Je ne sais très franchement même pas comment j'ai pu louper le déménagement d'Adrian dans l'immeuble. Si j'avais su exactement quand c'était, je l'aurais aidé à s'installer, puisqu'il avait rejoint le même immeuble que moi. Mais avec tout ce qui se passe en ce moment, le boulot, le club que j'ai lancé au lycée, devoir m'occuper seul d'Adam, j'ai la tête un peu partout, et j'ai réussi à passer à côté de l'info. Ou alors j'ai tout simplement oublié, ce qui peut être le cas. En tout cas, peu importe, je compte bien me rattraper. Il m'a proposé de passer chez lui, mais je lui ai demandé de faire l'inverse et de venir manger une pizza à l'appart. Je veux pas qu'Adam s'ennuie, après tout, il n'a que cinq ans, et si Adrian vient chez nous, au moins, il aura tous ses jouets et peut faire ce qu'il veut. J'ai donc passé mon après-midi à faire du ménage, chose que j'aime plutôt bien faire. Parce que généralement, quand je passe le balais ou la serpillère, c'est en chantant à tue tête. Tout ce que je fais, c'est en chantant à tue tête de toute façon. Et c'est vrai qu'à aucun moment, lors de nos conversations au téléphone, je ne lui ai parlé de ce qu'il s'est passé avec Janet. Ou du moins, de ce qu'il ne s'est pas passé. Adrian s'attend probablement à venir manger avec son couple d'amis, et je sais que je vais devoir lui expliquer ce qu'il s'est passé cet automne. Mais je chasse ces pensées de mon cerveau, tente de penser à autre chose en attendant mon ami. De toute façon, il faut bien que j'accepte que s'est bel et bien arrivé, mais de toute façon, je sais au fond de moi que c'est temporaire. Elle a besoin d'air, besoin d'un break. Elle reviendra.
C'est vêtu de ma plus belle chemise à fleurs, parce que oui, je me suis changé même si pour le coup c'est pas forcément pour l'occasion, mais parce que faire du ménage me met toujours en nage, que je bonds du canapé lorsque la sonnette retentit. Adam court dans le salon, pour observer qui était à la porte alors que j'ouvre, un large sourire sur mon visage.  « Heyyyy ! » je m'écris, la voix chantonante. « Mon nouveau voisin préféré ! » Je m'écarte de la porte pour laisser mon ami entrer dans l'appartement, Adam est derrière moi, il sautille comme un kangoroo à l'idée de revoir Adrian.

Sa valise qui ne demande qu'à être défaite, Adrian est assis sur son canapé, sa tasse de café dans la main, en train d'attendre désesperement que ça se fasse tout seul. Mais visiblement ça n'a pas envie de se faire tout seul et ça le désespère. Il s'allume une cigarette, espérant intensément que ça se fasse tout seul mais non. Jamais. Il ne peut pas claquer des doigts, il ne peut pas parce qu'il n'a pas de pouvoirs magiques. Une main qu'il passe dans sa nuque et il se lève, à défaut d'avoir la motivation, il lance une lessive qui, avec un peu de chance, sera fini quand il reviendra de chez Elior. Elior son voisin. Il ne sait pas où il avait vécu toutes ces années pour se rendre compte seulement maintenant que son ami était dans le même immeuble que lui, mais soit. C'est fait, il le sait. Il attrape le cadeau qu'il a fait pour Adam, essaie de l'emballer mais remballe vite son idée en buvant une grande gorgée de café avant de regarder l'heure, il va devoir y aller. Il passe par la salle de bain, enfile une chemise et un jean noir, une paire de chaussures habillées pour ne pas passer pour un plouc aux yeux de son ami et il sort de son appartement, avant d'aller devant celle de son ami. Il enserre le paquet pour Adam dans ses mains et il sourit quand la porte s'ouvre « Heyyyy, good to see you ! » prononce t-il avant de voir Adam, il s'abaisse et écarte ses bras pour que le petit garçon vienne s'y blottir avant de le faire tourner dans le couloir pour finir par rentrer dans l'appartement avec Adam toujours dans ses bras qui rit aux éclats. « Moi qui pensait que ta femme m'accueillerait les bras grand ouvert, je suis presque déçu. Elle bosse ? » demande t-il, ne se doutant pas une seule seconde de la bombe qu'il risque de déclencher. « On commande pizzas alors ? Je paye ! Ça me fait plaisir. » Et il repose Adam avant de lui tendre le paquet « Tiens, c'est pour toi, Tonton te ramène ça de Londres ! »

Voir Adrian et Adam aussi proches, ça me fait plaisir. J'peux vous dire qu'il m'en avait parlé le petit de Tonton Adrian pendant qu'il était absent, et je suis bien content de le voir aussi heureux. Depuis que Jay n'est plus là, il m'en parle souvent, me pose beaucoup de questions auxquelles je n'ai pas de réponses, et elle est dans chacun de ses dessins. Il a beau n'avoir que cinq ans, je sais qu'il comprend un minimum de ce qu'il se passe autour de lui. J'ai beau essayer de lui dire qu'elle va venir, il reste toujours aussi triste. Moi aussi, d'ailleurs. L'absence de Janet est le centre de la première remarque d'Adrian, et je réponds pas tout de suite. Je suis sûr que mon visage a pâlit, que mon sourire s'est effacé, et pour une fois dans ma vie, je n'ai plus les mots. Je me souviens de la fois où j'étais rentré du travail et avais trouvé la porte grande ouverte, avec la voisine qui veillait sur Adam. Où je me mis à hurler quand je vis tiroirs de Jay vides et la photo de notre mariage sortie du cadre. Adam et moi on avait pleuré à deux, assis à terre sur le tapis du salon, le même tapis sur lequel mon prince est en train d'ouvrir son cadeau à ce moment-là. Je reviens à la réalité et tente un sourire. « Ah, oui, les pizzas. Pas de soucis, on les commandes. Euh, tu viens avec moi dans la cuisine chercher à boire ? » Je n'attends même pas sa réponse, et file ouvrir le frigo pour sortir un soda frais et deux verres. J'aurais bien bu un bon shot de tequila, pour en parler, mais pas devant Adrian, je me contenterai du Canada Dry que je venais de sortir. « Elle est partie, » je murmure, la voix brisée une fois que mon ami m'a rejoint. Je suis toujours de bonne humeur, toujours le sourire aux lèvres et le regard rayonnant, mais c'est la main tremblante, que je nous serre un peu de soda dans nos verres et poursuis, « je te l'ai pas dis parce que je voulais pas t'embêter avec ça. » Faut dire que je l'avais pas crié sur tous les toits. Pleins de monde n'était pas au courant, que les gens que je voyais au quotidien. Et comme Adrian était à Londres avec sa soeur, j'ai pas voulu l'emmerder avec mes histoires.

Elior était sûrement l'une des raisons pour lesquelles Adrian n'avait pas craqué de nouveau. Parce qu'il était un ami à l'écoute et qu'il avait, sans vraiment le savoir, changer les idées du barista alors qu'li était à deux doigts de boire. Mais Adrian ne lui avouerait jamais. C'est ainsi qu'il avait accepté de venir manger des pizzas avec Elior et son fils, pensant une nouvelle fois le taquiner sur le fait qu'il pourrait lui voler sa femme. Mais visiblement, vu la gêne de son ami quand il lui demande, Adrian sent qu'il a mit les pieds dans le plat et pas qu'un peu. « Oui, j'arrive. » Et Adrian suivait son ami après avoir fait leur check bien à eux avec Adam. L'ambiance était pesante et Adrian se demandait bien ce qu'il se passait pour que ce soit ainsi. Il espèrait au plus profond de lui même ne pas avoir fait une boulette monumentale, et que, si c'était aussi pire qu'il ne l'imaginait, Elior aurait quand même prit le soin de le prévenir. Et quand la révélation tombe, Adrian le regarde, fronce un peu les sourcils avant de se rapprocher de son ami. « J'ai cru que c'était plus grave ! » s'exclame t-il avant de se pincer les lèvres quand il se rend compte que ce qu'il vient de dire est vraiment idiot. « Enfin je veux dire, elle va revenir... non ? » Qu'est-ce qu'il se sent idiot Adrian à ce moment là, il n'est pas foutu de consoler son ami, il n'est pas foutu de trouver les mots justes mais c'est juste qu'il ne sait pas comment s'y prendre parce qu'il n'a jamais vraiment été doué pour ça. « Tu aurais pu, j'aurais prit le temps pour toi. » explique t-il en regardant toujours son ami, appuyé sur le plan de travail. « Elle est partie comme ça ? » Peut-être que lui demander tout ça n'était pas la solution la plus adaptée mais après tout, Adrian avait besoin de comprendre pour chercher à consoler « Je suis désolé. Je, wow. Je viens de me rendre compte et j'ai l'impression d'avoir été un mauvais ami. Mais si tu as besoin avec Adam, je suis là, tu le sais hein ? »

Au début, je passais mon temps à l'attendre. A attendre le retour de ma bien aimée assit sur le canapé. Mais je veux changer les choses, je veux recommencer à vivre. Je ne peux pas passer ma vie à me morfondre, non. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, je ne compte pas tourner la page. Janet reviendra, je le sais, et quand elle pointera le bout de son nez, je serai là pour l'accueillir. « Plus grave ? » Je lui tends un verre de soda que je viens de verser. « Je sais pas si c'est plus grave en fait. J'ai pas eu de nouvelles depuis son départ. Elle n'a même pas laissé un mot. » Au début, je pensais que ça l'était. Les premiers mots que j'avais dit à Wes justement étaient de savoir si je devais appeler la police. Moi je pense qu'elle a peur des conséquences de ses actes, et que c'est pour ça qu'elle ne donne pas encore de nouvelles. Mais je peux me tromper. « Ouais, comme ça, aucun signe annonciateur, ou bien rien que j'ai vu. » Je porte mon regard sur mon fils, qui est encore à terre, en train de jouer avec ce qu'Adrian lui a offert. « Merci, » je tente un sourire, que je force presque sur mon visage. Je dois rester fort, pour Adam, pour moi. « heureusement que j'ai des amis comme toi. » Je bois un peu de soda, et fouille dans un tiroir pour sortir une publicité que j'avais reçu, avec des bons de réductions pour une pizzeria. Je regarde un peu le menu, mais je ne lis pas vraiment. Perdu dans mes pensées. « Tu crois qu'elle a pu... juste refaire sa vie ailleurs ? Avec quelqu'un d'autre ? » Et si c'était ça ? Peut-être que c'est pas moi l'homme de sa vie, après tout. Peut-être qu'elle s'en est rendu compte et est partie avec. Si ça se trouve, elle a trouvé quelqu'un de mieux que moi. « Mais ce que j'arrête pas de dire à Nana, une amie, je sais pas si tu l'as déjà croisé, je suis sûr qu'elle va revenir. J'le sens. C'est bizarre ? » Après tout, Adrian la connait très bien Jay. Peut-être qu'il a une idée de ce qui a bien pu lui passer par la tête. Peut-être même qu'il à une hypothèse sur où est-ce qu'elle a bien pu aller. Moi j'ai beau chercher, je ne vois rien.

Adrian en plus d'être le roi des beaufs, il est aussi les rois des pieds dans le plat. Et il a envie de rembobiner ses paroles quand Elior lui demande ce qu'il entend par plus grave, il se contente d'hausser simplement les épaules « Je ne sais pas... Plus grave quoi. » Il ne veut pas employer les mots durs qui passent dans sa tête, mais il se dit aussi que si c'était le cas, son ami ne serait pas dans cet état là. Il grimace un peu face à la dure réalité de la chose et s'en veut de ne pas avoir été là. « Parfois, la situation te dépasse tellement que tu ne sais pas comment réagir, mais je pense que ce n'était pas une bonne idée de te laisser sans mot. » Oui, il défend son ami mais de l'autre côté, il se dit que si Janet est partie ainsi c'est qu'il y avait forcément quelque chose. Même s'il ne veut pas croire que son amie ait prit le large juste pour le plaisir, il ne veut pas imaginer ce qui aurait pu se passer si jamais elle l'avait prévenu, justement. Parfois, il faut laisser partir les gens. « Ce n'est pas comme si Adam était le pire des enfants de la terre. Il pourrait presque me faire considérer une possible paternité si tu veux mon avis. » Adrian qui a toujours dit qu'il ne voulait pas d'enfants vu l'environnement familial dans lequel il a grandi, les familles qui se décomposent et se recomposent à cause de divergences d'opinions qui sont apparus bien après la naissance de l'enfant, merci mais non merci. Adrian secoue la tête après avoir bu une gorgée de soda, et il ne cesse de le faire tout en parlant « Non, je ne pense pas qu'elle ait refait sa vie ailleurs. Elle vous aime bien trop Adam et toi, pour avoir eu une double vie, ou le genre de truc qu'on ne voit que dans les films. » A croire que la vraie vie rattrape parfois. Et il grimace un peu. Il ne veut pas lui donner de faux espoirs, et il espère vraiment que son amie reviendra mais pourtant, il a peur qu'elle ne le fasse pas. Quel genre d'ami serait-il s'il lui disait l'étendue de ses pensées? Un mauvais ami certainement. « Non ce n'est pas bizarre, c'est même normal, dans des situations comme ça, il faut toujours être optimiste. Parce que le pessimisme risquerait de te faire perdre les pédales. » Et il en connaît un rayon Adrian. Il en connaît quelque chose quand on perd pied et que tout semble noir et sans espoir. Il a perdu l'espoir il y a longtemps, et il a vécu dans l'ombre pendant longtemps mais quand la lumière reprend le dessus, alors on se sent mieux. Toujours un peu bancal. Mais un peu mieux du moins. « Mais si elle revient, ou plutôt quand elle reviendra, fait lui comprendre que tu ne lui en veux pas trop. Parce qu'on ne sait pas pourquoi elle est partie. Peut-être qu'elle étouffait dans sa vie professionnelle et qu'elle avait besoin de prendre le large. Parfois, on a besoin de prendre le large et on n'a pas envie d'être retenu. » Il sourit un peu en regardant Adam « Mais quand elle reviendra, tu verras. Tout ira mieux. »

Je laisse Adrian parler, et ses mots, bien que parfois bruts ou maladroits, me réconfortent. Il sait ce qu’il faut dire à quelqu’un qui ne va pas bien pour ne pas que la personne broie du noir. La raison pour laquelle il trouve facilement les mots, elle est simple. Triste, mais simple. La vie de mon ami n’a pas toujours été rose, loin de là, même. Il sait ce que c’est que de sentir seul, au fond du trou. Il sait ce que ça fait, et en pire. Oh, ma situation n’a rien de comparable que celle dans laquelle avait été Adrian à ce moment précis de sa vie, je ne dis pas ça. Et puis, j’ai un enfant à charge, pour qui je donnerais ma vie. C’est pour lui que je ne peux pas faiblir. D’ailleurs, sa petite réflexion sur Adam me fait sourire. Lui qui n’envisageait pas la paternité pourrait presque le faire lorsqu’il passe du temps avec mon prince, et je le comprends. Mon fils est drôle, gentil, curieux. Mon sourire défaille un peu lorsque l’on en revient à Jay, selon lui, impossible qu’elle ait refait sa vie ailleurs. Et ça me rassure d’entendre quelqu’un qui dit la même chose que moi. Il semble penser lui aussi qu’elle reviendra, et ça me fait tant de bien d’entendre ça. ”Tout ira mieux” qu’il me dit, et mon sourire redevient naturel, positif, sincère. « Oh, si... Non, quand elle reviendra, je ne crierai pas. Et puis, je ne sais pas si elle m’aime encore, mais Adam… notre fils, elle l’aime à en crever elle aussi, j’en suis sûr. » Je hoche un peu la tête, persuadé de ce que je dis, ou bien, pour me persuader de ce que je dis. « Ca doit lui faire tellement mal d’être loin de lui. Je ne veux pas qu’elle souffre. » Je hausse les épaules, mon coeur est brisé, mon âme est en miettes, et pourtant, « je veux juste qu’elle soit heureuse. » Je passe ma main dans mes cheveux pour les replacer parfaitement, et lui tends la carte de la pizzeria derrière laquelle se trouve les bons de réductions. « On les commande ces pizzas ? » Et à ce mot, je vois Adam se lever, courir vers nous à toute vitesse « du fromage ! une avec du fromage !! » qu’il s’écrit en essayant de regarder la carte qu’Adrian a désormais entre les mains, comme s’il pouvait lire ce qui était écrit. Il me fait rire quand il fait ça, il agit comme s’il était beaucoup plus grand qu’il ne l’est déjà. Le pauvre loulou apprend à peine à écrire son prénom qu’il veut déjà lire tout ce qu’il voit.

Il a trop longtemps été pessimiste Adrian, et il a vu que ça n’amenait rien de bon. Preuve en est quand il a dû se faire enfermer dans un centre pour se désintoxiquer de l’alcool, quand il a failli perdre sa soeur… Tout ça c’est parce qu’il était pessimiste. Alors il tente de voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide, peut-être que ça fera du bien à Elior d’entendre cela plutôt que le contraire, parce qu’il aimerait pour son ami comme pour son filleul que Janet revienne. Même si ce n’est pas pour se remettre avec son ami, mais au moins pour revenir dans la vie du petit. Parce qu’il mérite le meilleur Adam, tout comme Elior. « En même temps je ne vois pas comment on peut ne pas l’aimer ce petit bout de chou. » tente Adrian pour rassurer son ami. Après tout c’est vrai, il n’est pas compliqué à vivre, il ne réclame rien. Quand Adrian le voit c’est toujours des sourires à profusion alors pourquoi se plaindrait-il ? Puis pourquoi Janet ne l’aimerait-elle pas ? Le barista regarde son ami qui semble vraiment mal en point, s’il pouvait faire quelque chose d’autre, il le ferait mais il a du mal à savoir ce qu’il pourrait faire justement. « Je pense que si elle est partie sans rien dire c’est qu’elle souffrait et peut-être qu’elle a trouvé son salut dans la fuite. » Parce qu’Adrian ne voit pas ça autrement, parce qu’il ne sait pas pourquoi d’autre elle serait parti. Janet n’est pas du genre à s’attirer des problèmes, surtout depuis Adam alors il est sûr que c’est pour une raison qui lui échappe, une situation qui devenait trop compliquée à vivre qu’elle est partie et il ne l’aurait pas retenu Adrian s’il avait su, parfois il vaut mieux laisser les gens partir. Adrian regarde la carte que son ami lui tend avant de récupérer Adam pour qu’il puisse faire semblant de lire avec lui. Il ne sait pas de quoi il a envie. Peut-être d’une extra fromage ? Ça peut être une bonne idée « Je vais prendre une extra fromage, comme ça le petit prince pourra partager avec moi. » Et il fait un high five avec Adam qui s’exclame au point d’en faire rire Adrian qui le laisse repartir en courant. « Ce qu’il faut que tu retiennes dans cette histoire c’est que Janet, elle t’aime. J’en suis sûr. Mais qu’elle avait besoin de temps pour elle. Si elle te l’avait dit, tu l’aurais laissé partir ? Ou tu l’aurais retenu ? » Peut-être qu’Adrian se trompe sur le compte d’Elior mais il est persuadé qu’il l’aurait retenu. Peut-être pas pour lui, mais pour Adam. Parce qu’Adam régit la vie d’Elior et Adrian est persuadé qu’Elior pense que son fils n’est pas si fort que ça, alors que c’est tout le contraire.

L'idée d'avoir perdu Janet à tout jamais semble si loin, si impossible. C'est bien simple, sans elle, je ne sais pas comment je vivrais le reste de ma vie. Pour l'instant je gère, à peu près, mais c'est parce que l'espoir est encore là. La seule chose qui m'empêche de broyer du noir c'est la présence d'Adam à mes côtés, sinon j'aurais sombré, je le sais, et je pense que toute personne proche de moi le sait. Mon amour pour Janet est ma première passion, c'est peut-être quelque chose qui l'a poussé à partir d'ailleurs. Je me demande parfois si je ne l'ai pas tout simplement étouffé avec mes promesses et mes chansons. Je ne sais pas, à vrai dire, je ne sais plus. Et Adrian a raison, c'est d'ailleurs ce que Wes a essayé de me faire comprendre ce soir-là quand je l'ai appelé, en détresse: mon fils. C'est sur mon fils que je dois me concentrer maintenant. Après tout, j'ai peut-être perdu la femme de ma vie il y a quelques semaines, mais je ne suis pas le seul. Adam doit constamment se demander où est sa maman. « Je suppose que c'est ça. J'ai du l'étouffer. » Une voix murmure dans mon oreille depuis ce soir là, une voix qui me répète, c'est de ta faute, Elior. Tu pousses trop loin, toujours, on t'a répété à plusieurs reprise dans ta vie que ça te fera souffrir, que d'aller repousser les limites de l'excès un jour sera ton tort. Ils avaient raison. Et si ils avaient tous raison ? Tous ceux qui m'ont critiqué, prétendant vouloir m'aider à évoluer. Tous ceux que j'ai tenté d'ignorer dans ma jeunesse, et si ils avaient raison ? Non, non, non. Je chasse ces mauvaises pensées qui ne cessent de me trotter dans la tête, et je souffle un bon coup. Je ne vais pas craquer, pas encore, pas alors qu'Adam s'approche de nous. Alors je pose mes yeux sur Adrian, qui tape dans la main de mon fils, preuve de leur complicité, Adam en a des adultes qui l'aiment. Entre Adrian, Wesley et ses parents. C'est pour eux que je ne dois pas broyer du noir. Pour mes amis, pour mon fils. Pour les personnes qui me reste. « Bien sur que je l'aurais retenue. J'aurais tout fait pour qu'elle reste, tu le sais. » J'en aurais probablement fait trop, d'ailleurs, comme d'habitude. Puisque je ne peux pas m'en empêcher, j'en fais trop, tout le temps, sous n'importe quel prétexte, peu importe le contexte.

Parfois, un trio devient un duo et c’est ce qu’il se passait pour Elior qui avait été habitué à combiner avec sa femme et son fils et qu’il n’a maintenant plus le choix que de faire en sorte que son fils aille bien et qu’il soit le petit garçon épanoui qu’il mérite d’être. Adrian n’avait aucun mal à croire que son ami en était capable encore fallait il qu’il s’en rende copte lui même et ce n’était pas en cherchant des réponses aux éternelles questions qu’il se posait qu’il allait réussir à faire en sorte que son fils aille bien et ne se doute de rien surtout. Adrian pourrait inventer des histoires sans queue ni tête si ça pouvait faire croire à Adam que sa maman était une super héroïne, Que sa maman était partie enfiler son costume de wonder Woman parce qu’elle avait été appelé ailleurs mais qu’elle reviendrait, il pouvait le faire. Si ça pouvait faire garder à Adam son sourire et son âme d’enfant parce qu’il n’avait pas envie que sa tête soit lourdes de soucis d’adultes, il aurait bien le temps de se rendre compte que tout cela n’est pas un monde de bisounours, que ce n’est pas parce qu’on pense que la vie est jolie, qu’elle l’est réellement. Il en savait quelque chose le Dawkins. « Je ne suis pas d’accord » répond le Barista et il pourra énumérer toutes les choses qui font qu’il n’a pas dû l’étouffer mais qu’elle avait simplement besoin de prendre le large quelque temps. Peut-être pour une raison qui n’incombe qu’elle, peut-être sans raison. Quand Elizabeth est partie après lui avoir dit non, Adrian n’a pas cherché à comprendre. Il n’a pas cherché à avoir de réponses parce que ça aurait fait plus de mal que de bien, de toutes façons. Alors que le petit est à leurs côtés, Adrian ne dit rien, s’occupe du petit avant de le laisser repartir et il repose un regard sur son ami avant de grimacer « Tu vois, c’est pour ça. C’est pour ça qu’elle a dû partir sans rien te dire parce qu’elle savait que tu l’aurais retenu. » Il s’humidifie les lèvres, tentant de ne pas être trop cru dans ses propos. « J’en connais quelque chose, de l’envie de prendre le large, de se barrer loin. Et crois moi, dans des cas comme ça, quand on ne voit que du noir et trop peu de couleurs, on a pas envie d’être retenu. On a besoin de souffler, on a besoin de voir autre choses, de voir d’autres paysages même si on aime les gens avec qui on est. Quand Elizabeth a refusé de m’épouser, je ne l’ai pas retenu, je n’ai pas eu envie qu’elle reste. Parce que ça aurait été égoïste de ma part de l’enfermer dans quelque chose dont elle n’avait pas envie. » explique t-il en attrapant son téléphone pour faire le numéro de la pizzeria, parce qu’elles n’allaient pas se livrer toute seule. Et il devait modérer ses paroles « Je sais que tu es comme ça Elior et je ne dis pas que c’est de ta faute, loin de là. Mais elle a certainement voulu se préserver elle même avant d’atteindre un point de non retour qui aurait sûrement était fatal à votre couple. »

Je ne sais pas si Adrian se rend compte de l'aide qu'il m'apporte. Ses mots sont rassurants, bienveillants, et surtout, ils calment la voix qui murmure dans ma tête. Qui me dit que c'est de ma faute, une voix qui veut me tirer vers le bas. Je tente de l'ignorer, mais c'est de plus en plus difficile de m'en débarrasser. Je ne veux pas céder à mes démons, et c'est grâce à l'aide que je reçois de mes amis que j'arriverai à garder le Nord. C'est grâce à eux, que tout va finir par rentrer dans l'ordre. Je me dois de rester positif, que ce soit pour moi ou pour Adam. « Merci, » je lui réponds simplement, un sourire enfin dessiné sur mes lèvres. Tout est arrivé si vite, je n'avais vu aucun signe qui pouvait me laisser penser que Janet allait nous laisser. Ca fait déjà plusieurs semaines que ça dure. Pourtant, je n'ai toujours pas eu le temps de me remettre de la situation dans laquelle je me trouve désormais. « t'as sûrement raison. » Et j'aimerais changer cette aspect de ma personnalité. J'aimerais savoir être plus patient, plus calme, j'aimerais pouvoir, comme Adrian, lâcher prise, prendre du recul. « Comment t'as fait ? » je lui demande alors, sincèrement curieux, prêt à écouter ses conseils qui pour l'instant, sont plus que  bons. « J'veux dire, comment t'as fais pour juste, continuer ta vie, comme si de rien n'était après ? » Il n'y a pas grand chose de comparable entre ce qu'Adrian avait vécu avec Elizabeth et ce qu'il se passe actuellement dans ma vie. Pourtant, quelque part, j'ai l'impression que le sentiment qu'il a ressenti quand elle avait refusé sa demande en mariage avait dû s'apparenter à celui que je ressens depuis que Jay n'est plus là. Et puis, il y a toujours cette autre voix dans ma tête. La voix plus positive, plus douce, plus réjouissante. Celle qui me dit qu'elle reviendra, que ce n'est qu'un passage de ma vie, et pas un nouveau tournant. Celle que j'écoute le plus souvent, pour la faire gagner face à la voix de mes démons, qui me rappelle chaque fois que j'ai dis quelque chose que je n'aurais pas dû dire face à elle, chaque fois que j'en ai fais trop, chaque moment qui aurait pu l'étouffer, participer à son besoin de prendre la fuite.

Adrian ne peut s’empêcher de se demander tout de même où se trouve Janet. Parce qu’il sait qu’un jour, son fils réclamera sa présence et quand bien même il veut être le tonton super cool, il devra être là si un jour les cauchemars sont un peu trop présents. Il devra être là pour Elior et il devra avoir des réponses à ses éternelles questions. Mais les obtiendra t-il vraiment ? Non, certainement pas. Il ne se voit pas envoyer un message à Janet pour savoir si elle va bien et lui demandait entre deux messages où elle était. Il voulait bien être gentil, mais dans cette histoire, il était la Suisse. Il ne prendrait pas partie, il ne prendrait pas partie dans leurs disputes si jamais elle revient un jour. Si elle revient, il sera là pour elle comme il était là pour Elior actuellement. Et pour Adam qui n’avait rien demandé. Adrian hausse les épaules quand Elior pense qu’il a raison, il voudrait agir comme un con mais il sait que ce n’est sûrement pas le moment. Adrian ne peut s’empêcher de rire jaune quand il lui pose la question et il se renfrogne un peu « Disons que ce n’était pas une bonne période de ma vie. » Il s’en souvient comme si c’était hier, de cette période et il est plutôt heureux qu’Eli ait dit non, parce qu’il sait qu’il ne l’aurait pas rendu heureuse. « J’étais souvent bourré. Je donnais le change quand elle était là mais… c’était de plus en plus compliqué. » Avoue t-il avec une grimace, ses deux mains qu’il lie derrière sa nuque avant de se mordre la lèvre « alors quand elle est partie j’ai bu, beaucoup trop. Puis j’ai glissé dans les abysses de l’enfer. » Parce que oui, c’était un enfer. « Mais après, je me suis repris en main et de toutes façons, je savais bien que je ne l’aurais pas rendu heureuse. » explique t-il avant de s’excuser et commander les pizzas, il commande même des mozarellas sticks en plus avant de raccrocher « Les pizzas seront là d’ici une heure. » Et il regarde son ami avec un sourire avant de récupérer Adam qui vient squatter sur ses genoux « Mais moi, si t’as besoin, je serais là pour le petit bonhomme, parce qu’il est génial et qu’il mérite le meilleur. »

La boulette. Je me doute que ça n'a pas vexé, ni froissé Adrian que je lui pose une question sur cette période de sa vie. Je n'ai pas trop réfléchi, c'est un peu sortit tout seul, mais je pense que c'est mieux de parler de ces choses là plutôt que de les garder pour soi. Bon, ça fait quelque temps maintenant, il a eu le temps d'en discuter avec les personnes proches de lui, et ne faisons pas semblant, j'ai vraiment pas fait exprès d'évoquer le sujet. A vrai dire, je l'écoute répondre à mon interrogation sans trop savoir quoi répondre, et tant mieux pour moi, il s'éclipse pour commander les pizza. Je soupire un coup quand il s'en va et finis mon verre de ginger ale, comme si c'était un shot de téquila. « Quel con, » je marmonne à moi-même, avant de m'asseoir sur une chaise en attendant son retour.
« Je le sais, et je te remercierai jamais assez pour ça. » Je lui adresse un large sourire, alors qu'Adam est le plus heureux du monde sur les genoux de celui qu'il appelle "tonton Adrian". « Sans toi, Wes et quelques autres personnes, je ne sais pas ce que je ferais. » Parce que ce ne sont pas mes parents qui vont me donner un coup de main, je suis de ceux qui pense que la famille n'a rien à voir avec le sang. Sa famille, ce sont les personnes que l'on décide de garder autour de soi, qui ont une influence positive pour soi. Dans mon cas, ma famille, ça a toujours été ma femme, mon fils, quelques bons amis comme Adrian ou Wesley, que je considère comme mon grand frère depuis que je suis gosse. Une petite famille, un peu atypique, et en ce moment elle est fissurée, mais je garde espoir pour que l'on puisse la réparer rapidement. « D'ailleurs, mon chéri, t'avais pas un truc à donner à Tonton ? » Et Adam se lève brutalement, et court dans sa chambre à toute vitesse, il semble chercher partout, on l'entend ouvrir les tiroirs de sa commode, et je ris un peu. « Adam, tu l'avais accroché au frigo pour pas l'oublier... » Et il revient, presque aussi rapide que Flash, et décroche un dessin du frigidaire. Il le tend à Adrian, tout sourire. « Je l'ai fait pour toi ce matin !!! » qu'il s'exclame. On ne va pas se mentir, ce n'est pas une oeuvre d'art, mais Adam a passé toute la matinée dessus. Un dessin fait aux craies grasses, avec des dinosaures qui ont l'air de se balader dans une ville, le plus petit ayant un cornet de glace à la main. Il se met à pointer chaque animal l'un après l'autre, chacun étant un dinosaure préféré, en disant qu'ils représentaient tous quelqu'un. Il y a Wes, un diplodocus, moi, un stégosaure, Adam s'est représenté en vélociraptor, et Adrian, lui, c'est un T-Rex, le plus grand d'entre nous tous. Faut pas dire, mon petit prince est fier du dessin qu'il a fait à son tonton préféré.

Adrian garde Adam tout contre lui alors qu'il revient alors qu'il pose son regard sur Elior. Il se concentre sur ce que raconte le petit, et il sourit à Elior « Tu ferais ce que tu fais avec nous. Mais sans nous. » rit-il un peu en ne pouvant s'empêcher de sourire continuellement face aux babillages de son neveu. Et il reprend « Et tu le ferais bien. » Comme pour le rassurer, comme pour lui dire que ce n'est pas parce qu'il est là, tout seul, sans sa femme qu'il se débrouille parfaitement parce qu'il a ses amis. Et puis, il se débrouille comme un chef et Adrian est persuadé que c'est parce qu'il est plus fort que ce qu'il ne pense. Le barista fronce les sourcils quand le petit part comme une terreur et il interroge Elior du regard sans trouver de réponses. Qu'est-ce que ? « Merci mon pote ! » répond t-il en riant avant de le récupérer pour le prendre une nouvelle fois sur ses genoux et il écoute avec attention la description du petit sur les dinosaures qu'il a dessiné. Un sourire franc et sincère naît sur les lèvres d'Adrian et il ne cesse de regarder Adam avec un regard sincère et bienveillant. Avec un regard protecteur. Puis son regard se pose sur Elior « Est-ce que tu veux que je prenne Adam à dormir ce soir ? » demande t-il, parce que ça lui ferait du bien d'avoir une présence dans l'appartement. Lui qui n'avait plus l'habitude de vivre seul. « Ça pourrait te permettre de sortir ? Et avant que tu ne dises quelque chose, ça me fait plaisir ! Et toi, bonhomme, ça te ferait plaisir ? »

Adrian me rassure, ou du moins, tente de le faire. Comme d'habitude, je souris et je hoche la tête, bien que peu convaincu. J'ai du mal à croire que je suis l'aussi bon père qu'il me le dit. Depuis que Jay est partie, je sors beaucoup, je confie pas mal Adam à la baby sitter. Mais rester enfermé dans l'appartement à attendre que ma femme repasse la porte me rend fou, et j'ai besoin de distraction. C'est égoïste, et je le sais. Je fais tout pour ne pas que mon fils se sente abandonné, mais je suis certain que je pourrais faire mieux que ça. « T'en dis quoi, mon chéri ? » Je demande à Adam alors qu'Adrian propose de le garder pour la nuit. « Oui, oui ouiii ! On pourra regarder un film, tonton ? » Alors j'affiche un large sourire en direction de mon ami, qui n'a pas l'air de se rendre compte d'à quel point il est une grande aide pour moi. « Merci. Je pense que ça va lui faire du bien à lui aussi, de changer d'air un peu. » Parce que le pauvre, entre l'appartement, l'école et le parc, en ce moment, je ne l'ai pas amené en ville aussi souvent que j'aurais aimé le faire. Et il a beau n'avoir que cinq ans, je suis sûr que lui aussi, comme moi, doit parfois se réveiller le matin en ayant oublié que sa maman n'est pas dans la pièce d'à côté en train de préparer le petit déjeuner. Lui aussi, doit constamment se demander pourquoi il n'a pas de nouvelles d'elle. Je n'ose même pas imaginer ce que cela doit faire de vivre ça, à son âge. « Et toi sinon ! A part tout ça ! Comment tu vas, j'veux dire, Londres, comment c'était ? » Assez parlé de moi, même si god knows, j'adore être sur le devant de la scène. Je veux des détails sur ses quelques mois passés ailleurs, après tout, peut-être que... « as-tu volé le coeur d'une belle londonienne, Adrian ? » je le taquine. Je sais qu'il aime séduire, et je suis persuadé qu'il a des anecdotes à me raconter.

Adrian ne peut qu’aider Elior à garder confiance en lui. Il ressent le besoin de l’aider. Parce qu’après tout il sait que son ami est comme un funambule qui marche le long d’un fil, fébrilement. Et il ne veut pas qu’Elior jette l’éponge, il ne veut pas qu’il soit triste. Il ne veut pas qu’il abandonne. Pour Adam, pour le bout de chou qu’il a sur les genoux. Et adrian est là, autant pour Adam que pour Elior et rien ne changera jamais. Adrian ne peut s’empêcher de rire quand il entend le fils de son ami qui réclame un film, il sourit et lui répond « Bien sûr bonhomme, on ira même acheter du pop corn. » Se faire une soirée film en bonne et dû forme. Et Adrian lui offre un sourire compatissant, il sait qu’il fait ce qu’il peut, et il le fait si bien. Il laisse Adam s’échapper et il regarde son ami avant de traquer la pizza sur son téléphone. Il meurt de faim mais la pizza a décidé de venir à pieds. L’impatience qui naît dans son corps fait trembler sa jambe d’agacement et il repose son regard sur son ami, l’écoutant poser sa question. Bien évidemment qu’ils allaient parler de Londres. « C’était chouette, on a squatté dans un Airbnb avec ma soeur le temps qu’elle trouve un appart. » sourit-il avant de prendre une gorgée de sa boisson et il rit à la question avant de pincer ses lèvres « Alors le coeur non mais le… ouais non. Y’a des oreilles sensibles qui traînent. » Il ne veut pas qu’Adam l’écoute ou même qu’il entende ce qu’il a à dire. « Mais les Londoniennes aime bien sortir, court vêtus. C’est tout ce que je peux te dire. » rit-il en secouant la tête positivement « Mais je ne me voyais pas vivre à Londres, j’aime bien trop New York. Et puis, vous m’auriez trop manqué. » conclue t-il en finissant son verre d’une traite. « Et puis vivre avec ma soeur, je l’aime mais je pense qu’on aurait fini par s’entretuer dans le petit appartement qu’elle a trouvé »

Après avoir passé quelques minutes à parler de moi, de ma vie, de ce qu'il m'est arrivé, je veux changer de sujet et arrêter de blablater sur ma petite personne, pour une fois. Je n'ai pas parlé beaucoup à mon ami alors qu'il était à l'autre bout de l'océan, alors, je cherche à me rattraper, quelque part. Entre le décalage horaire et nos occupations à tous les deux, ça n'a pas été évident de s'avoir au téléphone durant cette courte période. Je ne sais donc pas grand chose sur ses aventures européennes, que l'on parle de conquêtes ou de sa vie en général. D'ailleurs, la remarque qu'Adrian me fait sur ce qu'il a volé à quelques londoniennes me fait rire, en tant normal j'aurais probablement fait une petite blague pour surenchérir, mais j'essaye toujours de faire attention à ce que je dis quand Adam est dans les garages. « Elle a trouvé un bon appart', et un bon boulot ta soeur ? » que je lui demande, hochant la tête à ses quelques mots. Un sourire attendri alors qu'il dit qu'on lui aurait manqué. Pas besoin de jeter le moindre coup d'oeil à mon fils pour me rendre compte d'à quel point il est heureux à l'idée de passer une soirée avec son tonton t-rex, qui visiblement lui a encore plus manqué que je le pensais. « Tu m'étonnes, surtout pour elle, un colocataire comme toi, quel enfer... » je secoue la tête, plus d'une pointe d'ironie dans le ton que j'emploie. Adrian le sait, on a beau être différent, je l'adore, il fait partie de mes meilleurs amis, et je suis d'ailleurs bien content de l'avoir comme voisin, aussi proche de chez moi. Le moindre souci, la moindre galère, je sais que je peux aller toquer à sa porte et qu'il sera là pour moi. Je pense que c'est quand on sait que l'on peut compter sur quelqu'un, de cette manière, qu'on est certain que c'est une amitié solide.

Les soirées de la sorte lui avait manqué à Adrian, non pas qu'il détestait les soirées londonniennes en compagnie de Lou, mais New York, c'est sa vie, il connaît les bars (bien trop), les bonnes astuces et il a ses amis ici alors il ne se voyait pas y vivre. Rester éloigné d'Adam et d'Elior, très peu pour lui. Ils lui apportaient une certaine paix et une sérénité à tout épreuve alors il n'aurait pas pu les laisser tomber. Adrian prend une gorgée de sa boisson avant de lui répondre « Oui, elle est embauchée sur un show pour le west end ! Je ne sais plus lequel par contre, mais elle était heureuse de pouvoir enfin avoir un travail de costumière qui sera reconnu. Et oui, elle a trouvé un petit appartement, à Shoreditch. C'est pas si loin du centre donc c'est tout bénéfique pour elle. » Et puis, il ne se ferait pas un sang d'encre, parce qu'il avait vu l'endroit de ses propres yeux. Et ça, c'était le plus important. Adrian prend un air faussement choqué face à la réponse d'Elior, une main sur le coeur comme s'il venait d'être touché « C'est pas sympa ça, tu viens de briser mon coeur. » rit-il un peu avant de finir son verre d'une traite et il regarde Elior avec un air grave « Et toi alors, as-tu été faire un tour sur le marché du coup ? » demande Adrian en haussant frénétiquement les sourcils pour lui faire comprendre le sous entendu « Non pas que j'accepterais que tu mettes la clé usb dans le disque dur parce que Janet reste mon amie, mais bon, y'a pas de mal à se faire un petit plaisir de temps à autre non ? » Enfin, il dit ça, il dit rien. Et parfois, il ferait mieux de ne rien dire du tout.

Un air faussement dramatiquement choqué, bouche bée, je plaque ma main sur mon front. « Oh, God, je m'excuse, je ne voulais pas briser ton coeur, que vais-je faire... » Et bien oui, car si je brise le coeur d'Adrian, quel autre ami me parlera de ma clef usb et de disques durs que je pourrais trouver sur le marché. Quand il me pose cette question, je suis d'ailleurs en train de prendre la dernière gorgée de mon verre de soda, et je pose une main sur mon torse, comme pour m'aider à l'avaler, cette gorgée. Parce qu'il m'a surprit avec sa question, là, et la manière dont c'est formulé me fait un peu rire, si bien que j'aurais pu le recracher, mon ginger ale. « Pas quand je bois, j'ai cru que j'allais en mettre partout. » Je reprends mon souffle après cette difficile fin de verre, ben oui, ça fait mal dans la gorge quand on manque de s'étouffer avec du soda, surtout au gingembre comme celui-là. « Figures toi que je n'ai même pas regardé le marché par la fenêtre. Ca ne m'intéresse pas. » Je suis pourtant sûr que j'aurais pu repartir avec un mec à la soirée à laquelle je me suis rendu avec Debbie. Des possibilités, je ne pense pas en manquer, parce que je pense que quand on cherche bien, on trouve, surtout maintenant avec les applications de rencontres. Même Wes tente de me caser avec Moira ! On n'est pas dupe avec la blonde, on a bien comprit son petit manège. C'est simplement que je ne veux pas. Elle a beau s'être évaporée, avoir disparue dans la nature, ne pas répondre aux sms que j'ai envoyé, aux photos d'Adam que je lui partage, rien n'y fait. Je n'ai toujours que d'yeux pour Janet. « Ma clef usb n'est pas sortie de sa boîte depuis. » je soupire, continuant sans vergogne l'analogie assez farfelue de mon ami. « enfin, quelques fois, mais vraiment pour faire un peu de place dans sa mémoire, rien de bien méchant, elle est pas sortie de... ben euh... j'ai du mal à continuer la métaphore là, gros, faut m'aider, mais t'as compris ce que je voulais dire. Elle a pas vu d'autre disque dur quoi. Juste mon propre port usb droit, tu vois quoi. » Tais-toi, Elior, t'es nul à ça. Plus je m'étais enfoncé dans la métaphore, plus la cadence de ma phrase s'accélérait. Après ça, je ne peux pas m'empêcher de pouffer de rire, comme le véritable gamin que je suis. Mais j'ai tellement galéré à la finir, cette phrase, de l'extérieur ça devait être drôle à voir.

Adrian prend un air innocent suite à son sous-entendu, il ne comprend pas ce qui est marrant, peut-être que sa beauferie a prit beaucoup plus de place qu'il ne l'avait prévu. Il hausse les épaules et le regarde « C'est pas moi, c'est mon jumeau maléfique. » explique t-il, presque trop sûr de lui. Mais il retient qu'il doit faire attention à ce que fait Elior pour ne pas se retrouver avec du soda plein lui parce que son ami lui aura craché dessus (on dit que ce n'est pas très covid dans le métier). Adrian fait des gros yeux à l'évocation de l'ignorance du musicien avant de poser une main tout contre son coeur. « Tu ne regardes même pas le marché par la fenêtre ? Mais enfin ! » Il est offusqué Adrian qu'on ne prenne pas la peine de regarder le marché alors qu'il y en a partout dans la ville. Surtout des marchés de fruit ET de légumes. Alors qu'il regarde dans l'appartement pour voir ce que fait Adam quand la phrase d'Elior lui parvient aux oreilles, Adrian écarquille les yeux et tourne la tête au ralenti « Tu n'as pas sorti la clé usb de sa boîte depuis ? » demande t-il, comme une confirmation qu'on attend mais dont on a déjà la réponse puisqu'elle vient d'être dites. Il cligne des yeux et un petit sourire naît sur ses lèvres alors qu'il glousse comme un adolescent « Tu sais, il peut y avoir ton port usb droit et puis les ports usb d'autres ordinateurs. Pas nécessairement pour un formatage mais pour un transfert de données aussi. » explique Adrian avec sérieux. Avant de se rendre compte que ça pouvait être gênant « ce que je dis c'est que je peux potentiellement t'aider à trouver des ports usb si tu veux. Après s'il te faut tout type d'adaptateur, ça me va aussi. » Et il hausse les épaules en riant un peu « Bon fini les métaphores foireuses, ce que je veux dire c'est que tu ne peux pas rester sans rien faire. Enfin, tu pourrais hein. Mais ça te ferait peut-être du bien de voir du monde. Je peux te présenter certaines filles si tu veux. J'ai un carnet. » Et quand il voit l'air choqué d'Elior il se reprend « Non pas de carnet, mais j'ai gardé des numéros au cas où, peut-être que ça pourrait te servir. »

Adrian sait pourtant que depuis que j'ai rencontré Janet, personne ne peut rivaliser à mes yeux. Je ne vois plus qu'elle, et je sais pertinemment que même si elle ne revient jamais, tout le monde paraîtra fade à côté d'elle. Rien ne me ferait plaisir, rien ne me fait plus envie que de retrouver ma belle et de la serrer contre moi. Alors non, je n'ai même pas pensé une seule seconde à aller voir ailleurs. Je ne me vois pas ne serait-ce que flirter avec quelqu'un d'autre, quand je sais que ma place est ailleurs, là où le doux rire de Jay se trouve. Néanmoins, la métaphore douteuse me fait légèrement sourire, bien que je tente de garder mon sérieux face à la conversation. « Non, merci. Je ne veux pas de numéro de téléphone. » Un bref regard vers Adam avant de reposer mes yeux sur mon ami. « Tu sais bien que c'est Jay la femme de ma vie. » Quelques secondes de pause, et je me tourne vers la fenêtre de la pièce, pour détourner le regard. Je ne peux pas me résoudre à "tourner la page" comme Wes me l'a conseillé plusieurs fois déjà. « Si vraiment elle ne revient pas, alors oui, bien sûr que je vais devoir finir par me faire une raison et me remettre en scelle. » Ca ne sera pas quelque chose de facile pour moi, d'admettre que Janet s'en est allé pour de bon. Et de toute façon, je n'en suis pas là. Je suis encore plein d'espoir, et je n'ai qu'une hâte, la retrouver. « Et pour ta gouverne... » je me retourne vers lui, les bras croisés, et lui adresse un clin d'œil peu délicat. « oui, je joue sur tous le tableaux. Adaptateurs, ports usb, prise jack... » Je ne peux pas m'en empêcher. En même temps, c'est lui qui m'a lancé là dessus.

Adrian est plutôt satisfait ou plutôt soulagé d’avoir pu tourner la page rapidement après Elizabeth. Enfin, tourner la page… Il a réussi à oublier en se mettant minable chaque jour qu’il lui avait été donné d’avoir, à se retourner la tête jusqu’à ce qu’il ne puisse plus réfléchir. Et maintenant, il est bien. Heureux dans sa vie, droit dans ses baskets et peut-être que ça n’aurait pas marché. Ce dont il était sûr c’est qu’elle lui a en quelques sortes, sauvez la vie parce qu’elle l’a quitté. Doux euphémisme, mais c’est en le quittant qu’elle lui a fait en quelques sortes prendre conscience de ses démons. Et c’est ça qui compte. Maintenant, Adrian vit sa vie comme il l’entend -toujours protégé !- et il aimerait bien qu’eliot en face de même, mais il semble être peu convaincant « Bon… d’accord. Mais si jamais l’envie te prend, tu sais où toquer. » Il n’habite plus si loin finalement. Adrian comprend et accepte le point de vue d’elior. Il veut simplement qu’il vive correctement et ni avec des remords, ni avec des regrets. Il ne supporterait pas que son ami soit mal, maintenant qu’il est revenu. « Je sais. » répond t-il, simplement. Parce qu’au fond, il sait qu’ils sont fait pour être ensemble, il n’a jamais vu quelqu’un d’aussi attentionné qu’elior envers Janet. Et il ne trouvera sûrement jamais quelqu’un de la sorte. Adrian rit un peu à sa remarque, même si la situation n’est pas faites pour rire. « Ah ça c’est mon Elior ! » rétorque Adrian en lui donnant un petit coup dans l’épaule avant de regarder Adam qui semble motivé à aller dormir chez Adrian avant que le chemin de l’information fasse le tour de son cerveau « AH OUAIS ? » demande Adrian, un peu interloqué. « Mais tu me l’avais déjà dit ? Ou pas ? Dis moi que j’ai jamais fait de boulettes… » Parce qu’Adrian, il dit parfois ce qu’il pense, et des fois, il pense pouvoir penser juste mais mal penser justement. « Je suis désolé si c’est le cas ! »

La réaction d'Adrian à la nouvelle me fait sourire de plus belles. Et d'ailleurs, je ne suis pas sûr de déjà lui avoir dit explicitement que je suis pansexuel. Je ne m'en cache tellement pas, que des fois, je ne suis pas sûr d'à qui je l'ai avoué noir sur blanc. « En vrai, y'a moyen que je ne te l'ai jamais vraiment dit. » Je hausse les épaules, mais reste étonné de la surprise dans la voix de mon ami, même si je sais pertinemment que ça ne change absolument rien pour lui. « En vrai, je pensais que tu savais. Je pense pas que tu ai déjà fait la moindre boulette, de toute façon je ne vois même pas ce que tu aurais pu dire pour me vexer ou quoi ! » Adrian est un ami formidable et tolérant, et je sais que tout ce qu'il dit et fait, vient de sa bienveillance naturelle. « T'as beau être le plus gros beauf de cette planète, tu ne fais pas de blagues homophobes à ce que je sache. » Et heureusement, parce que les personnes qui en font ne sont pas les bienvenus chez moi.
« Et, merci. » que je lâche sur un ton un peu plus sérieux, accompagné d'un regard sincère. « Pour tout, Adrian. Merci. » Parce que ce n'est pas évident d'être un bon ami, et qu'on ne remercie jamais assez les personnes qui nous entourent d'être là. Parce que j'ai besoin que l'on m'aide comme il me le propose, et pas seulement pour l'aide qu'il me proposer à trouver un booty call. Aussi, parce qu'il est là pour Adam, et lui apporte beaucoup de soutient, à ce petit bonhomme qui n'a pas demandé à se retrouver seul, sans sa maman en compagnie de son papa qui se demande bien comment il va réussir à gérer.

Adrian aimerait bien être sûr qu’il n’a pas fait de boulettes et qu’il n’a pas dit quelque chose qui ne fallait pas au sujet de la sexualité de son ami. Adrian secoue la tête négativement parce qu’il n’était pas au courant, parce qu’il ne savait pas et il se sent un peu idiot d’avoir sûrement dit ou fait quelque chose qu’il ne fallait pas. « non, je ne savais pas, mais au moins maintenant je sais. Et puis, on ne sait jamais comment les personnes peuvent prendre les paroles alors… » Adrian soupire en se passant une main contre la nuque avant de sourire à son ami. « Ah non, l’homophobie c’est pas mon délire, les personnes peuvent bien aimer qui elles veulent, faire ce qu’iels veulent avec qui iels veulent, c’est leur choix et on ne devrait pas imposer sa vision étriqué au monde. » explique Adrian, les petits vieux qui s’amusent à hurler à qui veut bien l’entendre que Dieu n’a pas crée le monde comme ça, feraient mieux de se laver la bouche avec de la javel. C’est son opinion et jamais il ne changera d’avis. Une main qu’il balance derrière son épaule comme pour faire signe que ce n’est rien, il hausse les épaules a la suite « Ce n’est rien. Tu sais que tu peux compter sur moi c’est ce qui compte. » Et Adam qui court dans les jambes d’Adrian « On y va Tonton ???? » demande Adam alors qu’Adrian le prend dans ses bras avec un sourire « C’est parti bonhomme, tu prend ton sac ? Et ta peluche ? » Adam ne se laisse pas prier et s’éloigne en courant avant de revenir dans le salon, tandis qu’Adrian se tourne vers Elior « Profite de ta soirée, promis je le traumatise pas. » Et il sort de l’appartement avant de claquer la porte pour monter à son appartement, Adam qui lui raconte ses histoires et Adrian qui a le coeur léger de savoir qu’il va garder ce petit bout, histoire que son appartement ne soit pas silencieux, parce que le silence il déteste ça Adrian. Et au moins, il est sûr qu’il sera occupé.