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Be my guest [Pv Samara]

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Mer 20 Nov - 17:38
Lenny ne recevait que rarement du monde chez lui. Il menait une vie relativement solitaire, revenant à son appartement après une longue journée de travail pour savourer un peu de calme, loin du tumulte du lycée et du tapage des élèves, adolescents beaucoup trop énergiques pour son propre bien.

Aux yeux d'autrui, sa vie pouvait paraître relativement ennuyeuse. Après le travail, il retournait chez lui, se douchait, enfilait une tenue confortable et se laissait happer par son livre du moment ou un film quelconque, passant le reste de la nuit sur son ordinateur ou son téléphone portable jusqu'à ce que son insomnie chronique réponde à ses prières et l'autorise finalement à avoir un peu de sommeil.

Certains jours étaient une exception, une entorse à cette routine qui était la sienne. Ce soir faisait partie de ces bousculades de son quotidien. Lenny n'allait pas passer la soirée seul. Non. Samara venait le voir. Lenny n'avait rien de prévu, mais même si cela avait été le cas, il aurait dégagé le moindre empêchement pour pouvoir l'accueillir chez lui. Parce qu'il s'agissait de Samara. Parce qu'il ne lui tournerait jamais le dos.

Lenny était nerveux, ce qui n'avait rien d'inhabituel. Il n'avait pas toujours l'énergie de ranger son appartement et avait dû s'atteler à un ménage de fond en comble, incapable de savoir si les lieux auraient l'air "acceptables" aux yeux de son invitée.

Il avait essayé de cuisiner un plat, mais avait oublié un ingrédient dans sa précipitation et la préparation était complètement ratée. Lenny avait dû se résoudre à la jeter et il n'avait pas le temps de s'atteler à quoi que ce soit d'autre. Il leur faudrait donc commander à manger, une solution à laquelle Lenny se résignait bien trop souvent, lorsqu'il n'avait tout simplement pas de plat préparé à faire chauffer au micro-ondes...

Ses yeux rivés sur son téléphone portable, Lenny essayait de lire un article quelconque, mais son attention était sans cesse accaparée par les minutes qui défilaient peu à peu, se rapprochant de l'heure fatidique où Samara était supposée être là. Il posa un peu brusquement son téléphone sur la table, l'heure atteinte, son regard se dirigeant vers la porte d'entrée.

Sa raison savait que Samara n'avait pas à être là pile à l'heure, qu'il n'avait pas à s'angoisser pour si peu, mais chaque seconde passée était une torture et il fut immensément soulagé en entendant une sonnerie, quand bien même il détestait ce bruit strident. Il se leva, ouvrant la porte d'un geste précipité.

Son regard engloba Samara dans son ensemble, alors que son coeur s'emballait malgré lui. Même s'il s'était résolu à ne jamais agir sur ce coup de coeur qu'il avait pour elle, il ne pouvait pas empêcher sa tête d'en faire des siennes. Lenny espérait que cela ne se voyait pas. Il ne voulait pas gâcher leur amitié en la transformant en autre chose, une relation potentiellement nocive...

Il réalisa un peu tard qu'il était resté muet et immobile pendant trop longtemps et il s'excusa brièvement, se grattant nerveusement la nuque :

"Désolé. J'étais... J'étais ailleurs. Entre. Tu peux t'installer sur le canapé."

Lenny lui libéra le passage, ajoutant un "Bonsoir !" rapide, conscient qu'il avait oublié de se plier à la plus basique des politesses. Cela n'avait pourtant rien de compliqué, mais cela ne l'avait pas empêché d'échouer à cette simple convention...

Sortant plusieurs bouteilles, sans alcool, il s'empressa de servir Samara, avant d'en faire de même pour lui, se laissant tomber sur le canapé à côté d'elle, préservant une certaine distance entre eux deux. Frottant ses jambes, il posa brièvement un regard sur Samara, avant de le détourner, soufflant de sa voix douce et légèrement monocorde :

"Comment vas-tu ?"

Lenny voulait réellement savoir comment Samara se sentait. Si elle était heureuse ou si quelque chose la tourmentait. Ce n'était pas une question en l'air, une obligation sociale. Lenny était sincère, comme il l'était généralement.  

"Oh, j'ai complètement raté notre dîner. Je pense qu'il faudra commander quelque chose, cela ne te dérange pas ? Je paierai la note. C'est la moindre des choses."

Il ne s'était pourtant pas lancé dans une recette compliquée. Mais cela ne l'avait pas empêché d'oublier ce fichu ingrédient et de tout rater... Un sourire maladroit s'étira sur ses lèvres :

"Un jour, j'arriverai à cuisiner quelque chose de correct pour toi. Promis."

Ses échecs culinaires étaient récurrents. Il ne se rappelait pas avoir déjà concocté quelque chose de mangeable pour Samara... Mais un jour, un jour viendrait...

@ Invité

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Ven 22 Nov - 15:06
«  J'en ai rien à foutre de ce que «  Madame Ornella » veut Maman ! Elle peut aller se faire foutre je ne viendrais pas à son dîner à la con ! Je suis pas l'un de ses clebs qu'elle siffle et qui accourt ! »

Avait tonitrué dans l'habitacle de la voiture celle qui sentait sa patience, déjà bien éprouvée depuis le début de la matinée, périr sous le poids de cette conversation qui s'acheva aussi brutalement qu'elle avait débutée quand, exaspérée, Samara raccrocha au nez de sa mère. Elle l'imaginait déjà râler et jurer en italien quand, dans un juron, la sulfureuse brune écrasa violemment la pédale de frein de son bolide. Un piéton, blême de peur, qui s'immobilisait devant celle qui n'en cilla pas même, se contentant de lever le plus impoli des doigts tandis qu'elle hurlait à plein poumons

«  T'es en vie, non ? T'as rien de cassé ? Alors dégages ! Je vais être en retard ! »

Puis, comme pour mieux pousser le malheureux à se presser, elle avait fait rugir son V8 et, à peine la silhouette disparaissait de son champs de vision qu'elle jetait de nouveau sa voiture dans la cohue de la circulation new-yorkaise. Son regard qui, à la faveur d'un autre satané feu de circulation accro au rouge, glissait sur le cadran de sa Rollex. Ca va, elle était dans les temps... Si personne ne décidait de venir l'emmerder elle pourrait éviter à Lenny un stress inutile ! Elle ne connaissait que bien trop les conséquences qu'un moindre retard pouvait occasionner chez son si singulier ami. Enfin, singulier... Aux yeux d'un monde idiot peut-être mais certainement pas aux siens ! Elle avait ri de bon cœur en réalisant à quel point nombre de ses proches s'étonneraient de cette amitié qui ne lui ressemblait que si peu ! Et alors ? Hormis Harry aucune âme vivante ne pouvait se targuer sans mentir de la connaître vraiment ! Lenny, en fait, pouvant venir s'ajouter à cette liste plus que courte... Lui aussi connaissait son plus grand et précieux secret... Lui savait... Et même si elle ne se l'expliquait pas encore tout à fait, elle lui était reconnaissante à vie d'être là pour elle dès que, comme aujourd'hui, elle en avait tant besoin.

Son véhicule qu'elle garait, comme toujours, n'importe où et n'importe comment. Et sa silhouette qui s'extirpait de la carlingue pour mieux prendre la direction de l'appartement où elle se savait attendue. Déjà ses pensées virevoltaient là où, depuis dix ans, elle avait caché le plus beau et la seule partie pure de son être. Dans cet endroit où vivait celui qu'elle se désespérait de jamais pouvoir ramener vivre chez eux. Ce matin encore elle était allée le voir. Ce matin encore, elle s'était heurtée à ce silence et à cette distance qu'elle ne parvenait pas à considérer autrement que comme un rejet. C'était faux, tout le monde au centre ne cessait de le lui répéter mais elle... Une larme qu'elle écrasa d'un geste rageur alors qu'elle parvenait devant cette porte à laquelle elle sonna aussi brièvement possible sachant que cela aussi pouvait perturber celui qui, d'ailleurs, venait précipitamment lui ouvrir et l'invitait à entrer en oubliant, dans son rush, les politesses les plus élémentaires. Elle n'avait rien dit, se contentant de lui sourire et de lui adresser un clin d'oeil complice et tendre tandis qu'elle daignait lui répondre

«  Bonjour toi ! Et, tu as vu ? Je suis pile à l'heure ! » sur un ton encore plus doux elle avait ajouté, prenant ce verre que Lenny venait de lui servir   «  Que ne ferais-je pas pour mon ami ? Toi, bien sûr et au cas où tu te poserais encore la question. »

Absolument nulle méchanceté ni moquerie dans ces mots qu'elle avait prononcés doucement comme pour mieux rassurer celui qu'elle sentait nerveux. Comme quasiment toutes les fois où, comme aujourd'hui, il la laissait pénétrer dans son univers si parfaitement réglé et rangé qu'il en était pour Lenny rassurant. Le voyant se frotter les jambes de son pantalon comme toujours impeccable elle avait incliné la tête et répondu doucement

«  J'aimerais te dire que je vais bien mais ce n'est, hélas, pas le cas. Je suis passée voir Killian, comme tous les jours et... » son regard si clair qui se voilait de larmes retenues et un soupir qu'elle lâchait tandis qu'elle enfonçait sa tête entre ses genoux «  Mais c'est à peine s'il a semblé remarquer ma présence. Et quand j'ai voulu le prendre dans mes bras il s'est mis à hurler. Comme si mes étreintes le brûlaient... Je ne sais plus quoi faire... »

Elle sentait le meilleur d'elle-même lui échapper, se refuser à elle et cela la rendait bien plus malade qu'aucun mot n'aurait jamais pu l'exprimer. Refusant de se laisser trop aller elle s'était redressée et avait haussé les épaules devant l'annonce de ce dîner brûlé. La cuisine n'était pas la première des qualités de celui vers qui elle se tourna alors

«  Oh ne t'en fais donc pas pour le repas... Non seulement je n'ai pas très faim mais qui plus est je m'étais dit que, si tu es d'accord, nous pourrions peut-être cuisiner ensemble pour une fois ? Je suis pire que toi avec une poêle mais à nous deux nous pourrions peut-être parvenir à faire quelque chose de mangeable ? Mais si cela t'angoisse trop nous pouvons aussi commander ? »

Puis, après quelques secondes de silence où son regard laissait trop bien transparaître ses soucis et sa peine elle avait ajouté

  «  Je suis heureuse de te voir Lenny. J'aime passer du temps avec toi. Vraiment. Mais dis-moi, toi, comment vas-tu ? Tu m'avais parlé de ce club de lecture que tu avais rejoint alors ? C'est aussi intéressant que tu le voulais ? Tu as pu y rencontrer des gens ? »

Pour une fois Samara pensait à quelqu'un d'autre qu'elle-même et, le plus étonnant, c'était qu'elle était sincère.

@ Invité

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Ven 22 Nov - 15:58
Quelques années auparavant, Lenny aurait probablement eu pour réflexe de lui dire que Samara n'était pas vraiment pile à l'heure. Qu'elle avait presque une minute de retard. Mais il avait appris de ses erreurs, de ses difficultés et il garda cette remarque pour lui. Ses joues se teintèrent d'un rouge carmin lorsque Samara référa à lui comme son "ami".

Il avait toujours du mal à croire que quelqu'un puisse songer à lui de cette façon. Que c'était une chose à laquelle il avait droit, un privilège qu'il méritait. La vie de Lenny était relativement solitaire, en dépit de ses essais pour aller à la rencontre d'autrui, et il pouvait compter sur les doigts d'une main les gens qui le considéraient comme un ami ou quelque chose d'approchant. Samara en faisait partie.

Lenny tourna la tête vers elle alors que son amie commençait à se confier à lui, lui accordant ouvertement toute son attention, bien que son regard tendait à ne pas chercher le sien. Il aurait aimé avoir un discours tout prêt pour elle, quelque chose qui lui remonterait le moral, qui lui donnerait de l'espoir, mais Lenny n'était pas doué pour ce genre de choses.

Tout ce qu'il pouvait, c'était essayer de lui ouvrir une porte vers son monde, sa manière de percevoir les choses, qui n'était pas nécessairement la façon exacte dont Killian appréhendait son environnement. Même si cela s'en approchait.

"Hmm... Je pense que cela devait être proche d'une brûlure, oui. Parfois, j'ai l'impression qu'une main posée sur moi est... est semblable à une marque au fer rouge apposée sur ma peau. Ce n'est pas agréable."

Lui-même se rappelait d'avoir crié et de s'être débattu dans les bras de sa mère, plus jeune. Mais il avait aussi réussi à faire ce pas vers elle. Les étreintes étaient plus supportables lorsqu'il en était à l'origine, quand il avait le contrôle dessus.

Ses frottements sur ses jambes s'accentuèrent. Lenny avait toujours peur de dépasser les limites, de dire quelque chose qui contrarierait Samara. Même s'il essayait, il avait du mal à se mettre à sa place, à comprendre son état d'esprit. Et il craignait également d'avoir tort, parce qu'il n'était pas omniscient, parce que ce qu'il ressentait n'était jamais que son point de vue à lui, même s'il se sentait probablement plus proche de Killian que de n'importe qui d'autre en ce monde...

"Peut-être qu'il ne te dira jamais qu'il t'aime comme... comme tu aimerais l'entendre. Et... Et qu'il ne te serrera pas non plus dans ses bras. Mais ça ne veut pas dire qu'il ne t'aime pas ou qu'il ne veut pas de ta présence. Il... Il tente probablement de te faire passer le message à sa manière. Quand il joue, par exemple. Peut-être qu'il aimerait que tu te joignes à lui, mais il n'a pas les mots pour te le dire. Alors, il... il..."

Lenny prit une profonde inspiration. Il posa son verre sur la table basse, avant de le pousser du bout des doigts, pour illustrer ce qu'il essayait d'expliquer :

"Il t'envoie des signes. Une pièce de puzzle poussée vers toi pour que tu le complètes. Un... Un jouet mis un peu à l'écart pour que tu participes à ce qu'il est en train de faire. Vous êtes deux à communiquer d'une façon totalement différente et cela rend les choses compliquées. Comme... Comme deux systèmes qui chercheraient à interagir sans adaptateur pour leur permettre de se joindre. Tu vois ce que je veux dire ?"

Il avait besoin de se rassurer sur ce sujet. Qu'elle le comprenait. Qu'il s'exprimait clairement. Qu'il n'était pas en train de l'agacer ou l'énerver d'une quelconque façon. Lenny voulait seulement l'aider. Et il ne savait pas comment s'y prendre. Tout ce qu'il pouvait faire, c'était lui tendre une main maladroite et espérer que cela serait suffisant pour elle.

Mais Samara était forte, probablement plus forte qu'il ne le serait jamais. Déjà, elle repoussait ses tourments au plus profond de son être, changeant de sujet. Lenny mentirait s'il disait qu'il n'était pas nerveux à l'idée de cuisiner avec Samara. Mais s'il refusait d'effectuer chaque chose qui le stressait un tant soit peu, Lenny ne mettrait jamais le nez en-dehors de son appartement.

"Hmm... D'accord. Pour cuisiner, je veux dire. Il doit me rester de quoi confectionner quelque chose de basique. Rien de très délicat, développé ou diététique, je le crains."

Lenny peinait déjà à accomplir des mets simples, ce n'était pas pour se lancer dans quelque chose de plus élaboré et rater complètement son plat. Il sirota son verre, adressant un sourire timide à Samara alors qu'elle l'interrogeait sur sa vie, le club de lecture :

"Oui, j'y vais depuis un certain moment, désormais. Je n'ai pas raté une seule session. J'ai fait quelques connaissances. Et... Et il y a un auteur que j'aime tout particulièrement et qui y prend part aussi ! Mr Boyle m'a même signé mes livres, ainsi que ceux que j'ai commandé pour la bibliothèque du lycée ! Il est très gentil avec moi. Tous les membres du club le sont, en général."

Lenny n'avait pas de mauvais souvenirs liés au club. Pas de craintes. Pas d'appréhensions. Là-bas, il pouvait librement partager sa passion, même s'il veillait à laisser de la place pour les autres, à ne pas s'enfermer dans ses monologues. Personne pour lui dire que ce qu'il racontait n'était pas intéressant. Pour lui demander de se taire. Pour se moquer de lui.

"Et toi, cela ne t'intéresse pas ? Tu pourrais venir pour une séance d'essai, peut-être ? Voir si l'ambiance te plaît. C'est... C'est très calme. Apaisant. J'apprécie cela."

Lenny se gratta la nuque, hésitant, avant d'ajouter d'une voix embarrassée :

"Tu sais, je commence à apprendre à lire à voix haute. Je veux dire... A prendre le bon ton, à adopter le rythme approprié, ce genre de choses. On m'a proposé cette activité lors de mes ateliers d'habiletés sociales et je... je trouve ça vraiment intéressant. Je pourrais venir lire pour Killian de temps en temps, si... si tu es d'accord avec cette idée. Je... Je pense qu'il apprécierait. Je sais que, à son âge, j'aurais aimé que quelqu'un soit là pour faire cela pour moi."

Mais personne n'avait été là. Lenny avait passé la majorité de son enfance dans la solitude, à éviter les crises, la violence, à regarder sa mère s'enfoncer dans cette relation qui n'avait pas de sens, qui la blessait, qui la détruisait, mais à laquelle elle s'accrochait, avec la force du désespoir.

Il n'y avait pas de place là-dedans pour permettre à qui que ce soit d'accorder du temps à un petit garçon. Chercher à l'engager. Lui lire une histoire. L'aimer, tout simplement.

@ Invité

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Mer 4 Déc - 11:53
Il y avait tant de mondes, de réalités qui se côtoyaient sans jamais réellement se comprendre ! Samara vivait depuis sa naissance dans une bulle diamantée où tout semblait lui avoir été offert. Jamais elle n'avait eu à se soucier de quoique ce soit si ce n'était de ses égoïstes petits plaisirs, désirs. La santé lui avait été offerte, l'argent aussi. Elle vivait entourée de ces êtres qui, bien qu'ils ne la comprennent pas toujours, lui faisaient la grâce de la compter comme une amie. Quand bien même la femme se savait ne pas l'être vraiment. Parce qu'elle possédait cette chose, comme une tare congénitale ou un lourd handicap de myocarde, qui la rendait parfois presque indifférente aux gens et à leurs sentiments. Des amis ? Rares étaient ceux qui pouvaient se targuer de l'être ! Hypocrisie sociale qui voulait que les gens  se donnent l'accolade, s'embrassent et endossent des rôles amicaux mais, quand le besoin se faisait sentir... Quand le rose virait au gris qui était encore là ? Combien acceptaient d'entendre vos détresses sans vous écraser des leurs ? Combien tenaient assez à vous pour vous soutenir en pleine tempête et vous aimer sans jamais vous juger ? Si peu... Pour la brune ils se comptaient même sur les doigts d'une seule main... et encore. Mais comment aurait-elle seulement pu se plaindre quand, comme maintenant, elle se trouvait aux côtés de celui qui n'avait pas eu un centième de sa chance ? Oh, non ! Jamais Samara n'aurait l'indécence idiote de penser que Lenny était à plaindre ! Non, la vie ne lui avait pas donné les meilleures des cartes mais son ami, parce qu'il en était un, pouvait être fier de ce qu'il parvenait à faire de sa vie ! Courageux, il l'était bien plus que nombre de gens. Plus qu'elle-même aussi et d'ailleurs...

«  Je vois... »

Avait-elle dit quand l'homme s'était mis en charge de lui expliquer, à sa manière et avec ses mots,certaines de ces réactions que son fils avait et que, les ayant éprouvées lui-même, il ne comprenait que trop bien. Contrairement à elle qui, bien qu'elle se montra le plus ouverte d'esprit possible et attentive ne pouvait s'empêcher de souffrir de cette réalité qui continuait de lui échapper. Elle aimait Killian. Plus que n'importe quoi ou n'importe qui. Plus que sa propre vie et il n'y a rien, véritablement rien, qu'elle n'aurait été prête à faire pour lui. Pour le protéger et, enfin, parvenir à tisser un lien entre eux. Celui que, paradoxalement, l'enfant parvenait si bien à créer avec Andy ou Curtis. Pourquoi eux et pas elle ? Ses yeux qui, l'espace d'un moment, semblèrent se consteller de ces larmes qu'elle ne versa pas et ses lèvres qui, boueuses et tremblantes, confessaient

«  Je … Je suis perdue. Je m'étais toujours, naïvement il est vrai, imaginé que mon fils et moi saurions d'instinct nous comprendre, nous aimer. Mais cela fait des années que je réalise qu'il n'en est rien. J'aime Killy, ne te trompe pas ! Mais je me sens si … perdue ! Ce qu'il semble me refuser il le donne si naturellement à Curtis ! Que fait-il que je ne sache faire ? Suis-je donc une si mauvaise mère ? »

Elle avait fermé les yeux et soufflé son sentiment de perdition. Puis, laissant de nouveau apparaître l'océan de ses iris, elle avait regardé Lenny. Il était son ami. Il était aussi le modèle, l'espoir auquel elle se raccrochait quand, comme aujourd'hui, elle peinait à trouver le courage de continuer. Et y a-t-il plus terrible sentiment pour une mère que de se dire que sa progéniture serait mieux sans elle ? Qu'elle avait lamentablement échoué ? Opinant machinalement et inconsciemment de la tête devant les propos de son ami elle avait commenté, de sa toute petite et si fragile voix

«  Je comprends et je te promets de tenir compte de chacune de tes si judicieuses suggestions demain quand j'irai le voir. Lenny ? Je me demandais... Est-ce que tu penses que tu pourrais trouver un moment semaine prochaine pour m'accompagner au centre et nous accompagner mon fils et moi dans nos jeux ? Il t'aime énormément et je sais qu'il ne se troublera pas de ta présence. Et tu pourrais, si cela ne te met pas mal à l'aise, me guider ou me reprendre doucement si jamais je venais à avoir un geste malencontreux ? »

Elle sut, au moment même où la question avait franchi ses lèvres,que demander à Lenny de lui ouvrir sa cuisine était une mauvaise idée. De celles que l'on peut, sans peine, proposer mais pas à lui. Elle s'immisçait dans son univers sans même lui avoir laissé le temps de se préparer. Se mordillant devant la réponse, si gentille, de l'homme. Il faisait des efforts pour elle, cela était indéniable. Mais... Non, elle ne lui infligerait pas pareil bouleversement. Sans brusquerie, elle avait tendue sa main, paume ouverte, vers Lenny. Comme pour mieux lui permettre, à lui, d'y glisser la sienne s'il le souhaitait.

«  Oublies pour la cuisine je vais commander et nous nous ferons livrer. Que veux-tu manger ? »

Puis, quand il lui eut répondu et qu'elle ait pianoté sur son smartphone pour mieux trouver le Uber Eats le plus à même de satisfaire les appétits de son ami elle l'avait sagement écouté lui parler de son club de lecture. Elle aimait à le voir ainsi s'animer, parler avec une fluidité parfaite de ce qu'il faisait, ressentait. De ces progrès qui pourraient paraître infimes et dérisoires à ceux qui ne le connaissaient pas mais qui, à ses yeux à elle, étaient immenses. Comme elle le lui fit comprendre dans un sourire et de ces quelques mots.

«  Je suis tellement fière de toi ! C'est absolument génial ! Et je dois bien te dire que si la lecture est l'un de mes passe-temps préférés, mais ne le dis à personne cela ruinerait ma réputation de garce inculte, je me vois mal rejoindre un quelconque club. Tu me connais... Je ne suis pas la plus aimable en société. Mais, pour toi, je vais y réfléchir. Je t'accompagnerais même une fois si tu veux comme cela j'aurais le plaisir de t'entendre lire ! »

Puis alors qu'il lui proposait, comme en une réponse à sa demande précédente, de l'accompagner voir Killian elle avait souri et remercié de tout son cœur

«  Oui, je veux bien merci. Et nous pourrions en profiter pour déjeuner tous les trois ? »

@ Invité

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Jeu 5 Déc - 16:47
Lenny sentait que Samara avait du mal à le comprendre. A accepter, peut-être. Il ne pouvait pas la blâmer, elle essayait, ce qui n'avait pas été le cas de la plupart des adultes qui avaient fait partie de sa vie lorsqu'il avait eu l'âge de Killian. Il aurait aimé avoir quelqu'un qui aurait tenté de faire partie de son monde, même si cela aurait été loin d'être facile.

Au lieu de cela, il avait dû regarder sa mère se perdre et se détruire dans une relation abusive, son père leur faire du mal de bien des manières, dans un amour qui n'en portait guère que le nom. Personne n'avait essayé de l'aimer réellement. De le comprendre. Personne.

"Peut-être pourrais-tu en discuter avec Curtis ? Je suppose que tu l'as déjà fait, mais je crois que ce sont des choses dont il faut parler régulièrement. Et aborder aussi franchement que possible. Que tu en parles avec Killian, aussi. Tu auras peut-être l'impression qu'il ne t'écoute pas ou ne te comprend pas, mais... mais il faut que tu lui accordes le bénéfice du doute."

La plupart des gens tendaient à assumer que Lenny était stupide, lorsqu'ils venaient à le connaître en premier lieu par son diagnostic. Ils étaient plus prompts à parler de lui en sa présence, sans s'adresser directement à sa personne. Ou à parler à quiconque l'accompagnait, comme s'il était incapable de répondre tout seul.

Killian n'était peut-être pas toujours verbal, mais ce qu'il avait à dire et ce qu'il tentait de faire comprendre étaient importants. S'il sentait que sa mère le traitait avec le respect qu'il méritait, qu'elle le croyait en mesure de la comprendre, il s'ouvrirait probablement plus facilement à elle.

"Killian aura ses mauvais jours. Si Curtis était là avec toi à ce moment précis, il y a de fortes chances que Killian réagisse tout aussi violemment à son approche. Ce n'est pas contre toi ou qui que ce soit d'autre. C'est juste... compliqué. Progressivement, cela devient plus facile d'y garder sous contrôle ou... ou d'y cacher jusqu'à être dans un endroit sécurisé pour laisser exploser cela, mais cela reste compliqué."

Une fois, il avait laissé Samara le voir ainsi. Ou, plutôt, il n'avait pas eu d'autre choix que de l'obliger à assister à ce triste spectacle.

C'était une journée ordinaire, bien que fatigante. Lenny arrivait tout doucement au bout de sa corde et il était probablement temps pour lui d'inviter Samara à revenir plus tard. Ce qu'il détestait faire, mais qu'il s'efforçait malgré tout d'accomplir, parce que Samara comprenait, parce qu'il ne voulait pas lui mentir, dissimuler son malaise.

Et puis il y avait eu cet appel. Lenny détestait le téléphone, mais il avait préféré décrocher, par crainte d'ignorer un appel important. Et la voix de son père s'était faite entendre. Son père qui était en prison et qu'il n'avait plus vu ni entendu depuis des années. Son père qui avait obtenu son numéro et lui demandait de plaider pour lui, pour obtenir une réduction de peine.

Il n'avait pas pu raccrocher. Le portable était tombé de ses mains et il s'était mis à hurler. Hurler à s'en arracher les cordes vocales. Progressivement, ses mains s'étaient attaquées à ses cheveux, à ses tempes, frappant, arrachant, alors qu'il criait sans contrôle. Ses souvenirs de cet instant précis étaient confus, mais il se rappelait de l'après. De ce moment où il s'était calmé, épuisé, incapable de parler et où elle avait été là. Pour lui.

Elle l'avait vu comme ça et n'avait pas fui. Elle était restée. Comme elle serait là pour Killian. Lenny avait confiance en Samara pour cela. Il croyait en elle.

"Tu... Tu n'es pas une mauvaise mère, Samara. Tu fais ce que tu peux, de ton mieux. C'est déjà beaucoup."

Lenny lui adressa un sourire qui se voulait rassurant. Il considéra sa proposition sans grande hésitation, même si sa présence au centre le mettait mal à l'aise. Il avait l'impression d'être immédiatement diagnostiqué par la majorité du personnel qui y travaillait, d'être considéré de ce regard médical bien différent de celui qu'ils offraient à Samara.

Il savait que, dans d'autres circonstances, il aurait pu finir là-bas. Et il n'était pas toujours certain du bien-fondé de certaines de leurs méthodes, de certains de leurs buts. Lenny avait parfois l'impression qu'ils privilégiaient l'idée que leurs patients aient l'air "normal" plutôt qu'ils soient heureux et à l'aise dans leur peau.

Mais il viendrait. Pour Samara. Pour Killian. Et peu importe ce qu'ils pouvaient tous penser, Lenny n'essaierait pas d'être autre chose que ce qu'il était. Pas en présence du garçon. Il avait donc hoché la tête :

"Je viendrai. Je suis relativement libre toute la semaine et je peux annuler s'il y a quelque chose. J'aurais simplement besoin d'être prévenu à l'avance. Un ou deux jours avant, de préférence. Cela me laissera également le temps de lui préparer un petit cadeau. Je suis tombé sur des objets anti-stress particulièrement efficaces et je pense qu'il pourrait les apprécier."

Lenny essayait d'être plus à l'aise avec le fait de les utiliser en public, mais le regard des gens se posait naturellement sur lui et il se sentait plus anxieux encore. Il savait qu'il pourrait en faire usage en compagnie de Samara sans crainte, mais il n'en ressentait pas le besoin, malgré son anxiété initiale. En sa compagnie, il se sentait... bien, tout simplement.

Il avait eu un léger mouvement de recul lorsque Samara avait tendu la main vers lui, malgré ses précautions. Embarrassé par sa réaction, il hocha silencieusement la tête, suggérant une pizza, avant d'approcher ses doigts de la paume de son amie, avec hésitation.

Lenny décida finalement de ne pas la toucher, malgré cette envie qu'il avait ressenti d'être à son contact. Parce que cela serait probablement trop pour lui et pas assez pour elle. Parce qu'il entendait la façon dont elle parlait de Curtis et doutait qu'elle puisse un jour le voir comme elle le voyait lui.

Il fut soulagé de pouvoir changer de sujet, penser à autre chose, parler de son club, de sa nouvelle passion pour la lecture à voix haute. Il fut enchanté qu'elle accepte sa proposition, déconcerté lorsqu'elle lui suggéra un déjeuner.

Non pas qu'il trouvait l'idée absurde, il ne s'y attendait simplement pas. Il pencha la tête sur le côté, considérant son offre, avant d'opiner du chef. Il était rare qu'il refuse quoi que ce soit à Samara, de toute façon.

"Bien sûr. Si tu as un lieu en tête, je pense qu'il serait mieux que tu m'en fasses part avant. A Killian aussi. Avec un peu de chance, il sera possible de trouver un menu en ligne et de choisir avant. Oh, il faudra probablement prévoir plusieurs choix, au cas où le plat en question ne puisse être préparé le jour même... Cela peut sembler bête, mais c'est difficile d'accepter un petit changement lorsque tout est planifié."

Et pourtant, c'était plus rassurant que de se rendre quelque part sans avoir prévu quoi que ce soit. S'il le pouvait, Lenny aimait à choisir ce qu'il allait commander avant d'être sur place. De cette manière, il savait exactement ce qu'il allait dire au serveur lorsqu'il viendrait à lui et prenait moins de risques de se tromper dans ses mots ou de commander quelque chose qu'il n'aimait pas parce qu'il avait été pris au dépourvu.

"Oh, pendant que j'y pense..."

Lenny s'extirpa de son siège, ouvrant ses placards. Il sortit un casque anti-bruit, taille enfant, qu'il tendit à Samara, un sourire maladroit se dessinant sur ses lèvres :

"J'ai pris cela pour Killian. Il est réglable et atténue le bruit. Cela ne l'empêchera pas de t'entendre si tu t'adresses à lui. Cela rend juste les choses plus... confortables. Supportables. Il pourra le porter, quand nous déjeunerons ensemble. Les restaurants sont toujours tellement bruyants, entre les cliquetis des couverts, les conversations aux alentours, le vacarme en cuisine..."

S'il appréciait ce genre de propositions, Lenny était vite épuisé par la chose. Il sortait généralement du restaurant le regard hagard, répondant aux questions avec quelques secondes de décalage, cette impression d'être littéralement à l'extérieur de son propre corps, le manipulant maladroitement comme un marionnettiste le ferait de son pantin.

Laissant Samara s'emparer de l'objet, il ramena ses mains à lui, ses doigts tapotant son torse dans un rythme connu de lui seul. Lenny ne put s'empêcher de douter. Est-ce qu'il en faisait trop ?

Peut-être que Samara n'apprécierait pas l'idée, qu'elle estimerait que Killian ne pouvait pas se reposer sur ce genre d'objets, qu'elle se sentirait mal à l'aise à l'idée que Lenny se montre aussi intrusif vis-à-vis de son fils... Peut-être devinerait-elle même le genre de sentiments qu'il pouvait éprouver pour elle. Qu'elle le trouverait ridicule. Pathétique. Comme si elle pouvait réellement s'intéresser à quelqu'un comme lui, quand elle pouvait avoir tous les Curtis du monde...

"Hmm... Tu n'es pas obligée de... de le prendre. Je pensais juste que cela pourrait aider Killian et... et..."

La sonnerie retentit soudainement, interrompant Lenny dans ses paroles embrouillées. Ses mains se plaquèrent brusquement sur ses oreilles, une expression grimaçante se dessinant sur son visage alors qu'il enfonçait ses ongles dans la peau. Il savait que c'était le livreur, qu'il était supposé lui ouvrir la porte, mais il ne pouvait pas bouger. Tout ce qu'il pouvait faire, c'était supplier silencieusement Samara de le faire pour lui.

Lenny se détestait lorsqu'il était comme ça. Ce n'était qu'une stupide sonnette. Mais il était déjà nerveux et mal à l'aise et ce vacarme soudain ne l'avait pas aidé à se sentir à l'aise. Se recroquevillant sur son siège, détachant progressivement ses mains de ses oreilles, Lenny attendit le retour de Samara, les joues rouges, la honte l'étreignant malgré lui.

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Mer 22 Jan - 15:30
Son corps longiligne qui s'était redressé et qui, pendant quelques secondes, avait arpenté le sol de cet appartement où, comme si souvent lorsqu'il s'agissait de son fils, elle aimait autant à venir chercher des conseils qu'à se réfugier. Parce que s'il existait, sur cette fichue planète qui n'en finissait pas de tourner à l'envers, une personne capable de comprendre son enfant mieux que toute autre, c'était bien Lenny... Celui qu'elle couvait de son presque plus tendre regard alors que, consciente de ce que son agitation pouvait provoquer chez lui, elle revenait s'asseoir sagement à ses côtés et s'excusait à mots mimés.

« Tu veux savoir le pire ? Curtis parvient à faire des merveilles avec Killian ! Il arrive là où, moi, j'ai toujours la pire des impressions d'échouer... » sa tête qui s'abaissait, comme bien trop lourde, et qu'elle prenait entre ses mains pour mieux la secouer, tenter de refouler ces larmes qu'elle sentait bien trop lui monter aux yeux « Cela semble si naturel entre eux... Peut-être parce que ça l'est ? Peut-être que je suis la seule à ne pas comprendre mon propre enfant ?! »

Et cette larme unique qu'elle essuyait d'un revers las de la main avant que de se raccrocher à ces paroles que son ami lui offrait et dont elle ne savait plus même si cela lui faisait du bien ou du mal. Comme si les mots, ceux dont elle savait si bien se jouer quand elle le souhaitait, lui paraissait là et maintenant bien nébuleux. Et peut-être était-ce justement là son plus grand problème et la plus grande force de celui dont parlait Lenny. Amusant d'ailleurs de voir comment son ami, sans même avoir jamais encore rencontré l'homme qui faisait battre la chamade au cœur de la brune, sentait si bien les choses... L'incluait déjà dans leurs vies, au petit et à elle... Et, amenait à ses lèvres fatiguées un éclatant et bien doux sourire.

« Quand Killian ne va pas bien... Quand il se renferme sur lui-même au point que je me sente dépassée et inutile... C'est vers toi ou Curtis qu'il se tourne spontanément. Avec lui il est... » ses joues s'empourpraient d'un coup alors qu'elle s'entendait murmurer dans un soupir presque alangui « Tu sais que l'autre soir, alors qu'ils jouaient tous les deux... Ou plutôt quand Curtis jouait et Killian l'observait... Mon fils a posé sa main sur la sienne et murmuré un mot que je n'oublierai pas de si tôt... Papa... Il l'a appelé Papa... » son visage qui se relevait enfin, comme éclairé par ces sentiments qu'elle n'assumait alors pas le moins du monde mais qui transpirait dans chacun de ses mots suivants « Je crois que c'est le plus belle chose que je l'ai jamais entendu dire... Plus beau encore que lorsqu'il m'a appelée Maman pour la première fois... »

Oh douce confession qui, pendant une poignée de secondes, laissa sans voix celle qui semblait bien loin de cet appartement. Loin de cet homme, cet ami qu'elle n'avait jamais considéré comme différent contrairement à cette société qui ne cessait de le stigmatiser pour ce qu'il avait de spécial. Non, il n'était pas comme tout le monde ! Et alors ? Lenny étaient de ces êtres qui surpassaient les autres à leur manière car, lui, avait parcouru un bien long chemin pour parvenir à accepter puis à assumer sa nature si particulière. Et elle l'admirait, pour cela et la manière si courageuse qu'il avait de mener son existence. Quand, à de très rares occasions, elle l'avait vu victime de l'une de ses crises, elle n'en avait pas même eu peur. Parce qu'elle l'aimait, l'adorait bien plus qu'elle ne parvenait d'ailleurs à le lui montrer, le lui prouver comme pourtant elle aurait tant aimé pouvoir le faire. Quand, comme à cet instant, elle tentait d'avoir pour lui un geste tendre, elle sentait presque son appréhension, son rejet de ce témoignage. Et elle ne s'en vexait pas, comprenait sans pour autant parvenir à se l'expliquer. Oui, lui et elle vivaient dans deux mondes si différents qu'ils pouvaient en sembler opposés mais, pourtant, ils s'étaient trouvés. Et elle en était la plus heureuse qui soit !

« Je te laisserai choisir le jour. Pour que nous puissions aller, ensemble, voir Killian au centre et pour le déjeuner. » puis, prenant dans un sourire radieux le cadeau pour le petit, Samara avait esquissé un mouvement comme si elle eut voulu embrasser avec effusion celui devant lequel, pourtant, elle s'immobilisa et préféra agiter doucement la main . Pour mieux respecter son espace, pour ne pas le brusquer. « C'est une excellente idée et je suis sûre que Kiki en sera aussi ravi que je le suis ! Merci Lenny c'est un superbe cadeau ! Et je sais déjà que cela lui sera des plus utiles ! » un léger soupir alors qu'elle songeait à cette journée au stade qu'ils avaient passé avec son fils, Andy et Curtis. « Nous l'avons emmené voir un match de baseball. Et tout c'est admirablement bien passé, bien plus grâce à Curtis et à son neveu qu'à moi mais... Mais Terry s'est imposé et Kiki a fait une crise d'angoisse terrible ! Le pauvre Curtis a eu un mal de chien à le calmer.. »

Ses bras qui se croisaient, son corps qui se repliait sur lui-même comme à chaque fois qu'elle laissait son esprit divaguer vers le père violent de son enfant. L'homme qu'elle avait tant aimé qu'elle lui avait laissé l'occasion de presque les détruire son fils et elle. Celui que, aujourd'hui, elle entendait oublier. Ses joues rosies, ses lèvres qu'elle mordilla un instant avant que de demander, timide comme elle ne l'était que rarement

« J'ai peur Lenny... Terry veut obtenir la garde du petit... Killian, lui, s'attache tant à Curtis que … Et il se passera quoi le jour où Curtis décidera qu'il ne veut plus de lui... ou de moi d'ailleurs ... » puis un rire qui sonnait faux alors qu'elle demandait, épuisée « Pourquoi fallait-il que je tombe amoureuse du meilleur ami de mon ex hein ? Pourquoi ? » et son regard qui s'ancrait à celui de Lenny « Dans une autre vie c'est peut-être de toi dont je serais tombée amoureuse, qui sait ? »

Mais la sonnette, tonitruante de la porte d'entrée résonna alors, coupant non seulement court à leur conversation mais plongeant son ami dans un état comme second. Alors qu'elle le voyait se recroqueviller sur sa chaise elle s'était précipitée pour ouvrir et, d'humeur bougonne, régler le livreur. Des plats qu'elle ramenait, et déposait sur la table alors que, faisant exprès de ne pas gêner plus que cela encore son ami, elle faisait mine de ne pas lire sa gêne ou d'avoir pour lui des gestes qui seraient nés des meilleurs des sentiments mais l'auraient sûrement plus encore bousculés. Doucement, et en lui souriant, elle avait posé les plats sur la table et, s'asseyant sagement face à l'homme elle avait posé ses coudes sur la table et simplement conclu

«  La personne qui aura la chance d'être aimée de toi sera bien chanceuse. Je le pense Lenny ! Tu es un homme exceptionnel et je me sens chanceuse de t'avoir dans ma vie moi aussi ! » puis, montrant leur repas «  Tu me rejoins ? Ca va refroidir et je ne sais pas pour toi mais j'ai une faim de loup ! »

Et oublions l'incident de la sonnette mon ami... Cela n'est rien... Je suis là...

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Mer 22 Jan - 19:18
Lenny aurait aimé avoir les bonnes paroles pour Samara. Savoir exactement quoi lui dire, comment la réconforter, comment l'aider à se sentir mieux. Mais il était perdu. Perdu devant une détresse qu'il avait du mal à appréhender. Il n'avait jamais eu d'expérience comme celle que Samara décrivait.

Sa mère n'avait jamais spécifiquement cherché à être "proche" de lui et il préférait ne pas parler de son père. Quant à son tuteur, c'était... compliqué. Lenny l'appréciait, c'était certain, et il lui en était reconnaissant.

Mais il avait quinze ans lorsqu'il l'avait rejoint et il y avait toujours eu cette légère distance entre eux, celle qui existait entre deux êtres qui n'auraient jamais dû cohabiter et se retrouvaient pourtant à vivre ensemble et à faire du mieux qu'ils le pouvaient.

Lenny avait la sensation que son tuteur le considérait comme une "responsabilité" plus qu'autre chose et cela l'empêchait d'éprouver pour lui quelque chose de semblable à ce que Samara décrivait du lien partagé entre Killian et Curtis. Lenny se mordit la lèvre, avec l'impression qu'il était sur le point de marcher sur des oeufs, avant de souffler d'une voix hésitante :

"Est-ce que tu en as parlé avec Killian ? Est-ce que tu lui as demandé s'il était content de te voir, de passer du temps avec toi ? Sans pression aucune, juste... pour ouvrir le dialogue. Peut-être qu'il te répondra simplement oui, peut-être qu'il ne dira rien. Ou peut-être qu'il te dira quelque chose comme "J'aime être avec toi, mais j'ai du mal à supporter tes câlins", par exemple."

Lenny frotta ses jambes dans un geste nerveux. Il n'était pas doué pour ce genre de conversations. Il avait toujours peur de dire la mauvaise chose, sans compter que la détresse de Samara rejaillissait directement sur lui, comme s'il l'absorbait malgré lui. Il aurait voulu avoir les mots pour elle. Que ce soit aussi simple pour lui de lui parler que cela devait l'être pour Curtis...

"C'est bien. C'est bien qu'il voit un père en Curtis. Et que Curtis accepte cela de sa part. C'est... C'est important. Avoir des parents qui vous aiment et qui vous soutiennent. C'est important."

Lenny se rappelait de ces moments où il retournait de l'école pour trouver de nouvelles blessures sur le corps de sa mère, des cadavres de bouteilles éparpillés. Il nettoyait sous les paroles venimeuses de son père, il soignait sa mère parce qu'elle n'était pas en état de le faire toute seule et qu'il avait appris, tant bien que mal, à s'en charger. Et il se sentait seul. Tellement seul.

Killian méritait mieux que cela. Et il aurait mieux que cela. Lenny ne souhaitait que le meilleur pour le garçon, mais il se sentait impuissant à lui apporter quoi que ce soit. Il n'était qu'un ami de Samara. Un simple ami. Que pouvait-il faire pour l'aider ? Le soutenir ? L'accompagner ?

Chassant ces pensées-là, Lenny avait hoché la tête lorsque Samara lui proposa de choisir le jour pour aller rendre visite à Killian au centre et manger au restaurant. C'était peut-être ce qu'il y avait de mieux à faire. Lenny s'arrangerait pour prévenir Samara suffisamment à l'avance afin qu'elle puisse préparer Killian à l'idée. Lenny doutait qu'il réagisse bien à une surprise, lui-même n'était pas très doué pour les gérer...

Une nouvelle fois, les mots lui échappèrent et ce n'était pas uniquement dû à la sonnette et son bruit strident ou à l'anxiété qu'il avait éprouvé en faisant ce cadeau à Sam pour son fils, ce qu'elle semblait avoir bien pris de sa part.

Il y avait trop à analyser, trop à encaisser. Terry qui voulait reprendre la garde de Killian et Samara qui... qui lui confiait qu'elle aurait pu tomber amoureuse de Lenny dans une autre vie... Lenny ne savait plus à quel Saint se vouer et il se mura dans le silence, recroquevillé, honteux et perplexe. Il ignorait que répondre à Samara lorsqu'elle lui affirmait que la personne qui serait aimée de lui serait chanceuse.

Parce que cette personne, c'était elle, parce que, même si Lenny finissait par nourrir des sentiments pour un ou une autre, il savait qu'il finirait irrémédiablement par reproduire les mêmes schémas, encore et encore, incapable de se défaire de l'image de "l'amour" que ses parents lui avaient démontré. Difficilement, il trouva la force de se déplier et de quitter son siège pour rejoindre son amie. Il n'avait plus très faim, à dire vrai...

Regard baissé, fixé sur sa pizza qu'il ne parvenait pas à entamer, Lenny cherchait ses mots, tentait de retrouver son calme. Tant bien que mal, il y parvint, griffant nerveusement la paume de ses mains, se focalisant sur la douleur pour éclipser le reste. Les paroles se glissèrent sur ses lèvres, peu à peu, mais il était toujours incapable de lever la tête vers Samara, ne serait-ce que pour voir son visage :

"Terry ne peut pas avoir la garde. Il ne doit pas. Je ne laisserai pas cela arriver. S'il s'approche de Killian, je... je..."

Lenny ne parvint pas à finir sa phrase, poings serrés, frémissants. Il ne pouvait s'empêcher de se voir dans le fils de Samara. De s'imaginer à sa place, retournant sous la garde de son père, revenant à la souffrance, aux insultes, aux coups, à la négligence pure et simple.

Il ne savait pas ce qu'il ferait, si Terry était en face de lui, s'il tentait d'approcher Killian. Lenny n'avait été violent qu'une seule fois dans sa vie, mais il savait qu'il était prêt à laisser éclater cette part de lui qu'il refoulait furieusement, si cela venait à arriver...

Lenny se balança nerveusement sur sa chaise, glissant ses doigts à ses lèvres pour ronger ses ongles. Rester calme... Il devait rester calme... Ca ne servait à rien de s'énerver. Terry n'était pas là. Il ne pouvait rien faire. Calme. Calme. Calme.

"J'aurais été le plus heureux des hommes dans cette autre vie. Mais je ne pense pas que l'inverse aurait été vrai."

Lenny n'aurait probablement pas dû se montrer aussi franc, mais il ne pouvait pas s'en empêcher, encore moins dans l'état d'agitation qui était le sien. Il peinait à imaginer Samara heureuse à ses côtés. Elle rejoindrait probablement la longue liste des partenaires qui avaient fini par le quitter, parce que ces personnes méritaient mieux que lui et la vie qu'il leur offrait. Au moins ne serait-elle pas de ceux qui l'avaient blessé, humilié, manipulé...

Malgré son manque d'envie, Lenny entreprit de manger sa pizza, l'estomac noué, le coeur battant à vive allure. Il avait du mal à comprendre ce qu'il ressentait exactement, trop d'émotions de manière trop intense, mais il savait qu'il ne voulait pas faire payer à Samara son hypersensibilité. Qu'elle avait besoin de lui. Alors, il fit l'effort de lever les yeux vers elle, jouant avec sa pizza découpée du bout de sa fourchette :

"Il ne peut pas retourner avec son père. Il ne peut pas. Il ne doit pas retourner auprès des gens qui lui font du mal. Killian a une famille qui l'aime. Ils n'ont pas le droit. Ils n'ont pas le droit."

Lenny se répétait, regard hanté, perdu dans ses propres souvenirs. Il ne souhaitait à personne ce qu'il avait vécu. Et surtout pas à Killian. Il méritait mieux. Samara méritait mieux. Ils méritaient une vie belle et douce, en compagnie de l'homme qui avait réussi à se faire sa place au sein de leur petite famille.

"Je le protégerai. Killian. Je le protégerai. Je ferai tout ce qu'il faut pour ça. Et je te protégerai aussi."

Derrière une certaine forme de naïveté, il y avait une froide détermination. Lenny n'avait jamais rencontré Terry, ne savait pas quelle sorte d'homme il pouvait être. Mais Killian ne voulait pas de lui dans sa vie, pas plus que Samara, et cela lui était suffisant. Il n'avait pas besoin d'en savoir plus.

Ils avaient le droit au bonheur, eux tous. Et si Lenny devait sacrifier toute chance d'être lui-même heureux pour le leur offrir, il le ferait sans hésiter.

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