Je suis né dans une banlieue de Paris, un quartier pas très bien famé sans pour autant être dangereux. Je n'ai pas trop aimé grandir là-bas pour tout vous dire. J'avais l'impression que je ne pourrais jamais évoluer, que je devrais me contenter d'être menuisier comme mon père. J'ai eu de l'amour quand même en grandissant. On n'était pas très riche mais pas pauvre non plus. La table était toujours pleine aux heures des repas. Et je m'entendais plutôt bien avec ma soeur. Je ne sais pas trop comment décrire les émotions que j'avais à l'époque mais les souvenirs que j'en garde ne me procure aucune joie, ni aucune tristesse d'ailleurs. Je suppose que j'étais heureux quand même à l'époque. Je n'avais pas de quoi me plaindre...

Puis, j'ai grandi, comme tout le monde. J'ai été au collège, puis au lycée. J'ai rencontré des filles avec qui j'ai eu des aventures. C'était sympa. Puis, j'ai fini par rencontrer mon premier amour, la seule qui a eu une place dans mon cœur. C'était étrange au début car nous étions tout à fait l'opposé l'un de l'autre. Plutôt populaire à l'école. Enfin disons que j'avais des amis quoi et comme je faisais partie de l'équipe de foot... Elle était une nerd comme on dit de nos jours. Pourtant, elle m'a flashé dans l’œil. Alors on a commencé à se fréquenter. Ça a duré trois ans. Une belle histoire d'amour. Je pensais faire ma vie avec elle. Je nous voyais déjà avec nos trois enfants, dans une grande maison à la campagne. Mais la vie s'en est mêlée...

A 19 ans, j'ai été victime d'une arnaque. J'ai mis du temps à découvrir comment tout s'est passé et ce n'est qu'il y a quatre ans que j'ai enfin obtenu des réponses d'ailleurs. Un jour, les policiers sont venus m’arrêter, me mettant des chefs d'accusation sur le dos. J'étais suspect d'un meurtre. Une personne que je ne connaissais pas d'ailleurs. Ils ont retrouvé mon sang sur la scène de crime. Je n'ai pas arrêté de crier mon innocence pendant des années mais personne ne m'a cru, pas même ma famille, pas même Lola. Ils sont venus me voir les premiers mois en prison mais leurs visites se sont raréfiés au fil du temps. Ma bien-aimée m'a cru coupable elle aussi (même si maintenant, je comprends pourquoi). Rapidement, elle m'a quitté pour un autre homme. Je me suis senti anéanti, comme si le monde venait de s'écrouler sous mes pieds.

J'ai pris une peine de 20 ans. Vous imaginez ? Toute ma jeunesse et mes meilleures années données à titre gratuit alors que je n'ai rien fait. Puis un jour, à 25 ans, on m'a annoncé qu'on allait me transférer dans un autre département. Allez savoir comment, nous avons eu un accident de la route lors du transfert. C'est là que je me suis échappé. J'ai, avec beaucoup de chance, réussi à fuir aux États-Unis, grâce à l'aide de ma meilleure amie, celle qui ne m'a jamais lâché : Charlotte. Ne me demandez pas comment on a fait, je n'y crois pas moi-même. J'ai falsifié mon CV, me suis écrit de fausses lettres de références et j'ai été pris en temps que professeur de sport à l'université d'Austin.

Trois années passèrent, au cours desquelles ma vie fut synonyme d'aventures en tout genre. La première fut plutôt tranquille. Puis, j'ai rencontrai une femme, une policière, qui a tenu un rôle important. J'ai eu la chance de gagner sa confiance, et elle m'a crû, même s'il a fallu du temps pour ça. Quand on a retrouvé ma trace, elle a juste eu le temps de m'accuser d'un vol, pour empêcher mon expatriation en France. Là-bas, j'aurais péri. Par un autre miracle, j'ai donc fini par être jugé aux États-Unis après quatre mois d'horreur à subir les pires tortures en prison, tortures dont je me remets toujours pas des années après.

La policière dont je vous parlais m'a aidé à prouver mon innocence, faisant un voyage en France pour élucider le mystère. C'est là que j'ai appris toute la vérité. Mon père avait commis une erreur avec un bordereau de livraison d'un cargo, dans la boite d'import-export dans laquelle il travaillait à l'époque. Voulant corriger un bon qui avait l'air suspect, il a touché aux mauvaises personnes, empêchant un trafic d'esclave important, faisant perdre à ces gens des millions d'euros... Et c'est sur moi que la vengeance est tombée... Moi, qui n'avais rien demandé. Le pire, c'est que mon premier amour les a aidé à me piéger... Gâchant ainsi ma vie entière...

A la suite du procès, j'ai été indemnisé. J'ai touché une fortune, qui ne m'a jamais réellement servi pour tout dire, car ça ne remplacera jamais une jeunesse volée... Il a fallu du temps pour réussir à me reconstruire et quand je commençais enfin à voir le bout du tunnel, en couple avec une jeune femme remarquable, Heather, il a fallu qu'on m'enlève tout de nouveau. J'allais la demander en mariage. Elle était aussi brisée que moi, Heather et c'est sans doute pour ça qu'on s'est tout de suite si bien entendu. On a appris à refaire confiance et à réappréhender le contact humain.

Mais ils m'ont retrouvé. Les menaces de mort ont commencé à s'accumuler dans ma boite aux lettres, ainsi que les coups de téléphone anonymes. Un beau jour, j'ai compris que j'étais suivi et ça a été le truc de trop. En 24 heures, j'entrais dans le programme de protection des témoins. On ne m'a pas laissé le temps de prendre mes affaires, ma vie en dépendait. Et surtout, je n'ai pas pu dire au revoir à Heather. L'agent qui assure ma protection m'a promis de lui remettre une lettre de ma part, mais on m'a interdit de la contacter directement, sans quoi ça pourrait la mettre en danger. Je n'ai plus qu'un espoir : qu'elle lise ma lettre et accepte d'entrer dans le programme de protection de témoins, elle aussi, me rejoignant ainsi à New-York, le seul moyen qu'on puisse se retrouver.