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Night out (PV Carla)

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Mar 11 Aoû - 17:26
Une nouvelle journée de travail était terminée, à une heure que Claire n'aurait pas osé qualifier de décente, mais qui était encore loin des extrêmes auxquels, parfois, elle s'était contrainte. Mettant un point final au copieux rapport qu'elle devait parapher, la trentenaire s'étira sur sa chaise, rompue, avant de se lever, de ranger son bureau, tout du moins d'essayer, avant de récupérer sa veste, son casque et ses protections sur son porte-manteau et de sortir, non sans avoir évidemment fermé à clé l'endroit. Un signe discret de la tête tandis qu'elle voyait, dans certains autres bureaux, des visages connus qui n'avaient pas levé le pied en guise d'au revoir, la policière s'engouffra dans les couloirs de l'office central du NYPD et finit par terminer sa course dans le parking du bâtiment, où elle récupéra sa moto. Le superbe engin, de couleur noire et rouge, avait toujours été une de ses possessions les plus prisées, et si pour des raisons familiales, elle possédait comme l'immense majorité des américains une voiture, il fallait admettre qu'elle ne l'utilisait que peu, préférant les sensations offertes par cet appareil plus léger, ainsi que les facilités offertes dans les rues de New York, autant le reconnaître. Une fois son harnachement vérifié, l'ancienne championne mit les gaz et quitta donc son lieu de travail, se retrouvant bientôt dans la cohue de la chaussée, au milieu des taxis aux clients pressés et des habitants fatigués tentant tant bien que mal de regagner leur logis dans ce fatras de véhicules qui s'invectivait, se klaxonnait à qui mieux-mieux. Se glissant entre les voitures d'une main habile, la commissaire-adjointe ne mit guère de temps à se dépêtrer des artères les plus passantes de Manhattan, pour avancer vers Brooklyn, qui, à défaut d'être aussi passant, compensait aisément par son caractère populeux. Après cette épopée, donc, la commissaire arriva finalement près du poste du quartier et attendit donc son rendez-vous, après avoir garé son moyen de locomotion, retirant simplement son casque pour ne pas mourir définitivement de chaud, le corps calé contre un poteau.

Soudain, une voix connue la héla, et elle reconnut un des hommes de la Special Victim Division, un ancien collègue qu'elle appréciait. Lui serrant la main, elle le détrompa bien vite quand il lui demanda si elle était là "pour affaire", expliquant attendre simplement une amie. Le haussement de sourcils suggestif de l'homme la fit sourire, et elle lui colla une solide bourrade sur l'épaule. Pas ce genre d'amie, non. Dans une autre vie, cela aurait pu, elle n'allait pas le nier. Mais comme souvent, il y avait eu un mauvais timing : quand Carla avait débarqué dans sa vie et qu'elles avaient sympathisé, elle venait de se marier, et son esprit était entièrement focalisé sur celle qu'elle pensait être la dernière femme de sa vie. Erreur. Alors l'amitié s'était installée, agréable, dans ce monde un peu particulier qu'était celui des forces de l'ordre. On se serrait les coudes, entre femmes. Peut-être encore davantage entre femmes qui les aimaient, exclusivement ou non. Et pour Claire et ses amitiés essentiellement masculines, c'était un plaisir que de renouer avec une relation autre. Quoi de plus agréable qu'une virée sororale dans un bar pour enquiller les verres, parler boulot et râler sur le monde, éventuellement loucher sur les beautés des lieux ? C'était simple, et c'était doux, de conserver ce type de liens même quand on montait les échelons, et quand la vie personnelle avait tendance à être ébranlée. Bien sûr, en service, elle aurait traité Carla exactement comme les autres, donc avec une rigueur toute monocale. Mais justement, à l'extérieur, vraiment, il était bon de constater que certaines choses, au moins, ne changeaient pas. Son collègue commençait à discuter d'une affaire, qui nécessiterait probablement un suivi compte tenu de son caractère scandaleux, compte tenu des personnes impliquées, et la commissaire-adjointe arrêta le cours de ses pensées pour se concentrer sur la conversation, promettant de suivre le tout de près. En tant qu'ancienne de l'unité, elle avait conscience qu'elle aurait tendance à avoir la main sur ce genre de remontées, ne serait-ce qu'en raison de leur contenu. L'estomac solide était de rigueur. Sans parler du fait qu'elle connaissait bien la maison, les méthodes, les procédures, les intervenants principaux ...

Finalement la silhouette menue de Carla arriva dans son champ de vision, et Claire prit congé de son confrère, qui retraita dans le bâtiment, non sans avoir salué l'officier de son air jovial ordinaire. Mitch était un chic gars, honnêtement, carré et à la plaisanterie facile quand l'atmosphère devenait vraiment trop étouffante, de bon conseil aussi, qui ne jurait que par "le boulot bien fait" et se moquait du reste. Ils avaient fait quelques parties de base-ball, une ou deux fois, même, et sincèrement, la commissaire-adjointe l'appréciait. Heureusement qu'il y avait eu des gens comme lui, dans sa carrière, et aussi dans "la maison" en général. Enfin, place définitivement à la détente et exit le boulot. Avisant Carla qui était à portée, la trentenaire lui tendit gants, casque et veste - à sa taille, évidemment.

" Prête pour tout oublier ce soir ? J'ai passé une journée à me battre avec de la paperasse, alors j'ai besoin d'une solide dose de whisky, je te préviens."

S'écartant, Claire la laissa grimper à l'arrière de la moto avant de se positionner à l'avant et d'enclencher le moteur, qui ronronna joyeusement.

" Accroche-toi, c'est parti."

Et elles filèrent dans les rues de New York, jusqu'à un bar connu d'elles deux et qui, pour ce soir, accueillerait leur petite soirée.

@ Invité

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Jeu 13 Aoû - 21:16
La journée avait commencé comme toute autre journée, avec un large sourire affiché sur le visage de la policière. Assez hermétique au monde extérieur quand cela est nécessaire – comme par exemple les ondes négatives sont trop présentes chez une personne – Carla a tendance à se concentrer sur le positif de la vie. Alors, n’écoutant pas les racontars la concernant émis de la part d’envieux, c’est avec une certaine nonchalance qu’elle a répondu au téléphone. Il n’est pas rare que le débordement du standard, quand il y a beaucoup trop d’appels, finisse par tomber sur son appareil. Souvent en raison de mauvaises blagues de la part de ses équipiers pour tout dire… Un bizutage qui ne devrait plus avoir lieu après plusieurs années de travail acharné à prouver qu’elle est aussi digne qu’eux, mais que voulez-vous… Quand votre père a sa photo placardée sur le mur du couloir avec la légende « héros un jour, héros toujours », vous êtes vite cataloguée. Et quand votre grand-père figure également sur cette même photo alors c’est le début de la fin… Carla s’est déjà posée mainte fois la question : devrait-elle changer de district ? voir de ville ? Mais à quoi bon ? Elle est bien ici, elle a sa vie, ses amis. Et pour tout dire, les réflexions ne l’atteignent pas le plus souvent. Elle croit au karma, Carla, et elle sait qu’un jour, tout finira par s’arranger. En attendant, ce sont les épreuves de la vie qui l’endurcissent. Et la plupart du temps, elle le vit bien, oui, ou pas trop mal tout du moins.

Revenons-en à ce fameux coup de téléphone. N’importe quel type d’appel peut arriver vers le commissariat, parfois des anodins, parfois des plus sérieux. Celui-ci faisait définitivement partie de la seconde catégorie. Une voix haletante, une femme à bout de souffle, et visiblement apeurée. « Au secours. » Quelques mots qui suffisent à faire lâcher son style à Carla qui était en train de finir un rapport. Elle prend toujours les choses beaucoup trop à cœur, Carla, et pas assez de recul la plupart du temps. Elle est entière et ça, c’est au moins quelque chose qu’on ne peut pas lui reprocher. Elle fait un bond en se relevant de sa chaise. « Madame, Carla Cadwell à l’appareil. Que vous arrive-t-il ? » Elle en fait peut-être trop, peut-être pas assez, mais elle a besoin d’informations pour pouvoir aider cette femme. Elle fait signe à son équipier, qu’il demande à ce qu’on localise l’appel au plus vite. Il n’y a pas de temps à perdre.

Quelques explications peu précises plus tard, Carla n’a plus d’autre choix de se mettre en route. « Cadwell, tu restes là. On prend la relève. » Et là, elle voit rouge, Carla. A chaque fois, c’est pareil. Elle doit se battre, encore et encore pour se faire accepter, parce qu’elle est trop petite, trop menue, trop apprêtée, pas assez comme ces grands gaillards. Hors de question ! « Je viens ! Ce n’est pas négociable ! C’est moi qui ai pris l’appel, cette femme me fera confiance ! » Elle enfile déjà sa veste et suit à la trace les autres, refusant d’être mise à l’écart. Pire, elle se fait une place en tête de peloton et avant que quelqu’un d’autre n’ait le temps de le faire, elle utilise son petit gabarit pour se faufiler jusqu’au côté passager de la voiture où elle monte sans demander aucune permission.

La suite des aventures s’avère plus aisée qu’elle ne l’aurait cru. Le poursuivant est rapidement appréhendé, et la brune peut se concentrer sur la victime, une action dont on lui laisse volontiers la charge, pour le coup. Les secours arrivent pour prendre soin de la femme et bientôt, tout le monde est de retour au poste. Cela fera un rapport de plus à remplir, mais la satisfaction dégagée de cette arrestation vaut tous les rapports du monde ! Et d’ailleurs, avec tout ça, Carla n’a pas vu le temps passer et la fin de la journée arriver. Claire l’attend déjà en bas et elle ne se fait pas prier pour la rejoindre. Son amie lui tend bientôt des affaires que Carla attrape et enfile illico presto. Ça c’est la partie facile, car c’est quand elle doit enjamber la bécane que les choses se compliquent, ne manquant pas de déchainer des rires chez son amie la plupart du temps. Mais comment pourrait-elle lui en vouloir ? Elle-même en aurait fait autant si la situation avait été inversée. Avec le temps, elle a tout de même développé une technique presque infaillible et donc évidemment, la voici qui la met à profusion, sautant à pieds joints pour prendre son élan, avant de passer sa jambe de l’autre côté. Voilà, parée.

« Et moi de deux doses ! » Elle rétorque sur son ton habituel à Claire, celle-ci sachant exactement ce que cela augure pour la soirée. Oui, elles vont boire, mais avec leur descente acquise à force d’entrainement, aucune d’elle n’aura la gueule de bois le lendemain, ni de trous de mémoire d’ailleurs. Elle s’accroche ensuite, Carla, pendant le trajet. Elle sert fort son amie à la taille, sans aucune ambiguïté. Puis, elles arrivent enfin à destination. Quelques minutes plus tard, elles sont installées à leur spot habituel. Les habitués sont salués d’une tape à l’épaule. Elles ont la cote ici, et clairement, Carla adore ça. Ici, elle n’a pas besoin de se battre, elle est acceptée pour son joli minois, mais sans avoir besoin de changer son caractère. On la prend comme elle est, point. « Au fait, on a promis une revanche aux fléchettes aux cousins Fletcher ! » se souvient-elle tout à coup. La semaine précédente, les deux femmes les avaient battus à plate couture, non sans fierté. « Mais avant ça, on boit ! » Un signe au serveur et leurs boissons arrivent déjà devant leur nez. Elles trinquent rapidement et avalent les premières gorgées. « Tu sais quoi ? J’ai eu une mini victoire aujourd’hui. On a effectué une arrestation et c’est grâce à moi. » Certains trouveront le moyen de donner une autre version, car clairement, ce n’est pas Carla qui a passé les menottes en tant que tel. « Alors, ça se fête ! » Ce n’est nullement la première fois, et clairement, juste une excuse pour lever encore leur verre.

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Mar 6 Oct - 19:05
« Une revanche ? Une seconde raclée oui. »

Un sourire carnassier aux lèvres, la réplique de Claire fusa alors qu’elle s’installait en face de Carla. L’ancienne sportive de haut niveau n’avait pas perdu son sens de la compétition, chevillé au corps, même pour de simples jeux entre habitués d’un bar. Dans ce genre de situation, la femme calme et raisonnable, voire rigide aux yeux de certains, pouvait se révéler particulièrement passionnée, pour ne pas dire franchement intenable. C’était probablement pour cela qu’elle se fondait si bien dans ce type d’univers qui lui rappelait, avec un rien de nostalgie, les bars aux allures de saloons de westerns de sa jeunesse texane. Pour le coup, la carte postale n’était pas entièrement erronée, entre les colts à la ceinture de pratiquement tous les habitués, les jeans à l’ancienne, sans parler de l’inénarrable stand de rodéo mécanique et de l’alcool coulant à flots. En dépit de certains mauvais souvenirs, il était difficile de ne pas avoir une pensée un rien mélancolique pour ces quelques moments d’insouciance, quand elle était le grand espoir sportif de la ville mais pas encore une réelle championne, et qu’elle trouvait une camaraderie facile chez ces hommes rudes qui respectaient la force et la détermination. Elle avait beau être née à New York et y vivre depuis tant d’années, parfois, elle se sentait encore comme une fille de la campagne perdue dans les méandres de la vie citadine. Alors, oui, ce n’était pas l’atmosphère la plus fine au monde, cela sentait un peu le graillon et l’alcool bas de gamme, avec des plaisanteries tout aussi bas de plafond, pour ne pas dire autre chose, mais c’était un peu leur eldorado, leur coin caché, à Clara et elle, où les deux femmes s’étaient fait leur place et se délassaient joyeusement, à coups d’insultes qui fusaient, de jeux idiots et de solides cuites. Il y avait pire.

Justement, leur commande arriva, et Claire avala pratiquement cul-sec la moitié de son verre de whisky, le feu se répandant immédiatement dans sa gorge et dans le reste de son corps. Heureusement, elle était suffisamment habituée pour ne pas toussoter, appréciant à la place la sensation de brûlure qui la faisait soudainement se sentir plus vivante, plus alerte, plus légère aussi. Son regard pétillant se posa sur sa comparse, et un large sourire éclaira son visage alors qu’elle l’entendait leur donner une occasion de fêter un peu plus leurs retrouvailles.

« Raconte ! Je veux tout savoir. En plus comme ça, lorsque le rapport arrivera sur mon bureau, je n’aurai pas à le lire !

Et on va fêter ça. Oh, garçon ! La même ! »


Hélant le serveur, Claire attendit que leurs nouvelles consommations arrivent tout en écoutant les explications de Carla. Bien entendu, elle avait menti en affirmant qu’elle n’aurait pas à parcourir le résumé factuel des interventions : il était impensable qu’elle y songe, tout simplement parce qu’il y avait un monde entre le récit et le rapport administratif formaté et standardisé. Elles le savaient toutes les deux, ce qui rendait la plaisanterie plus amusante encore, comme si elles partageaient un secret particulier. Avec un rien de nostalgie, la trentenaire soupira :

« Je n’aurai jamais cru dire ça un jour, mais les enquêtes me manquent. J’ai toujours aimé la paperasse, mais là, je sature un peu.

Au lieu de ça, les seules enquêtes qui me passent par les mains sont les instructions disciplinaires. Et les plaintes qui vont avec. Nettement moins sympathique. »

En même temps, c’était précisément pour cela qu’elle avait obtenu le poste, alors elle n’allait pas rechigner. Cependant, de là à dire qu’elle ne regrettait pas ne seraient-ce que ses dernières années à la cellule anti-cybercriminalité aurait été mentir. Là, elle avait l’impression d’agir directement, et pas de manager une immense maison tentaculaire qui n’avait pas pour habitude d’être bousculée. Carla pouvait en témoigner …

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Lun 26 Oct - 17:10
Un rire franc éclate de la bouche de la belle brune. Evidemment, une seconde raclée. Bien que Carla ne soit pas une mauvaise perdante dans l’âme, il est inconcevable pour elle de partir avec idée de défaite en tête. Il faut qu’elle donne le meilleur d’elle-même, qu’elle se batte bec et ongles ; et là, seulement, si elle perd, elle ne s’en voudra pas. C’est ce que lui a appris sa mère dès son plus jeune âge, alors qu’elle la faisait participer à des concours de miss, semaine après semaine. L’enfant n’y trouvait pourtant pas spécialement son compte, mais le bonheur dans le regard de sa mère, la fierté aussi, lorsque Carla défilait, ou mieux, ramenait une écharpe à la maison… Ça valait tout l’or du monde pour la petite fille, qui avait besoin de cet amour maternel pour croire en elle.

« On peut au moins leur faire croire qu’ils ont une chance de gagner. La victoire n’en sera que plus satisfaisante. »

Elle rit de plus belle, de bonne humeur. Ce n’est pas seulement à cause de sa petite victoire de la journée, qu’elle est ainsi, mais ça a tout de même le don d’y contribuer. D’ailleurs, elle donne une première bouchée à Claire, qui s’empresse de vouloir tout savoir. Le contraire aurait été étonnant, les deux femmes n’ayant que très peu de secrets l’une pour l’autre, ou pour ainsi dire aucun. Un regard vers le serveur, plus par habitude qu’autre chose, et Carla se lance dans son récit.

« J’ai intercepté un appel car le standard était sous tension. Une dame qui était poursuivie par un type armé. Tu l’aurais entendue… Franchement, ça faisait froid dans le dos ! Mais j’ai gardé mon calme, bien sûr… J’ai demandé à Summers de tracer l’appel, qu’on puisse y aller. McCarty a voulu prendre les choses en main, mais je me suis faufilée dans sa voiture. Tu aurais vu sa tête d’ailleurs… Il était pas content de me voir là, à côté de lui. »

McCarty, c’est ce collègue qui fait toujours tout pour lui mettre des bâtons dans les roues. Et pour tout dire, Carla ne le supporte pas. Proche de la soixantaine, bedonnant, il a une opinion trop arriéré des femmes, et clairement, quand il rentre chez lui, il s’attend à ce que le diner soit prêt, la télévision allumée sur la bonne chaine, et à ce qu’il n’ait plus qu’à mettre les pieds sous la table… Ses propos sexistes sont monnaie courante dans le commissariat, et pour cela, il a déjà été repris par la hiérarchie, mais malheureusement, ça n’a rien changé. Alors, quand la brunette a l’occasion de lui faire un pied de nez, elle en tire une énorme satisfaction personnelle.

« Mais bon, c’est pas comme s’il avait pu me virer de sa voiture… Et il y avait plus urgent ; donc on a pris la route. Une fois sur place, on m’a laissée avec la femme pendant que les autres ont couru arrêter le type. Et voilà, on a réussi à l’avoir. La dame est un peu traumatisée, normal dans ce genre de situation, mais physiquement, ça allait quand elle est montée dans l’ambulance en tout cas. »

Carla pose ses mains à plat sur la table, écarte ses doigts et regarde Claire dans les yeux. La nouvelle tournée arrive et une nouvelle fois, l’alcool vient se glisser dans sa gorge, tel un breuvage magique qui entretient le bonheur. Elle savoure chaque instant de cette soirée, comme elle le fait toujours ; et écoute les confessions de son amie, quant à son poste.

« Tu sais bien que tu es géniale à ce poste ! » Et bien entendu, elle le pense. « Mais je comprends… ça ne doit pas être évident de ne plus avoir à courir partout, être infiltrée, sur le qui-vive à longueur de temps. » Carla, c’est l’inverse. Elle n’a que trop peu de responsabilité, sans qu’on ne sache lui expliquer pourquoi. Elle a souvent la charge de la balistique, des rapports, des recherches administratives. La plupart du temps, elle s’en contente sans se formaliser, se disant que son heure viendra, tôt ou tard. D’autres fois, elle râle beaucoup plus. « Et puis, avec les comportements de certains, tu n’es pas aidée ma pauvre ! Je n’en reviens pas que le monde de la police soit encore aussi arriéré. Heureusement, la nouvelle génération est bien plus ouverte, mais jamais je n’aurais imaginé cela aussi difficile, de se faire une place en tant que femme… Mon père m’avait prévenue, pourtant… Il était content que je choisisse de faire la même carrière de lui… Mais ça lui a fait peur illico presto… »

@ Invité

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Lun 18 Jan - 13:49
Définitivement, en écoutant Carla lui livrer le récit de son intervention, Claire ressentit une intense nostalgie en l’écoutant. Bien que le terrain n’ait été son domaine qu’en début de carrière, il y avait quelque chose de particulier, en général, à la conduite d’une enquête, d’une intervention, inimitable, cette impression d’être dans l’action, de faire ce qui convenait … et aussi, la peur de se tromper, celle d’être soi-même visé par une attaque. C’était une décoction particulière, un mélange d’assurance de se trouver là où l’on devait être, de crainte vis-à-vis de ses propres limites, de ses propres biais, qui ne devaient jamais conduire à une erreur, et en même temps, demeurait le sentiment diffus d’appréhension quant à une issue tragique. Ils en avaient tous connus, des camarades à terre, au cours de leur carrière. Parfois, ce n’était qu’une blessure qui se résorbait. D’autres fois, une blessure qui douchait net des espoirs. Et enfin, dans le pire des cas … la fin. Et il y avait aussi les blessures secrètes, psychologiques, qui restaient, chez les survivants comme les témoins. En dépit de l’entraînement aux situations d’urgence, jamais suffisant, de l’endurcissement nécessaire pour tenir, surtout dans certains postes exposés, il était impossible de se carapaçonner entièrement. Alors il fallait mettre à distance, quelquefois avec un humour très noir qui n’aurait sans doute pas été possible en dehors de ces murs. Mais rire du pire, c’était aussi un moyen de conjurer l’horreur, pour ne pas être dévoré par ce qu’il se passait sous leurs yeux. Parce qu’une carrière dans la police, c’était ne voir que le pire de l’humanité. Eventuellement, on avait la satisfaction d’empêcher ou de réparer un préjudice … mais pour cela, il fallait bien que quelque chose de répréhensible se déclenche. Même la prévention consistait à rappeler des dangers. Difficile de ne pas finir par voir la vie en noir, ou de ne plus exister en dehors du travail. Ce risque, elle l’avait connu. Alors pourquoi, en dépit de tout cela, demeurait une pointe de mélancolie en écoutant les retours de terrain ? Sans doute qu’on ne se défaisait jamais complètement de son besoin d’adrénaline. En tout cas, voir son amie si joyeuse lui réchauffait le cœur. Elle avait mérité son heure de gloire. Ce qu’elle pointa :

« Un flagrant délit … Excellent. L’enquête de voisinage ira vite, et le dossier sera bouclé à temps pour inscription au bureau du procureur. Je ne doute pas que nos magistrats s’en saisissent. Je veux dire, je verrai au rapport final, mais à première vue, ça me semble du tout cuit. La négociation avec les avocats de la défense va être à leur avantage pour le plaider coupable, et en plus, en vue d’une potentielle réélection, se saisir des dossiers de violences faites aux femmes est forcément bien vu. »

La dernière partie de sa phrase avait été dite avec neutralité. L’inconvénient d’avoir des magistrats de l’accusation élus, c’était qu’ils l’étaient sur un programme, comme n’importe quelle élection. Et que ce dernier avait fatalement une incidence sur les affaires priorisées, comme l’actualité, qui les obligeait à prendre des mesures pour défendre leurs chances de réélection ou le bilan de leur mandat. L’un dans l’autre, cela signifiait qu’une partie de leur discret travail était de savoir présenter les bonnes affaires, en identifiant rapidement celles qui avaient une chance d’avoir une issue correcte face aux autres. Ce n’était pas idéal de son point de vue, mais c’était ainsi que les choses étaient. Et par conséquent, elle devait faire avec. Donc oui, quand elle pouvait s’en servir pour avancer ses propres dossiers, il n’y avait pas d’hésitation à avoir. Les principes ne menaient pas à la justice rendue. Alors bien sûr, elle était persuadée aussi que le bureau s’en saisirait pour d’autres raisons, et sans doute même par intérêt sincère, mais les arrière-pensées étaient toujours présentes. C’était un fait, pas forcément négatif en soi, mais tout simplement une donnée qui faisait que, a priori, cette affaire serait menée convenablement à son terme, et avec, sans doute, à la clé, un jugement qui leur serait favorable. Ce qui était toujours bon à prendre, honnêtement. Le reste n’était que détail. Dont elle devrait néanmoins s’occuper. Et cela ne la dérangeait pas. Souriant à l’assertion de Carla quant à ses talents pour sa position, la commissaire répondit après avoir pris une gorgée de son propre verre :

« Même si à la cybercriminalité, je passais déjà plus de temps derrière un ordinateur qu’ailleurs, forcément … C’est plus d’être directement dans l’action, qui manque. Avancer les dossiers, autrement que par des réunions avec le bureau du procureur. Et pourtant, ça me convient, parce que sans ce travail, les affaires perdent en chance d’aboutir. Il faut un petit temps d’ajustement. »

Quant au reste … Claire haussa les épaules :

« La police n’est que le reflet amplifié des maux de la société. Ils sont plus visibles, car il y a moins de barrières, vu qu’on vit en permanence dans un monde où tout nous pourrait noir, et où les us sociaux normaux sont balayés. Et parce que le pouvoir que nous avons fait que les conséquences sont plus immédiates, plus dommageables, et qu’il attire davantage sans doute de profils borderline qu’ailleurs, oui.

C’est pour ça qu’il faut continuer à réformer nos procédures de recrutement, même si le manque de vocation risque de nous en empêcher. Et continuer à réfléchir à des formations continues avec les équipes, pour qu’elles soient acceptées, et non qu’elles tombent du haut, je crois que c’est contre-productif en termes d’engagement, et donc in fine de réussite. »


Parler process et formation en pleine sortie amicale avec passion ? Oui, c’était tout Claire et son inimitable amour pour le jargon administratif et tout ce qui s’y rapportait. Mais c’était, de son point de vue, aussi en réfléchissant sans cesse aux meilleurs moyens d’avancer que les choses se réformeraient. Une fois le constat posé, restait les actes. Et beaucoup, beaucoup d’optimisme pour éviter de se décourager. Même si cela empiétait parfois légèrement sur sa sociabilité, comme présentement. Avec une moue d’excuse adressée à Carla, la presque quadragénaire fit en riant :

« Désolée, voilà que je vais te faire un exposé de nos futurs process de management en plein bar …

A force de m’enterrer dans le travail, je crois que cela commence à devenir inquiétant pour mes capacités sociales.

Ce n’est pas comme ça que je vais réussir à retrouver quelqu’un. »


Cette fois, le rire fut plus franc. En plein divorce, ce n’était pas sa priorité, et vu le bagage qui allait avec, elle plaignait sincèrement la téméraire prétendante qui aurait l’idée saugrenue d’être intéressée par sa personne. Et puis, un peu de temps pour réapprendre à être seule, ce n’était pas plus mal.

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