'il s'était toujours montré le plus parfait et prévenant des amis, aurait pu le vouloir aussi. Et pourtant... pourtant lorsque les mots avaient jailli de sa bouche à elle, confessant ce qu'elle n'avait que trop longtemps tu... Quand elle avait vu sa mâchoire à lui se crisper... Oh oui, elle avait eu peur ! Peur d'être allée trop loin, d'avoir à jamais gâché cette relation si précieuse à ses yeux... Elle ne voulait pas le perdre ! Elle avait pensé pouvoir s'éloigner, elle réalisait qu'elle ne le pouvait pas. Ne le voulait pas !

Les mains de Curtis à son visage baigné de larmes. Leurs regards qui ne se trouvaient que pour mieux se fondre. Et ce baiser, passionné et furieux, qu'ils échangèrent alors. La violence d'un moment si sottement repoussé toutes ces années. L'urgence d'enfin laisser l'évidence parler, les réunir, eux qui au fond n'avaient jamais voulu que cela. L'impression d'enfin se sentir complète et si parfaitement en vie alors qu'elle savourait ce baiser qui n'avait plus rien d'accidentel ni de pudique. L'envie de voir ce moment se prolonger jusqu'à la nuit des temps. L'envie de s'abandonner à ses lèvres, à ses bras... Se donner totalement et sans peur ni appréhension. Les corps, déjà et bien qu'elle sentit leur impatience de se trouver plus encore, qui ne s'éloignaient que pour mieux permettre aux mots de  prendre le relais. Et, si elle pleura encore, ce fut cette-fois de joie. Curtis parlait, répondait à sa déclaration par une autre. Il parlait et chacun de ses mots allaient se ficher, en une douce flèche, dans le cœur de celle qui ne parvenait plus même à parler. Il l'aimait ? Il l'aimait... Il l'aimait ! Celle qu'elle était encore bien trop souvent au sein du Gotha aurait hurlé de rire devant pareille scène. Cette femme là aurait moqué ces sentiments bien trop purs et murmurés dans la fureur tendre d'un moment. Mais la femme qui se tenait, là et entre les bras de l'homme qu'elle aimait, était une autre femme. Celle qui n'avait jamais été plus heureuse qu'en cet instant. Ses yeux qui s'écarquillèrent et ses joues qui s'empourprèrent violemment dans ce qu'elle n'osait pas encore prendre comme une demande sérieuse. Ses cils qui se mirent à papillonner, et son souffle qui vint à lui manquer alors qu'elle tentait de son mieux de ne pas interrompre celui qui lui avouait tout ce qu'ils étaient l'un pour l'autre, tout ce qu'elle était pour lui.

« Tu as toujours été là Curtis... Depuis le jour de notre rencontre jusqu'à aujourd'hui... » ses mains qui se perdaient à leur tour sur ce visage tant aimé et ses lèvres qui ne pouvaient s'empêcher de baiser à chacun de leurs mots leurs homologues masculines « Dans les joies comme dans les pires des tragédies c'est toi que je revois à mes côtés. » un sourire, inhabituellement timide, qui fleurissait aux lèvres de celle qui continuait dans un souffle devenu murmure « C'est grâce à toi, rien que toi, que j'ai toujours pu me relever. Me trouver aussi quand, trop souvent, je me suis perdue dans des rôles qui ne me ressemblaient pas. » ce corps qu'elle laissait venir reposer contre celui de cet autre. Sa tête qu'elle reposait là où elle pouvait entendre palpiter son cœur. Et ses paupières qui s'abaissaient alors que, confiante et sereine, elle murmurait encore « Cela a toujours été toi Curtis. Depuis le début c'est toi. J'ai refusé d'épouser Terry parce que Cass avait raison : je t'aimais déjà. Aucune de mes aventures n'a jamais marché parce que c'était toi que j'attendais. Toi, toi et encore toi... » sa tête qui se relevait, son regard qui s'ancrait à celui de son amour et encore une confession « Lorsque tu m'as retrouvée, après Thansgiving... Je l'ai vue cette larme que tu as versée... Je t'ai entendu m'appeler « Chérie »... Et cela va sûrement te paraître idiot mais je te jure que c'est ça, toi encore et toujours, qui m'a donné la force et l'envie de me relever... Tu as toujours su me protéger, même de moi-même. Tu as toujours été là même quand, comme une pauvre sotte, je tentais de te repousser. » parce que la peur fait souvent bien des ravages et que le bonheur fait bien plus peur que le malheur. Un sourire qui s'élargissait un peu alors que, les yeux luisant d'autant d'envie que de timidité, elle demandait « Et si tu étais sérieux en parlant de bague... Demande-moi Curtis... Demande le moi et je te répondrais oui. Demande moi d'être tienne et rien que tienne dès maintenant et pour toujours et tu seras exaucé. Demande-moi et je serai ta femme... »

Plus de fuite. Jamais. Rien qu'un nouveau chapitre à écrire. Mais, cette-fois, à deux. Si, du moins, il le voulait.

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